Site protohistorique de Kach Kouch

Le site protohistorique de Kach Kouch est situé sur une colline à environ 9 kilomètres de la ligne de la côte actuelle. La colline est connue sous le nom de Dhar Moudden et à une altitude d’environ 60 mètres au-dessus du niveau de la mer. Le site est situé à proximité de la route reliant Oued Laou à Talambote, près du village de Chrouda.

Historique des recherches

L’établissement protohistorique de Kach Kouch a été localisé par une équipe maroco-espagnole lors d’une prospection dirigée vers la fin des années 1980 par Mohamed-Abdeljalil El Hajraoui et Manuel Fernández-Miranda. Le site a été l’objet d’une intervention archéologique en 1992, qui avait comme objectif l’ouverture de quatre sondages visant à confirmer les caractéristiques et la chronologie du site [1]. Cette intervention a permis de confirmer l’existence d’un établissement, qui s’étend sur environ 0,5 ha., composé de cabanes construites en terre et en branches soutenues par des poteaux. Le village était occupé par une communauté locale pratiquant un mode de vie agropastoral, à une époque indéterminée entre la fin du VIIIème s. et le début du VIème s. av. J.-C. La chronologie, la proximité géographique et les caractéristiques architecturales et urbaines du site de Kach Kouch en font un site similaire à celui documenté sur la place de la Cathédrale de Ceuta[2]. Les résultats de l'intervention réalisée à Kach Kouch en sont restés pratiquement inédits à ce jour. Un nouveau projet de recherche sera donc mené dans les années à venir dans le but de donner une continuité à la recherche dans ce site archéologique

La fondation de Kach Kouch est en relation avec l’arrivée des marins phéniciens, comme le suggèrent tant la localisation du site, contrôlant les voies d’accès de la côte vers l’intérieur des terres à travers la vallée de l’Oued Laou, comme la présence d’amphores de tradition phénicienne dès le début de sa séquence stratigraphique et l’absence dans le site de niveaux antérieures aux VIIIème et VIIème s. av. J.-C. Les amphores de tradition phénicienne documentées à Kach Kouch étaient probablement utilisées pour transporter du vin, de l’huile d’olive et du blé dans le cadre des échanges que cette communauté entretenait avec des communautés ou des individus d’origine ou de culture phénicienne. Il est possible que Kach Kouch ait fonctionné non seulement comme un centre de réception des produits, mais aussi comme un intermédiaire-redistributeur avec d’autres établissements ou communautés habitant les régions intérieures du Rif occidental. Dans ce sens, il serait intéressant de clarifier quel(s) produit(s) les Phéniciens obtienaient grâce à cet échange, puisque l’existence d’éléphants, d’ours et de lions a été documentée dans cette zone, dont on pouvait obtenir des peaux et de l’ivoire [3]. En plus de ces possibilités de chasse, l’estuaire et la vallée de l’Oued Laou offrent une grande fertilité agricole pour ces communautés, qui pratiquaient l’agriculture et l’élevage depuis le milieu du VIème millénaire av. J.-C. [4]. En ce sens, les possibles « silos » documentés sur le site de Kach Kouch pourraient suggérer la production et le stockage d’un surplus agricole qui aurait pu être utilisé comme moyen d’échange par cette communauté.

Contexte archéologique

La rive africaine du détroit de Gibraltar a connu une revitalisation des études sur la période protohistorique au cours des dernières décennies grâce aux nouvelles interventions réalisées sur des sites connus de l’historiographie tels que Lixus, Kouass et Kitane. Par ailleurs, de nouveaux projets et interventions archéologiques ont permis de localiser et d’étudier plusieurs sites inédits, qui complètent et enrichissent la connaissance de la protohistoire de la région, comme Ceuta, Sidi Driss, Azib Slaoui, Dar Aseqfane ou Tahadart [5]. Au cours des dernières décennies, de nouvelles interventions ont également été réalisées dans des sites clés du sud de la péninsule Ibérique, comme Cerro del Villar, Castillo de Doña Blanca ou Cadix [6]. Grâce aux données générées au cours des dernières décennies il est possible de faire une approche plus solide et plus complète aux premiers siècles du Ier millénaire av. J.-C. dans la zone du détroit.

Malgré le progrès considérable de ces dernières années, la rive africaine du détroit continue à présenter certaines problématiques qui empêchent une lecture diachronique des différentes phases de la préhistoire récente avant l’arrivée des Phéniciens. Cela est dû à l’existence d’un déficit de données concernant la période allant du IIIème au début du Ier millénaire av. J.-C. et plus particulièrement les établissements en plein air de cette période [7]. Nouvelles prospections extensives dans la province de Tétouan ont conduit à la localisation de plus de 40 établissements en plein air datables entre le IIIe et le début du Ier millénaire av. J.-C., bien que – pour l’instant – aucun de ces sites n’ait fait l’objet d’interventions archéologiques, ce qui explique le peu d’informations disponibles [8]. De plus, les données existantes sur les phases post-néolithiques de la Préhistoire récente provient principalement des fouilles réalisées dans les nécropoles à cistes et les grottes de la région, ce qui implique un problème de registre étant donné que l’information fournie par ce type de sites est limitée, surtout si l’on considère que la plupart des occupations ou fréquentations de grottes, spécialement au cours du IIe millénaire, sont liées à des occupations sporadiques par des bergers [9] et a des contextes funéraires [10].   

Références

  1. (Bokbot et Onrubia, 1995)
  2. Villada, Ramon, Suárez, 2010
  3. (Ouchaou et Hossini, 2008 ; Villada, Ramon, Suárez, 2010 ; Ouchaou et al., 2017)
  4. (Daugas et El Idrisi, 2008 ; Morales et al. 2016)
  5. (Bridoux, Kbiri Alaoui, Kermorvant, 2009 ; Villada, Ramon, Suárez, 2010 ; Kbiri Alaoui, 2012 ; El Khayari et Akerraz, 2012 ; Raissouni et al., 2016 ; Akerraz et al., 2020 ; Akerraz et Palumbo, 2020)
  6. (Ruiz, Pérez, 1995 ; Aubet et al., 1999 ; Torres et al., 2014)
  7. (Broodbank et Lucarini, 2019)
  8. (Ramos et al., 2011 ; Raissouni et al., 2016)
  9. (Ramos et al., 2011)
  10. (Ramos et al., 2011 ; Vijande-Vila, 2019

Bibliographie

  • AUBET, María Eugenia; CARMONA, Pilar; CURIÀ, E.; DELGADO, Ana, FERNÁNDEZ, A.; PÁRRAGA, A. (1999): Cerro del Villar I. El asentamiento fenicio en la desembocadura del río Guadalhorce y su interacción con el hinterland.
  • AKERRAZ, Aomar, PALUMBO, Gaetano; EL KHAYARI, Abdelaziz; ES-SADRA, Layla; AMORÓS-RUIZ, Victoria; BOUZZOUGAR, Abdeljalil; CARVAJAL, Jose Cristobal; CROSS, Anke Lizbeth; FILI, Abdallah; FLETCHER, Richard; PARENTI, Fabio; STREMKE, Frank; BELARMINO, Simone; BENJAÂFAR, Fadoua; DJELLAL, Youssef; HERRÁN, Mikel; JOHNSON, Devin; MOHAMED, H. Moustafa; OUAKRIM, Zayd; SEHASSEH, El Mehdi (2020): The Transformation of the Moroccan Landscape in the Early Islamic Period. Preliminary report on the 2017-2018 fieldwork. Fasti Online.
  • AKERRAZ, Aomar ; PALUMBO, Gaetano (ed.) (2020) : Archéologie de la Péninsule Tingitane: contribution à la carte archéologique du Maroc. VESAM VIII, Rabat.
  • BOKBOT, Youssef ; ONRUBIA PINTADO, Jorge (1995) : Substrat autochtone et colonisation phénicienne au Maroc. VIe CIHAAN, p. 219-231.
  • BRIDOUX, Virginie; KBIRI ALAOUI, Mohamed; KERMORVANT, Alain (2009): Kouass (Asilah, Maroc). Mélanges de l'école française de Rome, vol. 121, no 1, p. 340-350.
  • BROODBANK, Cyprian; LUCARINI, Giulio. The dynamics of Mediterranean Africa, ca. 9600–1000 BC: An interpretative synthesis of knowns and unknowns. Journal of Mediterranean Archaeology, 2019, vol. 32, no 2, p. 195-267.
  • DAUGAS, Jean-Pierre; EL IDRISSI, Abdelaziz (2008): Neolítico Antiguo de Marruecos. Las ocupaciones humanas de la cueva de Caf Taht el Ghar (Tetuán): Los productos arqueológicos en el contexto del Estrecho de Gibraltar, 2008, vol. 1, p. 63.
  • RUIZ MATA, Diego Ruiz; J. PÉREZ, Carmen (1995) El poblado fenicio del Castillo de Doña Blanca:(El Puerto de Santa María, Cádiz). Ayuntamiento de El Puerto de Santa María.
  • EL KHAYARI, Abdelaziz; AKERRAZ, Aomar (2012): Al-Qsar Al-Awwal. Nouvelles données archéologiques sur l’occupation de la base vallée de Ksar de la période tardo-antique au haut Moyen-âge. Ksar Seghir, vol. 2500, p. 11-34.
  • KBIRI ALAOUI, Mohamed (2012) Sidi Driss: un établissement phénicien à l’embouchure de l’oued Amekrane. Les Traces, vol. 2012, p. 145-149.
  • MORALES, Jacob.; PÉREZ, Guillem; PEÑA-CHOCARRO, Leonor; BOKBOT, YOussef; VERA, Juan Carlos; MARTÍNEZ, Rafael M.; LINSTÄDTER, Jörg (2016): The introduction of South-Western Asian domesticated plants in North-Western Africa: an archaeobotanical contribution from Neolithic Morocco. Quaternary International, 412, 96-109.
  • RAISSOUNI, Baraka; BERNAL CASASOLA, Darío; EL KHAYARI, Abdelaziz; RAMOS MUÑOZ, José; ZOUAK, Mehdi (2016). Carta arqueológica del Norte de Marruecos (2008-2012): prospección y yacimientos, un primer avance: vol. I. Carta arqueológica del Norte de Marruecos (2008-2012), 1-558.
  • RAMOS, J., ZOUAK, M., VIJANDE, E., CANTILLO, J. J., DOMÍNGUEZ-BELLA, S., MAATE, A., EL IDRISSI, A., CABRAL, A., GUTIÉRREZ, J. M. y BARRENA, A. (2011): «Carta arqueológica del Norte de Marruecos. Resultados de las ocupaciones de sociedades prehistóricas (campañas 2009 y 2010)», en D. Bernal, B. Raissouni, M. Arcila, M. Youbi Idrisi, J. Ramos, M. Zouak, J.A. López, M. Maatouk, A. El Khayari, B. El Moumni, M. Ghottes y A. Azzariohi (eds.): Arqueología y turismo en el círculo del Estrecho, Colección de Monografías del Museo Arqueológico de Tetuán (III), Servicio de Publicaciones de la Universidad de Cádiz, Servicio de Publicaciones de la Diputación de Cádiz y Dirección Regional de Cultura Tánger-Tetuán, Cádiz, pp. 53-94.
  • VIJANDE-VILA, Eduardo; CANTILLO-DUARTE, Juan Jesús; RAMOS-MUÑOZ, José; BERNAL-CASASOLA, Darío; DOMÍNGUEZ-BELLA, Salvador; ALMISAS-CRUZ, Sergio; CLEMENTE-CONTE, Ignacio; MAZZUCO, Niccolò; SORIGUER-ESCOFET, Mila; RUÍZ-ZAPATA, Blanca; GIL, María J.; UZQUIANO, Paloma; ZURRO, Débora; RIQUELME, José Antonio; SÁNCHEZ-MARCO, Antonio; ROSAS, Antonio; ESTALRICH, Almudena; BASTIR, Marcus; CUENCA-SOLANA, David; MORENO-MÁRQUEZ, Adolfo; MARTÍNEZ-CUESTA, Renata; RAMOS-GARCÍA, Pablo (2019): The Occupation of Benzú Cave (Ceuta) by Neolithic and Bronze Age Societies. African Archaeological Review, 2019, vol. 36, no 2, p. 317-338.
  • VILLADA, Fernando; RAMON, Joan; SUÁREZ, José (2010): El asentamiento protohistórico de Ceuta. Indígenas y fenicios en la orilla norteafricana del Estrecho de Gibraltar. Ciudad Autónoma de Ceuta, Archivo General de Ceuta, Ciudad Autónoma de Ceuta.
  • OUCHAOU, Brahim; HOSSINI, Saida (2008): Los restos óseos de Caf Taht el Ghar. Imagen de la zoocenosis de la región de Tetuán del Egipaleolítico a la Protohistoria. En Las ocupaciones humanas de la cueva de Caf Taht el Ghar (Tetuán): los productos arqueológicos en el contexto del estrecho de Gibraltar. Servicio de Publicaciones, p. 37-48.
  • OUCHAOU, Brahim; BOUGARIANE, Bouchra; ZAHID, Siham (2017): Les grands mammifères disparus du Maroc durant l’Holocène. L'Anthropologie, vol. 121, no 1-2, p. 133-145.
  • TORRES, M., LÓPEZ, E., GENER, J. M., NAVARRO, M. A., PAJUELO, J. M. (2014). El material cerámico de los contextos fenicios del ‘Teatro Cómico’de Cádiz: un análisis. Los Fenicios en la Bahía de Cádiz: Nuevas investigaciones, Collezione di Studi Fenici, 46, 51-82.

Liens externes

Page du projet archéologique

  • Portail du Maroc
  • Portail de l’archéologie
  • Portail des Phéniciens et du monde punique
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.