Science des données

En termes généraux, la science des données est l’extraction de connaissance d’ensembles de données[1],[2].

La science des données est un domaine interdisciplinaire qui utilise des méthodes, des processus, des algorithmes et des systèmes scientifiques pour extraire des connaissances et des idées de nombreuses données structurelles et non structurées. Elle est souvent associée aux données massives et à l'analyse des données.

Elle utilise des techniques et des théories tirées de nombreux domaines dans le contexte des mathématiques, des statistiques, de l'informatique, de la théorie et des technologies de l'information.

Parmi elles : les modèles probabilistes, l’apprentissage automatique, l’apprentissage statistique, la programmation informatique, l’ingénierie de données, la reconnaissance de formes, la visualisation de données, l’analytique prophétique, la modélisation d’incertitude, le stockage de données, la géovisualisation[3], la compression de données et le calcul à haute performance. Les méthodes qui s’adaptent aux données de masse sont particulièrement intéressantes dans la science des données, bien que la discipline ne soit généralement pas considérée comme limitée à ces données.

La science des données (en anglais data science[4]) est une discipline qui s'appuie sur des outils mathématiques, de statistiques, d’informatique (cette science est principalement une « science des données numériques »[5]) et de visualisation des données. Elle est en plein développement, dans le monde universitaire ainsi que dans le secteur privé et le secteur public. Moore en 1991 a défini la statistique comme la science des données[6] (définition reprise par d’autres, dont James T. McClave et al. en 1997[7]) et U. Beck en 2001[8] oppose la science des données à la science de l’expérience, voyant une dissociation croissante entre ces deux types de science, que tendrait selon lui à encourager une société de la gestion du risque au sein d’une « civilisation du danger »[9].

Objectifs

Le premier objectif du « data scientist » est de produire des méthodes (automatisées, autant que possible) de tri et d’analyse de données de masse et de sources plus ou moins complexes ou disjointes de données, afin d’en extraire des informations utiles ou potentiellement utiles.

Pour cela, le « scientifique des données » s'appuie sur la fouille de données, les statistiques, le traitement du signal, ainsi que diverses méthodes de référencement, d'apprentissage automatique et la visualisation de données. Il s'intéresse donc à la classification, au nettoyage, à l'exploration, à l'analyse et à la protection de bases de données plus ou moins interopérables.

En réponse à la complexité croissante de la science des données, des partenariats s'établissent entre collectivités, universités, grandes écoles et secteur privé, ce travail étant pris en charge en interne ou sous-traité par une entreprise spécialisée.

Histoire

Le terme science des données (data science en anglais) a été forgé lors du 2e colloque franco-japonais de statistique tenu à l’Université Montpellier II (France). Les participants ont reconnu l’émergence d’une nouvelle discipline au cœur de laquelle se trouvent des données de toutes origines, tailles, types et structures. Cette activité doit s’appuyer sur des concepts et des principes reconnus de la statistique et de l’analyse des données tout en exploitant pleinement la puissance croissante des outils informatiques. En 2001, William Cleveland reprenait essentiellement les mêmes idées dans un article programmatique paru en 2001 « Data Science: An Action Plan for Expanding the Technical Areas of the Field of Statistics » qui précise les contours de cette discipline émergente.

Cette discipline est issue de l'apparition et du développement des bases de données et de l'Internet et répond aussi à la complexité croissante et au volume en croissance exponentielle du nombre de données numériques disponibles dans le monde (infobésité).

Elle a reçu beaucoup d'attention dernièrement grâce à l’intérêt grandissant pour les "données massives". Cependant, la science des données ne se limite pas à l’étude de bases de données pouvant être qualifiées de "données massives".

Par ailleurs, l'essor de techniques d’apprentissage automatique (en anglais machine learning) et d’intelligence artificielle a également participé à la croissance de cette discipline et à son ouverture vers de nouveaux champs en passant, par exemple, de l’analyse statistique pure de données fortement structurées à l’analyse de données semi-structurées (XML par exemple) pour notamment mettre « en correspondance des bases de données et de données textuelles »[11].

Formation : Cette science nouvelle a naturellement généré « l'émergence d'une nouvelle filière de formation : « data scientists » »[12].

En France

Cette science s’inscrit dans les efforts d’accompagnement du numérique, en lien depuis qu’elle existe avec la mission Etalab, dont le directeur, Henri Verdier, est aussi « administrateur général des données de l’État », assisté par des scientifiques de données recrutés pour « accélérer la possibilité de politiques publiques « augmentées » par les données et leur analyse ».

Domaines d'utilisation

Parmi les plus grands utilisateurs de la science des données figurent (par ordre alphabétique)


Compétences métier

À ne pas confondre avec l’analyse métier et l’ingénierie des données, le scientifique de données va plus loin que l’analyste de données, notamment en utilisant l’apprentissage automatique.

Pour cela, il doit être rigoureux, mais curieux et créatif, capable de trouver les données les plus adéquates pour une question et avoir une pensée structurée lui permettant de décomposer et organiser les questions et les processus[14].

Il doit savoir manipuler et nettoyer les données et les préparer dans un format adapté à l’analyse. Il doit aussi maitriser les sciences des données qui nécessitent une expertise pluridisciplinaire[14]. Son expertise recouvre les domaines scientifiques, méthodologiques, statistiques (maitrise des statistiques descriptives ; moyennes, médianes, variance, déviation, distributions de probabilités, échantillonnage, statistiques inférentielles, etc.), des outils d'ingénierie logicielle du domaine (ex. SAS, R), de l'algorithmique de l'apprentissage automatique, de l'apprentissage profond. Pour déduire des tendances prospectives probables et de bons modèles prédictifs, il peut également s'appuyer sur des bibliothèques (ex. TensorFlow, Keras, PyTorch). Évidemment, ces découvertes s'appuient tant les données du passé et du présent. Il doit maîtriser au moins un langage de programmation (Python, R, Java, Julia, Perl ou C/C++) et de programmation (SQL)[14]. Le scientifique de données doit aussi maîtriser les questions de régression et de classification, d'apprentissage supervisé ou non supervisé. Il doit aussi avoir de solides compétences en droit des données et une maitrise des aspects éthiques et sociaux, notamment concernant la confidentialité, l'anonymisation, la sécurité des données sensibles (données personnelles et de santé notamment)[14].

La maîtrise de la plateforme Hadoop, d'outils de traitement (ex. Hive, Pig...), d'outils d'infonuagique (ex Amazon S3) et la gestion de données non structurées (ex. données issues des réseaux sociaux, de flux vidéo ou audio) est un avantage et peut être requise par certains employeurs. Des notions d'intelligence artificielle sont de plus en plus requises (réseaux de neurones artificiels, etc.)[14]. In fine, le scientifique de données doit idéalement aussi être pédagogique, notamment par la maîtrise de la visualisation des données, et il doit être en mesure de déployer les modèles d'apprentissage automatique qu'il a mis au point (c'est-à-dire les rendre utilisables par des non-spécialistes)[14]. En rendant les modèles utilisables par les non spécialistes, le scientifique de données crée un « produit de données » (Data product). Celui-ci peut être une application sur un portable ou une application web. Les utilisateurs de R développent généralement leurs produits de données sur Shiny.

Selon Le Big Data 88 % des scientifiques de données ont au moins une maitrise (master) et 46 % un doctorat. Parmi ces scientifiques de données, 32 % proviennent du domaine des mathématiques et des statistiques, 19 % des sciences informatiques et 16 % d'écoles d’ingénieurs[14].

Selon le classement des 25 ou 50 « meilleurs » métiers du monde fait aux États-Unis par le site de recherche d’emploi Glassdoor, celui de Data Scientist arrivait en tête, devant les « ingénieurs DevOps » et les « Data Technicians »[14].

Évolutions attendues du métier

Gartner inc., estime que plus de 40 % des tâches du scientifique des données seront rapidement automatisées (avant 2020), ce qui devrait favoriser une augmentation de leur productivité, mais aussi l’apparition de « citoyens scientifiques de données » (citizen data scientists en anglais) et d’approches collaborative (ex. Wikidata, Wikipédia).

Des questions éthiques et de démocratie se posent avec les vols massifs de données personnelles ou les usages manipulateurs de données. Un exemple d'usage qui pose des questions éthiques et qui peut influencer la démocratie est celui du scandale de Facebook et Cambridge Analytica/AggregateIQ. Un usage douteux, voire illégal, de données massives d'utilisateurs de réseaux sociaux a été utilisé au profit de quelques candidats (ex Donald Trump en contexte d’élections aux États-Unis) ou d’idéologies (ex. en faveur du parti du Brexit lors du référendum sur l’appartenance du Royaume-Uni à l’Union européenne). Des conséquences peuvent s’en suivre, notamment dans le contexte du Brexit où le Royaume-Uni a finalement quitté l’Union européenne.

Salaires

Selon Glassdoor, le salaire annuel d’un scientifique de données est en moyenne de 116 840 dollars et fin janvier Glassdoor estimait à 1 736 le nombre d’offres d’emploi. Le salaire annuel moyen d’un scientifique de données américain serait de 110 000 dollars, tandis qu’en France il serait entre 45 000 et 50 000 d’euros. Malgré l’apparition de nombreuses formations, les employeurs peinent encore à trouver des profils assez qualifiés.

Selon les plateformes de Freelance, le TJM (tarif journalier moyen) pour les "data Scientist" en freelancing se situe à 570 euros en moyenne pour les profils séniors et peut aller jusqu'à 1100 euros pour des projets d'envergures et complexes.

Notes et références

  1. (en) Vasant Dhar, « Data Science and Prediction », Communications of the ACM, no 12, , p. 64-73 (DOI 10.1145/2500499, lire en ligne)
  2. (en) « The key word in "Data Science" is not Data, it is Science », sur simplystats, (consulté le )
  3. « Roque Leal », sur roqueleal.me (consulté le )
  4. Davenport et DJ Patil « Data Scientist: The Sexiest Job of the 21st Century », Harvard Business Review, 2012
  5. Gossiaux J.F (1998) L'ethnologie au bout du compte (No. 30, p. 153-163). Ministère de la culture/Maison des sciences de l’homme.
  6. Moore, D. S. (1991), Teaching statistics as a respectable subject. In Gordon, F. and S. Gordon (eds.), Statistics for the twenty-first century, 14-25, Mathematical Association of America.
  7. McClave, James T. et co. (1997) Statistics , Prentice Hall, New Jersey
  8. Beck U (2001) La politique dans la société du risque (Vol. 17, No. 1, p. 376-392). La Découverte.
  9. Beck, U. (2001). La politique dans la société du risque (Vol. 17, No. 1, p. 376-392). La Découverte.
  10. Kégl B (2014) La science des données pour les données de la science. In 9th Journées Informatique de l'IN2P3-IRFU.(résumé)
  11. Stage Recherche-M2 : Mise en correspondance debases de données etdedonnées textuelles, encadré par Mathieu Roche (TETIS-Cirad & LIRMM, Montpellier) et Sophie Fortuno (TETIS-Cirad, Montpellier)
  12. Abiteboul, S., Bancilhon, F., Bourdoncle, F., Clemencon, S., De La Higuera, C., Saporta, G., & Soulié, F. F. (2014). L'émergence d'une nouvelle filière de formation:«d ata scientist s» (Doctoral dissertation, INRIA Saclay)
  13. « Data Science Blog », sur France Data Science Blog, (consulté le ).
  14. +Bastien L, « Voici toutes les compétences nécessaires pour devenir Data Scientist », sur LeBigData.fr, (consulté le )


Voir aussi

Bibliographie

  • (en) William Cleveland, « Data Science : An Action Plan for Expanding the Technical Areas of the Field of Statistics », International Statistical Review / Revue internationale de statistique, vol. 69, , p. 21-26
  • Serge Abiteboul, Sciences des données : De la logique du premier ordre à la Toile, Fayard, coll. « Collège de France », (lire en ligne)
  • (en) Rachel Schutt et Cathy O'Neil, Doing Data Science : Straight Talk from the Frontline, O'Reilly Media, , 406 p. (ISBN 978-1-4493-5865-5)

Articles connexes

Liens externes

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