Histoire de la Grenade

Avant l'arrivée des Européens, la Grenade était habitée par les Indiens caraïbes après que ceux-ci eurent expulsé les Arawaks. Le pays a connu plusieurs changements de noms au cours de ses 500 ans d'histoire. Les premiers habitants autochtones de l'île l'avait appelée Camerhogne, en langue kalinago. Christophe Colomb l'a rebaptisée Concepción en 1498, mais c'est Mayo (Mai) qui figure sur les premières cartes. Plus tard, les Espagnols ont donné à l'île le nom de Granada en souvenir de la ville du même nom en Espagne. Les Français, au début du XVIIIe siècle, ont traduit ce nom par Grenade/la Grenade puis les Anglais par Grenada.

Vue de l'île de la Grenade en 1776.

L'archipel de 600 îles et îlots entre Saint-Vincent et Grenade sera baptisé les Grenadines et partagé entre les deux pays.

Entre France et Royaume-Uni

Lors de sa découverte, l'île est peuplée par les Indiens Caraïbes, qui s'opposeront à la prise de possession par les Européens. La colonisation anglaise ne débutera pas avant 1600. En 1650, une compagnie française, fondée par Richelieu, acheta Grenade aux Anglais et y construisit un petit établissement. Entre 1656 et 1665 l'île appartint à Jean de Faudoas, comte de Sérillac dont les tentatives échouèrent et qui revendit ses possessions à la Compagnie des Indes Occidentales. Après de multiples escarmouches avec les Autochtones, les Français firent venir une centaine de mercenaires wallons du Brésil néerlandais, ainsi que quelques renforts depuis la Martinique, qui mirent en déroute les derniers Indiens. Entre 1690 et 1695, Louis Ancelin de Gémozac fut gouverneur de l'île. Le contrôle de l’île resta aux mains des Français jusqu’en 1762 puis elle fut prise par les Anglais pendant la guerre de Sept Ans. Grenade fut formellement cédée à l’Empire britannique par le traité de Paris (1763). C'est en 1779 à la suite de la prise de la Grenade que l'île revient temporairement sous le giron du Royaume de France. L'administration mise en place par le général victorieux est favorable aux colons présents. Ces derniers ne font d'ailleurs pas preuve de sentiments hostiles aux Français et se révoltent d'ailleurs contre le retour des forces anglaises durant l'année 1785 alors que l'île doit redevenir britannique.

Possession anglaise

Au XVIIIe siècle, l’île vécut des transformations très importantes. Comme de nombreux territoires des Indes occidentales, Grenade fut colonisée pour cultiver la canne à sucre exigeante en main d’œuvre que l’on déporta en masse d’Afrique dans le cadre du commerce triangulaire et de la traite négrière. En 1782, le botaniste Sir Joseph Banks, conseiller du roi George III du Royaume-Uni, introduisit sur l’île d’autres plantes comme la noix de muscade. En effet, les terres étaient idéales pour la culture de ce fruit. Banks en fit ainsi la principale productrice de la région. De ce fait, Grenade concurrença les colonies néerlandaises des Indes Orientales car plus proche du marché européen. L’effondrement de la culture de la canne à sucre combiné à l’essor de la culture de la noix de muscade et du cacao favorisa l’implantation de petites propriétés dans un contexte d’abolition de l’esclavage (loi de 1834).

Dès 1833, Grenade intégra la colonie des îles-du-Vent. Le gouverneur de la fédération administra l’île jusqu’à l’indépendance. En 1958, L’administration des Îles-du-Vent fut dissoute et Grenade intégra la fédération des Indes occidentales. Depuis la dissolution de cette fédération, en 1962, le gouvernement britannique essaya de former une petite fédération à partir de ses possessions restantes, dans l’est des Caraïbes. À la suite de cet échec, le gouvernement britannique et les habitants de l’île développèrent le concept d’État associé. Sous cette désignation, la Grenade obtint une autonomie totale dans ses affaires intérieures en mars 1967.

Indépendance de l'île

L’ile devint un État indépendant le . Après cette date, Grenade se dota d’un système parlementaire appelé système de Westminster, légèrement modifié par rapport au modèle britannique avec un gouverneur général nommé et représentant le souverain anglais, ainsi qu’un Premier ministre, chef du parti politique majoritaire et chef du gouvernement. Sir Eric Gairy fut le premier à occuper le poste de Premier ministre de Grenade.

Le , le New Jewel Movement expulsa Gairy par un coup d’État pratiquement sans violence, amenant au pouvoir Maurice Bishop qui devint Premier ministre du Gouvernement révolutionnaire populaire de la Grenade.

Le régime s’emploie en particulier à développer des politiques sociales : un Centre pour l'éducation populaire est créé pour coordonner les initiatives du gouvernement en matière d'éducation, notamment des campagnes d'alphabétisation. L'enseignement du créole grenadin (en) à base lexicale anglaise est autorisé à l'école. Néanmoins, la tendance du gouvernement de Bishop à marginaliser le rôle de l’Église dans l'éducation contribue à la dégradation des relations avec le clergé. Dans le secteur de la santé, les consultations médicales sont rendues gratuites avec l'aide de Cuba qui fournit des médecins, du lait est distribué aux femmes enceintes et aux enfants. En économie, les autorités mettent en place un système de prêts financiers et de matériel à l'attention des agriculteurs, et des coopératives agricoles sont mises en place pour développer l'activité. Le gouvernement de Bishop s'emploie également à développer les infrastructures, notamment en construisant de nouvelles routes et en modernisant le réseau électrique. Enfin, le gouvernement s'attaque aux cultures de marijuana pour favoriser l'agriculture vivrière et faire baisser la violence.

Son gouvernement renforça tout de suite ses liens avec Cuba, puis trois ans plus tard () avec l’URSS et les autres pays communistes. Maurice Bishop se rendit en URSS en , mais aussi peu après en septembre en France rencontrer François Mitterrand. Il faut préciser que Bishop était membre de l'internationale socialiste. La Grenade est pourtant de plus en plus isolée. Le Royaume-Uni suspend ses aides économiques et les États-Unis usent de leur influence pour bloquer les prêts du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale. La situation se dégrade également sur le plan intérieur : le , une bombe explose pendant un meeting au cours duquel Bishop devait intervenir. L'engin fait trois morts et vingt-cinq blessés. Bishop accuse ouvertement « l’impérialisme américain et ses agents locaux ». La responsabilité réelle de la CIA est cependant incertaine ; si elle avait en effet imaginé des opérations de déstabilisation, l’administration Carter y était opposée. Vers , il tenta un rapprochement avec les États-Unis et début septembre condamna à l'ONU la destruction du Boeing sud-coréen par la chasse soviétique. Cette réaction attisa les divisions au sein du mouvement, une partie de la presse grenadine soulignant que l'avion de ligne avait été pris en otage dans une mission d'espionnage.

En octobre 1983, une lutte pour le pouvoir entre Bernard Coard et Maurice Bishop se termina par l’assassinat du second et de quelques-uns de ses partisans. Après de nombreux troubles civils, une force militaire composée de troupes américaines et d'autres îles alentour (Antigua-et-Barbuda, la Barbade, Dominique, Jamaïque, Sainte-Lucie et Saint-Vincent-et-les-Grenadines) arriva à Grenade le sous le nom d’« operation Urgent Fury ».

Après cette opération, une personne, nommée par le gouverneur général, administra le pays jusqu’à la prochaine élection démocratique prévue pour décembre 1984. Le New National Party (NNP) dirigé par Herbert Blaize remporta 14 des 15 sièges au cours d’élections justes et libres. Il forma un gouvernement démocratique. La constitution de Grenade, qui avait été abolie par le gouvernement révolutionnaire du peuple, fut restaurée. Le NNP se maintint au pouvoir jusqu’en 1989 mais avec une majorité réduite. Cinq membres parlementaires du NNP, dont 2 ministres abandonnèrent le parti en 1986 et 1987 pour former le National Democratic Congress (NDC) donnant naissance à une réelle opposition. En août 1989, le Premier ministre rompit avec le NNP pour également former un nouveau parti. Il forma The National Party (TNP) attirant avec lui des membres du NNP. Cette scission dans le NNP provoqua la formation d’un gouvernement de minorité pendant une courte période, dans l’attente de la prochaine élection prévue pour mars 1990. De plus, en décembre 1989, le Premier ministre Herbert Blaize mourut. L’intérim fut assuré par Ben Jones.

Le NDC fut le parti qui sortit vainqueur de ces élections de 1990 en remportant 7 des 15 sièges. Nicholas Brathwaite fit alliance avec 2 élus du TNP et un autre du Grenade United Labor Party (GULP) formant une coalition majoritaire de 10 sièges. Le gouverneur général nomma Brathwaite, par conséquent, Premier ministre. Aux élections parlementaires du , le NNP gagna 8 sièges et forma un gouvernement dirigé par Keith Mitchell. Alors que le taux de chômage dépasse 30 %, le gouvernement impose en 1991 un plan d'austérité. Devant l'éventualité de nombreux licenciements, le plan est vivement contesté et le gouvernement réagit en limitant le droit de grève. En 1997, les partis d'opposition s'unissent pour faire face aux tendances « dictatoriales » du régime. Des manifestations contestent le projet d'installation d'une base militaire américaine[1]. Le NNP remporta les élections suivantes de .

Le , l’île fut touchée par l’ouragan Ivan qui détruisit une grande quantité de constructions, dont la prison et la résidence du Premier ministre, mais également la quasi-totalité des cultures de noix de muscade. On dénombra 20 morts.

Notes et références

  1. Les Essentiels d'Universalis volume 23, Le Monde, pages 26-27, 2009
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