Je t'aime… moi non plus
Je t’aime… moi non plus est une chanson française écrite et composée par Serge Gainsbourg, et chantée par celui-ci, en duo, tout d’abord avec Brigitte Bardot en 1967 et ensuite avec Jane Birkin en 1969.
Pour les articles homonymes, voir Je t'aime moi non plus.
Face B | Jane B. |
---|---|
Sortie | Février 1969 |
Enregistré |
Novembre - Décembre 1968 Studio Fontana, Londres Studio Barclay / avenue Hoche, Paris |
Durée | 4:25 |
Genre | Pop |
Format | 45 tours |
Auteur-compositeur | Serge Gainsbourg |
Producteur | Jean-Claude Desmarty |
Label | Philips/Phonogram 884 840-7 |
Critique |
Singles de Serge Gainsbourg
Singles par Jane Birkin
Pistes de Jane Birkin - Serge Gainsbourg
Historique
En 1966, Serge Gainsbourg compose la musique de la scène de bal pour le film Les Cœurs verts réalisé par Edouard Luntz[1]. Lorsque fin 1967, Brigitte Bardot demande à Serge de lui écrire « la plus belle chanson d'amour qu'il puisse imaginer », c'est sur cette musique qu'il pose les paroles de Je t'aime... moi non plus. En une seule nuit les duos Je t'aime... moi non plus et Bonnie and Clyde sont achevés.
L'orchestre est enregistré à Londres puis les voix du duo au studio B des studios Barclay[Note 1], avenue Hoche à Paris. L'enregistrement est diffusé le lendemain à 12 h 30 sur Europe 1. Le scandale éclate : Gunter Sachs, homme d'affaires allemand et mari de Bardot, menace immédiatement de poursuites en justice. Il n'y aura pas d'autre diffusion à la radio, le disque ne sortira pas et c'est la rupture sentimentale.
En 1968, Serge Gainsbourg tourne avec Jane Birkin, une jeune actrice anglaise, dans le film Slogan. Une nouvelle histoire d'amour commence. Serge, frustré de l'interdiction de l'enregistrement précédent, demande à Jane d'interpréter la chanson avec lui. Il lui demande de la chanter une octave plus haut que Bardot[2], ce qui, « mêlé aux soupirs explicites et à la voix grave de Serge, donne au morceau une teinte d'innocence dévoyée et renforce le trouble ressenti par l'auditeur »[3]. L'orchestre est enregistré à Londres, le duo est à nouveau enregistré à Paris et dans le même studio. Le disque sort en . Sur la couverture d'origine figurait la mention « Interdit aux moins de 21 ans ». La couverture fut modifiée lors de la commercialisation du disque sous le label Fontana à la place de celui de Philips.
Toutefois, Bardot, regrettant de ne pas avoir publié sa version, donnera son accord en pour la faire publier en single[4], mais à condition que les ventes du 45 tours soient reversées à sa fondation animalière[5].
Accueil de la version Gainsbourg-Birkin
Lorsque le titre sort en 1969, un journaliste demande : « Quel est le meilleur agent de publicité ? », Gainsbourg répond : « Sans conteste le Vatican ».
Il a suffi que L'Osservatore Romano qualifie d'obscène la chanson. À la suite de cela les radios italiennes l'interdisent sur leurs ondes le , puis les suédoises le et, enfin, les espagnoles le . La maison de disques Philips bloque les stocks et met aux enchères les matrices du disque alors troisième au hit-parade anglais pour être finalement retiré de la vente[6]. Gainsbourg a conclu un accord avec le label Major Minor Records (en), qui a acquis les droits de la chanson pour le ressortir en single au Royaume-Uni, ce qui permet à la chanson d'atteindre la première place, devenant le premier single banni et en langue étrangère à atteindre la première place des charts britanniques[7].
Le single est interdit à la vente dans certains pays, tandis que la maison de disques de Gainsbourg, Philips, préfère remplacer le titre sur l'album dont il est extrait par La Chanson de Slogan[8]. Officiellement rendu à son auteur, Gainsbourg en confie l'exploitation à Disc AZ[8].
L'objet du scandale : « un duo en râles mineurs ». Jane Birkin n'a que vingt ans[Note 2], selon un article publié en 1969 dans les colonnes de L'Express (republié en 2011 sur le site lexpress.fr). Très choqué, le quotidien Il Giornale d'Italia écrit dans ses colonnes : « En l'espace de trois ou quatre minutes, Gainsbourg et Jane Birkin émettent autant de soupirs, de plaintes et de grognements qu'un troupeau d'éléphants en train de s'accoupler ». De plus, la presse y voit une apologie de la sodomie (« Je vais je vais et je viens / Entre tes reins »)[9]. Ce qui n'entrave pas le succès de la chanson dont les ventes dépassent les 750 000 exemplaires[6]. En comparaison, la version de Bardot, sortie dix-sept ans plus tard, ne rencontre qu'un succès commercial modeste (20 000 exemplaires vendus[4]).
Fiche artistique
- Titre : Je t’aime… moi non plus
- Paroles et musique : Serge Gainsbourg
- 1re version
- Interprètes d’origine : Brigitte Bardot et Serge Gainsbourg
- Enregistrement : au studio Barclay / avenue Hoche à Paris
- Arrangements et direction musicale : Michel Colombier
- Producteur : Claude Dejacques
- Parution : 1986 sur simple 45 tours (single) Philips / Phonogram 884 840-7 (remix par Dominique Blanc-Francard et Philippe Lerichomme)
- Éditeur : Melody Nelson Publishing
- Durée : 4 min 32 s
- 2e version
- Interprètes : Jane Birkin et Serge Gainsbourg sur le 33 tours Jane Birkin - Serge Gainsbourg, Fontana 885-545
- Enregistrement : novembre-décembre 1968 au studio Fontana à Londres
- Enregistrement des voix : décembre 1968 au studio Barclay / avenue Hoche à Paris
- Arrangements et direction d’orchestre : Arthur Greenslade
- Producteur : Jean-Claude Desmarty
- Année de production : 1969
- Éditeur : Melody Nelson Publishing
- Parution :
- Durée : 4 min 25 s
Thèmes et contexte
La première version n’a pas été publiée à la demande de l’industriel allemand Gunter Sachs qui était marié, à l’époque, avec Brigitte Bardot. La seconde version a été interprétée par le compositeur et Jane Birkin qui en étaient alors au début de leur liaison.
C'est Mireille Darc qui a donné l'idée à Serge Gainsbourg de réenregistrer la chanson après sa séparation d'avec Brigitte Bardot.
La chanson doit notamment sa célébrité à son refrain :
Je vais, je vais et je viens Entre tes reins Et je Me re- Tiens |
Tu vas et tu viens Entre mes reins Et je Te re- Joins… |
Classements
Classement (1969-70) | Meilleure position |
---|---|
France (IFOP)[10] | 3 |
Suisse (Schweizer Hitparade)[11] | 1 |
Allemagne (Media Control AG)[12] | 3 |
Pays-Bas (Single Top 100)[13] | 2 |
Norvège (VG-lista)[14] | 1 |
Autriche (Ö3 Austria Top 40)[15] | 1 |
Belgique (Flandre Ultratop 50 Singles)[16] | 2 |
Japon (Oricon)[17] | 47 |
Royaume-Uni (UK Singles Chart)[18] | 1 |
Mexique (Radio Mil)[19] | 5 |
Italie (FIMI)[17] | 2 |
Canada (RPM Top Singles)[17] | 34 |
Irlande (IRMA)[17] | 2 |
États-Unis (Hot 100)[20] | 58 |
Suède (Kvällstoppen)[17] | 1 |
Finlande (Suomen virallinen lista)[17] | 3 |
Turquie[17] | 9 |
Argentine (CAPIF)[17] | 4 |
Portugal[17] | 5 |
Autour de la chanson
- En Italie, pour évoquer la sodomie, les italiens parlent « d'amour à la Gainsbourg ».
- Le duo Bourvil / Jacqueline Maillan a enregistré, en 1970, une parodie : Ça (Je t’aime… moi non plus), paroles Serge Gainsbourg / Marcel Mithois et musique de Serge Gainsbourg. Le 45 tours, paru deux mois avant le décès de Bourvil, se vend à 70 000 exemplaires[8].
- Je t’aime moi non plus est également le titre d’un film réalisé en 1976 par Serge Gainsbourg et interprété par Jane Birkin et Joe Dallesandro.
- Dans la version de Brian Molko et Asia Argento en 2003, les paroles habituellement chantées par l'homme le sont par la femme et inversement.
- L'idée du titre vient d'une phrase de l'artiste Salvador Dalí à qui on demandait ce qui le différenciait de Picasso. Il répondit « Picasso est espagnol, moi aussi. Picasso est un génie, moi aussi. Picasso est communiste, moi non plus. »
- Le riff d'orgue répété en boucle a probablement été inspiré par celui de la chanson A Whiter Shade of Pale du groupe Procol Harum sortie en 1967, lui-même inspiré par un morceau de Bach.
- La chanson des Charlots, Sois érotique, est également inspirée de cette chanson dont elle reprend le rythme et détourne l'orchestration.
- La chanson a été utilisée dans le film 14 ans, premier amour (14+) du réalisateur russe Andrei Zaitsev[Note 3].
Je t’aime… moi non plus en CD album
Reprises
- 1970 Sounds Nice Love At The First Sight sur l'album du même titre
- 1971 Frankie Howerd et June Whitfield Up Je t’aime, parodie
- 1971 The Tropical Islanders (instrumental à l'orgue)
- 1972 Hot Butter, sur l'album Hot Butter (instrumental, Love at First Sight)
- 1972 Maurice Vittenet sur l'album Maurice revient de Londres (instrumental à l'accordeon)
- 1974 Abigail (en)
- 1975 Judge Dread
- 1978 Donna Summer chante en français dans le film Dieu merci, c'est vendredi, enregistré en version longue de 15 minutes et courte de 5 minutes environ.
- 1991 Transvision Vamp Twangy wigout (Je t’aime moi non plus)
- 1992 Chayanne et Natalie Exxtasis
- 1993 Misty Oldland A Fair Affair
- 1993 Barry Adamson et Anita Lane
- 1994 Blown
- 1994 Angel Corpus Christi (en) enregistre un mix entre Je t'aime… et I Wanna Boogie With You de Lou Reed
- 1994 Malcolm McLaren sur l'album Paris (en)
- 1995 Nick Cave et Anita Lane I love you… nor do I
- 1997 Cibo Matto
- 1998 Pet Shop Boys et Sam Taylor-Wood
- 2000 Koffi Olomidé et Nayanka Bell
- 2000 Eiffel 65 (Remix)
- 2001 Sven Väth et Miss Kittin
- 2002 Böhse Onkelz
- 2003 Brian Molko et Asia Argento (projet Trash Palace)
- 2003 Kylie Minogue
- 2004 The Ukulele Orchestra of Great Britain
- 2004 Züri West
- 2006 Cat Power et Karen Elson I love you (me either) sur l’album Monsieur Gainsbourg revisited
- 2006 Mimi Crincrin et Justin Chicon Ej t’aime heu bein min non plus
- 2006 Patrice Coquereau et Macha Grenon (Québec)
- 2011 Jason Kouchak
- 2012 Madonna
- 2016 Mick Harvey et Andrea Schroeder
Notes et références
Notes
- Le studio Barclay, Avenue Hoche à Paris est créé par Gerhard Lehner à la demande d'Eddie Barclay au milieu des années 1950 ; il deviendra l'un des plus célèbres studios d'enregistrement parisiens de l'époque.
- En réalité, Jane Birkin, née en décembre 1946, était à un mois de son 22e anniversaire, lors de l'enregistrement en novembre 1968, et avait 22 ans révolus lors de la sortie du 45 tours en février 1969.
- Grand Prix de la Ville de Honfleur (ex-aequo) du Festival du cinéma russe à Honfleur 2015 (en compétition sous le titre 14+). Répertorié par le CNC sous le titre 14 ans, premier amour (classification et visa en 2017).
Références
- https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb424191394
- « Jane Birkin - Rediffusion (4/5) : 4ème entretien », sur France Culture (consulté le )
- Edwige Saint-Eloi, Serge Gainsbourg, ombres et lumières, City Edition, , p. 127.
- .
- .
- Un article de L'Express publié le (dont les sources pourraient paraître un peu confuses).
- (en) Neil Spencer, « The 10 most x-rated records », Observer Music Monthly, London, Guardian Newspapers, (lire en ligne, consulté le )
- https://web.archive.org/web/20050109024146/http://sergegainsbourg.artistes.universalmusic.fr/800/periodes/contenu/5/vue/f1bis.html
- Lucien Rioux, 50 ans de chanson française: de Trenet à Bruel, L'Archipel, , p. 285.
- (fr) Top France, cliquer sur les onglets «1969» et «06/09/1969».
- (en) Swisscharts.com – Jane Birkin avec Serge Gainsbourg – Je t'aime... moi non plus. Schweizer Hitparade. Hung Medien. Consulté le 11 octobre 2016.
- (de) Musicline.de – Jane Birkin avec Serge Gainsbourg. GfK Entertainment. PhonoNet GmbH. Consulté le 11 octobre 2016.
- (nl) Dutchcharts.nl – Jane Birkin avec Serge Gainsbourg – Je t'aime... moi non plus. Single Top 100. Hung Medien. Consulté le 11 octobre 2016.
- (en) Norwegiancharts.com – Jane Birkin avec Serge Gainsbourg – Je t'aime... moi non plus. VG-lista. Hung Medien. Consulté le 11 octobre 2016.
- (de) Austrian-charts.com – Jane Birkin avec Serge Gainsbourg – Je t'aime... moi non plus. Ö3 Austria Top 40. Hung Medien. Consulté le 11 octobre 2016.
- (nl) Ultratop.be – Jane Birkin avec Serge Gainsbourg – Je t'aime... moi non plus. Ultratop 50. Ultratop et Hung Medien / hitparade.ch. Consulté le 11 octobre 2016.
- « Serge GAINSBOURG », sur Archiveschartsventes.blogpsot.fr (consulté le )
- (en) Archive Chart. UK Singles Chart. The Official Charts Company. Consulté le 11 octobre 2016.
- March 14, 1970 issue of Billboard Magazine; page 61 (Retrieved 2016-10-05).
- (en) « Songs from the Year 1969 (voir à la 18ème place) », sur Tsort (consulté le )
Voir aussi
Bibliographie
- Serge Gainsbourg et Laurent Balandras, Les Manuscrits de Serge Gainsbourg : Chansons, brouillons et inédits, Éditions Textuel, Paris 2005 (ISBN 2845971761) présentation en ligne
- Bruno de Stabenrath, Qu’est-ce que tu me chantes ? : Histoires secrètes des cinquante plus grands tubes de la chanson française, Robert Laffont, Paris, 2006 (ISBN 2221107527) présentation en ligne
Articles connexes
- Je t'aime moi non plus (film)
- Liste des chansons de Serge Gainsbourg
- Reprises des chansons de Serge Gainsbourg
- Portail des années 1960
- Portail de la musique • section Chanson