Rif
Le Rif — en rifain : ⴰⵔⵔⵉⴼ, Arrif (« rivage, bord »), est la région septentrionale du Maroc, bordée par la mer Méditerranée au nord, l'Algérie à l'est, les plaines le séparant du Moyen Atlas au sud et l'océan Atlantique à l'ouest. Composé de montagnes et de plaines, le Rif s'étend sur près de 500 km de Tanger jusqu'à la Moulouya.
Cet article concerne la région marocaine. Pour l'île néerlandaise, voir Rif (île). Pour le rabbin, voir Isaac ben Jacob Alfassi.
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Rif | |
Carte topographique du Maroc montrant le Rif au nord. | |
Géographie | |
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Altitude | 2 450 m, Djebel Tidirhine |
Massif | Arc de Gibraltar |
Longueur | 360 km |
Largeur | 100 km |
Administration | |
Pays | Maroc |
Régions | Tanger-Tétouan-Al Hoceïma, Fès-Meknès, Oriental |
Géologie | |
Roches | Roches métamorphiques et sédimentaires |
La grande région du Rif se subdivise en trois régions. Le Rif oriental (Melilla, Driouch, Nador) et le Rif central (Al Hoceima, Targuist) correspondent au Nord-Est du Maroc, tous deux habités par les Rifains. Le Rif occidental (Tétouan, Chefchaouen), également appelé péninsule tingitane, occupe le Nord-Ouest du Maroc ; il est principalement habité par les Jbala, Ghomara et Sanhadja de Srayr.
Dans le cadre de l'organisation territoriale du Maroc, son territoire fait partie de trois régions administratives : Oriental (appartiennent au Rif les provinces de Nador, Driouch et les moitiés nord des provinces de Guercif et Taourirt), Tanger-Tétouan-Al Hoceïma (l'ensemble de la région appartient au Rif), Fès-Meknès (appartiennent au Rif la moitié nord de la province de Taza et la province de Taounate).
Géographie
Situation, topographie
Le Rif peut être subdivisé en trois parties. Le Rif occidental qui s'étend de la péninsule Tingitane jusqu'à la petite région de Ketama et est habité en grande majorité par les Jbala et Ghomara. Le territoire y est très accidenté avec de grandes montagnes et le climat est doux avec de fortes précipitations durant l'hiver. Les principales villes du Rif occidental sont Tanger, Tétouan et Chefchaouen.
Le Rif central s'étend quant à lui de la région de Ketama jusqu'aux environs de l'oued Kert. Il s'agit principalement d'une zone berbérophone, habitée par les Rifains, Sanhadja de Srayr et Jbala. Les principales villes de cette région sont Al Hoceïma, Targuist, Imzouren, Ketama et Taounate. Le territoire y est très accidenté avec de très hautes montagnes pouvant parfois même dépasser les 2 400 mètres d'altitude (djebel Tidirhine). Les monts sont généralement enneigés en hiver et ce jusqu'aux mois de mars-avril.
Le Rif oriental s'étend de l'oued Kert (Ait Said) jusqu'à la frontière algéro-marocaine. Les principales villes sont Nador, Al Aroui, Zeghanghane, Selouane, Zaïo, et Ras El Ma. Le territoire est relativement plat, avec de grandes plaines notamment au sud de Nador. Les montagnes n'y sont pas très hautes comparées à la partie ouest du Rif et exceptés les monts Gourougou et de Kebdana, il n'y a plus de grands reliefs. Il s'agit principalement d'une zone berbérophone (rifain), cependant on trouve un grand nombre d'arabophones à l’extrême est de la région autour des villes de Zaïo et de Berkane.
Hydrologie
Le Rif est irrigué par la Moulouya[1], qui traverse dans le sens sud-ouest/nord-est la moitié de la longueur du Maroc depuis Tounfite jusqu'à Kebdana à une dizaine de kilomètres de la frontière algérienne.
La Moulouya porte le barrage Mohamed V, qui alimente une usine hydroélectrique de 85 GWh et retient en principe 650 millions de m3, capacité réduite de moitié à cause de l'envasement. Son principal affluent de rive droite, le Za, porte le barrage Hassan II.
Géologie
Nées de la collision des plaques continentales d'Afrique et d'Europe, les montagnes rifaines font écho aux sierras andalouses.
L'argile et le schiste dominent, donnant des reliefs progressifs et arrondis. Quelques massifs calcaires abritent de superbes canyons (région de Tahar-Souk notamment).
En 2004, un violent tremblement de terre a dévasté les environs d'Al Hoceima.
Climat et végétation
Les parties occidentale et centrale, exposées à la fois aux perturbations océaniques et méditerranéennes, sont très arrosées (jusqu'à 2 000 mm d'eau par an vers Ketama), avec un enneigement prolongé au-dessus de 1 800 mètres d'altitude (le djebel Tidirine est généralement enneigé de novembre à mars). C'est la région du Maghreb la plus humide avec la Kabylie occidentale.
Le cèdre, arbre exigeant en eau et en lumière, forme de vastes forêts au-dessus de 1 500 mètres, le sapin s'étend sur une surface de 3 500 hectares au parc national de Talassemtane, à Tissuka et Tassaout près de Chefchaouen (Chaouen). Plus bas, c'est le domaine du chêne vert, et plus à l'est, résistant à la sècheresse, celui du pin.
La culture du cannabis est intensive dans la partie centrale du Rif, entre Chefchaouen et Temsaman.
Histoire
Le Rif compte de nombreux sites préhistoriques et protohistoriques, notamment des habitats récemment étudiés par des missions archéologiques[2].
Entre le début du VIIIe siècle et le début du XIe siècle, le royaume de Nekor occupait une partie du Rif, autour de la baie d'Alhoceima.
Dès la chute du royaume de Nekor, le Rif fut sous le contrôle des différentes dynasties qui gouvernèrent le Maroc, et les côtes subissent régulièrement les assauts espagnols et portugais dès le XVe siècle.
En mars 1912, la France place l'Empire chérifien sous « protection », et accorde le Nord du pays, le Rif, à l'Espagne. De 1912 à 1956, le Rif fait partie du protectorat espagnol du nord du Maroc.
Protohistoire et Préhistoire
Le Rif, tout comme le reste de l'Afrique du Nord, est habité par des hominidés depuis plus de 500 000 ans.
Les époques moustérienne (120 000-40 000) et atérienne (60 000-40 000) marquent cette région du monde. Plus de 300 sites préhistoriques et protohistoriques ont été mis au jour. Dans une grotte dans la commune d’Afsou, à environ 50 km au sud de la ville de Nador, l’abri d’Ifri n’Ammar livre une chronostratigraphie surprenante, notamment une alternance de « cultures moustériennes et atériennes ». La grotte préhistorique témoigne d’un potentiel archéologique et d’une séquence stratigraphique de plus de six mètres de profondeur. Les vestiges appartiennent aux cultures du Paléolithique moyen et du Paléolithique supérieur.
Autour de 20000 av. J.-C. apparaît l'Ibéromaurusien dont on retrouve énormément de traces.
La guerre du Rif
Abdelkrim al-Khattabi, originaire du petit village d'Ajdir de la tribu d'Aït Ouriaghel, fut enseignant et journaliste à Mritch, ville où il travaillait avec les Espagnols. Il était instruit selon les rites islamiques traditionnels et enseignait aux Espagnols la langue arabe. Il pensait ainsi faire rapprocher les deux peuples culturellement. Mais découvrant les travaux forcés dans les mines rifaines qui alimentaient l'industrie militaire espagnole, et les travaux forcés dans les champs, Abdelkrim retourne dans son village natal pour soulever les tribus rifaines et entamer la Résistance et la rébellion pour un peuple souverain[3].
En 1921, la tribu berbère des Aït Ouriaghel, sous la conduite du jeune Abd El Krim, suivie par le reste des tribus du Rif, se soulève contre les Espagnols. Le général Manuel Fernández Silvestre dispose alors d'une puissante armée, forte de 60 000 soldats espagnols, pour contrer la guérilla rifaine. En juillet, l'armée de Fernández Silvestre est écrasée lors de la bataille d'Anoual (12 000 morts)[4]. Face à cette défaite, le général se suicide.
En juillet 1921, Abd El Krim proclame la République confédérée des Tribus du Rif. Les Rifains espèrent alors rallier les tribus de la zone sous protectorat français. L'Espagne mène une guerre intensive contre les tribus du Rif sans succès décisif[4].
En 1925, Moulay Moh'and lance une offensive vers le sud contre les forces françaises du général Lyautey, qui sont battues et doivent se replier sur Fès et Taza. Paris envoie alors Philippe Pétain en lui accordant les moyens qui avaient été refusés à Lyautey. Le vainqueur de Verdun, allié au général Primo de Rivera, lance une vaste offensive. Le conflit, extrêmement dur, pousse les hommes d'Abd El Krim à demander à leur chef d'engager des négociations.
Des pourparlers s'engagent à Oujda mais, face à l'intransigeance des Français et des Espagnols, Abd El Krim est contraint à la reddition et est exilé à La Réunion pendant 20 ans. Autorisé à se rendre en France, il rejoint Marseille d'où il parviendra à s'échapper et à rejoindre Le Caire en Égypte, où il meurt en 1963.
La promotion 1924-1926 de l'École spéciale militaire de Saint-Cyr porte le nom de « promotion du Rif ».
Depuis l'indépendance
En 1958, 30 000 soldats marocains, avec à leur tête le futur Hassan II, alors chef d'état-major des Forces armées, répriment un soulèvement dans le Rif (près de 3 000 morts)[5]. La région se retrouvera de fait exclue de la vie politique marocaine durant tout le règne de Hassan II. Un second soulèvement se produisit dans la région en 1984[6] et causa, selon différentes sources, des dizaines de morts ainsi que des emprisonnements avec de lourdes peines.
La pauvreté de la région contraint des dizaines de milliers de Rifains à se rendre chaque année en Oranie française pour y travailler la vigne. La guerre d'Algérie ralentit puis interdit cette source de revenus, augmentant la misère de la région[4].
Cette même pauvreté contraint la population à une émigration massive vers des pays européens pour travailler tout d'abord dans les houillères du Nord de la France et dans celles de Belgique, puis aux Pays-Bas et plus récemment en Espagne[4]. Cette émigration permet, en dépit de l'isolement de cette région, une amélioration relative des conditions de vie des populations locales. Ainsi, les quelque 1,5 million de Marocains installés au Benelux et dans le Nord-Pas-de-Calais en 2015 sont en majorité rifains[4].
La crise sociale que connaît la région engendre un mouvement de contestation populaire depuis octobre 2016.
Économie
L'économie de la région du Rif est basée essentiellement sur :
- les revenus des Rifains résidant à l'étranger[réf. nécessaire] ;
- la culture de cannabis[7] ; la commercialisation du haschisch est étroitement liée à l'émigration rifaine, avec Anvers et Rotterdam pour plaque tournante[4] ;
- la contrebande à Nador avec les enclaves espagnoles de Melilla et Ceuta[réf. nécessaire] ;
- les dépôts bancaires liquides dont la région est la 2e place après la région de Casablanca[réf. nécessaire].
Références
- Notes et mémoires du service géologique du Maroc, no 278.
- Abdeslam Mikdad, Josef Eiwanger, Abiba Atki, Abdelwahed Ben-Neer, Youssef Bokbot, Reiner Hutterer, Jörg Linstädter et Touria Mouhcine, « Recherches historiques et proto-historiques dans le Rif oriental (Maroc) - Rapport préliminaire », Beiträge zur Allgemeinen und Vergleichenden archäologie, Institut national des sciences de l'archéologie et du patrimoine, vol. 20, , p. 109-158 (lire en ligne, consulté le ), p. 114.
- Germain Ayache, la Guerre du rif, on l'appela le héros du rif[réf. incomplète]
- Comment la Belgique est devenue le sanctuaire du désastre, Pierre Vermeren, lefigaro.fr, 16 novembre 2015
- (en) Creative State: Forty Years of Migration and Development Policy in Morocco ..., By Natasha Nefertiti Iskander,p.44
- Au-dessous du volcan, L'Humanité, .
- « Le Rif reste accro au kif », sur Libération.fr,
Voir aussi
Bibliographie
- Jacques/Jawhar Vignet-Zunz, Sociétés de montagnes méditerranéennes : Ouarsenis (Algérie), Jabal Al-Akhdar (Libye), Rif (Maroc), Éditions L'Harmattan, , 312 p. (ISBN 978-2-14-003169-4, lire en ligne)
Lien externe
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