Tour de France 1906
Le Tour de France 1906, 4e édition du Tour de France, s'est déroulé du 4 au sur 13 étapes pour 4 545 km. Il s'agit du second Tour de France à utiliser un système de points (et non au temps) pour calculer le classement général. Les nouveautés de cette année sont des passages à l’étranger (Allemagne, Italie et Espagne) et la flamme rouge. Comme les Tours précédents, la tricherie et les sabotages sont au programme de la course. Quatre coureurs sont d'ailleurs disqualifiés pour avoir pris le train comme raccourci et des spectateurs ont une nouvelle fois jetés des clous sur la route. Toutefois, cela n'a pas empêché René Pottier de prendre une belle avance dans les premières étapes. Libéré de sa tendinite du Tour 1905 qui l'avait obligé à abandonner, il a dominé toute la course.
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Généralités | |||
Course | 4e Tour de France | ||
Étapes | 13 | ||
Dates | 4 – 29 juillet | ||
Distance | 4 545 km | ||
Pays | ![]() ![]() ![]() ![]() | ||
Lieu de départ | Paris | ||
Lieu d'arrivée | Paris | ||
Partants | 78 | ||
Arrivants | 14 | ||
Vitesse moyenne | 24,463 km/h | ||
Résultats | |||
Vainqueur | ![]() | ||
Deuxième | ![]() | ||
Troisième | ![]() | ||
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◀ 1905 | 1907 ▶ | ||
![]() | Documentation ![]() |
Changement par rapport au Tour 1905
L'organisateur du Tour, Henri Desgrange, satisfait des effets bénéfiques de l'augmentation du nombre d'étape lors du Tour de France 1905, décide d'ajouter deux étapes en plus par rapport au tour précédent. L'introduction d'étapes de montagne ayant également été couronnée de succès, il ajoute au programme des coureurs les Vosges et aussi le Massif central avec les monts d’Or (le Massif central absent en 1905 avait déjà été traversé en 1903 et 1904 avec notamment les cols du Pin-Bouchain et de la République). Contrairement aux années précédentes, les cyclistes qui abandonnent lors d'une étape ne sont pas autorisés à prendre le départ de l'étape suivante.

Le système de points utilisé lors du Tour de France 1905 avait été satisfaisant pour réduire la tricherie, il est de nouveau utilisé par les organisateurs du Tour dans ce Tour 1906. Il est cependant légèrement modifié : alors qu'en 1905, les différences de temps avaient encore de l'effet sur la répartition des points, en 1906 le temps n'avait plus incidence sur le calcul du classement. Les points sont dorénavant distribués seulement en fonction de l'ordre d'arrivée de chaque étape. Le vainqueur de l'étape reçoit un point, le deuxième deux points, etc. Après la huitième étape, seulement 16 cyclistes sont encore en course. Le classement est "nettoyé", les résultats des huit premières étapes sont recalculées, avec seulement les coureurs en lice et les points sont redistribués entre les coureurs restants, conformément à leurs positions obtenues lors de ces étapes.
La première étape s'achève à Lille et la deuxième étape commence à Douai, c'est la première fois qu'une étape ne démarre pas dans la ville où l'étape précédente se termine. De même, pour la première fois, le peloton se rend dans un pays différent, durant 70 kilomètres lors de la deuxième étape l'Allemagne (l’Alsace-Moselle fait alors partie de l'Allemagne) est traversée ; plus tard, la course passe à Vintimille en Italie lors de l’étape Grenoble-Nice et à Irun en Espagne lors de Toulouse-Bayonne[1]. Le Tour 1906 a également vu l'introduction de la flamme rouge, un drapeau rouge qui indique que les cyclistes n'ont qu'un seul kilomètre à parcourir pour rallier la ligne d'arrivée.
Le départ du Tour a lieu au Vélodrome Buffalo et l'arrivée finale au Parc des Princes.
Déroulement de la course
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Dès la première étape, on retrouve des manifestants contre le Tour de France. Des clous sont jetés sur la route et tous les cyclistes, sauf Lucien Petit-Breton, crèvent. Le quotidien sportif L'Auto, organisateur de l'épreuve, titre en première page « Hooligan ». La première étape est remportée par Émile Georget au sprint. Dans la deuxième étape, René Pottier s'arrête après 175 kilomètres en raison d'un problème mécanique, et il perd 58 minutes pour le réparer. Les autres principaux prétendants à la victoire finale travaillent ensemble pour distancer définitivement Pottier. Mais celui-ci entame une poursuite de 200 kilomètres, il les rattrape à 25 kilomètres de l'arrivée, et remporte finalement l'étape avec une marge de 1 minute et 30 secondes sur Lucien Petit-Breton et plus de 9 minutes sur les autres. Dans la troisième étape, quatre cyclistes (Julien Gabory, Henri Gauban, Gaston Tuvache et Maurice Carrere) sont disqualifiés pour avoir pris le train. Le col du ballon d'Alsace, qui avait été franchi l'année précédente, est de nouveau au programme. Tout comme l'année précédente, c'est Pottier qui le grimpe en tête. Il remporte également l'étape avec plus de trois quarts d'heure d'avance sur le reste des coureurs. Pottier s'impose également lors de la quatrième étape après s’être échappé dans la côte des Chères dans les monts d’Or. Dans la cinquième étape, il se retrouve seul en tête avec une heure d'avance à la mi-course. Il décide de s'arrêter, entre dans un bar, commande une bouteille de vin, et la boit presque entièrement. Lorsqu'il voit passer ses poursuivants une heure après, Pottier remonte sur son vélo, les rejoint et remporte l'étape.
À ce stade de la course, Pottier est largement en tête du classement général. Le vainqueur du Tour de France 1905, Louis Trousselier, qui a eu une mauvaise première moitié de Tour, est loin derrière avec de nombreux points de retard. Cependant, il retrouve la forme dans la deuxième moitié de la course et remporte les 7e, 9e, 10e et 11e étapes, et se replace pour la bataille de la deuxième place. Georges Passerieu propriétaire de la deuxième place, défend sa position en remportant la 12e étape. Dans la dernière étape, Pottier conclut son succès au classement final en gagnant l'étape, après avoir battu au sprint son dauphin Georges Passerieu.
Après la 13e étape, la course est suivie de deux tours chronométrés sur le Vélodrome de Paris, dont le résultat n'est pas été pris en compte pour le classement général. Le vainqueur est Émile Georget, qui termine les 1 332 mètres en 2 minutes et 7 secondes[2],[3].
Les frères Wattelier (Édouard et Antony) et les frères Georget (Émile et Léon) sont les premiers frères à terminer le Tour.
Résultats
Les étapes

Note : en 1906, il n'y a aucune distinction entre les étapes de plaine ou de montagne ; les icônes indiquent simplement la présence ou non d'ascensions durant l'étape[6].
Classement général
Initialement, 100 coureurs sont inscrits à la course, 78 signent la feuille de départ de la première étape, finalement seuls 76 d'entre eux prennent le départ. Seulement 49 cyclistes terminent la première étape, 37 la deuxième étape, 29 la suivante et 16 la huitième. À ce stade, les points donnés dans les huit premières étapes sont redistribués entre les coureurs restants en fonction de leurs positions dans ces étapes. À la fin du Tour de France, le nombre d'arrivants est de seulement 14.
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Classement général final[7] | ||||
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Coureur | Pays | Équipe | Point(s) | |
1er | René Pottier | ![]() |
Peugeot | 31 points |
2e | Georges Passerieu | ![]() |
Peugeot | 39 pts |
3e | Louis Trousselier | ![]() |
Peugeot | 61 pts |
4e | Lucien Petit-Breton | ![]() |
Peugeot | 65 pts |
5e | Émile Georget | ![]() |
Alcyon–Dunlop | 80 pts |
6e | Aloïs Catteau | ![]() |
Alcyon–Dunlop | 129 pts |
7e | Édouard Wattelier | ![]() |
Labor | 137 pts |
8e | Léon Georget | ![]() |
Alcyon–Dunlop | 152 pts |
9e | Eugène Christophe | ![]() |
Labor | 156 pts |
10e | Antony Wattelier (de) | ![]() |
Alcyon–Dunlop | 168 pts |
Classement général final (places 11 à 14) | |||
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Rang | Coureur | Sponsor | Points |
11 | ![]() | Rochet | 201 |
12 | ![]() | Chapmeyrache-MIC Cycles | 222 |
13 | ![]() | — | 241 |
14 | ![]() | Biguet | 256 |
Autres classements
Lucien Petit-Breton remporte le classement des « machines poinçonnées »[8].
L'Auto nomme René Pottier meilleur grimpeur. Ce titre qui n'est pas officiel est le précurseur du Grand Prix de la montagne[9].
Retombées
Les organisateurs du Tour n'ont pas apporté beaucoup de changements aux règles et au parcours pour l'édition suivante. Le système de points sera conservé sous cette forme jusqu'en 1911, pour être changé un peu en 1912 avant d'être remplacé par le système au temps en 1913. La flamme rouge qui a été introduite en 1906 pour indiquer le dernier kilomètre d'une étape est également conservée et est toujours utilisée.
René Pottier ne défendra pas son titre en 1907, car il s'est suicidé après avoir découvert que sa femme avait eu une liaison alors qu'il était sur le Tour[10]. Petit-Breton et Georget seront au départ au Tour 1907 et se battront pour la victoire, qui sera remportée par Petit-Breton.
Pour honorer les performances de Pottier sur le ballon d'Alsace, un monument est placé en son hommage au sommet de cette montagne[11].
Liste des participants
Sur les 100 cyclistes inscrits au départ, 78 d'entre eux prennent le départ. L'un des absents est Henri Cornet, vainqueur du Tour de France 1904. Quatre cyclistes sont Belges, un est Luxembourgeois (le futur vainqueur François Faber), deux sont Allemands et les autres coureurs sont Français[6]. Louis Trousselier, vainqueur du Tour de France en 1905, est présent. Les coureurs ne sont pas regroupés en équipes, mais certains coureurs ont le même sponsor, même s'ils n'ont pas le droit de s'aider. Avant le début de la course, les plus attendus sont Cadolle, Aucouturier, Georget, Pottier, Trousselier, Dortignac et Petit-Breton[12].
Comme en 1905, les cyclistes sont divisés en deux catégories, les coureurs de vitesse et les coureurs sur machines poinçonnées. Les coureurs de la première catégorie sont ainsi autorisés à changer de vélo, ce qui est un avantage en montagne, où ils peuvent utiliser un vélo avec engrenages inférieurs. En 1905, les sponsors n'étaient pas très enthousiastes à l'idée de faire entrer leurs cyclistes dans la deuxième catégorie, mais en 1906, ils se sont rendu compte de l'intérêt commercial à faire entrer les cyclistes dans la catégorie des machines poinçonnées, car le citoyen français moyen pouvait davantage s'identifier. En 1906, plus de la moitié des cyclistes débutent dans la catégorie poinçonnées, dont Lucien Petit-Breton, l'un des favoris[13].
No | Numéro de dossard |
---|---|
Class. | Classement général final |
n.c. | Indique un coureur non classé au classement général final |
No | Coureur | Nationalité | Class. |
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1 | Édouard Wattelier | ![]() |
7 |
2 | Georges Sérès | ![]() |
n.c. |
4 | François Beaugendre | ![]() |
n.c. |
5 | Augustin Ringeval | ![]() |
n.c. |
6 | Eugène Christophe | ![]() |
9 |
7 | Arsène Tuale | ![]() |
n.c. |
8 | François Poiry | ![]() |
n.c. |
9 | Gaston Codam | ![]() |
n.c. |
10 | Prosper Rau | ![]() |
n.c. |
11 | Paul Trippier | ![]() |
n.c. |
13 | Émile Bertrand | ![]() |
n.c. |
14 | Pierre Desvages | ![]() |
n.c. |
15 | Henri Timmermann | ![]() |
n.c. |
17 | Marcel Cadolle | ![]() |
n.c. |
18 | Hippolyte Aucouturier | ![]() |
n.c. |
19 | Fernand Gaborias | ![]() |
n.c. |
21 | Aloïs Catteau | ![]() |
6 |
22 | Victor Lascoutounax | ![]() |
n.c. |
24 | Julien Gabory | ![]() |
n.c. |
25 | Henri Gauban | ![]() |
n.c. |
26 | Émile Georget | ![]() |
5 |
28 | Ferdinand Payan | ![]() |
12 |
30 | Martin Soulie | ![]() |
n.c. |
32 | Georges Devilly | ![]() |
n.c. |
35 | Firmin Pauloin | ![]() |
n.c. |
37 | Charles Crupelandt | ![]() |
n.c. |
38 | Ernest Ricaux | ![]() |
n.c. |
39 | Antoine Wattelier | ![]() |
10 |
40 | Fernand Lallement | ![]() |
n.c. |
41 | Frédéric Saillot | ![]() |
n.c. |
42 | Léon Winant | ![]() |
13 |
43 | Jules Chabas | ![]() |
n.c. |
45 | Arthur Pottiez | ![]() |
n.c. |
46 | Georges Fleury | ![]() |
11 |
47 | Pierre Schneider | ![]() |
n.c. |
48 | René Pottier | ![]() |
1 |
49 | Louis Trousselier | ![]() |
3 |
50 | Georges Passerieu | ![]() |
2 |
51 | Maurice Decaup | ![]() |
n.c. |
52 | Albert Baudet | ![]() |
n.c. |
53 | Eugène Duffis | ![]() |
n.c. |
55 | Émile Haemmerlin | ![]() |
n.c. |
56 | Jean-Baptiste Dortignacq | ![]() |
n.c. |
57 | Émile Lambœuf | ![]() |
n.c. |
58 | D. Gonjeaud | ![]() |
n.c. |
59 | Charles Perraud | ![]() |
n.c. |
60 | Georges Bronchard | ![]() |
14 |
61 | David Dupont | ![]() |
n.c. |
62 | Léon Georget | ![]() |
8 |
63 | Gaston Tuvache | ![]() |
n.c. |
64 | Henri Star | ![]() |
n.c. |
66 | Christophe Laurent | ![]() |
n.c. |
68 | Henri Marchand | ![]() |
n.c. |
69 | Giovanni Gerbi | ![]() |
n.c. |
70 | François Faber | ![]() |
n.c. |
71 | Julien Lootens | ![]() |
n.c. |
72 | Lucien Petit-Breton | ![]() |
4 |
73 | Pierre Privat | ![]() |
n.c. |
74 | Henri Menez | ![]() |
n.c. |
76 | D. Communal | ![]() |
n.c. |
77 | Édouard Chaumard | ![]() |
n.c. |
79 | Robert Dubois | ![]() |
n.c. |
80 | Robert Wancour | ![]() |
n.c. |
81 | Albert Chartier | ![]() |
n.c. |
82 | Gaston Heneau | ![]() |
n.c. |
83 | E. Vernimmen | ![]() |
n.c. |
84 | Alfred Belleville | ![]() |
n.c. |
85 | Charles Habert | ![]() |
n.c. |
86 | Albert Godefroy | ![]() |
n.c. |
87 | Maurice Carrère | ![]() |
n.c. |
88 | Alfred Pocarius | ![]() |
n.c. |
89 | Maxime Morel | ![]() |
n.c. |
90 | Louis Tanchou | ![]() |
n.c. |
91 | Heini Scholl | ![]() |
n.c. |
93 | François Lafourcade | ![]() |
n.c. |
94 | Jean Perreard | ![]() |
n.c. |
95 | Jean Giran | ![]() |
n.c. |
96 | Ludwig Barthelmann | ![]() |
n.c. |
Notes et références
- Le Tour de France pour les Nuls par Jean-Paul Vespini, First-Gründ, 2013, Paris.
- Tom James, « 1906: The first climbing star is born », VeloArchive, (consulté le )
- « 4ème Tour de France 1906 – 14ème étape » [archive du ], Mémoire du cyclisme (consulté le )
- Augendre 2016, p. 8.
- « The history of the Tour de France – Year 1906 – The stage winners », sur Tour de France, Amaury Sport Organisation (consulté le )
- « 4ème Tour de France 1906 » [archive du ], Memoire du cyclisme (consulté le )
- « The history of the Tour de France – Year 1906 – Stage 13.02 Caen > Paris », sur Tour de France, Amaury Sport Organisation (consulté le )
- « l'Historique du Tour – Année 1906 », Amaury Sport Organisation (consulté le )
- Jan Cleijne, Legends of the Tour, Head of Zeus, , 160 p. (ISBN 978-1-78185-999-5, lire en ligne)
- Bill McGann et McGann, Carol, The Story of the Tour de France, Dog Ear Publishing, , 16–19 p. (ISBN 1-59858-180-5, lire en ligne)
- Barry Boyce, « The Thrill of Victory, the Agony of Life », Cyclingrevealed, (consulté le )
- (es) « El "Tour de France" 1906 », El Mundo Deportivo, (lire en ligne, consulté le )
- (nl) « Gelode fietsen » [archive du ], Heersers van de Weg (consulté le )
- « 4ème Tour de France 1906 » [archive du ], Memoire du cyclisme
Voir aussi
Bibliographie
- Jacques Augendre, Guide historique, Paris, Amaury Sport Organisation, (lire en ligne[archive du ])
- Thierry Cazeneuve, 1903-1939 L'invention du Tour, L'Équipe, coll. « La Grande histoire du Tour de France » (no 1), , 62 p. (ISBN 978-2-8152-0293-0)
- Christian-Louis Eclimont, Le Tour de France en 100 Histoires Extraordinaires, Paris, First, , 380 p. (ISBN 978-2-7540-5044-9)
- Pierre Lagrue, Le Tour de France : reflet de l'histoire et de la société, Paris, l'Harmattan, , 299 p. (ISBN 2-7475-6675-7)
Liens externes
- Tour de France 1906 sur letour.fr
- (en) Tour de France 1906 sur bikeraceinfo.com
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