Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l'identité française et chrétienne

L'Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l'identité française et chrétienne (AGRIF) est une association fondée en 1984, située à l'extrême droite[1],[2],[3] et liée au Rassemblement national, qui lutte, principalement par voie juridique, contre « le racisme antifrançais et antichrétien, la pornographie et les atteintes au respect de la femme et de l'enfant »[4],[5],[6].

Organisation

L'AGRIF a pour président Bernard Antony, ancien député européen du Front national[3]. Elle affirme une vocation à défendre les victimes des « racismes antifrançais et antichrétien »[7], mais aussi de tous les racismes[8]. L'Agrif édite un bulletin trimestriel sous le titre homophone La Griffe[9] et revendique plus de 6 000 adhérents[8].

La création de l'AGRIF date de 1984 en introduisant les notions de « lutte contre le racisme en général » et de « lutte contre le racisme antifrançais et antichrétien »[10], dans les statuts d'une association déjà existante, le Centre national de coordination des comités d'action politique et sociale, fondé en 1975, entre autres par Pierre Arnaud et Daniel Burdeyron[11]. L'association prend également le nom d'« Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l'identité française et chrétienne »[12].

Orientation politique

L'association est généralement classée comme d'extrême droite ou proche de l'extrême droite[1],[2],[3].

Relations avec le Front national

Parmi les dirigeants de l'AGRIF il y a quelques années se retrouvaient des cadres, actuels ou anciens, du Front national (FN). Son président, Bernard Antony, ancien député européen, se défendait de représenter au FN un courant « national-catholique », récusant totalement ce concept gallican. En revanche il entendait y défendre l'enracinement et l'éclairage de la politique dans les valeurs chrétiennes. Parmi ses dirigeants figurent Jeanne Smits, ancienne directrice du quotidien Présent, Richard Haddad, candidat FN aux élections municipales de 2001, d'origine libano-arménienne, la journaliste Cécile Montmirail et l'avocat Jérôme Triomphe. On y note encore la présence de musulmans convertis au christianisme tel que Christophe Bilek (Notre-Dame de Kabylie)[13] ou le pasteur Said Oujibou[14], français d'origine marocaine. On y trouve encore la musicologue catholique d'origine juive Judith Cabaud, Yves Daoudal, qui fut directeur de National-Hebdo, le journaliste Serge de Beketch (mort en 2007). Wallerand de Saint-Just[15] qui fut de l'équipe fondatrice, en fut l'avocat dans plusieurs procès et, sur recommandation de Bernard Antony, l'avocat de Jean-Marie Le Pen, de Brigitte Bardot, de Samir Geagea au Liban et de la famille Kegelin.

À la fin des années 1990, Michel Guiniot, membre du bureau politique du Front national, désigna l'AGRIF comme une « entité du FN » dans l'Aisne Nouvelle. Bernard Antony a refusé de faire de l'AGRIF une courroie de transmission de ce parti, affirmant son indépendance vis-à-vis de tous les partis politiques[16]. Pour les auteurs du Dictionnaire de l'extrême droite, « les communiqués officiels de l'association, qui réaffirment "l'indépendance" de l'AGRIF vis-à-vis de "tous les partis politiques", n'ont jamais été pris au sérieux par personne. La séparation des structures au sein de cette mouvance a surtout permis de ne pas trop rendre de comptes à l'appareil frontiste, tout en bénéficiant de ses réseaux[17]. »

Le tribunal administratif de Nice (Alpes-Maritimes) en 1997, estime que l'Agrif « ne constitue pas une organisation indépendante mais est une simple émanation d'un parti politique, le Front national, puisque son délégué dans le département du Var est précisément Jean-Marie Le Chevallier, seul député de ce parti » et que « le caractère très restreint de son objet social, à savoir la lutte contre le racisme antifrançais et antichrétien, est en réalité directement contraire au caractère général et universel de la lutte contre le racisme, comme d'ailleurs, et au surplus, du message évangélique »[6].

Mais un éloignement plus grand entre l'AGRIF et la direction du Front national est constaté depuis que Bernard Antony a démissionné du bureau politique du parti en 2003 et qu'il a pris ses distances notamment avec Marine Le Pen[18],[19] pour lui par trop jacobine, coupable de ne pas vouloir modifier la loi Veil et ne voulant pas aborder sur le fond la question de l'islam.

Actions en justice

En 2011, l'AGRIF a été déboutée et condamnée à des dommages et intérêts[20] dans le cadre de l'action qu'elle menait à la suite de l'exposition, par la Collection Lambert, du Piss Christ d'Andres Serrano.

En 2012, l'AGRIF a été déboutée dans l'affaire du parti des Indigènes de la République. Sa porte-parole, Houria Bouteldja, était poursuivie pour « injures raciales contre les Français », par l'utilisation du terme « Souchien », pour Français de souche, homophonie de sous-chien. La cour d'appel de Toulouse n'a retenu ni l'injure raciale ni le « racisme »[21]. Le pourvoi en cassation de l'AGRIF a été rejeté le [22].

En 2017, l’AGRIF est débouté par la cour d’appel de Metz après avoir obtenu en première instance la condamnation à un euro symbolique à titre de dommages-intérêts du Fonds régional d'art contemporain de Lorraine. Après cassation, le dossier est toutefois renvoyé le devant la cour d’appel de Paris pour être rejugé[23].

En 2017 et 2018, l'AGRIF est déboutée par deux arrêts de la Cour de cassation de sa plainte contre Saïd Bouamama et Saïd Zouggagh, co-auteurs de la production de rap Nique la France. L'un le qui met Saïd Bouamama hors de cause[24], l'autre le qui casse et annule, sans renvoi, la condamnation de Saïd Zouggagh à une peine d'un euro et 3 000 euros de dommages-intérêts [25]. Dans ce dernier arrêt, la Cour de cassation indique : « éclairés par l’ensemble du texte de la chanson et compte tenu du langage en usage dans le genre du rap, les propos poursuivis, pour outranciers, injustes ou vulgaires qu’ils puissent être regardés, entendent dénoncer le racisme prêté à la société française, qu’elle aurait hérité de son passé colonialiste, et s’inscrivent à ce titre dans le contexte d’un débat d’intérêt général »[26].

Notes et références

  1. Erwan Lecœur (dir), Dictionnaire de l'extrême droite, Paris, Éditions Larousse, coll. À présent, 2007 (ISBN 978-2-03-582622-0).
  2. Fiammetta Venner, Extrême France, Grasset, 2006.
  3. Pour la justice, le concept de «Français de souche» n'existe pas, Le Figaro, 20/3/2015
  4. Présentation du livre La Preuve par l'AGRIF
  5. Bernard Antony : « La Halde est une institution nocive», 1er février 2009.
  6. Jean-Pierre Laborde, « Le tribunal administratif conteste l'“antiracisme” d'une association satellite du Front national », Le Monde, 28 décembre 1997.
  7. « L'AGRIF contre les propos racistes de Houria Bouteldja », par Bernard Antony dans Voix des Français, mars 2008.
  8. Dictionnaire de la réplique, Godefroy de Bouillon, 2004, p. 15 (article de Bernard Antony).
  9. (ISSN 1169-4378)
  10. Arrêt du 16 avril 1991 de la chambre criminelle de la Cour de cassation : « la cour d'appel relève que celle-ci, créée en 1974, a déclaré, le 30 octobre 1984, l'adoption d'une nouvelle dénomination, comportant un objectif de lutte contre le racisme, ainsi que l'adjonction de cet objectif aux dispositions des statuts relatives à son objet ; (…) qu'elle ajoute que l'association manifeste formellement, aux termes de l'article 2 de ses statuts, son intention de lutter contre le racisme, en spécifiant que sa lutte s'inscrit dans le cadre de la défense des « valeurs menacées de notre civilisation », et plus précisément contre le « racisme antifrançais et antichrétien », lequel constitue une forme de racisme punissable »
  11. Jean-Yves Camus et René Monzat, Les Droites nationales et radicales en France : répertoire critique, Lyon, Presses universitaires de Lyon, , 526 p. (ISBN 2-7297-0416-7), p. 154.
  12. Modifications du titre et des statuts déclarés à la Préfecture de Paris le 26 octobre 1984 et parus au Journal Officiel de la république française du 29 octobre 1984. Cf «La preuve par l'Agrif», Cécile Montmirail, p. 22
  13. Intervention de Christophe Bilek au « déjeuner d'Amitié Française » organisé par l'Agrif le 5 octobre 2013 à Paris et son intervention à la veillée de prière en soutien au chrétiens persécutés, organisée par Bernard Antony le 13 octobre 2012 à Paris
  14. Saïd Oujibou, l'islamiste devenu pasteur
  15. Source : communiqué de compte rendu de l'assemblée générale du 11 janvier 2007.
  16. Communiqué de Bernard Antony, président de l'Agrif, du 20 juin 2006 en réponse à des propos de Michel Guiniot : « L'Agrif n'est pas une "entité du FN". Elle ne l'a jamais été et ne le sera jamais, pas plus que l'entité de tout autre parti. »
  17. Article Agrif, p. 50.
  18. La Dépêche du Midi, 16 janvier 2011, « En désaccord avec Le Pen père et fille sur plusieurs sujets, Bernard Antony a quitté le bureau politique du FN. »
  19. Op. cit., p. 51. Voir aussi Bernard Antony, « Devoir de réponse à Marine Le Pen et à Philippe de Villiers », édition Godefroy de Bouillon, 2006.
  20. « Une association qui demandait l’interdiction de toute reproduction de Piss Christ, déboutée en justice » sur le site artclair.com.
  21. Voir sur toulouseinfos.fr.
  22. Chambre criminelle, 14 janvier 2014, 12-88.282, Inédit - Cour de cassation, Légifrance.
  23. « Exposition Infamille au FRAC Metz : la Cour de Cassation annule l’arrêt de la Cour d’Appel », Le Républicain lorrain, (lire en ligne, consulté le )
  24. Chambre criminelle, 28 février 2017, 16-80522, publié au bulletin - cour de cassation, Légifrance.
  25. « La Cour d'appel de Lyon condamne “Nique la France” », sur Valeurs actuelles (consulté le )
  26. Chambre criminelle, 11 décembre 2018, 18-80525, non publié au bulletin - cour de cassation, Légifrance.

Annexes

Bibliographie

Liens externes

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