Odilon Redon

Odilon Redon, pseudonyme de Bertrand Redon, né le à Bordeaux et mort le à Paris, est un peintre et graveur symboliste français.

Pour les articles homonymes, voir Redon (homonymie).

Ne doit pas être confondu avec Odile Redon.

Son art explore les aspects de la pensée, la part sombre et ésotérique de l'âme humaine, empreinte des mécanismes du rêve.

Biographie

Jeunesse et formation

Odilon Redon naît le 20 avril 1840 à Bordeaux sous le nom de Bertrand Jean Redon[1],[2]. Il est le fils de Bertrand Redon et d'Odile, une jeune créole d’origine française née à La Nouvelle-Orléans, qui a épousé Bertrand Redon aux États-Unis alors qu'elle n'était âgée que de 14 ans[1],[3]. Le couple revient en France cinq ou six ans plus tard après avoir donné naissance à Ernest Redon, frère musicien d'Odilon Redon[4],[1].

Odilon Redon est le deuxième dans un fratrie de cinq enfants : il a son grand frère Ernest, plus âgé de quatre ans, une petite sœur, Marie, et deux petits frères, Léo et Gaston qui sont plus jeunes de respectivement quatre, dix et douze ans[2].

De nature fragile, il est confié à une nourrice puis à son oncle, à la campagne[2]. Il passe son enfance entre Bordeaux et le domaine de Peyrelebade, près de Listrac-Médoc, une propriété viticole achetée par son père quand il était encore en Louisiane[2]. C’est là, vers six ans, « en plein isolement de la campagne », que les fusains voient le jour, dans cette nature pleine de clair-obscur et de nuances propres à éveiller chez le jeune garçon ce monde étrange et fantasmagorique, ce sentiment subjectif qui est l'essence même de son œuvre, et qui est encore aujourd'hui une énigme[4]. Il mène une vie sereine et religieuse. Ses parents l’emmènent en pèlerinage à la Basilique Notre-Dame de Verdelais pour guérir son épilepsie dont il est atteint depuis ses quatre ans[5].

À sept ans, une vieille bonne le mène à Paris pour quelques mois, il découvre les musées[2]. Il reste devant les toiles, silencieux et sous le charme. Les tableaux figurant des drames frappent l’esprit de l'enfant. Il guérit en 1850. Un an plus tard il revient vivre à Bordeaux avec ses parents. Il est scolarisé à Bordeaux à l'âge de 10 ans, il suit des cours de violon et de piano et obtient un prix de dessin l'année suivante[2]. Il fait sa Première Communion en 1852.

Il décide d'être artiste, sa famille y consent, il continue ses études et prend des leçons de dessin et d’aquarelle à partir de 1855 avec son premier maître, Stanislas Gorin, élève d’Eugène Isabey. Il découvre Millet, Corot, Gustave Moreau[2].

Sous l'influence de son père, qui l’envoie à Paris en 1857, il tente des études d'architecture à contre-cœur[2]. Il partage dès lors sa vie entre Bordeaux et Paris[2]. À Bordeaux, il se lie d’amitié avec le botaniste Armand Clavaud, de douze ans son ainé, qui l'initie aux sciences et à la littérature[6]. Grâce à lui, il se passionne pour Darwin et Lamarck, pour les recherches de Pasteur, lit Les Fleurs du mal de Baudelaire, dont il illustrera certains poèmes, Gustave Flaubert, Edgar Allan Poe et la poésie hindoue[2].

À l'âge de 18 ans, arrivé au terme de ses études, son père l'invite à préparer le concours des Beaux-Arts pour devenir architecte[7].

Redon pressent son échec à ce concours dont il n'a pas voulu et ne dissimule pas son envie de devenir peintre ; il échoue donc au concours en 1862[2],[7].

À Paris, il entre dans l’atelier de Jean-Léon Gérôme, mais les relations entre le maître et l'élève sont difficiles[2].

À Bordeaux, très lié avec Rodolphe Bresdin qui lui apprend la gravure, il commence sous la direction de cet artiste  dont l’art onirique est libre de tout formalisme , une série de onze eau-forte : Le Gué, tirées en 1866, dans une inspiration orientaliste et romantique venue de Delacroix qu’il connaît de vue.

« Aux confins du monde imperceptible »

Odilon Redon, Mon portrait (1867), huile sur bois, Paris, musée d'Orsay.

Redon participe comme simple soldat aux combats sur la Loire pendant la guerre de 1870. Après la guerre, il s’installe à Montparnasse, jusqu'en 1877, mais l'été, il retourne à Peyrelebade et passe l’automne en Bretagne. Il fréquente le salon littéraire et musical de madame de Rayssac, rencontre Fantin-Latour, Paul Chenavard, le musicien Ernest Chausson. Il séjourne à Barbizon pour y étudier les arbres et les sous-bois. En 1878, il voyage pour la première fois en Belgique et en Hollande. L'année suivante, il est remarqué pour son premier album de lithographies, intitulé Dans le rêve  il fait de la « lithographie de jet » , les rêves, la descente dans l'inconscient, lui permettent de révéler les sources de son inspiration et de décrire son monde personnel voué à l'exploration de l’imaginaire.

Le 1er mai 1880 il épouse à Paris Camille Falte, née en 1852 et décédée en 1923, qui est originaire de l’île Bourbon (aujourd’hui l’île de La Réunion). Elle joue un rôle très important dans son travail en le soutenant au quotidien et en lui assurant une stabilité.

En 1884, Joris-Karl Huysmans publie À rebours, avec un passage consacré à Odilon Redon.

Il y a une forte scission entre le début de son œuvre et la fin. Pendant la première moitié de sa vie, il est le peintre du noir, et ne cesse d'utiliser cette teinte. Son passage à la couleur correspond à la naissance de son premier fils. Après n'avoir jamais utilisé la couleur, il va à la fois en faire un usage très complexe, mais aussi créer des tableaux les plus colorés qui soient. L'artiste qualifiera ce passage à une peinture entièrement colorée de « déclic ».

En 1886, Odilon Redon participe à la huitième et dernière exposition des impressionnistes[8].

Les yeux clos, 1890, huile sur toile, 44 x 36cm, musée d'Orsay

Le 11 mai 1886, son premier fils, Jean, naît. Cependant il décède six mois et demi plus tard. Son second fils, Arï, naît en 1889.

Entre 1870 et 1895, il utilise principalement le fusain et la lithographie pour créer des dessins aux sujets oniriques qui appelle ses « noirs ». Les années 1890 et le début du siècle sont une période de transformation, de mutation, il abandonne ses « noirs » et commence à utiliser le pastel et l'huile, et la couleur domine les œuvres du reste de sa vie. Il réalise Ève, son premier nu féminin d’après modèle. Il représente des textes par la peintures, que ce soit les siens comme Les Yeux clos ou Les Origines mais aussi ceux d’autres auteurs de l’univers fantastique notamment Edgar Allan Poe. En 1899, Maurice Denis le présente au groupe des nabis et le peint, en 1900, dans l’Hommage à Cézanne, debout devant une toile de Cézanne, entouré de Pierre Bonnard, Édouard Vuillard, Ker-Xavier Roussel, Paul Sérusier, André Mellerio et Ambroise Vollard. Avec Maurice Denis, il exécute des peintures décoratives pour son ami le compositeur Ernest Chausson, dans son hôtel particulier du 22, boulevard de Courcelles, ainsi que dans le château de Domecy-sur-le-Vault, en Bourgogne, de son ami et mécène, Robert de Domecy, avec qui il a voyagé en Italie.

Autoportrait vers 1880, musée d'Orsay.

Redon travaille avec Mallarmé et expose à la galerie Durand-Ruel en 1900.

En 1900-1901 Redon peint des grandes surfaces en réalisant des panneaux grâce à une commande du baron Robert Domecy qui vient de faire construire un château dans l’Yonne. Il fait part de son travail à son ami Albert Bonger en écrivant : « Je couvre les murs d’une salle à manger des fleurs, fleurs de rêve, de la faune imaginaire ; le tout par de grands panneaux, traités avec un peu de tout, de la détrempe, l’aoline, l’huile, le pastel même dont j’ai un bon résultat ce moment-ci, un pastel géant. »

En 1901, il participe au salon de la Libre Esthétique à Bruxelles et au salon de la Société nationale des beaux-arts à Paris. Son ami d’enfance, le peintre Charles Lacoste, l’introduit en 1903 auprès de Gabriel Frizeau, mécène bordelais passionné d'art et de belles-lettres. La légion d'honneur lui est attribuée et, en 1904, une salle lui est entièrement consacrée au Salon d'automne avec soixante-deux œuvres.

Il crée en 1902 le décor du salon de musique de l’hôtel parisien de la veuve d’Ernest Chausson décédé en 1899.

Redon est apprécié et soutenu par des artistes et des intellectuels. En 1907 Marius-Ary Leblond publie dans la Revue illustrée  « Odilon Redon, le merveilleux dans la peinture ». Marius-Ary Leblond est un patronyme derrière lequel deux cousins : Georges Athénas qui correspond à Marius Leblond et Aimé Merlo qui est Ary Leblond. Originaires de l’île de la Réunion, il se sont installés à Paris dans les années 1890 et écrivent des romans et essais faisant écho au colonialisme. Redon aurait fait appel aux Leblond pour les inciter à écrire un article sur lui. Odilon Redon a donné un tournant différent à son art en explorant les thématiques de la nature et des couleurs. L’article de Marius-Ary Leblond va exprimer cette évolution artistique.  Ils la décrivent en ces termes «  Redon se lassa bientôt de cette sorte d’enfer spiralant et noir où il s’était enfermé […] il éprouva le besoin de la lumière et monta vers la couleur comme vers un paradis ».

En 1908, Odilon voyage à Venise, en Italie avec sa femme, son fils et Arthur Fontaine, il réalise ses premiers cartons de tapisserie pour la manufacture des Gobelins à la demande de Gustave Geffroy.

Il passe l'été à Bièvres (Essonne) à la villa Juliette qu'il loue, n'ayant pu la racheter, après le décès de Juliette Dodu, la demi-sœur de son épouse[9].

André Mellerio, en 1913, publie un catalogue de ses eau-forte et lithographies[10]. La même année, l'Armory Show présente quarante de ses œuvres sur le continent américain à New York, dans le cadre de l'International Exhibition of Modern Art, puis à Chicago et Boston.

Dans À soi-même, une intéressante autobiographie publiée de son vivant, il évoque ses rapports avec le milieu artistique et les ambitions artistiques et spirituelles de son époque.

Il meurt le en son domicile au 129 avenue de Wagram dans le 17e arrondissement de Paris[11] ; son fils Ari, mobilisé, n’a pu arriver à temps du front. Une huile sur toile, La Vierge, reste inachevée sur son chevalet[12]. Il est inhumé dans le petit cimetière de Bièvres, l’« âme du roi des mondes imaginaires » repose là sous une pierre tombale régulièrement fleurie.

Sans qu'aucune rétrospective ait été réalisée, en France, sur l'artiste depuis 1956[13], une exposition, labellisée d’intérêt national[14], est organisée durant l'année 2011 avec les partenariats de la Réunion des musées nationaux, le musée d'Orsay, le musée Fabre (Montpellier), le concours du département des estampes et de la photographie de la Bibliothèque nationale de France et l'abbaye de Fontfroide (Aude)[13],[15],[16]. Cette exposition a été présentée des mois de mars à juin aux Galeries nationales du Grand Palais de Paris, mettant en avant le passage du noir profond aux teintes colorées et lumineuses[17], puis des mois de juillet à octobre au musée Fabre de Montpellier[13].

Redon et la musique

Redon avait été formé très tôt à la musique, grâce à son frère Ernest. Les chants sacrés exercent également une influence profonde sur son adolescence ; la joie des chants sacrés « [lui] révélait alors un infini sans mélange, découvert comme un absolu réel, le contact même avec l'au-delà ». Il se décrit lui-même comme « fidèle écouteur aux concerts » et il ajoute : « […] Jamais je n'ai résisté aux attirances que je sentais venir des autres arts[18] ». Bien entendu, Redon suit avec attention l'évolution du wagnérisme et l'orientation de la Revue wagnérienne, dans laquelle Théodore de Wyzewa écrit notamment un article, dans le numéro de mai 1886, sous le titre « Art wagnérien : la peinture[19] ».

Ses maîtres les plus chers furent Mozart, Beethoven et surtout Schumann, qui avait été le dieu de sa jeunesse, écrit Roseline Bacou. Vers 1904, il exécute son Hommage à Schumann (pastel). En 1911, peignant le panneau La Nuit, dans la bibliothèque de l'abbaye de Fontfroide, chez ses amis Gustave Fayet et son épouse, il évoque (à droite) le visage de Robert Schumann de même que, sous forme de feux follets, ceux de Déodat de Séverac et de Ricardo Viñes[20].

Œuvres

Gravures et dessins

Odilon Redon a produit vingt-sept eau-forte, trois pointes sèches, ainsi que cent quatre-vingt-dix-sept lithographies, sans compter les neuf dessins reproduits dans Les Fleurs du mal chez Deman, à Bruxelles, en 1890[21].

Contrairement à ce qu'écrit son biographe André Mellerio[22], les premières productions gravées de Redon remonteraient à 1865, et non à 1861. Depuis 1863, il travaille à Bordeaux aux côtés du graveur Rodolphe Bresdin dont il utilise la presse à bras, mais sans doute n'est-il pas emballé par la technique de la plume sur pierre employée par ce dernier. Par la suite, s'il est en contact avec l'imprimeur Auguste Delâtre, qui produit Le Gué (avec petits cavaliers), l'essentiel des premières eaux-fortes est tiré à Bordeaux. Intitulée Paysage, l'une d'entre elles est présentée au Salon de 1867[21].

En 1874, il s'installe définitivement à Paris et produit moins de dix eaux-fortes jusqu'en 1893, abandonnant cette technique au profit de la pierre lithographique, et sa première composition remonte à 1879. Le marchand d'art Ambroise Vollard se porte acquéreur du cuivre de Perversité (1891) mais ne l'insère pas dans ses albums. Redon chercha à transcrire ses dessins et fusains sur la pierre et ce fut Henri Fantin-Latour qui lui montra l'utilisation du crayon gras, seul capable de rendre le noir intense de ses traits originaux. En 1879, la série des dix planches intitulée Dans le rêve, tirée chez l'imprimeur parisien Lemercier et auquel il fut fidèle durant presque dix ans, introduit à son style si particulier, alliant mystères et choses du quotidien[21].

Vollard et Redon vont travailler ensemble à plusieurs reprises, servis par le talent de tireur d'Auguste Clot : ainsi, au printemps 1897, Redon s'applique à produire une suite de dessins lithographiés en noir pour l'édition illustrée du Coup de dés, de Stéphane Mallarmé, qui ne vit pas le jour et seules quatre planches purent être conservées[23]. Vollard pousse également Redon à se lancer dans la lithographie en couleurs, mais l'artiste résiste, trouvant difficile de restituer l'éclat de ses fusains sur la pierre[24].

Principales séries et estampes isolées[22]
  • Dans le rêve, dix planches lithographiées en album, Paris, Lemercier (1879), tirage à 25 exemplaires.
  • À Edgar Poe, six lithographie et un frontispice, Paris, Lemercier (1882), tirage à 50 ex.
  • Les Origines, huit lithographies et un frontispice, Paris, Lemercier (1883), tirage à 25 ex.
  • Hommage à Goya, six lithographies, Paris, Lemercier (1885), tirage à 50 ex.
  • La Nuit, dix lithographies, Paris, Lemercier (1886), tirage à 50 ex.
  • L'araignée, elle sourit, les yeux levés, lithographie, Paris, Lemercier (1887) ; fonds musée d'Orsay / département des arts graphiques du musée du Louvre.
  • La Tentation de saint Antoine, dix lithographies tirées chez Becquet, et un frontispice, texte de Gustave Flaubert, Bruxelles, Deman (1888), tiré à 58 ex.
  • À Gustave Flaubert, 2e série pour les Tentations, six lithographie et un frontispice, Paris, Becquet (1889), tiré à 60 ex.

Bibliothèque de l'Abbaye de Fontfroide

A une dizaine de kilomètres de Narbonne, l’abbaye de Fontfroide appartient en 1908 à Gustave Fayet peintre lui aussi et collectionneur notamment des œuvres d’Odilon Redon dont il est l’ami. Redon découvre le lieu à l’automne 1908. Fayet entreprend de grands travaux dans l’abbaye cistercienne qui était vide depuis 1901 et dont la construction originelle remontre au Xe siècle. Il fait appel à Redon pour la décoration en lui commandant en 1910 des panneaux dans l’ancien dortoir des moines qu’il réhabilita en bibliothèque. La pièce est un carré de dix mètres de côtés. Redon réalise deux grands panneaux qui se font face sur les murs latéraux et mesurent de 6,5 mètres de large et 2 mètres de hauteur qu’il divise en trois parties. Un autre panneau d’un mètre de large sera fait au-dessus de la porte. Il est complètement libre de peindre ce qu’il souhaite. De retour à Paris, il réalise un premiers grand panneau Le Jour qu’il installe à la fin de l’été 1910. Il se concentre ensuite le second panneau, La Nuit, qu’il réalise entièrement à Paris et qui n'est installé à l’abbaye qu’à l’automne 1911. Dans une lettre à son ami André Bonger, il relate les travaux, leur avancement et l’installation : « Je vous écris de sous la voûte de la grande salle que je décore, dans le vieux cloître. J'ai emporté le travail pour le continuer sur place. Ça m'intéresse énormément. […] J'ai risqué la représentation (toujours indéterminée) d'un quadrige conduit par un ou deux êtres ailés, sorte de fleurs - au milieu des montagnes et de divers gris lumineux. Au mur de face est un autre panneau que j'esquisse en noir, et avec la permission de laisser au dévergondage toute la fantaisie imaginaire possible. Le noir sur grande surface est terrible. Il ne faut pas en abuser, je le vois. On ne sait, on n'apprend qu'au cours d'une exécution. C'est la première fois que je me tourmente en face de pareille surface […]. Je conduis la chose, entouré d'une société d'invités fort vivants, enjoués, sous le soleil gai et lumineux du Midi. Belle région, non loin de celle que représenta Cézanne, et aussi Van Gogh. Je la vois avec des yeux autres, naturellement. »[25]

Les deux panneaux qui s’opposent spatialement et thématiquement peuvent être considérés comme une synthèse de l’art d’Odilon Redon, des deux époques et tendances artistiques qu’il a exploitées : la couleur dans la seconde partie de sa carrière et les noirs de sa jeunesse.

Dans Le Jour on remarque un jaune éclatant qui domine mais aussi l’abondance de fleurs excessivement présentes sur les parties latérales. Ces deux éléments sont caractéristiques de l’art de Redon dans ses œuvres de maturité où il explore la couleur. On observe une référence à Delacroix avec le motif du quadrige qui rappelle le plafond de la galerie d’Apollon au Louvre. On retrouve ce motif dans les tableaux de fin de carrière de Redon.

La Nuit rappelle ses premières œuvres avec les formes qui étaient très présentes dans les années 1870-1880 dans ses Noirs. On remarque un ange déchu, des têtes ailées, des femmes voilées… Cependant on sent une maturité par rapport à ses travaux de jeunesse. L’ensemble paraît plus doux et beaucoup moins inquiétant que ces créatures d’antan. Sur ce panneau il peint de manière subtile les propriétaires de l’abbaye et leurs enfants : Madeleine Fayet, épouse de Gustave Fayet, et leur fille Simone sont représentées par deux femmes voilées. Les feu-follets présents à droite de l’arbre reprennent les traits de Gustave Fayet et de ses deux fils, Léon et Antoine. Redon peint également les traits de sa femme Camille dans un des feu-follets. On retrouve par ailleurs d’autres figures artistiques : le compositeur Déodat de Séverac, le pianiste Ricardo Viñes ou Robert Schumann. Ceux personnalités font écho à l’importante influence de la musique chez Redon. Cela paraît peu étonnant qu’il ait peint ses figures dans son panneau La Nuit puisqu’il dit lui-même que "la musique est un art nocturne, l'art du rêve"[25].

L’onirisme et le mystère de ses œuvres dans l’entièreté de sa carrière se retrouvent dans les deux panneaux. Ils s’harmonisent alors avec la bibliothèque qui abrite des ouvrages traitant d'occultisme et d'ésotérisme, domaines qui passionnent les intellectuels français à la fin du XIXe siècle.

Le dernier panneau au-dessus de la porte se nomme Le Silence. Ainsi le ton est donné quand on entre dans cette bibliothèque qui se niche dans une ancienne abbaye. Un personnage mystérieux avec un visage sombre posant son index sur ses lèvres est peint au milieu de halos dorés rappelant la fonction de cette pièce. Le contraste entre ce personnage sombre et les halos dorés rappelle les deux autres panneaux thématiquement et visuellement opposés par le traitement de la couleur de chacun d'eux[25].

Peinture

La Naissance de Vénus (1912), New York, Museum of Modern Art.
Algérie
Canada
Etats Unis
France
Japon
  • Conversation mystique, huile sur toile, Tokyo, Musée Artizon.
  • Offrande, huile sur carton, Tokyo, Musée Artizon.
Pays-Bas
Royaume Uni


Publications

  • « Autobiographie », dans Van onzen Tijd, De Katholieke Illustratie, 's-Hertogenbosch, 1909.
  • À soi-même, autobiographie, introduction de Jacques Morland, Paris, éditions Henri Floury, 1922 ; réédition chez José Corti, [1961-1989].
  • Lettres d'Odilon Redon, 1878-1916, publiées par sa famille, préface de Marius-Ary Leblond, Paris et Bruxelles, G. Van Oest, 1923.
  • Lettres inédites d'Odilon Redon à Bonger, Jourdain, Viñes…, établie et présentée par Suzy Lévy, Paris, José Corti, 1987.
  • Écrits, édition critique établie et présentée par Claire Moran, collection MHRA Critical Texts, Londres, Modern Humanities Research Association, 2005.
  • Il rêve et autres contes, présentation par Alexandra Strauss, Paris, Libretto, 2016, (ISBN 9782369142652) — comprend « Un séjour dans le Pays basque », « Une histoire incompréhensible », « Nuit de fièvre », « Il rêve », « Le Cri », « Perversité », « Le Fakir », « 1870 Décembre » et « Le Récit de Marthe la folle »[37].

Notes et références

  1. Lagrande et al. 2011, p. 20.
  2. « Odilon Redon », sur www.grandpalais.fr (consulté le )
  3. « Pégase, vers 1895-1900 | Musée Guggenheim Bilbao », sur Guggenheim Bilbao (consulté le )
  4. Jean-Luc Destruhaut, La nature silencieuse. Paysages d’Odilon Redon Exposition à la Galerie des Beaux-Arts 9 décembre 2016 – 26 mars 2017 (dossier pédagogique), (lire en ligne)
  5. Robert Coustet, « Odilon Redon miraculé », Revue de l'Art, vol. 100, no 1, , p. 84–85 (DOI 10.3406/rvart.1993.348043, lire en ligne, consulté le )
  6. Lagrande et al. 2011, p. 21-22.
  7. Lagrande et al. 2011, p. 22.
  8. Paul Signac, D'Eugène Delacroix au néo-impressionnisme, Paris, Hermann, , p. 147.
  9. Odilon Redon, publié sur le site de la mairie de Bièvres (consulté le 13 juillet 2018).
  10. Odilon Redon / par André Mellerio sur Gallica
  11. Archives de Paris 17e, acte de décès no 2065, année 1916 (page 5/31)
  12. « Odilon Redon : du noir fantastique à la couleur sereine », L'Express, (lire en ligne).
  13. « Odilon Redon, le prince du rêve », Harmonie, Imp. Chirripo, Montpellier Agglomération, no 285, , p. 40 sur 48 (présentation en ligne, lire en ligne [PDF], consulté le ) (consulté le 13 juillet 2018).
  14. Seize expositions ont reçu le label d'exposition d'intérêt national, publié le 2 mars 2011 sur le site du ministère de la culture (consulté le 13 juillet 2018).
  15. Odilon Redon : Prince du Rêve, publié sur le site RMN - Grand Palais (consulté le 13 juillet 2018).
  16. L’Abbaye de Fontfroide, l’interactivité au service de l’Histoire, publié le 15 juillet 2016 par Alexandre Plateaux, sur le site Culturecom (consulté le 13 juillet 2018).
  17. La palette enchantée, présentation de l'exposition au Grand Palais, publié le 26 avril 2011 par Marion Point, sur le site de L'Intermède (consulté le 13 juillet 2018).
  18. Cité dans Roseline Bacou, Odilon Redon, Genève, édition Pierre Cailler.
  19. Redon donne au no 7, publié en août 1885, un beau frontispice : Brunhilde.
  20. Cf. Mario d'Angelo (coord.), La Musique à la Belle Époque. Autour du foyer artistique de Gustave Fayet (Béziers, Paris, Fontfroide), Narbonne, MAGFF, 2010.
  21. « Redon, Odilon », dans Janine Bailly-Herzberg, Dictionnaire de l'estampe en France (1830-1950), Paris, Arts et métiers graphiques / Flammarion, 1985, p. 274-277.
  22. « Catalogue de l'œuvre gravé », dans Odilon Redon. Peintre, dessinateur et graveur, Paris, Henri Floury, 1923, p. 177-194, sur archive.org, en ligne.
  23. Voir trois planches dans la notice du catalogue général de la BnF, en ligne.
  24. André Mellerio, La Lithographie originale en couleurs, Paris, Éditions de L'Estampe et l'Affiche, 1898.
  25. « Musée d'Orsay: Autour de Redon », sur www.musee-orsay.fr (consulté le )
  26. « Le Corbeau / National Gallery of Canada », sur https://www.gallery.ca (consulté le ).
  27. (en) « Dallas Museum of art - The Port of Morgat », sur https://www.dma.org (consulté le ).
  28. (en) « Redon, Odilon : breton village c. 1890 », sur https://www.nga.gov (consulté le ).
  29. (en) « Initation to Study - Two Young Ladies », sur https://www.dma.org (consulté le ).
  30. « Roland à Roncevaux », sur http://collections-musees.bordeaux.fr.
  31. « L'Enfant devant l'aurore boréale : Odilon Redon », sur http://mba-collections.dijon.fr (consulté le ).
  32. « Lumière sur ... Odilon Redon », sur https://beaux-arts.dijon.fr (consulté le ).
  33. « Musée d'Orsay : notice d'œuvre : Odilon Redon, portrait de l'artiste », sur http://www.musee-orsay.fr (consulté le ).
  34. « Odilon Redon : les yeux clos (1890) », sur http://www.musee-orsay.fr (consulté le ).
  35. « Notice Vieillard ailé barbu », sur www.musee-orsay.fr.
  36. (en) « Ophelia among the Flowers », sur https://www.nationalgallery.org.uk (consulté le ).
  37. Maria Cláudia Rodrigues Alves, « Paratextos do insólito: o diálogo entre a literatura e a pintura », communication au XIIe colloque international de l'Associação Brasileira de Literatura Comparada, 18-22 juillet 2011 (lire en ligne).

Annexes

Bibliographie

  • Julien Teyssandier, L'Oeil pâle d'Odilon Redon, Paris, Pierre-Guillaume de Roux, , 197 p. (ISBN 978-2-36371-249-3)
  • Sophie Barthélémy, Sandra Buratti-Hasan, Guillaume Ambroise et Sophie Kervran, Nature silencieuse. Paysages d'Odilon Redon, Snoeck, coll. « Catalogue de musée », , 264 p. (ISBN 978-94-6161-344-8).
  • [Lagrange et al. 2001] Marion Lagrange, Pierre Pinchon, Laurent Houssais, Emmanuelle Amiot-Saulnier, Ingrid Junillon et Michel Hilaire, « Dossier Odilon Redon, Prince du rêve », Dossier de l'art, no 183, , p. 18-64
  • Frédéric Canovas, L'Écriture rêvée, Paris, L'Harmattan, coll. « Espaces littéraires », 2000, 328 p. (ISBN 978-2738497895).
  • Odilon Redon : Catalogue raisonné de l'œuvre peint et dessiné, vol. 3 : Fleurs et paysages, Wildenstein Institute, (lire en ligne).
  • Grand Palais (Paris), "Odilon Redon", [lire en ligne]

Filmographie

Liens externes

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