Séduction

La séduction désigne, en science sociale, un ensemble de procédés de manipulation visant à obtenir une faveur, donner une image avantageuse de soi ou susciter délibérément une émotion, une admiration, une attraction, voire un sentiment amoureux de la part d'un ou de plusieurs individus. Le mot est dérivé du latin seducere, signifiant littéralement « tirer à l'écart »[1]. Elle possède, selon le but recherché, des connotations négatives si elle nuit à autrui, ou au contraire être perçue culturellement comme positive dans le cas par exemple de la séduction amoureuse pour laquelle elle est associée à une forte empathie. Giacomo Casanova, personnage historique (connu par ses mémoires que recoupent de nombreux documents), et Don Juan[2], figure mythique (créée par Tirso de Molina dans El Burlador de Sevilla), sont considérés comme les types du séducteur.

Cet article possède un paronyme, voir Subduction.
Cet article concerne le comportement. Pour le film italien, voir Séduction (film).
La Proposition (1872), de William-Adolphe Bouguereau (1825-1905).

Dans le champ sexuel ou amoureux elle est parfois appelée « flirt » ou, plus rarement, « marivaudage ». Elle se présente alors souvent comme une forme de jeu ou de défi dans lequel une personne (voire les deux) s’efforce de susciter de l'attirance et/ou des sentiments chez l'autre par divers stratagèmes (appelés draguer, faire la cour, etc.) généralement dans le but d'obtenir une relation sexuelle ou une relation amoureuse.

Le but le plus simple de la séduction consiste à obtenir un avantage de la part de la personne séduite, par exemple des rapports sexuels, des cadeaux ou de l'argent (lorsqu'elle est effectuée de mauvaise foi et pour abuser de quelqu'un, il est question de manipulation physique ou psychologique). Mais son but peut être plus complexe et détourné : reconnaissance, estime de soi, narcissisme ou simple satisfaction du désir de vaincre. Elle est souvent perçue comme une étape préliminaire nécessaire à une relation sexuelle occasionnelle et même à une relation amoureuse lorsque celle-ci fait suite à une rencontre dans ce but. Dans les autres cas elle s'instaure généralement par la suite et se poursuit de manière consciente au sein du couple. Elle est un élément de la complicité amoureuse sur laquelle ce dernier repose.

Du point de vue de la religion, la séduction est souvent considérée comme une forme de tentation, une invitation à commettre un péché ou un acte de faiblesse charnelle (étymologiquement, « détourner » du droit chemin)[3].

Histoire

La séduction est une icône populaire dans l'histoire et la fiction, en tant que conséquence sociale. Dans la Bible, Ève offre le fruit défendu à Adam. Ève n'est pas explicitement décrite comme séductrice[4], mais certaines œuvres artistiques ou extra-Bibliques adoptent ce point de vue. Ève elle-même a verbalement été séduite par un serpent, perçu, dans le Christianisme, comme étant la tentation du mal. Les sirènes, dans la mythologie grecque ont séduit les marins jusqu'à leur mort, en chantant ; Cléopâtre a séduit Jules César et Marc Antoine, et Dionysos était le Dieu de la séduction et du vin. Les grands séducteurs se classent de Genji jusqu'à James Bond.

Processus

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Tractation silencieuse

Avant tout approfondissement, il semble important de souligner que le comportement de séduction - si elle est hétérosexuelle et ciblée - a tendance à différer d'un sexe à l'autre[réf. nécessaire].

Si, chez l'homme, séduire est souvent une démarche active, demandant un ensemble d'efforts et de prises d'initiatives de sa part, les tentatives de séduire chez la femme sont régulièrement assimilées dans certains milieux à une forme d'incitation à la débauche. Pour cette raison, la part de la femme dans le phénomène de la séduction prend souvent une tournure plus passive, fondée sur la mise en valeur de ses atouts et l'émission de signes dits d'intérêt. L'attirance exercée par une femme est alors le plus souvent assimilée à son charme : elle est alors perçue comme une forme de séduction passive ou indirecte.

Ces signes d'intérêt, pouvant prendre différentes formes, et émis plus ou moins consciemment, jouent le rôle de « feux de signalisation » passant du rouge au vert : leur rôle est de signifier à l'homme qu'il peut établir le contact et poursuivre ses efforts. Le processus de séduction classique peut alors être envisagé comme la réponse d'un homme aux invitations d'approches et aux signes d'intérêts qu'il perçoit - à tort ou à raison, selon ses facultés de perception et d'interprétation.

Bien évidemment cette vision doit être nuancée, beaucoup de femmes appréciant de prendre l'initiative et beaucoup d'hommes appréciant que les femmes ne soient pas passives. On citera Anaïs Nin dans sa correspondance avec H. Miller : « Agir comme un homme (j’ai toujours eu en moi des éléments masculins) me faisait mal, parce que je suis extrêmement féminine. Il aurait été plus féminin de me satisfaire de la passion de différents amoureux, de les laisser m’aimer –mais je tenais à mon propre choix… qui tombait toujours sur des hommes plus faibles que je ne l’étais. J’ai profondément souffert, en tant que femme, des progrès que je pouvais faire. En tant qu’homme, j’aurais dû être heureuse d’avoir choisi ce que j’avais voulu. Que mon premier amour ait été homosexuel, et Hugo à demi estropié par des tabous moraux, fut mon malheur. C’est alors que je me tournai vers l’homme fort, John, mais il était sans imagination, sans poésie, et ne me comprenait pas. J’ai découvert la joie de diriger ma propre vie comme un homme, en faisant la cour à June, par exemple. »

Le processus de séduction est étroitement lié au mode de rencontre. Il peut être extrêmement abrégé dans la drague, ou le « cruising » (notamment des homosexuels), sorte de patrouille ou, dans un lieu ad hoc, chacun se cherche un partenaire. Il en va de même lors de rencontres sur certains sites internet.

Perspectives scientifiques

De très nombreuses études scientifiques ont tenté de repérer les tenants et aboutissants du processus de séduction.

Les phéromones peuvent jouer un rôle dans la séduction. Dans le règne animal, il a été établi qu'elles servent à indiquer la disponibilité des femelles prêtes à être fécondées à des partenaires potentiels éventuellement situés à plus de dix kilomètres. Chez l'homme, leur rôle est indéniable, quoiqu'il y ait une importance moins marquée que chez les autres espèces. Ainsi, au cours de différentes expériences, les sièges de salles d'attente, de cinémas ou de théâtres ont été aspergés d'une phéromone humaine mâle. Les femmes choisissaient majoritairement ces sièges alors que les hommes les évitaient systématiquement[réf. nécessaire].

L'importance des odeurs est également établie, notamment celles qui sont le fait des gènes immunitaires CMH qui donnent à chacun une signature olfactive personnelle[réf. nécessaire]. D'après un test effectué avec des tee-shirts portés deux nuits de suite par des hommes, les femmes préféreraient ceux qui présentent des gènes et donc des odeurs différents des leurs[réf. nécessaire]. Dans son analyse détaillée des comportements animaux, le biologiste Thierry Lodé[5] insiste sur le rôle du baiser. L'échange des salives initierait une exploration du système immunitaire (CMH) favorisant l'attrait de partenaires génétiquement différents. Le biologiste révèle également le rôle des caractères extravagants dans la séduction. Ces traits exagérés, très présents chez les animaux comme la queue du paon, résulteraient d'une tendance évolutive à l'exubérance et ces « stimuli supranormaux » provoqueraient un emballement du désir. D'après Thierry Lodé, cette même tendance qu'illustrent certains artistes comme Fernando Botero, met en évidence les éléments d'identité entre le beau, l'esthétique et la séduction. Enfin, toujours selon le même auteur, la séduction, définie à partir de caractères biologiques met encore en œuvre le système immunitaire des partenaires sexuels : c'est l'attirance pour les traits symétriques. En effet, la symétrie bilatérale fondamentale du corps est altérée par des accidents de croissance souvent dus à des maladies, ce qui révèle l'affaiblissement du système immunitaire. En préférant des partenaires sexuels aux traits symétriques, l'animal choisit un partenaire disposant d'un système immunitaire transmissible à sa progéniture et indemne de maladies.

Modes de séduction

Apparences

L'apparence physique peut jouer un rôle lors d'une séduction.

Le rôle de l'apparence physique et du vêtement est étudié par la sociologie, et notamment par la sociologie du corps. Le sociologue français Jean-François Amadieu cite une expérience établissant qu'un rapport taille-hanche de 0,71 est idéal chez les femmes selon les hommes[6]. Cela signifie une taille de 64 centimètres pour un tour de hanche de 90. Certains scientifiques estiment que de telles proportions sont les plus attractives car elles témoigneraient de l'excellent état de santé et de la fertilité de la partenaire, en plus de sa qualité génétique.

D'un point de vue encyclopédique, la personne qui cherche à séduire, « qui a un charme attirant et aguichant » est, entre autres, qualifiée de « sexy »[7]. De même que le dicton dit que « les goûts et les couleurs ne se discutent pas », le qualificatif sexy pour l'apparence physique peut avoir une signification différente d'une personne à l'autre. Certains fondamentaux sont cependant communément partagés : le terme « sexy » est souvent lié à l'apparence que donne un individu par son habillement : vêtements, accessoires. Il convient de remarquer que ce n'est pas le vêtement en lui-même qui est sexy, c'est la façon dont il est porté. Être sexy, c'est mettre ses formes en valeur : par contraste (pull très large et minijupe), par suggestion (col roulé moulant) ou par démonstration (décolleté). Dans tous les cas, il s'agit de mettre en valeur certaines parties du corps tout en les cachant ou en attirer l'attention et le désir à partir d'un détail (une nuque, une cheville, Jean-Jacques Rousseau était attiré par la simple vue d'un poignet). Catherine Örmen, historienne de la mode, explique que : « Tout est dans l'attitude »[8] : « La femme qui décide de passer du jour au lendemain d'une paire de tennis à des talons hauts ne devient pas sexy grâce à ces chaussures, mais par le fait que sa démarche va être différente. Elle va devoir changer de rythme, de déhanchement, et c'est toute sa façon d'être et de se comporter qui en est modifiée. Pour moi, être sexy aujourd'hui c'est cela : se donner la liberté d'essayer tout ce qui est disponible dans la mode, sans hésiter à jouer de la surenchère. »

Gestes

Les gestes sont également des déterminants essentiels. Le fondateur de l'éthologie humaine, Irenäus Eibl-Eibesfeldt a par exemple noté que dans plusieurs pays les jeunes femmes flirtent de la même façon : via un sourire, un battement de cils, un mouvement de la tête vers le côté, un regard au loin et un abaissement des paupières[9]. Le rôle du regard est aussi essentiel : le psychologue américain Eckhard Hess a pu constater qu'entre deux photographies d'une même femme, les hommes préfèrent celle sur laquelle ses pupilles sont dilatées, signe de désir.

Par ailleurs, les résultats de la psychologie sociale en matière de manipulation sont également approfondis, notamment ceux de Robert Cialdini.

Techniques

Évolution

L'évolution des modes de vie entraîne de profonds changements dans les modes de rencontre et dans les circonstances du flirt proto-amoureux. Ainsi, le nombre croissant de célibataires, dont un certain nombre de « déboussolés de la séduction », a suscité l'apparition de sites web de rencontres, version moderne de l'agence matrimoniale, et véritables succès commerciaux.

Certaines personnes, hommes ou femmes, n'ayant pas ou plus l'opportunité de faire des rencontres dans le cadre de leur vie privée ou professionnelle, ont désormais exclusivement recours à ce type de sites web pour entrer en contact avec d'autres personnes présentant des attentes et des centres d'intérêt similaires. Mais, paradoxalement, alors que le nombre de mises en contact virtuelles augmente, grâce à l'incroyable succès de ces sites web, les membres se font de plus en plus sélectifs.[10]

On remarque aussi depuis une dizaine d'années, l'apparition de coachs en séduction et sites spécialisés en conseils dans ce domaine.

Science humaine des relations

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Dans les pays occidentaux, depuis quelques années, de véritables communautés adeptes de diverses « méthodes de séduction » se sont formées. Une abréviation couramment utilisée par les sites web francophones est PUA tirée de l'anglais pick up artist.

Aux États-Unis, la plus connue est celle qui est présentée sur le site web fastseduction, une méthode parfois accusée de machisme. Elle consiste pour l'homme à se montrer « joueur, sexué et mystérieux » tout au long de son interaction avec la cible qu'il aura choisie[réf. nécessaire].

Il existe aujourd'hui une véritable communauté de la séduction présente sur des sites web spécifiques et dans laquelle s'échangent conseils et encouragements. À l'instar des lairs américains (le mot anglais lair signifie en français : tanière), des groupes locaux dans les villes les plus importantes se forment pour allier la pratique à la théorie.

Au-delà de la séduction elle-même, ce sont de nombreux concepts humains qui sont impliqués en périphérie du processus tels que le leadership au sein d'un groupe, la dépendance affective ou encore la différenciation.

Vision stratégique chinoise

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Par rapport à la drague offensive, compulsive et/ou machiste, il est possible de puiser dans les stratagèmes chinois des modèles inspirés de la pensée stratégique de Sun Tzu, auteur de L'Art de la guerre, le plus vieux traité de stratégie. Notamment, le premier stratagème d'un classique qui en contient trente-six, « Mener l'empereur en bateau » ou « Cacher dans la lumière » est parfaitement adaptable dans les ambiances de séducteurs. Selon Pierre Fayard répond que l'« art de la guerre et la séduction sont similaires », si ce n'est que la seconde se refuse à user de violence. En prônant la victoire en s'adaptant aux circonstances, une interprétation orientée de Sun Tzu incite à une séduction entendue comme une stratégie relationnelle.

Leurs sources d'inspiration sont multiples et éminemment éclectiques :

  • Les ouvrages traitant du développement personnel, qui leur permet de s'affirmer et de se construire une personnalité plus forte et plus résistante à la déstabilisation, imperméable au découragement et à la mauvaise humeur…
  • Jusque l'emploi détourné des ouvrages de stratégie militaire, qui leur permettent une acuité supérieure dans leur lecture des situations (cible isolée, entourée d'amis-obstacles potentiels, assiégée par les prétendants qu'il va falloir disqualifier, etc.).
  • Les traités de négociation commerciale, qui leur permettent d'apprendre à passer outre les obstacles dressés par l'objet de leur désir dans un réflexe de défense contre les importuns, et qu'on[Qui ?] pourrait considérer comme tenant de la sélection naturelle.
  • La psycho-sociologie, qui leur offre une meilleure compréhension des façons dont fonctionnent et réagissent les groupes d'individus et les moyens dont ils disposent pour s'assurer leur sympathie.

Notes et références

  1. « Séduire, définition », sur Larousse (consulté le )
  2. (en) Greene, Robert, The Art of Seduction, Penguin Books, (ISBN 0-14-200119-8)
  3. « L'alliance entre séduction et religion », sur Swissinfo, (consulté le )
  4. Genèse 2:6, 1 Timothy 2:14
  5. Thierry Lodé, La guerre des sexes chez les animaux Éditions Odile Jacob, Paris 2006.
  6. Le Poids des apparences. Beauté, amour et gloire, éditions Odile Jacob, 2002
  7. Dictionnaire de la langue française, éditions Larousse
  8. Modes XIXe et XXe siècles de Catherine Örmen, éditions Hazan, 2000
  9. Éthologie d'Irenäus Eibl-Eibesfeldt, ouvrage édité à Paris en 1972
  10. Nouvel Observateur N°1970 - 8/8/2002 « La rencontre de votre vie ; Dix millions de célibataires en quête de l'âme sœur »

Annexes

Bibliographie

  • Jean-Claude Bologne, L'invention de la drague : Une histoire de la conquête amoureuse, Paris, Points, , 385 p. (ISBN 978-2-7578-1964-7 et 2-7578-1964-X)
  • Frédéric Monneyron, Séduire. L'Imaginaire de la séduction de Don Giovanni à Mick Jagger, PUF, 1997
  • Pierre Fayard, Sun Tzu. Stratégie et Séduction, Dunod, 2009
  • Gisèle Harrus-Révidi, Qu'est-ce que la séduction ?, Petite bibliothèque Payot, , 288 p. (ISBN 978-2-228-90522-0 et 2-228-90522-4)
  • Cécile Dauphin (dir.) et Arlette Farge (dir.), Séduction et Sociétés : Approches historiques, Seuil, , 352 p. (présentation en ligne)

Articles connexes

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