Prise de Cadix

La prise de Cadix est un épisode de la guerre anglo-espagnole.

Pour les articles homonymes, voir Bataille de Cadix.
Prise de Cadix
Carte de la baie de Cadix au XVIIe siècle
Informations générales
Date Du 30 juin au
Lieu Baie de Cadix
Issue Victoire anglaise
Belligérants
Royaume d'Angleterre Monarchie espagnole
Commandants
Charles Howard
Robert Devereux
Alonso Pérez de Guzmán
Forces en présence
150 navires
14 000 hommes
40 navires
5 000 hommes

Guerre anglo-espagnole (1585-1604)

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Coordonnées 36° 33′ 00″ nord, 6° 17′ 01″ ouest

À l'automne 1596, la ville de Cadix est attaquée par une flotte britannique commandée de l'amiral Charles Howard de Nottingham et les troupes du comte d'Essex, Robert Devereux, soutenue par le Provinces-Unies.

La négligence et l'impréparation des forces espagnoles, aggravées par une résistance peu énergique se soldent par une rapide victoire des Anglais. Après la destruction de la marine espagnole dans la baie de Cadix, les forces débarquées capturent et pillent la ville avant de se retirer avec plusieurs otages choisis parmi les personnalités de la ville.

Préparatifs

Le [1], la flotte anglo-néerlandaise leva l'ancre à Plymouth : elle comptait 150 bâtiments, dont 17 de la Royal Navy, répartis en quatre escadres de 6 360 mercenaires, 1 000 volontaires anglais, et 6 772 marins[2]. Outre l'amiral Howard, ces escadres étaient dirigées par Robert Devereux (2e comte d'Essex), Lord Thomas Howard, Sir Walter Raleigh et Sir Francis Vere. Anthony Ashley (en) était Secrétaire d'État à la guerre[3]. Cristóvão et Manuel de Portugal, les fils d'Antoine de Portugal, et peut-être également Antonio Pérez, étaient à bord, sans toutefois exercer de commandement[4]. Ce corps expéditionnaire fut rejoint par vingt autres navires alliés des Provinces Unies, embarquant 2 000 hommes sous les ordres de l'amiral Johan II van Duvenvoorde, seigneur de Warmond[5],[6].

Arrivée à Cadix

La ville de Cadix, peuplée à l'époque d'environ 6 000 habitants[7], était l'un des principaux ports et arsenaux des galions de la flotte de Nouvelle-Espagne[8]. Le samedi , les habitants de Cadix apprirent de la ville voisine de Lagos (Portugal), dans l'Algarve, qu'une flotte anglaise longeait la côte vers l'Est. Il y avait alors quelque 40 vaisseaux espagnols, galéasses ou galions, croisant dans le golfe de Cadix[4] de même que 16 autres cargos du convoi espagnol, désarmés et prêts à partir pour les Antilles. Ces cargos firent immédiatement voile vers Puerto Real pour y trouver refuge.

Juan Portocarrero et Alonso de Bazán (en) jetèrent l'ancre à l'avant des galéasses espagnoles, avec l'intention de barrer la route de la baie à la flotte anglo-néerlandaise.

Le dimanche à 2 heures du matin, on pouvait voir la flotte anglo-néerlandaise depuis Cadix, mais celle-ci ne pouvait progresser à cause du mauvais temps[9]. À 5 heures du matin, les deux flottes lancèrent un intense tir de barrage. Pourtant, au bout de deux heures, la flotte espagnole, supérieure en nombre, dut battre en retraite : déjà, deux galions espagnols, le San Andrés et le San Mateo venaient d'être capturés, tandis que le San Felipe et le Santo Tomás se sabordaient pour ne pas tomber aux mains de l'ennemi. Les navires espagnols gagnèrent la baie à 8 heures du matin[10].

À midi, les renforts envoyés de Vejer de la Frontera, Jerez, Arcos, Medina-Sidonia, Puerto Real et Chiclana par le duc de Medina-Sidonia, Alonso Pérez de Guzmán, arrivèrent à Cadix. Pour la plupart, c'étaient des soldats novices et mal équipés. Ces contingents de renforts furent rejoints par 5000 hommes déployés entre Santa Catalina et San Felipe.

Le débarquement

À 14 heures, moins de 200 soldats anglais débarquaient à El Puntal ; ils firent feu sur les troupes espagnoles, dépourvues d'officier, commises à la défense de la place. Il n’était pas encore 17 heures que le contingent anglais s'était emparé de la ville, tandis que le reste du corps expéditionnaire marchait vers le pont Zuazo (es) à San Fernando. Au cours des escarmouches qui eurent lieu sous les remparts de la cité, chaque camp perdit 25 hommes[5]. Le fort San Felipe se rendit le lendemain.

Cette faible résistance s'explique par la mauvais état de l'artillerie, le manque de munitions, l’impréparation de l'armée espagnole et la mauvaise organisation du commandement espagnol[4]. La tactique défensive fut entièrement improvisée par le capitaine Pedro de Guía et le corrégidor Antonio Girón à Cadix, et le duc de Medina-Sidonia à Jerez ; car comme on put l'écrire par la suite : « ...le désordre, selon le désir de Notre Seigneur, avait causé la perte de notre cité, car tous commandaient et nul n'obéissait, et c'est ainsi qu'ils furent perdus : pour n'avoir ni bras ni tête. »[10]

La mise à sac de Cadix

Maîtres de la place, les Anglais et les Néerlandais entreprirent le pillage de la cité, épargnant toutefois la vie des citadins qui ne s'opposaient pas à eux : selon Lope de Valenzuela[4], ils traitèrent les gens convenablement et respectèrent particulièrement les femmes.

Avant que les Anglais puissent s'emparer de la flotte réfugiée à Puerto Real, Alonso Pérez de Guzmán el Bueno y Zúñiga, duc de Medina-Sidonia, donna l'ordre du sabordage. 32 navires, y compris les galéasses de l'armada et les galions de Nouvelle-Espagne, furent incendiés[5].

Le lendemain (), les autorités civiles et ecclésiastiques de Cadix libérèrent 51 détenus anglais et payèrent à l'armée ennemie une rançon de 120 000 ducats pour permettre aux bourgeois de quitter Cadix. Ces gaditanos gagnèrent d'abord le pont Zuazo avec ce qu'ils pouvaient porter sur eux. Pour s'assurer du paiement de la rançon, quelques notables, parmi lesquels le président de la Casa de Contratación, le maire et ses échevins, enfin les prélats, furent remis comme otages.

La bataille du golfe de Cadix par Aert Anthonisz. (nl)

Le comte d'Essex, Francis Vere et les commandants néerlandais entendaient faire de Cadix une place-forte anglaise, qui permettrait l’approvisionnement pour de futures opérations. Mais cela semble avoir été contraire aux vœux de l'amiral Howard et des autres responsables anglais, qui y voyaient une entreprise dangereuse, contrevenant d'ailleurs aux ordres de la reine[5]. Finalement, le , les Anglais incendièrent la ville et levèrent l'ancre le lendemain, emmenant avec eux les otages faute d'avoir pu récupérer la rançon.

Pillages au Portugal

Sur la route de retour, la flotte anglaise débarqua à Faro et incendia la ville. À hauteur de Lisbonne, les Anglais apprirent l'arrivée imminente des Açores d'un convoi chargé de trésors. Le comte d'Essex proposa de l'attaquer, mais l'amiral Howard s'y opposa, disant que cela outrepassait les ordres. Sur quoi la flotte reprit la route de Plymouth, qu'elle atteignit quelques jours plus tard.

Conséquences

Le sac de Cadix de 1596 fut, avec l'attaque de Drake en 1587 et la défaite de l'Invincible Armada en 1588, l'une des pires défaites espagnoles de cette guerre. Les pertes économiques qu'entraîna l'expédition du comte d'Essex et la perte de la flotte de Nouvelle Espagne, estimées à 5 millions de ducats[10], précipitèrent la banqueroute de la Couronne d'Espagne. Néanmoins, le potentiel de récupération de l’Armada parut clairement avec l’organisation d'une nouvelle flotte qui, en octobre 1596 puis en septembre 1597, pilla les côtes anglaises sous le commandement de Martín de Padilla (en).

La ville de Cadix était sinistrée ; outre la perte de ses églises et de ses hôpitaux, 290 des 1 303 maisons avaient disparu dans les flammes[4]. Après le départ des Anglo-néerlandais, les autorités espagnoles envisagèrent de fortifier la ville, ou de la démanteler pour l'implanter sur le site plus favorable de Puerto de Santa María. Les ingénieurs militaires Luis Bravo de Laguna, Tiburzio Spannocchi, Peleazzo Fratín et Cristóbal de Rojas (en) présentèrent chacun leur projet[10]. Finalement, on adopta le projet de Cristóbal de Rojas, qui fut chargé de la construction des fortifications en 1598. Le roi Philippe II réétala sur dix années les impôts des bourgeois. Tous les autres raids ultérieurs entrepris sur Cadix seront des échecs.

Les otages ne seront rendus qu'en [11], après la mort de la reine Elizabeth et l'accession au trône de Jacques Ier d'Angleterre. L’année suivante, l’Espagne et l’Angleterre mirent un terme aux hostilités par le traité de Londres (1604).

Postérité

  • L’expédition de Cadix de 1596 avait été consignée par l'historien Richard Hakluyt dans son ouvrage The Principal Navigations, Voyages, Traffiques and Discoveries of the English Nation ; elle aurait été supprimée des premières éditions sur ordre d’Élisabeth Ire, peut-être par suite de la disgrâce du duc d’Essex[12].
  • Le raid sur Cadix, au cours duquel l'armée anglaise s'empara d'une importante cargaison de sherry (vino de Jerez), aurait contribué à propager la consommation de cet alcool en Angleterre.
  • Miguel de Cervantes a consacré un sonnet satirique à l'arrivée de l'armée du duc de Sidonia-Medina et du capitaine Becerra juste après que le contingent anglais eut repris la mer[13].
  • C'est au cours de cette bataille que, selon des témoins oculaires, le comte d’Essex monta à l'assaut des remparts en s'agrippant d'une seule main.

Notes et références

  1. nouveau style
  2. William Camden: Annales.
  3. Thomas Birch: Memoirs of the Reign of Queen Elizabeth, contiene la relación de los oficiales ingleses participantes en la expedición, extraída de entre los documentos de Francis Bacon.
  4. Documentos relativos a la toma y saco de Cádiz por los ingleses, pp. 205–435, de la Real Academia de la Historia.
  5. John Lothrop Motley: History of the United Netherlands.
  6. Pieter, « Johan van Wassenaar-Duivenvoorde Heer van Warmond (1547-1610) » West-Europese adel » Généalogie Online », sur Généalogie Online (consulté le )
  7. Siglo XVII.
  8. D'après Coll., Recopilación de Leyes de las Indias, vol. IX (lire en ligne), « XXX ».
  9. Relato del capitán Price
  10. Pedro de Abreu: Historia del saqueo de Cádiz por los ingleses en 1596, écrite peu après ces événements, fut censurée à l'époque à cause des vertes critiques qu'on peut y lire contre la défense espagnole. Elle ne sera imprimée qu'en 1866.
  11. Fernando de la Sierpe: Los nobles españoles rehenes del conde de Essex.
  12. The Principal Navigations, Voyages, Traffiques and Discoveries of the English Nation
  13. «A la entrada del duque de Medina en Cádiz».
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