Joseph Déchelette

Joseph Déchelette, né le à Roanne (Loire) et mort pour la France le à Vingré (Aisne), est un archéologue et conservateur de musée français.

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Joseph Déchelette
Archéologue

Joseph Déchelette par Albert Dawant (post-mortem d'après photographie).
Présentation
Naissance
Roanne (Loire)
Décès
Vingré (Aisne)
Nationalité française
Activité de recherche
Autres activités Conservateur du musée des beaux-arts et d'archéologie de Roanne
Hommage Chevalier de la Légion d'honneur

Il s'est particulièrement illustré comme précurseur de la céramologie antique. Il est parmi les premiers à avoir fait la relation entre la culture de La Tène et la civilisation celtique.

Biographie

Famille

Joseph Jean Marie Déchelette est le fils de Benoît Déchelette (1816-1888), industriel, propriétaire de la maison de tissage Déchelette-Despierres, vice-président de la Chambre de commerce de Roanne, et de Charlotte Despierres (1826-1909)[1],[2]. Il est le frère cadet de Louis Déchelette (1848-1920), évêque d'Évreux de 1913 à 1920.

Il se marie le 3 mai 1905 à La Pacaudière avec Jeanne Bonnier (1860-1957).

Carrière

Il fit ses études au collège de Saint-Chamond tenu par les pères maristes puis son service militaire à Saint-Étienne[3]. Joseph Déchelette débuta sa vie active comme représentant de commerce de l'entreprise familiale. Toutefois, la passion de l'archéologie, à laquelle il avait été initié dès son adolescence par son oncle maternel Jacques-Gabriel Bulliot, figure éminente de la Société éduenne des lettres, sciences et arts, prit rapidement le dessus, bien qu'il continuât à travailler pour l'entreprise familiale jusqu'en 1899.

En 1884, il adhère à La Diana, société archéologique et historique sise à Montbrison, qui a pour but de recenser et d'étudier les antiquités et les monuments de la région du Forez, au sud de Roanne. Il devient inspecteur pour le compte de la Société française d'archéologie. En 1899, Joseph Déchelette abandonne définitivement son travail dans l'entreprise de son père pour se consacrer exclusivement à l'archéologie protohistorique.

De 1892 à 1914, il est conservateur du musée des beaux-arts et d'archéologie de Roanne. Ce musée municipal, fondé en 1844, n'était jusqu'alors qu'une accumulation d'objets hétéroclites de diverses périodes stockés dans les combles de l'hôtel de ville[4]. Joseph Déchelette contribue à le transformer en un musée moderne où les œuvres sont documentées et comparées. Les collections sont enrichies par les apports issus des découvertes régionales, des destructions de bâtiments anciens, des dons de collectionneurs et des achats, parfois effectués sur ses propres deniers[4]. A sa mort, Joseph Déchelette lègue à la ville de Roanne ses collections personnelles et sa bibliothèque, ainsi qu'un legs de 100 000 francs-or pour la réalisation d'un nouveau musée[4]. Sa veuve offre à la ville de Roanne l'ancien hôtel de François de Valence de Minardière (1764-1829), que Joseph Déchelette a acheté en 1896, dont elle continue à occuper le rez-de-chaussée jusqu'à sa mort en 1957. Le nouveau musée y est installé en 1923 et est rebaptisé en son honneur musée des beaux-arts et d'archéologie Joseph-Déchelette.

Travaux en archéologie

Le menhir géant de Kerdeff à Carnac, Morbihan
(Joseph Déchelette, vers 1908)

De février à avril 1893, Joseph Déchelette fait un voyage en Égypte dont il revient chargé de la momie de Nesyamon, supposée morte à l'âge de quinze ans et qui, de son vivant, chantait à Thèbes pour le dieu Amon.

Joseph Déchelette est le premier à avoir mis en évidence une unité culturelle au nord des Alpes vers la fin de l'âge du fer en comparant les résultats des fouilles archéologiques de quatre oppida : Bibracte au mont Beuvray, Manching en Bavière, Stradonice en Bohême et Velem-Szent-Vid (hu) en Hongrie. Il crée l'expression « civilisation des oppida » qui définit aujourd'hui la période de la fin de la civilisation celtique sur le continent européen, dans une région allant du sud de l'Angleterre jusqu'à l'Europe centrale.

Déchelette n'est pas, tant s'en faut, l'inventeur de la Graufesenque ni le premier à le publier[n 1]. Mais il est celui qui signe en 1903 l'« acte de naissance » du site[5], le faisant découvrir pour ce qu'il est : une « fabrique rutène dont l'importance [...] n'était égalée par aucun autre centre de fabrication de la Gaule ni même de l'empire romain, au Ier siècle »[6].

Dans son ouvrage consacré aux vases ornés de la Gaule (1904)[7], il réalise une compilation des découvertes de céramiques antiques où l'analyse s'attache tant au décor qu'à la forme, une typologie qui demeure toujours utilisée aujourd'hui[4]. Entre 1906 et 1914, il rédige un Manuel d'archéologie préhistorique celtique et gallo-romaine, en plusieurs volumes, première synthèse de l'archéologie en Gaule et ouvrage d'une rare précision et concision[4]. Cet ouvrage contient des idées réellement nouvelles, et est considéré comme la fondation de l'archéologie moderne et scientifique.

Il visite également le site d'Altamira en Espagne, qu'il baptise en 1908 du surnom de « Chapelle Sixtine de l'art quaternaire »[8]. L'expression est reprise par Henri Breuil, cette fois-ci pour surnommer la grotte de Lascaux « Chapelle Sixtine du Périgordien », exprimant un lien direct avec les dires du « regretté Joseph Déchelette »[9].

Décès

En 1914, au déclenchement de la Première Guerre mondiale, rappelé au 104e régiment d'infanterie territoriale il demande, malgré son âge avancé, une affectation sur le front pour combler les vides laissés par la bataille de la Marne. Capitaine au 298e régiment d'infanterie, il est tué au front deux mois après le début des hostilités, le [10]. Il repose aujourd'hui dans la nécropole nationale du Bois-Roger à Ambleny et son nom est inscrit au Panthéon, parmi les 560 écrivains morts pour la France[11].

Ouvrages

  • [1893] J. D., Inscriptions campanaires de l'arrondissement de Roanne, impr. Éleuthère Brassart, , 45 p., sur archive.org (lire en ligne).
  • [1900] J. D., Éleuthère Brassart, Charles Beauverie, abbé Reure et Gabriel Trévoux, Les Peintures murales du Moyen Âge et de la Renaissance en Forez, Montbrison, impr. Éleuthère Brassart, , 67 p. (présentation en ligne).
  • [1901] J. D., Le Hradischt de Stradonic en Bohême et les Fouilles de Bibracte, étude d'archéologie comparée, Mâcon, impr. Protat frères, .
  • [1904] J. D., Les Fouilles du mont Beuvray de 1897 à 1901, compte-rendu suivi de l'inventaire général des monnaies recueillies au Beuvray et du Hradischt de Stradonic en Bohême, étude d'archéologie comparée, Paris, Alphonse Picard et fils, , sur archive.org (lire en ligne).
  • [1904] J. D., Les vases céramiques ornés de la Gaule romaine (Narbonnaise, Aquitaine et Lyonnaise), vol. 1, Paris, A. Picard & Fils, , 308 p., sur archive.org (lire en ligne) ; et vol. 2, 380 p.
  • [1908-1914] J. D., Manuel d'archéologie préhistorique, celtique et gallo-romaine (2 volumes en 4 tomes + 2 tomes d'appendices, plusieurs rééditions), vol. 1 : Archéologie préhistorique, Paris, éd. Alphonse Picard et fils, , 747 p., sur archive.org (lire en ligne)  ;
    • [1910] Manuel d'archéologie préhistorique, celtique et gallo-romaine, vol. 2 : Archéologie celtique ou protohistorique, 1re partie : Âge du Bronze, Paris, éd. Alphonse Picard et fils, , 512 p., sur gallica (lire en ligne)
    • [1913] Manuel d'archéologie préhistorique, celtique et gallo-romaine, vol. 2 : Archéologie celtique ou protohistorique, 2e partie : Premier âge du Fer ou époque de Hallstadt, Paris, éd. Alphonse Picard et fils, , (514-910 + pl.) 512 p., sur gallica (lire en ligne)
    • [1914] Manuel d'archéologie préhistorique, celtique et gallo-romaine, vol. 2 : Archéologie celtique ou protohistorique, 3e partie : Second âge du Fer ou époque de la Tène, Paris, éd. Alphonse Picard et fils, , (911-1692 + pl.) 799 p., sur gallica (lire en ligne)
  • [1913] J. D., abbé Parat, Dr Brulard, Pierre Bouillerot et Clément Drioton, La Collection Millon, antiquités préhistoriques et gallo-romaines, Paris, libr. Paul Geuthner, , sur gallica (lire en ligne).

Distinctions et reconnaissance

Les décorations, prix, distinctions, titre et autres fonctions sont mentionnées sur les sites de l'Institut national d'histoire de l'art et du Comité des travaux historiques et scientifiques, sauf mention supplémentaire[12],[13].

Décoration française

Prix

Distinctions

Titre

Autres fonctions

Postérité

À Roanne, le musée des beaux-arts et d'archéologie Joseph-Déchelette honore la mémoire de l'archéologue natif de la ville.

À Autun (Saône-et-Loire), ville siège de la Société éduenne et proche de Bibracte, une voie est baptisée rue Déchelette en 1965[15].

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Livre d'or de Joseph Déchelette, centenaire 1862-1962, Roanne, impr. Sully, .
  • [Binétruy 1994] Marie-Suzanne Binétruy, De l'art roman à la Préhistoire, des sociétés locales à l'Institut, itinéraire de Joseph Déchelette, Lyon, éd. LUGD, .
  • [Chatelain 1914] Émile Chatelain, « Éloge funèbre de M. Joseph Déchelette, correspondant français de l'Académie », Comptes rendus de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, vol. 58e année, no 6, , p. 574-577 (lire en ligne [sur persee], consulté le ).
  • [Comby 2006] Céline Comby, Être ouvrier à Amplepuis : L'usine Déchelette et le quartier de la Quarantaine, de 1870 à 1940, Lyon, Université Lyon 2, .
  • [Gran-Aymarich 2016] Ève Gran-Aymarich, « L'archéologie moderne : Déchelette, Joseph (1862-1914) », dans Les chercheurs du passé 1798-1945 : Aux sources de l’archéologie, CNRS Éditions, , 1271 p., sur books.google.fr (lire en ligne), p. 736-738.
  • [Jullian 1914] Camille Jullian, « LXIV. Joseph Déchelette. », Revue des Études Anciennes, t. 16, no 4, , p. 417-425 (DOI https://doi.org/10.3406/rea.1914.1841, lire en ligne [sur persee], consulté le ).
  • [Lewuillon 2009] Serge Lewuillon, « Des fouilles aux tranchées. Les jalons de Déchelette », Anabases, no 9, (DOI 10.4000/anabases.495, lire en ligne [sur journals.openedition.org], consulté le ).
  • [Pailler 2010] Jean-Marie Pailler, « Déchelette et la Graufesenque », Journées d’études PCR Archives et correspondance de Joseph Déchelette (4-5 nov. 2010), Toulouse, (lire en ligne [sur halshs.archives-ouvertes.fr]).
  • [Péré-Noguès 2014] Sandra Péré-Noguès (dir.), Joseph Déchelette, un précurseur de l'archéologie européenne, Arles, éd. Errance, .
  • [Perez 2014] Camille Perez, « L'invention de l’archéologie », Archéologia, no 521, , p. 16-24.
  • [Reinach 1914] Salomon Reinach, « Joseph Déchelette », Revue archéologique, vol. 24, , p. 315–327 (lire en ligne [sur gallica]).

Liens externes

Notes et références

Notes

  1. Pour plus de détails sur la place de Déchelette en regard de la connaissance et la reconnaissance de ce site, et sur ses prédécesseurs, voir l'article « La Graufesenque ».

Références

  1. « Joseph Déchelette », sur roglo.eu (consulté le ).
  2. « Généalogie de Joseph Jean Marie Déchelette », sur Geneanet (consulté le ).
  3. Reinach 1914
  4. Perez 2014, p. 24.
  5. Pailler 2010, p. 4.
  6. Déchelette 1904, p. 48. Cité dans Pailler 2010.
  7. Déchelette 1904.
  8. Déchelette 1908, tome I : Archéologie préhistorique, p. 150.
  9. [Breuil 1940] Henri Breuil, « Découverte d'une remarquable grotte ornée, au domaine de Lascaux, Montignac (Dordogne) », Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 84, no 5, , p. 389 (lire en ligne [sur persee], consulté le ).
  10. « Joseph Jean Marie Déchelette », Mémoire des hommes. Base des Morts pour la France de la Première Guerre mondiale, sur memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr (consulté le ).
  11. « Les 560 », sur lesecrivainscombattants.org, éd. Les Écrivains combattants (consulté le ), p. 2.
  12. « Déchelette, Joseph », sur inha.fr, (consulté le ).
  13. « Jean Marie Joseph Déchelette », sur cths.fr (Comité des travaux historiques et scientifiques) (consulté le ).
  14. « Prix Lambert », Académie française, sur academie-francaise.fr (consulté le ).
  15. Gérard Chevaux et Catherine Loriot (dir.), Lire les rues d'Autun : Un regard sur le patrimoine, Nos ancêtres autunois, , 254 p., p. 155.
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