Cimetière juif de Fontainebleau

Le cimetière juif ou cimetière israélite de Fontainebleau, aussi appelé cimetière de la Vallée de la Chambre, est un lieu d'inhumation de la communauté juive locale situé à Fontainebleau, en France.

Ne doit pas être confondu avec Cimetière de Fontainebleau.

Situation et accès

Le cimetière est situé au lieu-dit de la Vallée de Chambre, au nord de la ville de Fontainebleau, elle-même au sud-ouest du département de Seine-et-Marne. En retrait de la lisière de la forêt de Fontainebleau, il s'inscrit dans l'espace boisé entre la route Louise, la route de la Fontaine et la route de la Bonne Dame.

Seul un chemin, formé en diagonal depuis la route Louise, permet d'y accéder. Le cimetière est habituellement fermé au public.

Historique

Communauté juive

Les frères Wahl, au nombre de cinq, sont les premiers à s'établir à Fontainebleau à la Révolution et constituent l'une des familles fondatrices de la communauté locale[A 1]. D'autres familles s'installeront plus tard[A 2]. Dans cette communauté, les chefs de familles sont tous marchands colporteurs, à part ceux qui travaillent à la manufacture de porcelaine[A 3].

Cimetière de la rue de l'Arbre-Sec

Les frères Wahl tentent de créer un premier cimetière pour la communauté. Parmi les documents conservés, on retrouve notamment un acte de décès de Moyse, âgé de deux mois, fils de Félix Wahl, en date du 28 pluviôse an IV (), mentionnant « inhumé dans un terrain appartenant au citoyen Charles [et] Salomon Wahl ». Il est alors situé à l'extrémité sud-ouest de la rue de l'Arbre-Sec, près de l'hôtel de Pompadour alors appelé « hôtel du Gouvernement ».

Dans un manuscrit, Chabouillé donne une description du projet de ce cimetière[1] :

« Les frères Wahl, juifs domiciliés à Fontainebleau, ayant demandé par un mémoire lu en Municipalité le 28 Pluviôse an V (17.2.1796) à faire encore un terrain par eux acquis hors de l’enceinte de la ville, derrière le ci-devant gouvernement afin d’en faire un cimetière pour leurs coreligionnaires. Cette autorisation leur fut accordée par un arrêté du département de Seine-et-Marne en date du 23 germinal an IV (12 avril 1796) et d’après la réclamation faite le 24 brumaire an IV par le citoyen Ferdinand Grandjean Delisle, propriétaire d’un jardin adjacent au dit terrain; l’administration municipale fait d’avis le 19 Pluviôse an V (7 février 1797) qu’il fallait maintenir l’arrêté départemental à condition que les propriétaires du terrain y feraient construire deux murs dont l’un serait éloigné de 15 pieds d’un puits voisin, qu’on donnerait aux fosses 5 ou 6 pieds de profondeur et qu’en aucun cas on ne pourrait les ouvrir avant 6 ans »[2]

 Chabouillé

La fondation de ce cimetière aurait par ailleurs été entamée avant même sa demande d'autorisation administrative[A 4] :

« Ce jourdhui vingt-cinq frimaire 4e année de l'ère républicaine (16 décembre 1795), je soussigné Jacques Roche Donnebecq commissaire de police près l'administration municipale de Fontainebleau, fais rapport que ledit jour entre midy et une heure en faisant ma ronde ordinaire passant par la Plaine des Sables, j'ai vu un ouvrier faisant la fouille profondément de murs pour enclore un terrain, attenant les murs de jardins entre la rue Honoré et celle de l'Arbre-Sec ; m'étant approché j'ai demandé au citoyen qui travaillait ce qu'on voulait faire de ce terrain et à qui il appartenait, il m'a répondu que ledit terrain était aux Juifs, qu'ils l'avaient acheté à dessein d'en faire un cimetière. De retour près l'administration municipale j'ai rendu compte de ce que je venais d'apprendre. [...] »

 Jacques Roche Donnebecq, commissaire de police

Acquisition d'un terrain à la Vallée de la Chambre

Un terrain est accordé à la Ville par arrêté du Département du 8 messidor an II ()[3]. Ainsi, le , afin de créer un lieu écarté de la ville pour les inhumations, le Comité de salut public de Fontainebleau ordonne l'acquisition d'un terrain de deux hectares quarante-deux ares (soit 24 200 m2) sur la forêt dans le canton de la Vallée de la Chambre[1].

On reprochait alors un esprit particulariste aux lieux d'inhumation selon la religion pratiquée, qui serait contraire aux esprits de liberté et d'égalité nouvellement instaurés. En effet, le Bureau des Lois 7 floréal an VI () ordonne :

« L'exerice du culte est subordonné aux lois ; le culte doit se pratiquer à l'intérieur d'une enceinte consacrée ; l'inhumation, distinguée des cérémonies que l'accompagnent n'a rien de religieux ; on prône une absence de distinction entre Juifs, Mahométans, Catholiques, Incrédules... durant leur vie, il serait absurde de l'établie après la mort. »

C'est ainsi que les Juifs sont contraints d'abandonner le cimetière de la rue de l'Arbre-Sec pour s'installer dans ce cimetière municipal[A 5].

Déménagement du cimetière communal

Le cimetière communal déménage en 1822 pour former le cimetière de Fontainebleau[1]. Les Juifs s'opposent au transfert de leurs dépouilles, contestation qu'ils réitèrent en 1855, et effectuent des démarches pour racheter le terrain[A 6]. Ce n'est qu'en 1876 que le rachat a été possible[1].

Pourtant, loi de séparation des Églises et de l'État remet en question cette possession et le cimetière de la Vallée de la Chambre redevient municipal[1].

Structure

Le cimetière adopte une forme rectangulaire.

Personnalités inhumées

Mémorial

Un mémorial des Juifs déportés lors de la Seconde Guerre mondiale se situe en face de la grille d'entrée. Une soixantaine de noms est inscrit[1] sur deux plaques.

Représentations culturelles

Dans ses indicateurs et sur ses cartes, Claude-François Denecourt appelle ce site « vallée des Tombeaux »[3].

« De la vallée du Chêne-des-Fées, retour à Fontainebleau par la route longeant le bas du rocher Mont-Ussy, puis par celle qui traverse la vallée des Tombeaux, et enfin par la rue des Bois. »[6]

Références

  • Rosine Alexandre (préf. Gérard Nahon), Fontainebleau, naissance d'une communauté juive à l'époque de la Révolution : 1788 - 1808, 38 rue du Père-Corentin, Paris, Rosine Alexandre, , 177 p. (ISBN 2-9504973-1-4)
  1. p. 25
  2. p. 24
  3. p. 38
  4. p. 49
  5. p. 52
  6. p. 53
  • Autres :
  1. Frédéric Viey, « Le cimetière Israélite de Fontainebleau », Fontainebleau : la revue d'Histoire de la ville & de sa région, no 6, , p. 26-28
  2. Manuscrit Chabouillé : La Ville (conservé dans le fonds local de la médiathèque de Fontainebleau).
  3. Eugène Plouchart, Le Cimetière des Mathurins : Premier Cimetière de Fontainebleau, Fontainebleau, Cuënot-Bourges, , 22 p. (lire sur Wikisource, lire en ligne [DjVu]), p. 6 :
    « Le cimetière de la Vallée de la Chambre, accordé à la Ville par arrêté du Département du 8 messidor an II. Désaffecté à son tour en 1822. Dans ses indicateurs et sur ses cartes, le sylvain Denecourt appelait ce site la « Vallée des Tombeaux ». Colinet, son successeur, a abandonné cette appellation romantique ; »
  4. « Nécrologie », La Petite Presse, no 5472, , p. 4 (lire en ligne , consulté le ) :
    « Le corps sera déposé provisoirement au cimetière israélite de Montmartre où aura lieu la cérémonie religieuse.
    Il sera transporté à Fontainebleau où repose Mme Adam Salomon, décédée le 8 février 1878. »
  5. « Nécrologie », L'Abeille de Fontainebleau, no 18 de la 42e année, , p. 2 (lire en ligne , consulté le ) :
    « Adam-Salomon a demandé à être inhumé dans le cimetière israélite de Fontainebleau où depuis quelques années repose sa digne compagne, artiste elle-même et auteur d'ouvrages sérieux pour lesquels Lamartine avait bien voulu écrire une préface. »
  6. Claude-François Denecourt, Promenades dans la forêt de Fontainebleau, Fontainebleau, Auteur, , 48 p. (lire en ligne ), p. 35

Annexes

Articles connexes

Liens externes

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