Chaâbi algérien

Le chaâbi[2] (de l'arabe الشعبي) est un genre musical algérien, né à Alger au début du XXe siècle. Šaʿabī signifie « populaire » en arabe, c'est l'un des genres musicaux les plus populaires d'Algérie. Il dérive de la musique arabo-andalouse.

Pour les articles homonymes, voir Chaâbi.

Chaâbi algérien
Origines stylistiques Musique arabo-andalouse (Sa'naa), Melhoun.
Origines culturelles Début du XXe siècle en Algérie
Instruments typiques Mandole, banjo, derbouka, tar (tambourin), alto, qanûn, ney (flûte en roseau), piano.
Popularité Musique populaire citadine Algérie
Scènes régionales Alger, Kabylie, Blida, Médéa, Koléa, Mostaganem, Cherchell, Dellys, Jijel, Annaba[1].
Voir aussi Musique algérienne

Genres dérivés

aucun.

Genres associés

Hawzi, aroubi, musique arabo-andalouse, musique kabyle.

Étymologie

Šaʿabī signifie « populaire » en arabe[3] (شعب, šaʿab, « peuple »).

En 1946, El Boudali Safir, le directeur littéraire et artistique de Radio Algérie pour les émissions en langues arabe et kabyle, désigna des musiques provinciales dont faisait partie le medh sous le nom générique de « populaire » dans la langue française mais ce n'est qu'après l'indépendance de l'Algérie et lors du premier colloque national sur la musique algérienne qui s'est tenu à Alger en 1964 que la dénomination officielle et définitive de chaâbi a été adoptée. Le mot chaâbi a fait son entrée dans les dictionnaires de la langue française grâce à la reprise de la chanson Ya Rayah de Dahmane El Harrachi par Rachid Taha. Cette reprise a eu un succès mondial. Elle a même été chantée dans plusieurs langues[3].

Histoire

El Hadj M'hamed El Anka

En parallèle du medh (chant religieux) qui est l'ancêtre du chaâbi, Alger possédait déjà un autre genre musical populaire qu'on appelle aroubi et qui puise ses modes dans la musique arabo-andalouse[3]. Au temps de Cheïkh Nador (décédé en 1926) il y avait une pléiade d'artistes meddah (interprète du medh) tels que Mustapha Driouèche, Kouider Bensmain, El Ounas Khmissa, Mohamed Essafsafi, Saïd Derraz, Ahmed Mekaïssi, Saïd Laouar, Mahmoud Zaouche. Au début du XXe siècle, existait déjà une tradition dans les fumeries de la Casbah d'Alger qui consistait à interpréter des istikhbar (improvisation musicale, prélude vocal improvisé sur un rythme libre) dans les modes musicaux sika et sahli tout en s'accompagnant d'un guember. À l'origine, les chants sacrés du medh étaient accompagnés par le son des instruments à percussion et des instruments à vent.

À l'orée des années 1920, certains meddah ont commencé à introduire des instruments à cordes dans leurs orchestres à l'image des orchestres du aroubi algérois. Cette époque a vu la prédominance des textes puisés dans les répertoires des poètes du Melhoun[4]. Les musiciens ont commencé alors à adapter les textes interprétés aux modes andalous de l'école algéroise tout en travaillant la forme et l'orchestration. Le medh était confiné dans la casbah d'Alger surtout dans les fumeries, peu à peu les artistes ont commencé à se produire dans les cafés arabes d'Alger durant le mois du Ramadhan.

Cheïkh Saïd el Meddah de son vrai nom Malek Saïd a réalisé quatre enregistrements de textes profanes qui datent de 1924 et qui sont gardés par la phonothèque de la radio algérienne. Après le décès de Cheïkh Nador, c'est son élève M'hammed El Anka qui a pris le relais dans l'animation des fêtes alors qu'il n'avait que 19 ans. Sa jeunesse l'a aidé à avoir une nouvelle vision du medh. Il a pu donner une nouvelle impulsion au medh et a introduit dans les orchestres le Mandole algérien. Grâce aux moyens techniques modernes du phonographe et de la diffusion radiophonique, El Anka était devenu le promoteur du medh, il est considéré comme le plus grand interprète du genre[5]. Les autres grands interprètes sont : Hadj M'Rizek,Hsissen,El Hachemi Guerouabi, Dahmane El Harrachi, Maâzouz Bouadjadj, Amar Ezzahi et d'autres plus récents[5].

Vers 1934, des artistes judéo-algériens, comme Lili Labassi; avec les titres Ya Bechar (1934), Ya Keibi Testehal (1937), El Guelsa di Fes (1939) s'ajoutent au répertoire[6].

Le chaâbi est ainsi né au début du XXe siècle dans la région d'Alger[7]. Il est issu d’un mélange entre trois sources principales : la mélodie arabo-andalouse, le melhoun et la poésie amoureuse ainsi que la langue berbère dans un certain temps[5]. Selon les journalistes Jean-Paul Labourdette et Dominique Auzias, le genre appartient dans sa forme à la musique arabo-andalouse mais enrichi aujourd'hui par divers influences arabe, européenne et africaine dans ses mélodies et gnawa et berbère dans ses rythmes[7]. Alger demeure son centre le plus actif, suivi par, dans une moindre mesure, la ville de Mostaganem[5]. Cependant, il est apprécié dans toute l'Algérie, pour l'aspect moral et social de ses textes[7].

Modes et formes musicales

Le chaâbi utilise pour ses compositions les mêmes modes musicaux de la nouba algéroise : moual, zidane, âraq, ghrib, jarka, reml maya, sika, mezmoum et le mode sahli qui n'existe pas dans la musique arabo-andalouse[3]. On le retrouve seulement dans la musique populaire citadine. À Constantine, ce mode musical s'appelle r'haoui et en orient-arabe nahawand.

Le chaâbi utilise les formes traditionnelles de la nouba : ouverture tushiyya, chants istiḣbâr, inqilâb, mṣaddar ou darj, inṣirâf, khlâṣ ; ainsi que du aroubi et du madh, mais il a également ses propres formes telles que le qṣîd et le baytwṣyâh[3].

Instruments

Le chaâbi utilise les instruments de musique suivants : deux instruments à percussion à savoir la derbouka et le tar mais aussi le mandole algérien, l' alto et le banjo (généralement dans l'orchestre chaâbi, nous avons un banjo guitare et un banjo ténor), ney sans oublier le qanûn[3].

Les altistes de l'arabo-andalou et du chaâbi utilisent toujours leur alto à la verticale. Quant au mandole, il a remplacé la kouitra (instrument de la musique arabo-andalouse algérienne). Il n'est pas rare d'entendre aussi le piano. En revanche, aucun instrument électrique n’est admis, hormis parfois le clavier pour son côté pratique.

Interprètes notables

Chanteuses

Notes et références

  1. Louhal Nourreddine, « Le chaâbi, une histoire algérienne: Toute l'actualité sur liberte-algerie.com », sur liberte-algerie.com (consulté le )
  2. Entrée « Chaâbi », dans Ambroise Queffelec et al., Le français en Algérie : lexique et dynamique des langues, Bruxelles, Duculot, coll. « Champs linguistiques / Recueils », 1re éd., 590 p., 24 cm (ISBN 2-8011-1294-1 et 978-2-8011-1294-6, OCLC 470185511, notice BnF no FRBNF38858608), p. 228-229 (consulté le 16 décembre 2015).
  3. Hassan Remaoun Ahmed Khouadja, « Les mots au Maghreb Dictionnaire de l’espace public », sur ouvrages.crasc.dz (consulté le )
  4. [PDF] Le chaâbi dans les textes
  5. Collectif coordonné par Hassan Ramaoun, L'Algérie : histoire, société et culture, Alger, Casbah Editions, , 351 p. (ISBN 9961-64-189-2), p. 296
  6. François Bensignor, « Kamel Messaoudi : Le Meilleur du Néo-Chââbi (Collection La Voix du Maghreb) », Hommes et Migrations, no 1194, (www.persee.fr/doc/homig_1142-852x_1996_num_1194_1_2600_t1_0058_0000_2)
  7. Collectif, Dominique Auzias et Jean-Paul Labourdette, Algérie, Petit Futé, (ISBN 978-2-7469-2575-5, lire en ligne), p. 119

Annexes

Bibliographie

  • Yamilé Ghebalou, « Le chant chaabi : Une histoire parallèle de la ville d'Alger », dans Naget Khadda et Paul Siblot (dir.), Alger : Une ville et ses discours, Montpellier, Praxiling. Université Paul Valéry, coll. « Le Fil du discours », , 400 p. (ISBN 2-84269-001-X), p. 273-287

Articles connexes

Lien externe

  • Portail des musiques du monde
  • Portail de l’Algérie
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.