Médium (spiritisme)

Un médium est une personne qui serait sensible à des influences ou à des phénomènes non perceptibles par les cinq sens.

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La médium Eusapia lors d'une expérience dirigée par Albert de Rochas d'Aiglun en 1894.

Des suppositions avancent que les médiums percevraient les manifestations de l'au-delà, ou bien des esprits. D'autres suppositions suggèrent que les médiums percevraient intuitivement des informations lors d'un changement de leur état de conscience. La communication en elle-même peut prendre plusieurs formes, comme la manipulation d'objets (planche ouija, télékinésie), la manipulation de personne (l'esprit communiquerait en prenant le contrôle du médium), les apparitions visuelles ou sonores. La communication avec les esprits permettrait d'obtenir des informations sur le passé, le présent ou le futur, ainsi que sur la vie après la mort.

L'idée de médiumnité est ancienne. De multiples activités, religions et cultures prétendent utiliser les capacités des médiums dont les facultés supposées se déclinent de diverses manières. Lors de l'âge d'or du spiritisme au XIXe siècle, un grand nombre de médiums se sont avérés être des charlatans. L'étude scientifique de la médiumnité a généralement abouti à l'absence de phénomène.

Définition et étymologie

Le substantif « médium », emprunté à la langue anglaise, apparaît en France au milieu du XIXe siècle, après l'arrivée de missionnaires du spiritualisme moderne anglo-saxon[1]. Il passa dans le langage courant avec la diffusion du Le Livre des médiums, publié par Allan Kardec en 1861. Dans cet ouvrage, le mot médium (du latin, medium, milieu intermédiaire) désigne une « personne pouvant servir d'intermédiaire entre les Esprits et les hommes »[2] et la médiumnité désigne l'ensemble des facultés spécifiques aux médiums. Bien que représentés dans de multiples activités, les médiums sont généralement associés au mouvement spirite[3] ou au domaine du surnaturel[4].

Histoire et évolutions

La capacité à communiquer avec les esprits est une idée ancienne. Durant l'Antiquité, les vestales romaines et les sibylles grecques étaient supposément dotées de cette capacité. On peut aussi citer l’Égérie de Numa, les songes de Scipion[Lequel ?] et les voix de Jeanne d'Arc comme autres exemples historiques.

Du magnétisme à la médiumnité

Avant la période de la Révolution, la France connaît un véritable engouement pour les phénomènes du magnétisme animal étudiés par Franz-Anton Mesmer. Des individus exposés à ces phénomènes entrent dans des états de conscience comparables à ceux que l'on observera plus tard chez les médiums. En 1811, le marquis de Puységur considère notamment que les effets du sommeil hypnotique s'apparentent à du « somnambulisme provoqué »[5]. Avant l'apparition du terme médium, on utilise le mot de somnambule pour désigner des personnes qui, dans un état hypnotique, attestent d'une sensibilité exceptionnelle ou bien affichent des comportements sans rapport avec leur personnalité habituelle. Les tentatives pour développer les applications scientifiques de l'hypnose et du mesmérisme sont alors supplantées par l'expansion du spiritisme et sa propre définition des médiums, qui seraient les instruments utilisés par les « Esprits » pour se manifester.

La médiumnité a gagné en popularité au cours du XIXe siècle. Les investigations durant cette période ont révélé des fraudes généralisées où les praticiens employaient des techniques utilisées en prestidigitation, la pratique a ensuite perdu sa crédibilité[6],[7]. Un cas notable est celui des sœurs Fox, qui font carrières à la suite d'un nombre de phénomènes inexpliqués dans la maison familiale. Bien plus tard, Margaret Fox a admis que les phénomènes et les séances de médiumnité en découlant étaient des supercheries[8]. Le déclin du mouvement spirite en Europe au milieu du XXe siècle fera progressivement disparaître l'intérêt pour les médiums au profit des voyant(e)s. Les médiums croient essentiellement à la vie éternelle et aux échanges avec les défunts, alors que les voyants annoncent généralement que leurs capacités extra-sensorielles sont des moyens pour répondre aux préoccupations pratiques des clients qui les consultent[5].

Évolution des interprétations

Illustration du livre d'Albert de Rochas d'Aiglun, L'extériorisation de la sensibilité, Paris, 1899.

À la fin du XIXe siècle, les phénomènes médiumniques suscitent des débats entre les scientifiques qui analysent le psychisme comme Charles Richet ou Isabel Briggs Myers. En dehors du mouvement spirite, certains médiums exposent des capacités exceptionnelles telles que la lecture à distance, la vision d'objets cachés ou la précognition[9]. À cette époque, des études académiques tentent de vérifier la réalité de ces facultés et de les comprendre[Note 1].

En France, durant la première moitié du XXe siècle, l'étude des médiums est considérée comme un sujet vulgaire, empreint de superstitions. Cependant, à partir des années 1950, de nombreux ethnologues rendent compte des états modifiés de conscience observés dans d'autres cultures, ainsi que du rôle social des chamanes.

Perceptions actuelles du phénomène

La médium Eusapia lors d'une expérience contrôlée par Alexandre Aksakof en 1892.

Malgré tout, la pratique a continué de nos jours, des fraudes de haut niveau ont été mises au jour au cours des années 2000[10]. Au cours des dernières années, la recherche scientifique a été menée pour vérifier la validité des allégations de médiumnité. Dans une expérience menée par la British Psychological Society, la conclusion a été que les sujets testés n'ont démontré aucune capacité médiumnique.

Dans les pays anglo-saxons, la possibilité de « perceptions extrasensorielles » n'est pas réfutée a priori et les spécialistes préfèrent désormais le terme de channel à celui de médium. En France, à partir des années 1980, une convergence de disciplines scientifiques s'oriente occasionnellement vers les énigmes posées par la médiumnité. Des chercheurs mentionnent la complexité du réel et la nécessité d'en considérer tous les éléments. Leur objectif n'est plus de « faire la preuve » de faits paranormaux, dans un laboratoire qui isole le sujet observé de l'environnement nécessaire à la production de ces faits. Leur démarche consiste plutôt à définir des méthodes d'observation pouvant s'appliquer à des phénomènes non perceptibles par les cinq sens. Ces travaux sont compliqués par le fait que les « états altérés de conscience », partie intégrante de nombreuses cultures, ne le sont plus en Occident[11].

L'étude de ces phénomènes implique au départ l'acceptation d'hypothèses et cette acceptation dépend de la subjectivité de l'observateur[12].

Les signes de la médiumnité

Selon Alain Assailly (Médium ou médiateur, 1959), les médiums auraient des caractéristiques physiologiques distinctives : gonflement de l'abdomen en période prémenstruelle chez la femme, fragilité des vaisseaux capillaires, hyperlaxité des ligaments, développement pileux supérieur à la normale, sensibilité aiguë à l'épigastre. Il leur prête également des caractéristiques psychologiques : insatisfaction sensuelle, affective ou intellectuelle, propension à la mythomanie, troubles du schéma corporel, aisance pour les automatismes. Assailly n'a fourni aucune donnée empirique fiable pour étayer ses affirmations.

Des instituts dédiés aux médiums

Certaines institutions ont pour vocation l'accueil des médiums et le développement de leur médiumnité. Par exemple :

D'autres instituts font passer des tests à des médiums afin de vérifier leurs aptitudes pour ensuite les "certifier" comme d'authentiques médiums. Par exemple :

D'autres instituts analysent la médiumnité pour tenter de développer les connaissances scientifiques sur ce sujet. Par exemple :

Scepticisme scientifique

Les scientifiques qui ont étudié la psychologie anomalistique considèrent que la médiumnité est le résultat de fraudes et de facteurs psychologiques. La recherche en psychologie depuis plus de cent ans a révélé que là où il n'y a pas de fraude, la médiumnité et le spiritualisme peuvent être expliqués par l'hypnose, la pensée magique et la suggestion[23],[24]. La validation subjective joue un rôle déterminant dans ce genre d’activité : les médiums comptent sur la grande motivation de leurs clients pour faire reconnaître comme significatifs des mots, des initiales, des énoncés ou des signes quelconques. Cette validation est tenue comme une preuve d’un contact avec les morts. La transe médiumnique, qui est revendiquée par les spiritualistes pour être causée par des esprits désincarnés parlant par leur intermédiaire, est due à un trouble dissociatif de l'identité du subconscient du médium[25].

Albert Moll était l'un des premiers scientifiques à étudier la psychologie des séances de spiritisme. Selon (Wolffram, 2012) « [Moll] argumente que l'atmosphère hypnotique des salles sombres de séance de spiritisme et l'effet de prestige social et scientifique des expérimentateurs pourrait expliquer pourquoi les personnes apparemment rationnelles accordent du crédit aux phénomènes occultes »[26].

Les médiums peuvent obtenir des informations sur leurs clients de façon détournée, pour se donner l’apparence de transmettre des messages réconfortants venant de l’au-delà, en écoutant secrètement les conversations de leurs clients ou en faisant des recherches dans les annuaires téléphoniques, sur l'internet où dans les journaux avant les séances[27]. Les médiums sont connus pour employer la technique de la lecture à froid et obtiennent des informations sur leurs clients par leur comportement, leurs vêtements, leur posture, et leurs bijoux[28],[29]. Plusieurs militants du scepticisme scientifique, dont Susan Gerbic, déplorent l’exploitation des personne endeuillées par des prétendus mediums et ont prouvés l'utilisation de lecture chaude par ceux-ci.

Les psychologues Leonard Zusne et Warren Jones dans leur livre Anomalistic Psychology: A Study of Magical Thinking (1989) écrivent :

« Les esprits, les contrôles et les guides d'un médium sont les produits de la dynamique psychologique propre au médium. D'une part, ils personnifient les stimulations cachées du médium, d'autre part, ils sont aussi modelés par les attentes du client, l'expérience du médium, le fond culturel et l'air du temps.[30] »

Dans une série d'expériences de fausses séances de spiritisme (Wiseman et coll. 2003) un acteur suggérait à des croyants et des non croyants au paranormal qu'une table entrait en lévitation, alors qu'en fait, elle était restée stationnaire. Après la séance, environ un tiers des participants indiquait à tort que la table avait bougé. Les résultats ont montré un plus grand pourcentage de personnes qui déclaraient que la table avait bougé parmi les croyants au paranormal. Dans une autre expérience, des croyants au paranormal ont aussi rapporté qu'une clochette avait bougé alors qu'elle était restée stationnaire et ont exprimé leur croyance que la fausse séance contenait de véritables phénomènes paranormaux. Ces expériences soutiennent fortement la notion que dans une salle de spiritisme les croyants sont plus suggestibles que les non croyants, ce qui est cohérent avec leur croyance aux phénomènes paranormaux[31].

Médiums célèbres

Médiums comme personnages principaux au cinéma et à la télévision

Au cinéma

À la télévision

Film documentaire

  • Les yeux fermés, réalisation Clémént Dorival et Christophe Pons, production CNRS image, Paris, 2011. Ce documentaire de 59 minutes montre la complicité qui unit les morts aux vivants dans la société islandaise, en suivant les pratiques de deux médiums, Skuli et Maggy[32].

Médiums de littérature

  • La Télégraphiste de Chopin (2019), roman d'Éric Faye

Notes et références

Notes

  1. Albert de Rochas d'Aiglun, L'extériorisation de la sensibilité, Paris, 1899. Albert de Rochas d'Aiglun, L'extériorisation de la motricité, Paris, 1896. Alexandre Aksakof, Animisme et spiritisme, Paris 1906. William Crookes, Nouvelles expériences sur la force psychique, Paris, 1896.

Références

  1. Marion Aubrée (2010), p. 703.
  2. Allan Kardec, p. chapitre XXXII, vocabulaire spirite, 505.
  3. Selon le dictionnaire Hachette (2005), un médium est « une personne qui, selon les spirites, peut communiquer avec les esprits et servir d'intermédiaire entre eux et les humains ».
  4. Selon l'encyclopédie Larousse (2003), un médium est une « Personne capable de percevoir, par des moyens apparemment surnaturels, des éléments de connaissance réels, et dans un sens plus restreint et plus classique, de percevoir les messages des esprits. »
  5. Marion Aubrée (2010), p. 704.
  6. Ruth Brandon. (1983). The Spiritualists: The Passion for the Occult in the Nineteenth and Twentieth Centuries. Alfred E. Knopf. (ISBN 978-0394527406)
  7. Milbourne Christopher. (1979). Search for the Soul. T. Y. Crowell. (ISBN 978-0690017601)
  8. Earl Fornell. (1964). The Unhappy Medium. Austin: University of Texas Press. p. 179
  9. Jean Prieur, L’Europe des médiums et des initiés, éditions Perrin, 1987.
  10. Terence Hines. (2003). Pseudoscience and the Paranormal. Prometheus Books. (ISBN 978-1573929790)
  11. Marion Aubrée (2010), p. 705 et 706.
  12. Marion Aubrée (2010), p. 706.
  13. Site officiel du Collège Arthur Findlay
  14. Site officiel de l'ISM
  15. Site officiel de l'Imagine Spirit Institut
  16. Site officiel de l'ESM
  17. Site officiel
  18. Site officiel de la fondation des médiums spiritualistes
  19. Site officiel
  20. Site officiel et tableau de certification des médiums
  21. « Institut Français de Recherche et d'Expérimentations Spirites », sur IFRES (consulté le )
  22. Site officiel de la Scottich Society of Psychical Research.
  23. David Marks. (2000). The Psychology of the Psychic. Prometheus Books. (ISBN 978-1573927987)
  24. Nicola Holt, Christine Simmonds-Moore, David Luke, Christopher French. (2012). Anomalistic Psychology (Palgrave Insights in Psychology). Palgrave Macmillan. (ISBN 978-0230301504)
  25. Millais Culpin. (1920). Spiritualism and the New Psychology, an Explanation of Spiritualist Phenomena and Beliefs in Terms of Modern Knowledge. Kennelly Press. (ISBN 978-1446056516)
  26. Wolffram, Heather. (2012). ‘Trick’, ‘Manipulation’ and ‘Farce’: Albert Moll’s Critique of Occultism. Medical History 56(2): 277-295.
  27. Ian Rowland. (1998). The full facts book of cold reading. London, England: Ian Roland. (ISBN 978-0955847608)
  28. Brad Clark (2002). Spiritualism. p. 220-226 in Michael Shermer. The Skeptic Encyclopedia of Pseudoscience. ABC-CLIO. (ISBN 978-1576076538)
  29. Jonathan Smith. (2009). Pseudoscience and Extraordinary Claims of the Paranormal: A Critical Thinker's Toolkit. Wiley-Blackwell. p. 141-241. (ISBN 978-1405181228)
  30. Leonard Zusne, Warren H. Jones Anomalistic psychology: a study of magical thinking 1989, p. 221
  31. Wiseman, R., Greening, E., and Smith, M. (2003). Belief in the paranormal and suggestion in the seance room. British Journal of Psychology, 94 (3): 285-297.
  32. Notice au dos de la jaquette du DVD : Les yeux fermés, CNRS Images, Paris, 2011

Annexes

Bibliographie

  • Marion Aubrée (dir.), Dictionnaire des faits religieux, Paris, Presses universitaires de France, , 703-706 p. 
  • Grégory Gutierez et Nicolas Maillard, Les aventuriers de l'esprit : Une histoire de la parapsychologie, Paris, Presses du Châtelet, . 
  • René Louis, Les explorateurs de l'invisible, Paris, Kiron Philippe Lebaud, . 
  • Jean Pierre Girard, Encyclopédie de l'au-delà, Paris, éditions Trajectoire, coll. « Les incontournables », . 
  • Bertrand Méheust, Somnambulisme et médiumnité : Vol. I : Le défi du magnétisme, 620 p. vol. II : Le choc des sciences physiques, Le Plessis-Robinson, Les empêcheurs de penser en rond, . 
  • Allan Kardec, Le Livre des médiums, Paris, Dervy, . 
  • Allan Kardec, Le Livre des Esprits, 1857
  • Allan Kardec, Le Livre des médiums, 1861
  • Robert Amadou, Les Grands Médiums, Denoël, 1957
  • Christophe Colera, Mediums, une forme de chamanisme contemporain, L'Harmattan, (présentation en ligne)

Articles connexes

Liens externes

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