Alcide-Joseph Lorentz

Alcide-Joseph Lorentz (1813-1889) est un peintre d'histoire, dessinateur et enseignant français. Il fut un caricaturiste et lithographe assez renommé dans le Paris romantique, signant parfois ses productions d'un monogramme, « JAL ».

Pour les articles homonymes, voir Lorentz.

Biographie

Né le à Paris, Alcide-Joseph Lorentz expose au Salon de Paris en 1841, 1847, 1848 et 1850, essentiellement des peintures représentant des scènes de la vie militaire sous le Premier Empire ; il réside à cette époque rue Neuve-Coquenard[2]. Son tableau Une revue au Carrousel (1850) est acheté par l'État (musée d'art moderne et contemporain de Saint-Étienne)[3].

Avant d'exposer au Salon, Lorentz est l'ami intime de George Sand dont il fait la couverture du premier ouvrage, Rose et Blanche (1831)[4], mais aussi d'une « bande d'amis » un peu bohème, comme il en existait juste après la révolution de Juillet, qualifié de « cercle du Doyenné » ; la plupart vivait tous dans le quartier du Louvre, au niveau du Carrousel, sur les restes de l'ancienne église Saint-Louis-du-Louvre : c'est Théophile Gautier qui en témoigne, rappelant à ses lecteurs, qu'une fête y fut organisée grâce aux soins de Gérard de Nerval, Camille Rogier, Arsène Houssaye, Célestin Nanteuil, et Lorentz composa pour l'occasion des motifs en forme d'arlequin[5]. À cette époque, Lorentz, vingt ans, vit rue Notre-Dame-des-Victoires ; lui aussi y reçoit ses amis, on y retrouve Nerval, mais aussi Théodose Burette, Bouchardy, La Bédollière, Brot, Perrin, un mélange de dessinateurs, graveurs, poètes et futurs dramaturges, auquel se joint bientôt un jeune peintre, Théodore Rousseau, ami d'enfance de Lorentz. Durant l'été 1834, Lorentz rejoint Rousseau qui s'était retiré dans le Jura, au col de la Faucille, pour peindre, protégé par un certain comte de La Fortelle. Lorentz laissa un portrait de son ami en souvenir de ce périple qui les mena jusqu'en Suisse, vers la mi-octobre ; ils rentrèrent à Paris en décembre. L'année 1836 fut décisive : Lorentz, Rousseau, et tant d'autres de sa génération, sont refusés au Salon pour leurs envois de peinture[6]. En janvier, il était annoncé comme dessinateur-collaborateur au journal Le Monde dramatique[7].

Au contraire de ses tableaux, Lorentz commence à placer ses dessins dès le début des années 1830. Il semble commencer dans les pages de L'Artiste (1833)[8]. Durant l'été 1838, est inaugurée au sein des Conserts-Musard, rue Vivienne, une nouvelle salle conçue en un décor moyenâgeux, pour lequel Lorentz a produit des « peintures spirituelles »[9]. Il fait son entrée dans le monde des auteurs caricaturistes en 1840, composant un double recueil intitulé Fiasco, mêlé d'allégories. Livre-album iconographicocomique, contenant plusieurs dizaines de dessins légendés lithographiés chez Rigo frères et édités chez « Auguste, élève de Lambert ». Il collabore ensuite à La Caricature et au Charivari dirigés par Charles Philipon, y produisant des portraits charges pour le « Miroir drolatique » (George Sand ; Franz Liszt ; Alfred de Vigny, 1842).

Vers 1840-1842, il fait partie avec Daumier, Trimolet et Vernier, des illustrateurs de recueils comique à la mode appelés Physiologies ; d'abord chez Ernest Bourdin (La femme entretenue ; Le Jour de l'an ; Le fumeur[1]), puis chez Aubert (maison fondée par Philipon)[10], y publiant Le floueur[11]. Lorentz est aussi l'auteur à la même époque de l'affiche de lancement et des vignettes de l'Histoire de l'Empereur, racontée dans une grange par un vieux soldat de Balzac, chez Dubochet et Jules Hetzel[12]. Toujours pour Aubert, il composera plusieurs albums comiques lithographiés[8].

Fin 1847, il signe, selon Henri Beraldi[13], un « album à succès », Polichinel, ex-roi des Marionnettes devenu philosophe (Willermy éditeur), chargeant le roi Louis-Philippe et son régime, sous la forme d'un récit illustré de nombreuses vignettes gravées sur bois  certaines exécutées par Noël-Eugène Sotain , la préface étant constituée d'une sorte de bande dessinée[14]. En avril 1848, il présente à l'Ambigu-Comique, une pièce de sa composition, intitulée La Famille de l'ouvrier, avec entre autres Charles Albert Fechter (1824-1879) et Charles de Chilly[15]. On sait par ailleurs qu'il était inscrit à la Société des auteurs et compositeurs dramatiques puisqu'il figure dans l'annuaire des fondateurs[16].

Inspiré par son aîné Paul Gavarni, il poursuit ses publications au début du Second Empire, avec entre autres suites lithographiques, La Bourse, ou cette affiche[17] pour Tournachon, Nadar jeune et Cie, artistes photographes (1856). On retrouve ensuite sa signature dans le Petit Journal pour rire (1861-1862), La Lune (1865-1868), L'Éclipse (1869) et Le Monde pour rire (1871)[8].

Il est l'auteur d'un singulier récit, Dernier jour de l'exposition de 1865 : revue galopante au Salon (Paris, 1865), plaquette dédiée au critique d'art Jean-Antoine Luthereau et dans laquelle il tacle l'exposition personnelle de Gustave Courbet[18]. Au début des années 1860, il entretient avec les Nadar (Félix et Adrien) une correspondance, qui laisse entrevoir un homme aux abois, criblé de dettes, vivant seul avec sa mère malade, jamais à court d'idées de « bonheur universel », et à qui le régime impérial aurait refusé l'ouverture d'un théâtre de marionnettes satiriques[19]. Quant aux frères Goncourt, il ne l'épargne pas dans leur Journal : « Il y a un imbécile, un caricaturiste manqué et inconnu, du nom de Lorentz, un homme dont Gavarni fait, on ne sait pourquoi, un grand cas. Celui-ci est un imbécile à idée, tranchant, coupant la parole à tous... » (30 août 1860) ; et d'expliquer, en somme, qu'il souhaitait installer des chauffe-marmites en haut des réverbères pour que le peuple y prépare sa soupe[20].

Lorentz meurt en son domicile au 4 passage des Eaux dans le 16e arrondissement de Paris le [21]. Il est inhumé au cimetière des Batignolles (32e division)[22].

Clément-Auguste Andrieux se signale comme ayant été son élève[23].

Autres ouvrages illustrés

Lorentz a participé à l'illustration de nombreux ouvrages en donnant des dessins destinés à être traduits en gravures sur bois, parmi lesquels[8] :

Collections publiques

Bibliothèque nationale de France

Musée des Arts décoratifs (Paris)

Musée barrois (Bar-le-Duc)

  • Arlequin, gouache et aquarelle sur papier, 58 x 22,5 cm, 1882.

Musée Carnavalet

  • Défilé de la gendarmerie de la Seine[24], huile sur toile, 25 x 61,5 cm, août 1857.
  • Garde national blessé (épisode de la révolution de 1848)[25], huile sur toile, 78,3 x 56,4 cm, août 1858.

Musée national de l'éducation (Rouen)

  • Exercice au Salon[26] : annonce publicitaire pour Jules-Léandre Pichery, gymnaste-médecin, représentant une sculpture de femme en train de pratiquer la musculation avec des extenseurs, litho., 1854

Galerie

Notes et références

  1. Théodose Burette, La Physiologie du fumeur, Paris, Ernest Bourdin, 1841 — sur Gallica.
  2. Fiche exposant Salon de 1850, base salon du musée d'Orsay.
  3. Centre national des arts plastiques — Notice d'attribution.
  4. Ils s'écrivaient encore en 1869, comme en témoigne cette lettre — Vente Sand, étude Brissonneau, 24 novembre 2017, lot 8.
  5. Théophile Gautier, « Marilhat », In: Revue des Deux Mondes, période initiale, tome 23, 1848, pp. 56-75sur Wikisources.
  6. Alfred Sensier, Souvenirs sur Théodore Rousseau, Paris, Téchener, 1872, pp. 44, 55-76, 90sur archive.org.
  7. Le Monde dramatique, Paris, 1er janvier 1836, p. 4sur Gallica.
  8. [PDF] « Les dessinateurs de l'édition Furne de la Comédie Humaine : Lorentz » par Claire Scamaroni [notice], Paris, La Maison de Balzac, p. 15en ligne.
  9. L'Indépendant, Paris, 2 août 1838, p. 2sur Gallica.
  10. (en) James Cuno, « Charles Philipon, La Maison Aubert, and the business of caricature in Paris, 1829-41 », Art Journal, vol. 4, no 353, , p. 347-354 (lire en ligne, consulté le ).
  11. Physiologie du floueur : voir l'exemplaire du Getty Research Institute — sur archive.org.
  12. [Affiche] Histoire de l'Empereur, Notice bibliographique, Catalogue général de la BNF.
  13. Henri Beraldi, Les graveurs du Dix-neuvième siècle, tome IX, Paris, Conquet, 1889, p. 190.
  14. Voir l'exemplaire de la réédition de 1849, Louis-Philippe, ex-roi des marionnettes, ou, Polichinel devenu philosophe (Getty Research Institute) — sur archive.org.
  15. Le Courrier français, Paris, 23 avril 1848, p. 4sur Gallica.
  16. Annuaire de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques, volumes 1 et 2, Paris, Commission des auteurs et compositeurs dramatiques, 1869, cf. index — en ligne.
  17. Tournachon, Nadar j[eu]ne et Cie, Notice bibliographie, Catalogue général de la BNF.
  18. Dernier jour de l'exposition de 1865, voir pp. 14-15, sur Gallica.
  19. « Collection d'autographes formée par Félix et Paul Nadar » vol. XVII Lemaître-Lysès], sur Gallica.
  20. Propos rapportés par Antoine Compagnon, In: Baudelaire: L'Irréductible, Flammarion, 2014, notes 22-24.
  21. Archives de Paris 16e, acte de décès no 752, année 1889 (vue 8/31)
  22. Registre journalier d'inhumation du Cimetières des Batignolles de 1889 en date du 11 juillet (page 7/31)
  23. Andrieux, Fiche exposant SAF 1880, base salons du musée d'Orsay.
  24. Défilé de la gendarmerie de la Seine, Notice objet, Catalogue en ligne Paris-Musées.
  25. Garde national blessé, Notice objet, Catalogue en ligne Paris-Musées.
  26. Notice objet, Catalogue des collections en ligne, sur reseau-canope.fr.

Liens externes

  • Portail de la peinture
  • Portail de la gravure et de l'estampe
  • Portail de l’humour
  • Portail du romantisme
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.