Reinette l'Oranaise

Reinette l’Oranaise ou Reinette el Wahrania (en arabe : راينات الوهرانية) de son vrai nom Sultana Daoud (en arabe : سلطانة داود) est une chanteuse et une compositrice judéo-algérienne d'expression arabe, parfois française, née en 1918 à Tiaret (Algérie) et décédée le à Paris.

Elle fut pendant plus d'un demi-siècle une digne représentante du folklore oranais, du houzi et l'auteur de compositions constamment réactualisées.

Sa force de travail, son talent, son œuvre originale et sa bonne humeur l'ont menée à se faire apprécier, au-delà du public juif et arabophone, et fait redécouvrir en France les beautés de la musique arabo-andalouse.

Enfance

Reinette est née à Tiaret. Atteinte de cécité à l'âge de deux ans, à la suite d'une variole mal guérie[1], Reinette fréquente l'école des aveugles d'Alger et apprend le braille et le cannage des chaises. Mais sa mère refuse qu'elle continue à exécuter ce travail qu'elle juge ingrat et qui lui abîme les doigts.

Elle intervient alors auprès de Messaoud Médioni, dit Saoud l'Oranais[1], un juif séfarade et chanteur violoniste virtuose du style houzi, qui tenait un café à Oran[1] (rue de la Révolution), – qui était le rendez-vous de tous les mélomanes, les musiciens, les paroliers et les vedettes locales (les théâtres étaient sous contrôle des autorités et interdisaient à cette époque toute expression arabe) – pour que le maestro initie Reinette à l'éveil de la musique arabo-andalouse[1]. Il l'accueille chez lui et la surnomme Reinette[1].

Initiation

Il en sort quelque temps après un 78 tours, que plus tard Reinette ose à peine écouter à cause des fautes de diction. Elle intègre l'orchestre du maestro[1], tout en se familiarisant avec les instruments de musique. Après la darbouka, elle s'initie au mandole puis à l'oud pour s'accompagner au chant et également se constituer un riche répertoire de textes et composer des mélodies puisées dans la tradition musicale oranaise. En 1938, Saoud Médioni émigre en France pour monter un café musical à Paris. La vie de ce dernier se termine en déportation sous la barbarie des nazis[1]. À l'âge de 26 ans, elle commence une carrière fulgurante. Elle réalise des prestations bi-hebdomadaires à Radio-Alger[1] qui diffuse les meilleurs artistes du chaâbi algérois et du répertoire andalou. Elle devient alors une chanteuse réputée[1].

Consécration

Elle est accompagnée de musiciens tels que le virtuose Mustapha Skandrani au piano, Alilou à la darbouka, Abdelghani Belkaïd au violon. Elle interprète à l'instar des plus grandes voix de la chanson populaire et de la musique savante du Maghreb : Fadela Dziria, Meriem Fekkaï, Alice Fitoussi, Zohra al-Fassia, Abdelkrim Dali, Dahmane Ben Achour[1]. Reinette l’Oranaise accompagne le maître du chaâbi, Hadj El Anka[1].

Elle continue à exercer son art musical à l'occasion de fêtes juives et musulmanes, mariages, circoncisions, anniversaires[1]. Comme juive séfarade, elle est même autorisée à chanter dans un orchestre d'hommes. Son nouveau maître de chant, le cheikh Abderrahmane Belhocine, lui donne des cours d'arabe classique et lui fait travailler la diction.

Oubli avant une reconnaissance tardive

Comme la plupart des Juifs d'Algérie (plus de cent mille), Reinette quitte l'Algérie en 1962. Commence alors pour elle une longue période de repli, quasi d'oubli et de grande solitude. En 1985, Reinette, à l'approche de ses 70 ans, ne songe plus qu'à cultiver ses souvenirs. Il faudra toute la ténacité de Hoummous, alors journaliste musical à Libération, grand fan de Reinette, et l'appui d'une génération de mélomanes français pour la convaincre de remonter sur scène.

En 1987, elle tourne un film court musical : "Amours éternelles" , avec le grand pianiste algérien Mustafa Skandrani (sélection au Festival International du film de Cannes).

En 1991, Jacqueline Gozland lui consacre un long métrage documentaire : "Le port des amours "[2] co- produit et édité par la chaîne de télévision ARTE. Une amitié se noue entre elles.

En 1995, Reinette l’Oranaise vit en banlieue parisienne, aux côtés de son époux, Georges Layani[1], un percussionniste. Elle est alors couronnée par l'Académie Charles-Cros et est reconnue par les Algériens de la tradition du style houzi.

Devenue une légende de la chanson judéo-arabe, sa voix s'éteint à Paris, le à l'âge de 83 ans. Son corps est inhumé au cimetière israélite de Pantin[1].dans la 89e division.

Bibliographie

  • Colette Attal, « Reinette l'Oranaise s'est tue », Communauté Nouvelle, 100 (1998), p. 90
  • Hélène Hazéra, « Reinette au paradis andalou », Libération,
  • Frank Médioni, « Reinette l'Oranaise, la voix de l'Algérie plurielle », Tribune Juive, 1448 (1998), p. 32

Discographie

  • Reinette l'Oranaise - Trésors de la chanson judéo-arabe, CD, Mélodie Distribution, Michel Lévy / Bruno Barre
  • Reinette l'Oranaise - Mémoires. CD, Mélodie Distribution, Michel Lévy / Bruno Barre

Clin d’œil

Filmographie

  • Reinette l'Oranaise, le port des amours, réalisation Jacqueline GOZLAND, production Les Films de la Passion, 1991 Édition DVD Arte Éditions / Harmonia Mundi, 2009

BNF - Images de la culture Centre National du cinéma

Références

  1. « Wikiwix's cache », sur archive.wikiwix.com (consulté le )
  2. « Reinette l'Oranaise (1918?-1998) - Auteur - Ressources de la Bibliothèque nationale de France », sur data.bnf.fr (consulté le )
  3. « Le port des amours, Reinette l'Oranaise (1991) » (consulté le )

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