Site archéologique de Tintignac

Le site archéologique de Tintignac situé à Naves en Corrèze est caractérisé par la superposition d'un sanctuaire gaulois et d'un temple gallo-romain et par la qualité des découvertes, en particulier un dépôt gaulois contenant des objets méconnus et exceptionnels tels que des trompettes de guerre et des casques fabuleux[1].

Site archéologique de Tintignac-Naves

Le sanctuaire en cours de fouilles durant l'été 2013.
Localisation
Pays France
Région Nouvelle-Aquitaine
Département Corrèze
Commune Naves
Protection  Classé MH (1840)
Coordonnées 45° 20′ 00″ nord, 1° 45′ 28″ est
Altitude 490 m
Géolocalisation sur la carte : France
Site archéologique de Tintignac-Naves
Géolocalisation sur la carte : Corrèze
Site archéologique de Tintignac-Naves
Internet
Site web tintignac-naves

Le site a fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques sur la liste de 1840[2].

Situation

Le site archéologique se trouve au nord du plateau de Naves, entre les deux sommets les plus élevés de la zone, le Puy de l’Aiguille culminant à 509 m dont il occupe le versant oriental, et le Peuch Redon culminant à 501 m. Cette situation offre au site de Tintignac-Naves une visibilité sur les Monédières, la vallée de la Vimbelle et celle de la Corrèze à 180°.

La commune de Naves, est située à km au nord de Tulle (Corrèze). Le site est accessible depuis la sortie « Tulle Nord » sur l'A89, distante de seulement 250 m.

Tintignac-Naves borde une ancienne voie protohistorique importante, surnommée la « route des métaux » car on y faisait transiter l'étain, un métal rare et indispensable à la fabrication de bronze, venu d'Armorique ou de Cornouailles jusqu'aux rives de la Méditerranée. Du fait de la présence d'un très important bassin minier à l'époque gauloise dans la vallée de la Corrèze où l'on extrayait de l'or et du fer, les archéologues pensent que les Lémovices échangeait leurs métaux avec les commerçants empruntant cette voie. Sous Hadrien est construite la voie romaine reliant Lugdunum à Burdigala en passant par Augustonemetum et Vesunna, le carrefour entre la voie antique et la voie impériale surnommée « voie d'Hadrien » se trouve alors à Tintignac-Naves[3].

Autour du sanctuaire, les recherches récentes menées depuis 2003 ont montré l'existence d'une occupation ponctuellement assez dense mais dispersée, aussi bien à l'époque gauloise que durant la période gallo-romaine. Le sanctuaire fait donc plutôt partie de ce qu'on appelle une "agglomération secondaire", que d'une véritable ville.

On peut noter plusieurs phases de changement dans le site correspondant à l'édification ou au remaniement des bâtiments. La première semble être la romanisation du site, détruit sans doute par les élites gauloises soucieuses de plaire au nouveau pouvoir romain à la fin du Ier siècle avant notre ère. La deuxième pourrait correspondre à la construction de la voie impériale amenant un afflux conséquent de pèlerins et nécessitant de ce fait un agrandissement du site. Le troisième correspondrait à l'édification du théâtre et à l'apogée de Tintignac-Naves au IIIe siècle. Enfin, au IVe siècle, le site de Tintignac aurait été volontairement incendié, potentiellement par les premiers évangélisateurs de la région qui y auraient vu la rémanence d'un culte païen.

Toponymie

Attesté avec la graphie occitane Tintinhac au XIIe ou XIIIe siècle (Arnaud de Tintignac). Il est tentant de rapprocher ce nom de Tintigny (Belgique, Tintiniacum 1090) et de Tinténiac (Bretagne) qui contient le nom de personne d'origine latine Tintinius d'après Albert Dauzat et Charles Rostaing[4]. Le second élément est le suffixe -acum « lieu de », « propriété de ».

Le site de Tintignac-Naves n'étant pas mentionné dans les écrits de l'époque romaine retrouvés, il est pour l'instant impossible de connaître son nom à l'époque antique. Certains auteurs du XIXe siècle ont tenté de retrouver dans le nom des hameaux alentour le nom de divinités romains comme Céron pour Cérès, Bach pour Bacchus, mais cette hypothèse est peu probable car les noms semblent tirés de la langue occitane et donc être postérieurs à l'occupation gallo-romaine du site.

Bâtiments

La fonction du site est uniquement religieuse puisqu'y a été découvert un sanctuaire gaulois, remplacé par un ensemble monumental religieux gallo-romain (constitué d'un fanum, d'un théâtre, d'un bâtiment en hémicycle et d'un autre édifice appelé au XIXe siècle « tribunal à deux basiliques ».

Le sanctuaire gaulois se compose d'une aire sacrée délimitée par une imposante palissade ouverte vers l'est une direction importante dans le culte des Celtes. Au centre ont été découvertes les empreintes d'un bâtiment de bois plusieurs fois reconstruit et d'un feu continu marquant la fonction religieuse du lieu.

À la période gallo-romaine, deux fana s'implantent sur les vestiges du sanctuaire gaulois. Ils évolueront en un grand et luxueux temple doté de deux cellae. Plus tard, à partir de la première moitié du IIe siècle de notre ère, deux autres bâtiments, dont la fonction exacte n'a pu être clairement définie, sont ajoutés : le fameux "Tribunal" qui semblerait en réalité être un portique et l'édifice semi-circulaire, unique de par sa morphologie et ses dimensions. Le théâtre de type gallo-romain a été accolé à ce dernier plus tard à l'est et on estime qu'il pouvait contenir jusqu'à 2 500 personnes lors de grandes cérémonies religieuses. En de nombreux points, la configuration des bâtiments du pôle rural de Tintignac-Naves semble unique dans le monde romain[3].

Histoire du site

Redécouverte

Tintignac-Naves, du fait de l'affleurement des ruines du fanum et du théâtre, a toujours été connu des locaux. À partir du XVIIe siècle, les érudits humanistes commencent à s'intéresser au site, notamment Étienne Baluze qui fait représenter dans son Historia tutellensis, des arènes en lieu et place du théâtre de forme semi-circulaire et non elliptique. Le site est depuis fréquemment nommé, improprement, les "Arènes de Tintignac".

Le site est redécouvert au xixe siècle et est classé sur la Liste des monuments historiques protégés en 1840. Prosper Mérimée, inspecteur général des monuments historiques et Abel Hugo visitent le site. Dans les années 1830, plusieurs campagnes de fouilles menées par des érudits locaux mettent au jour les vestiges des quatre bâtiments principaux. Dans les années 1880, ces fouilles servent à établir un plan en creusant le long des murs de ces bâtiments[5].

Découvertes au xxie siècle

Casque en forme de tête d’oiseau trouvé à Tintignac[6].

À partir de 2001, des fouilles sont entreprises sur le site par une équipe d'archéologues de l'INRAP. En septembre 2004, une fosse gauloise renfermant près de 500 fragments d'objets en fer et en bronze a été mise au jour. Parmi ces objets, une dizaine d'épées et de fourreaux en fer, des fers de lance, un umbo de bouclier, une dizaine de casques en bronze et en fer dont un prend la forme d'un oiseau (une grue ou un cygne, oiseau que l’on retrouve sur certaines statères lémovices), 2 têtes d'animaux dont une de cheval, 1 corps d'animal en connexion avec les deux pattes arrière, 1 patte avant, un chaudron, et sept carnyx[6] (dont un presque entier, trompettes de guerre).

C'est la première fois que des objets de ce type sont découverts en contexte sur un sanctuaire gaulois. Ces objets uniques appartenant au monde militaire et religieux gaulois sont en cours d'étude par l'équipe dirigée par Christophe Maniquet, responsable scientifique du site de Tintignac. Lors de la campagne de fouilles en 2009, en descendant dans un puits d'une profondeur de 13 mètres, a été découvert un aqueduc de m de hauteur praticable sur 10 m vers l'est.

Le site demeure néanmoins extrêmement méconnu, seul un bâtiment, le fanum, ayant été fouillé dans son intégralité en addition de la moitié du bâtiment semi-circulaire fouillée et d'une des basiliques du portique nommé « Tribunal ». Pourtant, on a déterminé l'existence d'au moins quatre autres bâtiments qui n'ont jamais été fouillés et dont la fonction est parfaitement inconnue sur un site qui s'étendrait sur près de 60 ha.

Conservation

Les pièces gauloises de ce site archéologique après avoir été restaurées par le laboratoire Materia Viva de Toulouse et exposées à Tulle, entament une tournée mondiale qui a débuté à Berne (Suisse). Elles sont aujourd'hui entreposées dans les réserves du musée Jacques-Chirac de Sarran dans l'attente d'un local capable de les accueillir.

Tintignac et son musée

Évocation d'une cérémonie gauloise dans le sanctuaire de Tintignac[6].

Dans l'attente de la réalisation d'une structure muséale permanente, le site archéologique de Tintignac-Naves dispose d'un local d'exposition temporaire pour présenter au public le site et des reproductions des objets découverts.

Le site est ouvert de juin à septembre et les visites sont opérées par Tintignac Association, chargée de l'animation du site archéologique. Les vestiges sont par ailleurs en partie recouverts, seul le fanum étant visible, dans l'attente de la réalisation de travaux de conservation pour protéger les murs. Une aire de repos et un sentier d'interprétation sont en projet en partenariat avec les ASF.

Notes et références

  1. Dossier pour la science, no 61, octobre 2008.
  2. Notice no PA00099815, base Mérimée, ministère français de la Culture.
  3. « Site archéologique de Tintignac-Naves » (consulté le ).
  4. Dictionnaire étymologique des noms de lieux en France, Librairie Guénégaud 1979. p. 678.
  5. « Site archéologique de Tintignac-Naves » (consulté le ).
  6. Source : « Les Gaulois, une expo renversante », 2012.

Annexes

Bibliographie

  • Christophe Maniquet, Le sanctuaire antique des Arènes de Tintignac, Limoges, Culture et Patrimoine en Limousin, , 123 p. (ISBN 2-911167-38-4)
  • Christophe Maniquet, Comment les Gaules devinrent romaines : Le dépôt d'armes, d'instruments de musique et d'objets gaulois du sanctuaire de Tintignac à Naves, Paris, La découverte, , 21 à 34 p.

Articles connexes

Liens externes


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