Zizim

Zizim (turc Cem, prononcé Djem), né le à Andrinople et mort le à Capoue, est le fils du sultan ottoman Mehmed II et un prétendant au trône de l'empire ottoman contre son frère Bayézed II.

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Zizim

Portrait de Zizim (Cem) à cheval peint par Pinturicchio.
Titre
Sultan d'Anatolie

23 jours
Second prince héritier
Gouverneur de Karaman
Gouverneur de Kastamonu
Biographie
Nom de naissance Cem Osman
Date de naissance
Lieu de naissance Andrinople, Turquie
Date de décès (à 35 ans)
Lieu de décès Capoue, Italie
Sépulture Tombeau de Moustafa, Mosquée du Sultan Murad II, Bursa, Turquie
Nationalité ottomane
Père Mehmed II
Mère Çiçek Hatun
Fratrie Bayézid II
Conjoint Elena-Marie dei Conti Orsini di Pitigliano[réf. nécessaire]
Enfants 4
Religion Islam

Dynastie ottomane

Biographie

Arrivée de Zizim à Rhodes
Zizim reçu à la table du grand maître Pierre d'Aubusson à Rhodes.
Le château de Rochechinard.
Tombe de Zizim à Bursa (à gauche sur l'image).

Zizim était le plus jeune frère du sultan Bayézid II (Bajazet). À la mort de Mehmed II, leur père, Bayézid était gouverneur des provinces de Sivas, Tokat et Amasya, alors que Zizim régnait sur les provinces de Karaman et Konya.

Le grand vizir Karamani Mehmed Pacha envoya deux messagers aux deux frères juste après la mort du sultan Mehmed II. Mais le messager envoyé à Zizim fut capturé en route par le député d'Anatolie Sinan Pasha, et Zizim n'apprit la mort de son père que quatre jours après son frère aîné. Pour des raisons incertaines, les janissaires de Constantinople se révoltèrent le et tuèrent Karamani Mehmed Pacha. En l'absence de Bayezid, son fils, le prince Korkut, prit le trône comme régent.

Le prince Bayezid arriva à Constantinople le et y fut déclaré sultan. Seulement six jours plus tard, Zizim prit le contrôle de la ville d'İnegöl avec une armée de 4 000 hommes. Bayezid envoya son armée sous le commandement du vizir Ayas Pasha pour tuer son frère. Le , Zizim avait vaincu l'armée de son frère et se déclara lui-même sultan d'Anatolie et fit de Brousse sa capitale. Il proposa alors à son frère de se partager l'empire avec lui, laissant seulement l'Europe à Bayezid. Bayezid, furieux, rejeta la proposition, déclara : « entre deux souverains, il ne saurait y avoir d'affinité » et se mit en route vers Brousse. La bataille décisive entre les deux frères eut lieu près de la ville de Yenişehir. Zizim fut vaincu et s'enfuit vers Le Caire[1].

Au Caire, bien accueilli par les mamelouks, Zizim saisit l'occasion de faire le pèlerinage de la Mecque (en cela il fut le seul prince ottoman à l'effectuer). Zizim reçut une lettre de son frère lui offrant million d'akçes (la monnaie ottomane) pour sa renonciation au trône. Zizim rejeta l'offre et lança une campagne en Anatolie l'année suivante. Le , il assiégea Konya mais fut rapidement forcé à se retirer vers Angora. Il envisagea alors de tout abandonner et de rentrer au Caire, mais toutes les routes vers l'Égypte étaient sous le contrôle de Bayezid. Il dut se réfugier à Rhodes, sous la protection des Hospitaliers qui virent en lui un précieux otage. Après cela, Zizim fut envoyé en France où il résida jusqu'en 1488[2]. Le sultan Bayezid envoya un émissaire en France, afin que Zizim y fût gardé en captivité, et accepta de payer 40 000 akçes annuels en or pour couvrir les besoins de son frère et de sa suite[1].


En France, Zizim, toujours sous la garde des Hospitaliers, séjourna notamment environ un an au château de Rochechinard, dans le Dauphiné, à partir de 1483[3], puis au Château de Bois-Lamy en 1484 et 1485, et enfin au château de Bourganeuf de 1486 à 1488, dans la tour Zizim construite à son intention. Il est alors accompagné d'une nombreuse cour de dignitaires fidèles dont certains feront souches dans la région. Dans son Histoire de la Turquie[4], Alphonse de Lamartine raconte : « Sveadeddin, d’après un des compagnons de captivité du sultan, décrit ainsi cette tour : “Au-dessus des souterrains creusés dans le roc, étaient les cuisines ; au premier, les logements des gardes ; au deuxième, les serviteurs ottomans du sultan ; au troisième et au quatrième, les appartements de Djem ; aux deux derniers étages, les chevaliers chargés de veiller sur lui et de le distraire dans sa solitude.” »

Il séjourna ensuite à Rome aux mêmes conditions. Le pape Innocent VIII entreprit de lancer une nouvelle croisade en utilisant Zizim, mais cette idée fut réprouvée par les monarques européens. Il proposa également à Zizim de se convertir au christianisme, mais celui-ci refusa. Zizim fut néanmoins utile car lorsque Bayezid entreprit de lancer une campagne contre les nations chrétiennes des Balkans, le pape menaça de libérer le prétendant au trône.

Zizim mourut à Capoue [1] le . Le sultan Bayezid déclara un deuil national de trois jours. Il requit également de disposer du corps de Zizim pour des funérailles musulmanes, mais le corps de ce dernier ne fut rapatrié sur ses terres ottomanes que quatre ans après sa mort. Zizim fut enterré à Bursa[5].

Présence littéraire

  • Mireille Calmel, Le Chant des Sorcières : Djem est au cœur d'une histoire racontant la conspiration de la fée Mélusine et de ses sœurs pour conquérir le royaume des Hautes Terres.
  • De Hammer, Sur le séjour en Provence de Bayazid II dit Djem ou Zizim, Journal asiatique, mars 1825, en ligne sur Gallica.
  • Le récit de la captivité de Zizim — ainsi que des intrigues politiques qui contribuèrent à le garder en captivité — est à la base du roman historique Francesca: Les Jeux du Sort (1872), écrit par le penseur et exilé haïtien, Jean Demesvar Delorme[6].
  • La vie du prince Zizim est racontée par l'écrivain yougoslave Ivo Andrić dans son récit Prokleta avlija (1954), publié en français sous le titre La Cour maudite (traduit par Georges Luciani, Paris, Stock, 1962 ; réédition, Paris, Presses du Compagnonnage, « Collection des prix Nobel de littérature », 1965 ; nouvelle traduction de Yasna Šamić et Bochko Givadinovitch, Lausanne, L'Âge d'Homme, collection « Classiques slaves », 1990).
  • Dans le roman historique Le Prince errant [7] Véra Moutaftchiéva (en) Véra Moutaftchiéva raconte le jeu subtil des Hospitaliers faisant payer le sultan pour garder Djem prisonnier et probablement empoisonnant ce dernier quand il ne leur fut plus utile.
  • Dans son roman historique Chevaliers de Malte, Roger Peyrefitte consacre un chapitre aux tractations financières entre l'Ordre des hospitaliers, le roi de Hongrie, le pape et Louis XI à propos de la mainmise sur Zizim comme otage et comme moyen de pression sur les Turcs. En définitive, le roi de France parvient à duper tous les autres en leur soutirant des sommes considérables.
  • Le roman historique Djem, un prince dans la tourmente, de Maurice Caron relate l'histoire de la vie du prince[8].
  • L'article Le sultan Djem et sa prétendue descendance maltaise, de Nicolas Velin démontre les faux liens entre Djem et Malte[9]
  • L'appelant Zim-Zizimi, Victor Hugo, dans un célèbre poème de La Légende des siècles, le met en scène dans sa solitude.

Présence cinématographique et séries

  • Dans la série Borgia de Canal+, le personnage du prince Djem, interprété par Nicolás Belmonte, est accueilli par le pape Innocent VIII et soutenu par le cardinal, qui deviendra le pape Alexandre (Borgia). Il meurt de la fièvre alors qu'il voyage avec César Borgia pendant la campagne de Charles contre Naples.
  • Dans la série The Borgias de Showtime, Djem, interprété par l'acteur britannique Elyes Gabel, et est dépeint à Rome sous la papauté du successeur d'Innocent VIII, le pape Alexandre VI. Il est aussi décrit comme ayant cherché à se convertir au christianisme et comme ayant été assassiné par le fils d'Alexandre VI, Juan Borgia.

Notes et références

  1. Jean-Michel Sallmann, Géopolitique du XVIe siècle (1490-1618), (Nouvelle histoire des relations internationales, tome 1), Paris, Le Seuil, "Points histoire", 2003, p.70
  2. Duicker, « Zizim, un prince turc otage en Auvergne », Le Gonfanon, n°65, Argha
  3. Guy Allard. Zizimi, prince ottoman, amoureux de Philippine-Hélène de Sassenage. Histoire dauphinoise. À Grenoble, chez Nicolas, M.DC.LXXIII.--in 16. de X et 389 p. Il s'agit d'une vie romancée de Zizim. Voir sur cet ouvrage l'article de Bertrand Galimard-Flavigny, « Zizim et Philippine », Petites affiches, no 6, 8 janvier 2009, p. 16. Voir aussi d'Ulysse Chevalier Un tournoi à Romans en 1484, 1888
  4. Alphonse de Lamartine, Histoire de la Turquie, volume 4, Librairie du Constitutionnel (Paris), 1854, p. 89-90.
  5. (en) John Freely, Jem Sultan, The adventures of a Captive Turkish Prince in Renaissance Europe, Hammersmith, London, Harper Collins Publishers, , 342 p. (ISBN 0-00-715066-0), p. 145
  6. Delorme, Demesvar. Francesca: Les Jeux du Sort. Paris : E. Dentu, Libraire-Editeur, 1872.
  7. Le Prince errant, Véra Moutaftchiéva, 1966, traduction Claude Guilhot, Paris : Stock, 1988.
  8. Djem, un prince dans la tourmente, Maurice Caron, éditions du Zeugma, 2010.
  9. Le sultan Djem et sa prétendue descendance maltaise, Nicolas Velin.

Liens externes

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