Yolande de Bretagne

Yolande de Dreux ou Yolande de Bretagne (1218-), dame du Pallet, comtesse de Penthièvre, puis de la Fère-en-Tardenois, est une princesse bretonne. En 1226, à l'âge de sept ans, elle est promise au roi Henri III d'Angleterre mais se marie finalement au demi-frère de celui-ci, Hugues XI le Brun, de la maison de Lusignan. Par ce mariage, elle devient dame de Lusignan, comtesse de la Marche et d'Angoulême.

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Biographie

Famille

Elle est la seule fille de Pierre Ier de Dreux dit Mauclerc, duc-baillistre de Bretagne, et d'Alix de Thouars, duchesse de Bretagne. Elle a deux frères : L'ainé, Jean (1217-1286), deviendra duc de Bretagne sous le nom de Jean Ier de Bretagne dit le Roux à la mort de sa mère en 1221. Le benjamin, Arthur nait en 1220 mais ne vit que jusqu'en 1224. Les grands-parents paternels de Yolande sont Robert II, Comte de Dreux et Yolande de Coucy, ses grands-parents maternels sont Guy de Thouars et Constance, Duchesse de Bretagne[1].

Yolande a également un demi-frère, Olivier de Braine, fils soit de la seconde épouse de Pierre Mauclerc, Marguerite de Montaigu, dame de La Garnache et de Commequiers puis de Machecoul (1188/90-après 1241), soit plus vraisemblablement d'une inconnue dénommée Nicole (♰ le ), simple maîtresse ou épouse dont on ignore l'origine. Olivier de Braine hérita de la seigneurie de Machecoul et devient ainsi Olivier Ier de Machecoul et fonde le rameau familial de Machecoul.

Alliance, apanage et héritage

Yolande de Bretagne

En 1236 Thibault IV comte de Champagne, roi de Navarre, Hugues X comte de la Marche, Isabelle comtesse d'Angoulême et son père signent une alliance[2],[3]. La même année, elle épouse Hugues XI le Brun[4] (v. 1221-1250). À l'occasion de son mariage Yolande reçoit en dot la seigneurie du Pallet[5],[6] et le comté de Penthièvre[7] (à l'exception de Jugon)[8], confisqué en 1213 à Henri Ier d'Avaugour[9].

En 1250, au décès de son père, Yolande hérite de la seigneurie de Gometz-le-Châtel[10].

En 1263, son frère Jean Ier le Roux reprend possession du comté de Penthièvre et l'échange avec les seigneuries de la Fère-en-Tardenois (Champagne), de Chilly et de Longjumeau[11] (Île-de-France)[12].

Décès et sépulture

Yolande meurt au Château de Bouteville le . Elle fut inhumée en compagnie de sa mère dans l'abbaye Notre-Dame de Villeneuve près de Nantes. Ce tombeau[13] portait l'épitaphe de Yolande autour de son gisant :

« Ici se trouve Yolande, noble fille de Pierre de Braine, duc des Bretons, que couvre cette lourde plaque brillante. Le comté s'illustra de <celle qui fut> la fleur du territoire de la Marche. Elle brûla d'amour magnifique pour le Seigneur. Elle était mesurée dans ses richesses, savante, amie de la piété, constante, généreuse, pudique de corps et d'esprit, douce, féconde en vertus, agréable par sa voix, pure en tout, patiente, éloquente dans ses discours. Que sainte Marie, pieuse Mère de Dieu, brillante étoile du jour, persuade Dieu de lui préparer un lieu de repos. Le dimanche après la fête de saint Denis [15 octobre] est morte dame Yolande, comtesse de la Marche et d'Angoulême, en l'an du Seigneur 1272. »[14]

Fiançailles, mariage et descendance

Fiançailles

Yolande, héritière potentielle de son frère et de la Bretagne jusqu'à la naissance de son neveu, le futur Jean II de Bretagne en 1239, fut fiancée à de nombreuses reprises à de grands seigneurs :

1225 : Henri III d'Angleterre

Par le traité signé entre son père et le roi d'Angleterre en 1225 elle est promise, à l'âge de sept ans, au roi Henri III d'Angleterre. Par une lettre datée du , le roi confirme ses fiançailles avec Jolentam filiam Petri ducis Brittanniae et comitis Richemundiae. Le mariage n'eut pas lieu à cause de l'opposition de la France et à la suite du traité de Vendôme en , Yolande est confiée à la garde de cinq seigneurs de sa parenté (Philippe Hurepel, fils de Philippe Auguste, ses oncles Henri de Braine, archevêque de Reims et Robert III de Dreux, Enguerrand III de Coucy et Mathieu de Montmorency, connétable de France)[15]. Henri III qui ne pouvait se résoudre à cet échec intervient encore auprès de Pierre Mauclerc le avant d'épouser finalement Éléonore de Provence en 1236[16].

1227 : Jean de France

Les secondes fiançailles eurent lieu en par le traité de Vendôme sous l'égide de la régente Blanche de Castille. Yolande est alors promise à Jean de France, comte d'Anjou, fils du roi Louis VIII de France. Elle est alors dotée de Brie, de Champtoceaux, et des territoires que son père pourrait acquérir en Anjou, ainsi que de Saint-James du Beuvron, La Perrière et Bellême après la mort de son père. De plus, en cas de décès du duc Jean le Roux, Jean de France et Yolande ne pourraient lui succéder tant que leurs père Pierre Ier vivra[15]. Les fiançailles sont rompues peu de temps avant la mort à l'âge de 13 ans de Jean en 1232[17].

1231 : Thibault IV de Champagne

Les troisièmes fiançailles eurent lieu en 1231. Yolande est promise à Thibault IV de Champagne veuf depuis le . Comme ce fut le cas lors des fiançailles précédentes, le mariage ne fut pas prononcé, après l'intervention de Blanche de Castille auprès du pape Grégoire IX qui interdit l'union pour « cause de parenté » le . L'alliance entre la Bretagne et la Champagne fut toutefois scellée par le mariage en de son frère le futur duc Jean Ier avec Blanche de Champagne fille et héritière de Thibaut IV[18].

Elle est l'objet d'une chanson du comte Thibaut IV de Champagne, débat entre le comte et un certain Robert, où Thibaut regrette le projet de mariage avec « un si lointaing baron ». Le trouvère la décrit son visage comme très pâle: « Il veut marier sa fille/ Dont le visage est si pur/ Que l'on pourrait s'y mirer ! »[19]

1236 : Hugues XI le Brun

En , à l'âge de 18 ans, Yolande se marie finalement avec Hugues XI le Brun, fils du comte de la Marche et d'Isabelle comtesse d'Angoulême, veuve de Jean sans Terre. Hugues XI le Brun succédera à sa mère, Isabelle, en 1246 en tant que comte d'Angoulême et à son père, Hugues X de Lusignan, en 1249 en tant que comte de la Marche et seigneur de Lusignan[20]. De cette union naquit six enfants :

  1. Isabelle de Lusignan (av. 1239-18 fév. ap. 1314), dame de Marcillac, de Commequiers et de Beauvoir. Elle épouse en premières noces Geoffroy VI de Rancon (av. 1241-1263) et en secondes noces Maurice III de Montaigu, seigneur de Belleville.
  2. Hugues XII de Lusignan, comte de la Marche et d'Angoulême (av. 1241-ap. ), marié le à Jeanne de Fougères (av. 1242-ap. 1273), dame de Fougères et de Porhoët avec qui il eut six enfants connus. Il décède lors de la huitième croisade.
  3. Alix de Lusignan (ap. 1236-1290), mariée en 1253 à Gilbert II de Clare (1243-1295), 7e comte de Gloucester et comte de Hertford avec qui elle eut deux filles (Isabelle et Jeanne).
  4. Marie de Lusignan (1242-ap. 1266), mariée à Robert III de Ferrières (1240-1279), 6e comte de Derby ; sans descendance.
  5. Guy de Lusignan, (v. 1243-/), seigneur de Couhé et de Peyrat, seigneur de La Fère-en-Tardenois puis de Frontenay.
  6. Yolande de Lusignan (av. 1250-1306), mariée à Pierre Ier (?-ap. 1273), seigneur de Préaux.

Le , son mari est tué dans le cadre de la septième croisade lors de la bataille de Fariskur en Égypte[21]. Yolande de Dreux devient alors régente des fiefs de la Marche et d'Angoulême au nom de son fils Hugues XII de Lusignan entre 1250 et 1257[22].

Armoiries

de 1236 à 1249[23]

Blasonnement :
burelé d'argent et d'azur, chargé de six lionceaux de gueules brochants, posés trois, deux et un.
Commentaires : Elle ne porte pas les armes de son père en parties des armes de son mari.

de 1249 à 1272[24]

Blasonnement :
Mi-parti aux armes de Dreux-Bretagne et aux armes des Lusignan
Commentaires : Yolande de Bretagne choisit de faire figurer le blason de son père à dextre plutôt qu'à sénestre, contrairement à l'usage, elle fait donc le choix de valoriser son lignage d'origine. Cela correspond à la légende de son nouveau sceau qui la présente comme fille de Pierre, comte de Bretagne, plutôt que comme femme de son mari dans son ancien sceau.[25]

Notes et références

  1. Yolande de Bretagne (1218-1272) est la cousine de la seconde épouse de Raoul II d'Exoudun, Yolande de Dreux (1216-1239).
  2. Mémoires pour servir de preuves à l'histoire ecclésiastique et civile de Bretagne (éd. Dom Hyacinthe Morice), t. I, Paris, (lire en ligne), partie 900
  3. Layettes du trésor des chartes, de l'année 1224 à l'année 1246 (éd. Alexandre Teulet), t. II, Paris, Plon, (lire en ligne), partie 2443, p. 313
    1236, dimanche 13 avril : Hugues [X] de Lusignan, comte de la Marche et d'Angoulême, et son épouse, Isabelle d'Angoulême, forment une alliance défensive avec Pierre [Ier Mauclerc], comte de Bretagne et de Richemont et Thibaut [IV de Champagne], roi de Navarre.
  4. Clément de VASSELOT de REGNE, Le "Parentat" Lusignan (Xe – XIVe siècles) : structures, parenté vécue, solidarités et pouvoir d’un lignage arborescent, vol. 1 : Texte (Thèse de doctorat en histoire médiévale, sous la direction de John Tolan et de Martin Aurell), Université de Nantes, (lire en ligne), p. 854
    « Yolande de Bretagne qui épouse Hugues XI, frère de Marguerite, en 1236, est elle-aussi une Thouars par sa mère, Alix, fille du gardien de Bretagne, Guy de Thouars, et petite-fille de Denise de Lusignan. Cette union avec la famille ducale bretonne renforce aussi les liens des comtes de la Marche avec les Thouars. »
  5. Située au sud-est de Nantes
  6. Mémoires pour servir de preuves à l'histoire ecclésiastique et civile de Bretagne (éd .Dom Hyacinthe Morice), t. I, Paris, (lire en ligne), col. 925-926
    1245, Juillet : Hugues [XI] le Brun, seigneur du Pallet, et son épouse Yolande [de Bretagne] étaient en conflit avec le prévôt de Vertou : ils revendiquaient pour eux et leurs hommes du Pallet le droit de passer librement sur la chaussée des moulins du monastère de Vertou et de faire aller et venir leurs barques et leurs navires. Après de nombreuses disputes, Hugues [XI] abandonne au prévôt les droits qu'il prétendait avoir.
  7. Mémoires pour servir de preuves à l'histoire ecclésiastique et civile de Bretagne (éd. Dom Hyacinthe Morice), t. I, Paris, (lire en ligne), col. 931-932
    1247, juillet, Le Pallet : Hugues [XI] le Brun, comte d'Angoulême, et son épouse Yolande de Bretagne, héritière et dame de Penthièvre confirment les donations des ducs de Bretagne Geoffroy [II] Plantagenêt et Pierre [Ier] Mauclerc et de la duchesse Alix [de Thouars] en faveur du prieuré de Lamballe du monastère de Marmoutier.
  8. Glossarium mediae et infimae latinitatis (éd Charles du Fresne du Cange), t. I, Paris, (lire en ligne), p. 464
    « Eodem tempore data et atournata fuit Penthevria, excepto Jugonio, Hugoni filio comitis de Marchia, cum filia Petri comitis totius Britannie »
  9. Vincent LAUNAY, Le roi en son duché : étude sur les relations entre le roi de France et l’aristocratie de Bretagne (1199-1328) (Thèse de doctorat en Histoire sous la direction de Florian Mazel), Université de Rennes 2, , p. 311
  10. Layettes du trésor des chartes, de l'année 1247 à l'année 1260 (éd. Joseph de Laborde), t. III, Paris, Plon, (lire en ligne), partie 4162, p. 234
    1255, avril : Yolande [de Bretagne], comtesse de la Marche et d'Angoulême donne à son fidèle Guy, seigneur de Chevreuse, chevalier, une rente annuelle de 30 livres parisis à percevoir sur la prévôté de Gometz-le-Châtel pour laquelle Guy lui fait hommage lige.
  11. Les olim ou registres des arrêts rendus par la cour du roi : sous les règnes de Saint Louis, de Philippe le Hardi, de Philippe le Bel, de Louis le Hutin et de Philippe le Long (éd. Jacques Claude Beugnot), t. I : 1254-1273, Paris, Imprimerie royale, (lire en ligne), XI, p. 249-250
    1267, 9 février, Parlement de Paris : Yolande de Bretagne, comtesse douairière de la Marche et d'Angoulême, était en conflit avec les agents royaux au sujet de la justice de Boissy et de plusieurs autres points. Le parlement de Paris diligente une enquête et, compte tenu de ses résultats, lui attribue la basse justice de Boissy. Les ormes tombés en dehors du village que les gens du roi avaient emmené devront être rapportés. Les bestiaux vendus dans son marché de Longjumeau sont maintenus dans l'exemption des droits de péage à Montlhéry, pourvu qu'ils y passent le jour-même ou le lendemain du jour du marché, avant la troisième heure. En revanche, le Parlement déclare la comtesse mal fondée à réclamer la justicedu fief de la Briche.
  12. Actes de Pierre de Dreux, duc de Bretagne (1213-1237), (éd. Marjolaine Lémeillat), Rennes, Presses Universitaires de Rennes, coll. « Sources médiévales de l'Histoire de Bretagne », , partie 107, p. 199-200
  13. Inventaire des dessins exécutés pour Roger de Gaignières et conservés aux Départements des estampes et des manuscrits (éd. Henri Bouchot), t. I, Paris, (lire en ligne), partie 1961, p. 217
    Tombeau en forme de socle de cuivre émaillé à base de maçonnerie, vu à plat, sur lequel sont représentées deux dames du XIIIe siècle, l'une tenant un sceptre, et l'autre ayant les mains jointes. La seconde seule a une inscription gravée sur la tranche de la cuvette. Sur le pourtour du tombeau et sur le socle, sont peints en émail les blasons des alliances des deux dames.
  14. Corpus des inscriptions de la France médiévale, volume 23, CNRS (lire en ligne), p. 111
  15. Actes de Pierre de Dreux, duc de Bretagne (1213-1237) (éd. Marjolaine Lémeillat), Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Sources médiévales de l'histoire de Bretagne », , acte no 61
  16. Barthélémy-Amédée Pocquet du Haut-Jussé Les Papes et les Ducs de Bretagne COOP Breizh Spézet (2000) (ISBN 284346 0778) p. 96
  17. Barthélémy-Amédée Pocquet du Haut-Jussé op. cit. p. 97
  18. Barthélémy-Amédée Pocquet du Haut-Jussé op. cit. p. 97-98
  19. Thibaut de Champagne : les chansons, Honoré Champion, chanson no 45
  20. Auguste Dupouy Histoire de Bretagne, Ancienne Librairie Furne, Boivin & Cie éditeurs, Paris 1941 p. 97
  21. (la) Matthieu PARIS (éd. Henry Richards Luard), Matthaei Parisiensis, monachi Sancti Albani, Chronica majora. 5. A. D. 1248 to A. D. 1259, vol. 5, Londres, Longman, 1872-1884, 777 p. (lire en ligne), p. 158
    « Hugo Brunus comes de Marchia cujus pater paulo ante obiit apud Damiatan »
  22. Layettes du trésor des chartes, de l'année 1247 à l'année 1260 (éd. Joseph de Laborde), t. III, Paris, Plon, (lire en ligne), partie 4372, p. 375-376
    1257, samedi 22 septembre, Longpont : Hugues [XII] de Lusignan, comte de la Marche et d'Angoulême a demandé au comte de Poitiers et de Toulouse, Alphonse, de la recevoir à l'hommage bien qu'il n'ait pas atteint sa majorité. Alphonse ayant acquiescé, il lui fait hommage lige pour le comté de la Marche et les châteaux de Lusignan et de Crozant. Il promet de mettre ses châteaux à sa disposition à chaque réquisition. S'il enfreignait ces dispositions, qu'il faisait la guerre au comte et qu'il refusait de se présenter à la cour comtale sur convocation, il serait astreint à payer une amende de 10000 livres tournois. Sa mère, Yolande [de Bretagne] et son oncle, Guy de Lusignan, seigneur de Cognac, sont garants.
  23. Université de Poitiers, « Yolande de Bretagne - premier - sceau du secret », sur http://www.sigilla.org/
  24. Université de Poitiers, « Yolande de Bretagne - deuxième - sceau du secret », sur http://www.sigilla.org/
  25. « Yolande de Bretagne - deuxième - sceau », sur http://www.sigilla.org

Bibliographie

Sigillographie

Articles connexes

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