Sun Yat-sen

Sun Yat-sen (chinois simplifié : 孙逸仙 ; chinois traditionnel : 孫逸仙 ; pinyin : sūn yìxiān ; cantonais Jyutping : syun¹ jat⁶sin¹ ; zhuyin : ㄙㄨㄣ 〡ˋ ㄒ〡ㄢ, Sun Yat-sen étant la prononciation en cantonais qui s'est exportée en Occident ; le nom se prononce Sūn Yìxiān en mandarin), plus connu en Chine sous son surnom Sun Zhongshan (en mandarin, chinois : 孙中山 / 孫中山, sūn zhōngshān, cantonais Jyutping : syun¹ zung¹saan¹, zhuyin : ㄙㄨㄣ ㄓㄨㄥ ㄕㄢ), également appelé Sun Wen (孫文), () est un révolutionnaire et homme d'État chinois.

Dans ce nom chinois, le nom de famille, Sun, précède le nom personnel.

Pour les articles homonymes, voir Sun.

Sun Yat-sen
孫文 / 孫逸仙
Fonctions
Président provisoire de la république de Chine

(2 mois et 10 jours)
Vice-président Li Yuanhong
Prédécesseur Puyi (empereur)
Successeur Yuan Shikai
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Zhongshan, Empire de Chine
Date de décès (à 58 ans)
Lieu de décès Pékin, république de Chine
Nationalité Chinoise
Parti politique Kuomintang
Conjoint Lu Muzhen
Song Qingling
Enfants Sun Ke
Profession Médecin, écrivain
Religion Congrégationalisme

Il est considéré comme « le père de la Chine moderne ». Il a eu une influence significative dans le renversement de la dynastie Qing (dont le dernier représentant a été Puyi) et l'émergence de la république de Chine. Sun Yat-sen, l'un des fondateurs du Kuomintang, a été le premier président de la république de Chine en 1912 et, entre 1917 et 1925, dirigea plusieurs gouvernements basés dans le Sud de la Chine, qui visaient à réunifier le pays alors en proie à la domination des seigneurs de la guerre. Il a développé une philosophie politique connue sous le nom des Trois principes du peuple (nationalisme, démocratie et bien-être du peuple).

Biographie

Enfance et années d'étude

Photo de Sun Yat-sen et de ses amis, surnommés Si Da Kou (四大寇), au Hong Kong College of Medicine for Chinese (de gauche à droite : Yang Heling, Sun Yat-sen, Chen Shaobai et You Lie ; debout, Guan Jingliang).

Sun Yat-sen est né dans une famille de paysans du village de Cuiheng (翠亨村), situé dans le district de Xiangshan, devenu depuis la ville de Zhongshan (en chinois 中山市 ), dans la province du Guangdong (Simplifiés : 广东, Traditionnels : 廣東), dans le sud de la Chine.

Selon Hans-Heinrich Wetzel, sa famille serait originaire de la communauté juive de Kaifeng mentionnée au XVIIe siècle par des Jésuites qui indiquent qu'ils étaient quelques centaines, que leur apparence physique comme leurs habitudes étaient semblables à celle des Han, et qu'elles étaient appelées les « Ye-Se-Lo-Ni » qui veut dire Israëlites, plus tard les « yóu tài rén » ou « yo se lie rén », littéralement les tribus d'Israël, originaires plus anciennement de la province de Xinjiang, ancien Turkestan oriental[1].

Après avoir été à l'école de son village, Sun Yat-sen, à l'âge de treize ans, va vivre avec un frère aîné, qui avait émigré à Honolulu (Hawaii) et qui y est devenu un marchand prospère. Il étudie ainsi au lycée de Iolani (en) (1879-1882), au lycée Diocesan Boys (1883) et à la Queen's University (1884-1892) à Hong Kong. Il obtient finalement un diplôme de médecine à l'université de médecine à l'université de Hong Kong, dont il a été l'un des deux premiers diplômés. Il pratique alors brièvement la médecine à Hong Kong en 1893.

Il épouse à vingt ans Lu Muzhen (Simplifiés : 卢慕贞, Traditionnels : 盧慕貞), qui provient du même village que lui. Elle lui donne un fils, Sun Ke et deux filles, Sun Yan et Sun Wan. Ils mènent vite des vies séparées, Lu Muzhen n'étant pas en mesure de le suivre dans ses tribulations, en raison entre autres de ses pieds bandés. Sun Ya-sen a par la suite une autre compagne qui va l'assister dans ses activités politiques, Chen Cuifang (陳粹芬, 1873-1954). Considérée avec son accord comme une concubine par la famille Sun, elle est enterrée dans le cimetière familial. En 1914 il demande la main de Soong Ai-ling à son père Charles Soong qui refuse. L'année suivante, il épouse Song Qingling, sœur de Ai-ling, contre l'avis de Charles Soong, après avoir cette fois divorcé de Lu Muzhen, car les Song sont méthodistes. C'est elle qui sera connue internationalement comme « Madame Sun Yat-sen ».

Ses années d'étude à Hawaii le poussent à développer un fort intérêt pour le système économique américain, dont il devient l'un des plus ardents défenseurs. Il attache un intérêt tout particulier aux idées d’Alexander Hamilton et Abraham Lincoln. La phrase de ce dernier « Le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple » lui inspire d'ailleurs ses « trois principes du peuple ».

D'après Serge Hutin[2], Sun Yat-Sen était un membre important de la Triade et franc-maçon de haut grade.

Carrière politique

Sun marque aussi sa forte opposition au gouvernement impérial Qing de la Chine, et commence sa carrière politique en essayant d'organiser des groupes de réforme des Chinois exilés à Hong Kong. En il fonde le Xingzhonghui (littéralement « société pour le redressement de la Chine ») pour exposer ses idées pour la prospérité de la Chine et comme plateforme de ses futures activités révolutionnaires.

En 1895, un coup d'État qu'il fomente échoue et il doit s'exiler pour seize ans en Europe, aux États-Unis, au Canada puis au Japon, réunissant de l'argent pour son parti révolutionnaire. Au Japon, il rejoint d'autres groupes révolutionnaires chinois et fonde avec eux le Tongmenghui, ligue d'union dont il est élu président, et dont il exprime ainsi le programme : « Chasser les étrangers, restaurer la Chine, fonder une république et redistribuer équitablement les terres ».

La création de la république de Chine

Le , une révolte à Wuchang, à laquelle Sun Yat-sen n'est pas lié, provoque la chute de la dynastie Qing des Mandchous et en conséquence du système impérial de la Chine, vieux de deux millénaires. Le , un gouvernement républicain provisoire est proclamé et tous s'entendent sur l'appel à Sun Yat-sen pour en être président, prenant de vitesse Yuan Shikai. Sun Yat-sen, alors aux États-Unis après son expulsion du Japon, est surpris par la révolution nationaliste dont il apprend la victoire par la presse, mais il ne se hâte pas de rentrer. Il ne débarque à Shanghai que le . Sun Yat-sen déclare que la Chine a été occupée par deux fois par des puissances étrangères : d'abord par les Mongols (dynastie des Yuans) puis par les Mandchous (dynastie des Qing)[3].

Le 29 décembre, il est élu président provisoire et proclame à Nankin la république de Chine au début de 1912.

Premier drapeau de la république de Chine aux couleurs des cinq peuples rassemblés : Hans, Mandchous, Mongols, Hui et Tibétains.

Sun Yat-sen se rendit avec son cabinet sur la tombe de Yongle, empereur de la dynastie Ming et s'adressant à ces ancêtres hans, il déclara : « La politique des Mandchous a été une politique extrêmement tyrannique. Motivés par le désir de soumettre perpétuellement les Chinois, les Mandchous ont gouverné le pays au plus grand détriment du peuple. La race chinoise, aujourd'hui, a enfin restauré le gouvernement du peuple de Chine… Le peuple est venu ici pour informer Votre Majesté de la victoire finale[4]. » Plus tard, en 1912, Sun Yat-sen dans son discours inaugural comme premier président de la république de Chine, annonça « l'unification des peuples han, mandchou, mongol, hui et tibétain »[5]. Promouvoir un État multiethnique était le moyen choisi par Pékin pour affirmer son héritage de l'empire[4].

L'histoire officielle du Kuomintang accentue fortement le rôle de Sun comme le premier président provisoire, mais un grand nombre d'historiens remettent en question le rôle de Sun dans la révolution de 1911 et indiquent qu'il n'a eu aucun rôle direct dans la révolte du Wuchang et qu'il était alors hors du pays. Dans cette interprétation, sa nomination en tant que premier président provisoire est due à sa position de personnalité respectée mais relativement peu importante, qui faisait de lui un candidat de compromis entre les camps révolutionnaire et conservateur.

Sun Yat-sen organise alors la république de Chine, en provoquant dans chaque province des élections destinées à établir l'Assemblée nationale de la république de Chine. Cette assemblée vote les objectifs et la loi provisoire de la République. Il lance une démarche de codification des lois.

La prise de pouvoir par Yuan Shikai

Cependant, le gouvernement provisoire est rapidement en position de faiblesse. Les provinces du sud de la Chine ont déclaré leur indépendance de la dynastie Qing, mais ce n'est pas le cas de la plupart de celles du Nord. De plus, le gouvernement provisoire ne dispose d'aucune force militaire propre, son contrôle des mutins de la Nouvelle Armée est limité et une grande partie des forces militaires ne se sont pas prononcées contre les Qing.

L'hypothèse d'une intervention des puissances occidentales en Chine pour soutenir l'empire inquiète suffisamment le gouvernement de Nankin pour que soit trouvé un compromis avec la puissante armée de Beiyang de Yuan Shikai. Lors de la révolte des Taiping, l'armée britannique avait été poussée à soutenir les Qing pour défendre ses concessions. Une pareille intervention en 1911 aurait pu être fatale au mouvement. Pour éviter que l'histoire ne se répète, un compromis est trouvé avec Yuan Shikai. Celui-ci, principal soutien à l'empire, négocie l'abdication du jeune empereur âgé de quatre ans, Pu Yi. En contrepartie, il demande sa nomination au poste de président de la République. À sa trahison envers l'empereur s'ajoute rapidement une autre, celle envers les révolutionnaires. Les élections législatives donnant gagnants les révolutionnaires, et le régime donnant le pouvoir à l'Assemblée à l'automne 1912, Yuan fait assassiner en le chef de file et représentant du Kuomintang à Pékin, Song Jiaoren. Puis, il chasse les élus Kuomintang de l'Assemblée, interdit leur parti et dissout la Chambre. Les nationalistes étant dès lors poursuivis, Sun s'enfuit au Japon. Commence la dictature de Yuan, au cours de laquelle celui-ci cherche en 1915 à se faire nommer empereur, avant de mourir dès 1916.

Le retour en Chine et la lutte pour l'unité du pays

Statue de Sun Yat-sen dans le parc qui porte son nom à Pékin.
Statue de Sun Yat-sen dans sa maison à Shanghai.

Sun retourne en Chine en 1917 et est élu président du gouvernement national auto-proclamé à Canton en 1921. En 1923, il prononce un discours durant lequel il proclame les « trois principes du peuple » comme principes fondateurs du pays et la constitution des cinq pouvoirs (ou yuan : le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif, le pouvoir judiciaire, le pouvoir d'examen et le pouvoir de censure) comme base du système politique et de l'administration.

Pour développer le pouvoir militaire nécessaire au renversement du gouvernement des seigneurs de la guerre de Pékin, il crée, d'après les préconisations des conseillers soviétiques envoyés pour chapeauter l'activité anti-impérialiste chinoise (Borodine et Vassili Blütcher), l'Académie militaire de Huangpu près de Canton, à la tête de laquelle il nomme Tchang Kaï-chek.

Au début des années 1920, il reçoit de l'aide du Komintern pour réorganiser le Kuomintang comme un parti nationaliste anti-impérialiste et anti-féodal. Le Kuomintang coopérera alors avec tous les partis, y compris avec les communistes chinois. Sun est alors convaincu que la réalisation d'une Chine unifiée passe par la conquête militaire partant de sa base dans le Sud, suivie d'une période de transition qui s'achèverait dans un passage à la démocratie.

Le , Sun Yat-sen voyage dans le Nord et donne un nouveau discours pour suggérer l'idée d'une conférence pour le peuple chinois et l'abolition de l'ensemble des traités inégaux avec les pays occidentaux. Deux jours plus tard, il est à nouveau en voyage pour Pékin pour discuter de l'avenir du pays, malgré la détérioration de son état de santé et la guerre civile provoquée par les seigneurs de la guerre. Son objectif est de tenir des pourparlers de paix avec les représentants régionaux à propos de l'unification de la Chine. Il meurt d'un cancer le à l'âge de cinquante-huit ans, sur la route de Pékin.

Message de Sun Yat-sen

La veille de sa mort, il fait rédiger, vraisemblablement par Wang Jingwei, un message[6] adressé au Comité exécutif central des soviets. Ce message[7] émet le vœu que les communistes et le Kuomintang continuent à collaborer étroitement. La suite des événements devait montrer que ce vœu ne se réaliserait pas et la rupture entre les deux partis révolutionnaires devait survenir moins de deux ans plus tard.

Un mausolée est créé à Nankin pour accueillir sa dépouille. Un wagon sera affrété pour lui faire faire le trajet de Pékin à Nankin. La sculpture de son mausolée est créée par le Français d'origine polonaise, Paul Landowski[8].

Publications

  • Kidnapped in London (1897)
  • The Outline of National Reconstruction/Chien Kuo Ta Kang (1918)
  • The Fundamentals of National Reconstruction/Jianguo fanglue (1924)
  • The Principle of Nationalism (1953)

Notes et références

  1. Hans-Heinrich Wetzel, Liú Shàoqí: le moine rouge, Paris, éditions Denoël, 1961
  2. Serge Hutin, Les sociétés secrètes en Chine, , p.36 p.
  3. Xinhua's allegations baseless claims.
  4. Une histoire du Tibet : Conversations avec le Dalaï Lama, de Thomas Laird, Dalaï-Lama, Christophe Mercier, Plon, 2007, (ISBN 2-259-19891-0).
  5. China White Paper, Tibet:its Ownership and Human Rights Situation, texte du Conseil des affaires de l'État de la République populaire de Chine septembre 1992, reproduit sur le site de Free Tibet Campaign.
  6. Cf. Jacques Guillermaz, Histoire du Parti communiste chinois. Des origines à la conquête du pouvoir (1921-1949), Petite bibliothèque Payot, 2004, (ISBN 2-228-89843-0), pp. 153-155 qui cite Sun Yat-sen, Œuvres choisies, édition chinoise de Pékin (1957), p. 922.
  7. Roger Lévy, « Le souvenir de Sun Yat-sen et la république populaire de Chine (1886-1960) », Politique étrangère, (DOI 10.3406/polit.1960.2395), p. 491-516.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Jean Chesneaux, Sun Yat-sen, Bruxelles, éditions Complexe, 1982.
  • Marie-Claire Bergère, Sun Yat-sen, Paris, Fayard, 1994.
  • Fabien Gallinella, « Docteur Sun Yat-Sen : la prescription du sérum national pour sauver "l’homme malade de l’Asie" », in J. Broch (dir.), Médecins et politique (XVIe– XXesiècles). Études d’histoire des idées politiques et sociales, Bordeaux, LEH Édition, coll. « Les Cahiers du droit de la santé », 2019, p. 117-140.
  • Hans-Heinrich Wetzel, Liú Shàoqí: le moine rouge, Paris, éditions Denoël, 1961
  • George Soulié de Morant, Soun-Iat-Senn, Paris, édition N.R.F., 1932.

Liens externes

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