Arsène-Hippolyte Rivey

Arsène-Hippolyte-Florent Rivey, né le à Caen et mort le à Paris, est un peintre français.

Biographie

Fils d’Anne-Elisabeth Cliquet et de Louis-Hippolyte Rivey, relieur de livres, au n° 2 rue Hamon, Rivey obtint, après avoir été un bon élève de l’école élémentaire, le premier prix de dessin, en 1854, à l’école municipale de sa ville natale dirigée alors par Guillard. Après avoir travaillé pendant quelque temps dans l’atelier de cet artiste et fait de nombreuses copies au musée, le conseil municipal lui accorda une subvention qui lui permit d’aller continuer ses études artistiques à Paris, où il entra, sur la recommandation de son professeur, dans l’atelier de Picot, membre de l’Institut[1].

Mis en rapport, par l’intermédiaire de relations de voisinage, avec Chardigny, sculpteur aixois, mais dont le père était rouennais, celui-ci s’intéressa au jeune artiste dont il pouvait constater chaque jour le travail assidu et les bonnes dispositions[1]. Il fit son buste[2] et, pendant les séances de pose, il lui conseilla d’entrer dans l’atelier de Couture, qu’il connaissait particulièrement et auquel il se chargea de le recommander[1]. Ce dernier, qui venait d’être décoré et nommé membre de l’Institut, avait déposé ses pinceaux et ne s’occupait que fort peu de son atelier[1]. De plus, s’il n’était pas un élève de David, il était un de ses fervents disciples, ce qui n’était guère dans les idées de Rivey, grand admirateur des peintres flamands, dont il avait souvent copié les œuvres dans le musée de sa ville natale[1].

À cette époque, Couture était à l’apogée de sa réputation ; car, si son grand tableau de l’Orgie romaine, exposé au salon de 1847, avait donné lieu à de nombreuses critiques, le Fauconnier, qu’il venait de peindre et qu’il avait exposé chez Barbedienne, était considéré comme une œuvre irréprochable ; de plus, Napoléon III lui avait confié l’exécution d’une œuvre importante : le Baptême du Prince Impérial[1]. Le nouveau milieu dans lequel il se trouvait ne fut pas sans exercer quelque influence sur la manière de faire du jeune artiste[1]. Il s’étudia surtout à donner plus de transparence à ses ombres et plus de relief à ses figures ; quelques portraits, qu’il fit à cette époque, se ressentirent de son passage dans l’atelier du maitre[1].

Toutefois, il ne trouva pas là ce qu’il cherchait, et lorsqu’en 1860, un élève de Léon Cogniet, Léon Bonnat, ouvrit un atelier, il fut un des premiers à s’inscrire au nombre de ses élèves car il retrouvait dans les œuvres du jeune artiste la hardiesse du dessin, la vigueur du modelé et surtout la couleur brillante de l’école flamande, vers laquelle il s’était senti entrainé dès le début de sa carrière[1]. Il rencontra en Bonnat, non seulement un conseiller bienveillant, mais encore un ami sincère[1].

En 1861, Rivey exposait à Caen trois portraits que Léon Coignet, membre du jury, distingua comme étant d’une excellente facture, et pour lesquels il obtint une médaille d’argent[1]. En 1865, il exposait au salon des Champs-Elysées un fort bon portrait[1]. Il en fut de même aux expositions de 1866 et 1868[1]. En 1870, un tableau intitulé Intimité fut très remarqué. En 1873, il exposait à Paris, puis à Caen, Brenda. Ce tableau, pour lequel il obtint dans cette dernière ville une médaille d’or, représentait une saltimbanque en costume de parade, corsage de couleur rouge à manches courtes, jupe blanche, figure aux traits réguliers mais fatigués ; c’était une œuvre dont M. Buret, secrétaire de la Société des Beaux-Arts, a dit dans son rapport sur l’exposition, reproduisant l’opinion de Charles Blanc, président du jury :

« L’auteur de ce tableau ne cherche pas la grâce ; son œuvre est empreinte d’une réalité que quelques-uns même trouvent excessive ; mais, à côté de cela, quelles magnifiques couleurs ! Comme la lumière joue sur ces étoffes de soie et fait ressortir les chairs, auxquelles de savants empâtements donnent un relief extraordinaire ! C’est là, sans contredit, une belle œuvre qui fait honneur à M. Rivey, un peintre, on peut le dire, de premier ordre, qui n’a qu’un tort, si nous pouvons laisser échapper ce petit mot de critique, celui de ne pas choisir un sujet moins vulgaire[1]. »

Toutefois, le jeune peintre éprouva une grande déception lorsqu’il apprit que la Commission choisie par le conseil municipal afin d’acquérir pour le musée une des meilleures œuvres exposées, avait donné la préférence à la Rolande de Céline Dubosc, élève de Chaplin, membre du jury[1]. Rivey vendit, sur la recommandation de Charles Blanc, à un amateur un prix beaucoup plus élevé que celui offert par la ville de Caen son tableau qu’il avait remporté à Paris[1].

En 1874, il exposa le portrait du docteur Le Dentu, que celui-ci, sur le conseil de Bonnat, offrit, en 1902, au musée de Caen, seul tableau que ce musée possède de lui[1]. En 1875, il envoya au Salon deux portraits de femme, puis, en 1876, un saint Sébastien, bon tableau d’église, excellente étude d’anatomie ; en 1879 et en 1880, son portrait de Mme D…, qui lui valut une médaille de 3e classe[1]. Il prit part ensuite à toutes les expositions jusqu’en 1888, où il obtint une médaille de 2e classe pour un Buveur et le portrait d’Eugène Berthelon[1]. Enfin, il obtint une médaille de bronze aux Expositions Universelles de 1889 et 1900[3].

Vers 1876, il fut chargé de peindre un grand médaillon du Poussin, pour mettre dans une voussure d’une des salles de l’hôtel de ville de Paris ; il le dessina d’après une maquette modelée exprès par son collègue et ami, Arthur Le Duc, ce qui lui facilita la mise en perspective de son dessin[1].

Parmi les œuvres intéressantes des dix dernières années de sa carrière, un Gentilhomme flamand, Salon de 1882, et un Officier de la garde bourgeoise des Pays-Bas au XVIIe siècle (salon de 1885)[1]. Il fit un voyage en Hollande et en Belgique, visitant les musées de Harlem, de La Haye, d’Amsterdam et d’Anvers, où il put, réalisant son rêve de jeunesse, admirer les œuvres magnifiques des grands Maitres flamands et hollandais[1]. De plus, il eut l’occasion de trouver à peindre, dans ce pays, plusieurs portraits, dont le prix rémunérateur l’indemnisa largement de ses frais de voyage et de séjour[1].

En 1882, Il épousa, Marguerite Lemonnier, originaire du Mans, dont la bonté et l’amabilité ont laissé le meilleur souvenir à tous ceux qui l’ont connue[1]. Elle avait le gout des arts, et s’intéressait tout particulièrement aux travaux de son mari, qui la consultait souvent et tenait compte de ses appréciations[1]. Pendant les vingt ans qu’ils passèrent ensemble, ils eussent été parfaitement heureux, si plusieurs maladies n’étaient venues troubler leur bonheur[1]. Vers cette époque, Rivey fit bâtir à Riva-Bella l’une des premières maisons qui furent édifiées sur cette plage[1]. C’était une habitation modeste, composée d’un simple rez-de-chaussée surélevé de quelques marches au-dessus du sol, entourée de gazons et ornée de quelques fleurs pendant la belle saison ; chaque année il y venait passer ses deux mois de vacances[1]. Mais, plus tard, l’air de la mer étant devenu absolument contraire à la santé de sa femme, il se résigna à s’en défaire et la vendit en 1902[1].

En 1890, bien qu’il eut obtenu de nombreux succès aux salons des Champs-Elysées, il se sépara de la Société des artistes français pour fonder, avec Ernest Meissonier, Carolus-Duran, Ribot, Prinet, Dagnan-Bouvret, Leduc, etc., la Société nationale des beaux-arts, pensant que les conditions faites à ses adhérents par la nouvelle Compagnie seraient favorables à ses intérêts, en lui permettant d’exposer un plus grand nombre de tableaux[1]. De 1890 jusqu’en 1903, il prit part à toutes les expositions de la Société Nationale par l’envoi de 5 à 6 toiles à chacune d’elles[1]. Parmi celles qui furent le plus remarquées : en 1895, l’Ordre de départ (époque de Louis XIII) ; en 1896, Une Tricoteuse ; en 1899, L’Estampeur ; enfin, en 1903, deux portraits de femme, dont un excellent, un portrait d’homme, une Vue du Sacré-Cœur, effet de soleil couchant pris de son atelier de la rue des Martyrs, puis encore deux paysages : Dunes à l’embouchure de l’Orne, et une Vue de Riva Bella, reproduite dans le catalogue illustré[1].

Dans le commencement de l’année 1903, l’état de santé de sa femme s’aggrava subitement, et commença de donner de sérieuses inquiétudes à ses amis[1]. Après de longues souffrances, elle succombait malgré les bons soins qui lui avaient été prodigués[1]. À partir de ce moment, le caractère de Rivey, qui, quelques semaines avant, avait perdu son frère, changea complètement[1]. La disparition brusque des deux êtres qu’il aimait le plus l’affecta profondément[1]. Il fut pris d’un profond découragement et cessa de travailler[1]. Il s’enfermait des journées entières dans son atelier et s’abimait dans la contemplation du portrait de sa femme défunte[4]. Alarmés de son état mental, ses amis essayèrent vainement de l’arracher à ses tristes pensées[1]. Toutefois, comme il avait résolu de changer de logement, celui qu’il occupait au 12, rue de Navarin, étant trop important pour lui seul, ils espéraient que le travail nécessité par le déménagement pourrait lui apporter quelque distraction et atténuer son chagrin, mais il n’en fut pas ainsi, car, rentré chez lui le soir du , il fut pris d’un accès de dépression et se suicida, sans que rien eut pu faire pressentir sa fatale résolution[1]. Sa femme de ménage, en entrant dans son appartement le trouva pendu devant le portrait de sa femme placé sur une sorte d'autel, parmi les dentelles et les fleurs[5].

Par les soins de sa belle-sœur, un service funèbre fut célébré dans sa paroisse de Notre-Dame de Lorette[1]. De nombreux amis et collègues accompagnèrent jusqu’à sa dernière demeure cet artiste de talent, qui venait de disparaitre d’une manière si tragique[1]. Il fut inhumé au cimetière de Montmartre, où il repose auprès de ceux qu’il avait tant aimés[1].

Quelques œuvres

  • Saint Sébastien, 2e moitié XIXe siècle, Le Mans ; musée de Tessé.
  • Tête de jeune fille, étude, 4e quart XIXe siècle, Rouen ; musée des beaux-arts.
  • Tête de turc, étude, 4e quart XIXe siècle, Rouen ; musée des beaux-arts.
  • Un étudiant hollandais, 2e moitié XIXe siècle, Le Mans ; musée de Tessé.
  • La Lettre, 1er quart XXe siècle, Nantes ; musée d'arts.

Notes et références

  1. Jules Ravenel, Vice-Président de la Société des Beaux-Arts, « Rivey artiste peintre », Bulletin de la Société des Beaux-Arts de Caen, Valin, vol. 11, , p. 373-9 (lire en ligne, consulté le ). Même bulletin sur Gallica.
  2. Ce buste a figuré, sous le n° 234, à l’Exposition organisée à Caen, en 1861, par la Société des Beaux-Arts de cette ville.
  3. « La Chronique des arts et de la curiosité : supplément à la Gazette des beaux-arts », Gazette des beaux-arts, no 32, , p. 271 (lire en ligne, consulté le ).
  4. « Suicide d’un artiste peintre », Le Radical, no 278, , p. 2 (lire en ligne, consulté le ).
  5. « Douleur mortelle », Gil Blas, no 25, , p. 2 (lire en ligne, consulté le ).

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