Famille monastique de Bethléem, de l'Assomption de la Vierge et de saint Bruno

La Famille monastique de Bethléem, de l'Assomption de la Vierge et de saint Bruno est une communauté religieuse contemplative et monastique de droit pontifical[1] qui a pris un grand essor dans les années 1970-1990 dans le sillage des communautés nouvelles. Elle a d'abord été fondée comme une congrégation féminine, les Sœurs de Bethléem. Sa branche féminine est gouvernée par une prieure générale, actuellement sœur Emmanuel[2], et son conseil. Sa branche masculine est gouvernée par un prieur général, actuellement frère Jean-Baptiste, et son conseil.

L'habit religieux des moines et des moniales de Bethléem s'inspire de celui de l'Ordre des Chartreux.
Monastère de La Verne (France).

Historique

La famille monastique de Bethléem, de l'Assomption de la Vierge et de saint Bruno prend naissance, le , sur la place Saint-Pierre de Rome, au Vatican, à la suite de la promulgation du dogme de l’Assomption de la Vierge Marie[3]. Des pèlerins catholiques, accompagnés par le père dominicain Ceslas Minguet[4], dont des membres de la famille Dupont-Caillard,[5] sont venus à Rome pour assister à cette grande solennité, célébrée par le pape Pie XII.

Après une année passée au monastère des dominicaines de l’Épiphanie à Soisy-sur-Seine[5], « à quelques pas de l'Eau vive »[6], sœur Marie (Odile Dupont-Caillard), désireuse de mener une vie plus érémitique[7], fonde avec deux autres femmes une première communauté féminine le 2 février 1951[8], en la fête de la Présentation de Jésus au Temple, à Chamvres dans le diocèse de Sens[9] sous le nom des « dominicaines de la Nativité »[10]. Comme c’est dans une étable qu’est aménagée la toute première chapelle, le nom de Bethléem sera donné par la suite à la communauté naissante. La communauté s'installe ensuite à Méry-sur-Oise en 1954[9] « non loin du couvent dominicain du Saulchoir » où enseigne alors le père Marie-Dominique Philippe[10]. Les premières fondations datent de 1957 dans un esprit de solitude[11], tout en étant très ouvertes à l'accueil de tous. « Dès l'origine, des laïcs ont été proches des moniales et associées à leur fondation. Bientôt ils forment la Fraternité séculière de Bethléem et de l'Assomption de la Vierge. »[12]

La première prieure et fondatrice est sœur Marie (1922-1999), ancienne dominicaine entrée au couvent des Tourelles de Montpellier en 1946[13],[9]. Le livre Des saints au XXème siècle Pourquoi ? paru en 2005 la présente comme la cousine des pères Thomas Philippe et Marie-Dominique Philippe[14], mais ce point est contesté par des sources familiales. Il n'en demeure pas moins que le père Marie-Dominique Philippe a encouragé dès le départ sœur Marie dans cette entreprise[10] et a été longtemps l'enseignant extérieur quasi exclusif de la communauté[15] dont il a rédigé, à la demande de la fondatrice, la règle de vie en 1983, selon le témoignage de Philippe Rouvillois, membre laïc de la Fraternité séculière de Bethléem, dont le père Marie-Dominique Philippe a aussi été le prédicateur pendant plus de dix ans[12]. Les Sœurs de Bethléem s'étant séparées de l'ordre dominicain dont elles étaient issues en 1971[16], « elles passent des dominicaines à Filles de Saint Bruno fin 1973 »[10]. En 1986, Gabriel Matagrin, évêque de Grenoble, reconnaît la famille de Bethléem comme congrégation diocésaine et le Saint-Siège approuve sa règle en 1998[14]. Il y alors vingt-huit monastères féminins et trois monastères masculins, pour environ 500 membres.

À la mort de la fondatrice, sœur Isabelle lui a succédé en tant que prieure générale[17],[18]. En 2017, sœur Isabelle a été remplacée par sœur Emmanuel[19].

Quant à la branche masculine, le frère Silouane a succédé au frère Patrick, gouvernant pendant dix-sept ans. Depuis octobre 2018, c'est le frère Jean-Baptiste qui a été élu prieur général de la branche masculine[20].

Règles de vie

La vie des moines et des moniales est identique. Les moines et moniales de Bethléem prient, travaillent, étudient, prennent leurs repas et dorment en cellule. La journée monastique débute le soir avec les vêpres célébrées à la chapelle. Puis, les religieux se lèvent au cours de la nuit « où ils montent une garde sainte et persévérante, dans l’attente du retour de leur maître, pour lui ouvrir dès qu’il frappera » (saint Bruno). Ils se rendent ensuite à l’oratoire pour les matines, suivies des laudes et parfois de l’eucharistie, celle-ci est désormais plutôt célébrée en fin de journée avant les vêpres. Ce sont les deux seuls temps de célébration liturgique vécus en commun quotidiennement, avec l'office des vêpres en fin de journée ; les Petites Heures de l'office divin sont célébrées en cellule (neuf heures, midi et quinze heures). La vie de la famille monastique de Bethléem s'inspire, outre du modèle des Chartreux, du modèle des laures du christianisme oriental ou des skites égyptiens des débuts du monachisme chrétien, où les moines vivaient en solitude dans la thébaïde pendant la semaine et se regroupaient pour la synaxe dominicale[21].

Les offices s'inspirent grandement du rite byzantin, ponctués de nombreuses métanies (se courber jusqu'au sol), de tropaires et d'hymnes comme c'est l'usage dans l'Orient chrétien, tandis que l’eucharistie est célébrée selon le rite romain.

Le dimanche revêt un caractère plus fraternel : un repas communautaire, une grande marche (spaciement) et un partage évangélique réunissent les moniales/moines. Le lundi est jour de désert : les moniales/moines ne se rassemblent que pour l'Eucharistie, sommet de la journée monastique.

Controverses

En 2001, le magazine La Vie publie une enquête intitulée « Des gourous dans les couvents »[22]. Cette enquête dénonce notamment « les dérives sectaires » régnant dans la famille monastique de Bethléem.

Depuis, d'autres enquêtes menées par des journalistes et des associations anti-sectes ont continué à dénoncer la famille monastique de Bethléem comme étant un lieu de dérives sectaires. Ainsi en 2014 et 2015, l'association Aide aux Victimes de mouvements Religieux en Europe et Familles (AVREF) a publié sur son site internet une longue série de témoignages à charge contre la famille monastique de Bethléem[23].

De son côté, le site internet L'envers du décor, spécialisé dans la lutte contre les dérives sectaires au sein de l'Église catholique, a publié également de nombreux documents et témoignages[24]. En particulier, il a été publié un document qualifié par le site de « révélations accablantes d'un ancien supérieur »[25].

En avril 2015, des anciens membres de la famille monastique de Bethléem, témoins des nombreux dysfonctionnements de la communauté, ont créé une association : « Accueil et Soutien aux Ex Membres de la communauté de Bethléem » (ACSEMB)[26].

Le Conseil Général de la famille monastique de Bethléem a demandé une visite apostolique en 2015[27], afin de faire la vérité sur toutes les accusations portées contre la communauté[28], tandis qu'un collectif s'organise pour défendre les Sœurs de Bethléem. Cette visite canonique a été menée par Jean Quris, ancien secrétaire général adjoint de la conférence des évêques de France et par sœur Geneviève Barrière, bénédictine et ancienne abbesse de Jouarre, de 2007 à 2014. Cette visite fait suite à des « dysfonctionnements » de certaines communautés[29] et à des plaintes reçues témoignant de manque de distinction entre for interne et for externe. À noter que depuis la visite apostolique en 2015, aucun texte n'a été publié par les visiteurs apostoliques.

Le 4 janvier 2021 la famille monastique de Bethléem reconnaît officiellement les erreurs et fautes du passé. Elle met en place une cellule d'écoute et entame un chemin de conversion qui passera par un travail de révision des constitutions.

Membres et monastères[réf. nécessaire]

Monastère de Currière-en-Chartreuse, lieu-phare de la congrégation.

La famille monastique de Bethléem, de l’Assomption de la Vierge et de saint Bruno compte plus de 700 membres, répartis comme suit :

  • 30 monastères de moniales situés en France, en Belgique, en Italie, en Espagne, en Autriche, en Israël, aux États-Unis, en Allemagne, en Argentine, au Canada, en Lituanie, en Pologne, au Portugal, au Chili, à Chypre, et bientôt un monastère supplémentaire au Mexique et un nouveau en Jordanie. Environ 650 moniales.
  • 3 monastères de moines (la branche masculine a été fondée en 1976) en Italie, en France et en Israël. Environ 60 moines, dont frère Silouane[30], qui en assure le priorat jusqu'en octobre 2018, lorsque frère Jean-Baptiste lui succède.

Monastères des moines de Bethléem

Monastères des moniales de Bethléem

Notes et références

  1. « Bethléem dans l'Eglise »
  2. Annonce de la nouvelle prieure sur le site officiel
  3. « Naissance de la famille monastique de Bethléem », sur le site de la Famille monastique de Bethléem, de l'Assomption de la Vierge et de saint Bruno (consulté le ).
  4. « Histoire des sœurs de Bethléem, de l’Assomption de la Vierge et de saint Bruno », sur Diocèse de Fréjus-Toulon (consulté le )
  5. Les petites sœurs de bethléem, « Soeur Marie Dupont Caillard », (consulté le )
  6. Antoine Mourges, Des "sages et des savants" aux "tout petits" Aux origines des communautés de l'Arche, 1945-1965, , p. 68
  7. Kristoff Talin, Survivre à la modernité: religieux et religieuses dans le monde occidental, 2005
  8. IDREF
  9. Olivier Landron, Les communautés nouvelles: nouveaux visages du catholicisme français, éditions du Cerf, page 26
  10. Céline Hoyeau, La Trahison des pères, Paris, Bayard, , 351 p. (ISBN 978-2-227-49870-9), p. 50
  11. Olivier Landron, op. cit., p. 26.
  12. Marie-Christine Lafon, Marie-Dominique Philippe - Au cœur de l’Église du XXe siècle, Desclée de Brouwer, , 839 p. (ISBN 978-2-220-06630-1), pp. 376-377
  13. Née Odile Dupont-Caillard, elle naît au Havre en 1922 dans une famille aisée et entre en 1946 chez les dominicaines de Montpellier. Avec l'autorisation de Mgr Lamy, évêque de Sens, elle se lance en 1951 dans une fondation à Chamvres avec Sœur Marie-Liesse Djakeli. En 1954, les religieuses déménagent à Méry-sur-Oise jusqu'en 1970, où elles s'installent à Poligny, près de Nemours. Plusieurs communautés féminines de « solitudes » se forment, ainsi qu'un noyau étudiant à Fribourg en Suisse. Des laïcs et des familles se joignent pour prier avec les religieuses dans les années 1970. C'est le début de la famille de Bethléem.
  14. Joachim Bouflet, Bernard Peyrous et Marie-Ange Pompignoli, Des Saints au XXe siècle, pourquoi?, pages 80-81]
  15. Céline Hoyeau, « L’influence des frères Philippe sur les communautés nouvelles. », sur La Croix, (consulté le )
  16. Selon Olivier Landron, op. cité, p. 26, parce qu'elles n'adhéraient pas à l'« ouvriérisme » des dominicains français, de plus en plus marqué depuis le milieu des années 1960
  17. La Croix, 8 juin 2015
  18. Née Isabelle Flye-Sainte-Marie
  19. Née Rose Armelle Lorenchet de Montjamont, le 30 juillet 1949, elle entre dans la famille de Bethléem en 1971. Elle a été prieure du monastère de Marches-les-Dames, puis d'Opgrimbie et ensuite assistante de Sr Isabelle à Bet Gemal.
  20. Élection du frère Jean-Baptiste
  21. Synaxe : Définition selon le Larousse
  22. « Des gourous dans les couvents - Catholicisme - La Vie », sur www.lavie.fr (consulté le )
  23. « Témoignages concernant la communauté Bethléem », sur http://www.avref.fr,
  24. « FAMILLE MONASTIQUE DE BETHLEEM », sur lenversdudecor.org
  25. lenversdudecor.org, « Communauté de Bethléem : les révélations accablantes d'un ancien supérieur » (consulté le )
  26. « Déclaration d'association », Journal officiel, , p. 2160 (lire en ligne)
  27. Lettre de Sr Isabelle
  28. La Croix, Article du 8 juin 2015
  29. Né Éric Frémond
  30. Page du monastère
  31. Page du monastère
  32. Page du monastère

Voir aussi

Intérieur de l'église des Sœurs de Bet Gemal, en Judée.

Bibliographie

  • Patricia Blanco Suarez, 15 ans dans l'enfer de la famille monastique de Bethléem, Editions Harmattan,

Liens externes

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