Charles Spinasse

Charles Spinasse est un homme politique français né le à Égletons et mort le à Rosiers-d'Égletons. Député SFIO de Corrèze et maire d'Égletons, pour laquelle il mena un projet innovant d'urbanisme, il fut ministre dans le gouvernement du Front populaire et signa comme ministre de l'Économie nationale les accords Matignon. Pacifiste avant guerre, il est favorable au régime de Vichy, tout en ne soutenant pas les mesures raciales et anti-sémites. Il participera à la création après-guerre du Parti socialiste démocratique mais ne jouera plus de rôle politique national. Il redeviendra maire d'Égletons entre 1965 et 1977.

Charles Spinasse

Charles Spinasse, député de la Corrèze (1929).
Fonctions
Ministre du Budget

(28 jours)
Président Albert Lebrun
Président du Conseil Léon Blum
Prédécesseur Paul Marchandeau
Successeur Edgar Faure
Ministre de l'Économie nationale

(1 an et 18 jours)
Président Albert Lebrun
Président du Conseil Léon Blum
Prédécesseur Louis Loucheur
Successeur Raymond Patenôtre
Maire d'Égletons

(15 ans)
Prédécesseur François Monéger
Successeur Jean-Baptiste Gautherie

(12 ans)
Prédécesseur Jean Guinot
Successeur Louis Bourzai
Député français

(12 ans, 2 mois et 11 jours)
Élection 29 avril 1928
Réélection 8 mai 1932
3 mai 1936
Circonscription 2e de Tulle
Groupe politique socialiste
Prédécesseur René Lafarge
Successeur nouveau régime

(4 ans et 20 jours)
Élection 11 mai 1924
Circonscription Corrèze
Groupe politique socialiste
Prédécesseur élection par liste
Successeur élection par circonscription
conseiller général de la Corrèze

(15 ans)
Circonscription Canton d'Égletons
Prédécesseur Pierre Caraminot
Successeur André Crouzette

(20 ans)
Circonscription Canton d'Égletons
Prédécesseur Hippolyte Spinasse
Successeur Jean Guinot
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Égletons
Date de décès
Lieu de décès Rosiers-d'Égletons
Nationalité française
Parti politique SFIO
Père Joseph Spinasse
Mère Marie-Jeanne Delor
Conjoint Jeanne Maurin
Enfants 3
Profession homme politique
Distinctions Chevalier de l'Ordre de la légion d'honneur
Croix de guerre 1914-1918

Ne pas confondre avec Charles-Marie-Esprit Espinasse, général et homme politique du XIXe

Biographie

Charles Spinasse nait à Égletons au sein d'une famille chrétienne très pratiquante[1]. Il suit des études universitaires, à la fois technique et économique et il devient professeur au Conservatoire national des Arts et Métiers à Paris[1]. Il participe aux quatre années de la Première Guerre mondiale, entre 1914 à 1918[1].

Entre-deux-guerres : député puis ministre

Militant de la SFIO, il est élu en 1919, au conseil municipal de Rosiers-d'Égletons et est conseiller général du canton d'Égletons (il le restera jusqu'en 1949).

Spinasse est élu à Rosiers mais travaille à Paris en tant que professeur au Conservatoire national des arts et métiers.

Pendant la période 1929-1944 de son mandat municipal, inspiré entre-autres de l'urbanisme américain, Spinasse mène un projet d'aménagement, d'embellissement et d'extension d'Égletons. Il y fait entre autres construire un collège, y fait s'installer une école nationale professionnelle (équivalent des actuels lycées techniques) et une école d'application des travaux publics. La ville se développe aussi économiquement.

En 1922 et 1923, il est rédacteur en chef du Populaire du Centre, journal socialiste de Limoges mais rayonnant sur le Limousin[1]. Pour les élections législatives de 1924, il est choisi pour être le représentant de la Fédération socialiste sur la liste du Cartel des gauches qui pour le département de la Corrèze (scrutin à liste départementale) est menée par le Radical socialiste Henri Queuille[1]. La liste obtient 31 159 voix sur 83 333 inscrits et Charles Espinasse est élu député. À la Chambre des députés, il s’intéresse alors plus particulièrement à la politique étrangère[1],[2].

En 1926, il fait un voyage d'études aux États-Unis dont il tira une analyse du capitalisme et de son évolution vers la production de masse[1]. Il l'exposa à la Chambre des députés et dans une conférence donnée qu'il fit le 11 février 1928 sous l’égide de La Vie socialiste de Pierre Renaudel[1]. Espinasse affirmait que la production de masse menait à la consommation de masse et qu'elle serait possible aussi en France si on allait résolument vers une organisation européenne[1].

Lors des élections législatives de 1928, qui se déroulent cette fois au scrutin uninominal, il se présente dans la 2e circonscription de Corrèze (Tulle) où il est élu au second tour dans une triangulaire avec 7 427 voix contre le républicain de droite Georges Lafarge (4 897 voix) et le communiste Léon Bossavy (3 949 voix)[1]. Il est réélu facilement lors des élections de 1932[1].

Pendant son second mandat, il fut secrétaire de la Commission des finances et intervint fréquemment dans les débats budgétaires[1]. Il est membre de X-Crise[3], cercle de réflexion créé par des polytechniciens en 1931, qui a une approche planiste antilibérale et souvent considéré comme un creuset de la technocratie française.

Il tente de rentrer au Sénat en décembre 1935 lors d'une élection partielle à la suite de la mort d'Henry de Jouvenel mais il est battu par Henri Queuille[1]. Lors des élections de 1936, il est réélu député de Corrèze pour un 4e mandat, obtenant 7 495 voix devant le candidat communiste Bourdarias (5 708 voix) et le candidat de droite Lafarge (3 629)[1].

Cette élection marque l'arrivée au pouvoir du Front populaire et Charles Spinasse entre dans le gouvernement de Léon Blum. Pressenti initialement pour être secrétaire d'État en charge des relations avec le Parlement[1], il devient finalement ministre de l'Économie nationale, de juin 1936 à mars 1937[2], et à ce titre signe les accords Matignon, puis il est ministre du Budget (mars-avril 1938) dans le second gouvernement Blum[1],[2]. N'occupant cette fonction que pendant 29 jours, sa principale action est avec Pierre Mendès France, alors sous-secrétaire d'État au Trésor, de préparer le programme budgétaire et financier qui doit permettre de faire face à l'augmentation considérable des dépenses militaires et qui comporte notamment l'instauration d'un impôt sur le capital et du contrôle des changes[4].

Il fait partie du courant pacifiste, anticommuniste et planiste de la SFIO. Pendant la Drôle de guerre, son attitude est, selon Jean-Louis Crémieux-Brilhac, celle d'« un attentiste, secrètement fasciné par le national-socialisme[5] ».

Seconde Guerre mondiale : favorable au régime de Vichy

Le 6 juillet 1940, après la débâcle de mai et juin, devant les parlementaires réunis à Vichy, il plaide en faveur d'un changement de régime dans un sens autoritaire, et proclame son appui à la politique du maréchal Pétain. Après avoir lui avoir voté l'attribution des pleins pouvoirs le 10 juillet[2], il reste dans un premier temps en zone libre et soutient le régime de Vichy.

En août 1940, il fait partie avec Paul Rives des membres fondateurs du quotidien L'Effort, journal appelant à soutenir l'effort de collaboration[6] et publié sous censure en zone libre. Il y prône la collaboration en vue de la réorganisation politique de l'Europe en une « libre association d'États socialistes » dans l'esprit du fédéralisme proudhonien[7].

Il fonde ensuite et dirige, à Paris, l'hebdomadaire Le Rouge et le Bleu, « revue de la pensée socialiste française », selon l'en-tête. Le premier numéro paraît le 1er novembre 1941. Le journal a l'autorisation de la censure allemande et le soutien d'Otto Abetz, on y prône une collaboration européenne, qui soutient Pierre Laval après son retour au pouvoir, mais qui n'entend pas renier les traditions socialistes et républicaines de la gauche française[8]. Les autres publications collaborationnistes sont pour la plupart hostiles à cet hebdomadaire qui « n'a rien dit des mesures de protection de la race... et n'a pas davantage soufflé mot de l'étoile jaune » (L'Appel, journal proche du PPF, juin 1942). Pierre Costantini va jusqu'à demander « que Spinasse soit envoyé dans un camp de concentration, chez ses amis juifs[9]. » Finalement interdit, Le Rouge et le Bleu cessera de paraître en août 1942 (le dernier numéro est daté du 22 août).

Après cette interdiction, Charles Spinasse est évincé de L'Effort et cesse toute activité dans la presse autorisée.

En tant que maire, il fait installer entre 1941 et 1944 à Rosiers-d'Égletons (qui se trouve alors en zone libre jusqu'à qu'elle soit occupée par les Allemands en novembre 1942) un groupement de travailleurs étrangers et un groupement disciplinaire qui fournissent de la main d'œuvre à faible coût aux entreprises environnantes.

Après guerre

Exclu de la SFIO à la Libération pour « félonie », Charles Spinasse est arrêté en janvier 1945[1] et emprisonné pendant quatre mois, au motif de collaboration, avant d'être finalement relaxé le 22 octobre 1945[6],[10] mais il reste inélligible.

Il participe alors à la création du Parti socialiste démocratique, comme nombre de socialistes compromis avec le régime de Vichy.

Il ne joue plus ensuite qu'un rôle politique modeste. Profitant d'une amnistie en août 1953, il tente, sans succès de redevenir député lors des législatives de 1958[11] où il est sèchement battu (5 360 voix sur 36 958 votants[1]). Mais il est largement élu conseiller général de Corrèze dans le canton d'Égletons en 1961[11] sous l'étiquette « socialiste indépendant »[1]. Dans les années 1960, il soutient l'ascension en Corrèze du jeune Jacques Chirac, notamment aux élections législatives de 1967 au cours desquelles il déclare que « la couleur politique [de Chirac] est sans aucun doute socialiste[12] ».

Il est élu maire d'Égletons lors des élections municipales de 1965 puis réélu en 1971. Mis en ballotage au premier tour lors des élections municipales de 1977, il préfère se retirer avant le second tour[1].

Veuf depuis 1947, il meurt deux ans plus tard, le 9 août 1979 à 85 ans.

Mandats électifs et fonctions gouvernementales

Sources

  • « Charles Spinasse », dans le Dictionnaire des parlementaires français (1889-1940), sous la direction de Jean Jolly, PUF, 1960

Annexe

Référence

  1. Le Maitron, « SPINASSE Charles, Marie, André », sur https://maitron.fr (consulté le ).
  2. « Charles Spinasse », sur Sycomore, base de données des députés de l'Assemblée nationale (consulté le )
  3. "De X-Crise (1931-1939) à X-Sursaut (2005-?): L’apport des Polytechniciens à la réflexion sur le rôle de l’Etat dans la vie économique" par Marianne Fischman et Emeric Lendjel, HAL
  4. "Charles SPINASSE" sur le site du ministère de l'Économie
  5. Jean-Louis Crémieux-Brilhac, Les Français de l'an 40, Gallimard, 1990, T. I, p. 259.
  6. Un camp disciplinaire en zone non occupée 1941-1942, Mouny Estrade-Szwarckopf et Paul Estrade, Les Monédières, 2007, p. 14-15, 27, 69.
  7. Dominique Venner, Histoire de la Collaboration, éd. Pygmalion, Gérard Watelet, 200, p. 649.
  8. Simon Epstein, Un paradoxe français, Albin Michel, 2008, p. 95
  9. Les Collaborateurs, Pascal Ory, Éditions du Seuil, 1980, pages 137-139
  10. Le Monde, « Charles Spinasse est acquitté », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
  11. Le Monde, « M. Charles Spinasse est élu à Egletons (Corrèze) », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
  12. Dominique Venner, Histoire de la Collaboration, éd. Pygmalion, Gérard Watelet, 200, p. 650.

Liens externes

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