Probus (empereur)

Probus (Marcus Aurelius Probus) (v. 232282) est empereur romain de juillet 276 à octobre 282. Héritant d’un Empire romain réunifié, il continue l’œuvre de sécurisation des frontières et de reconstruction économique entamée par Aurélien.

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Probus
Empereur romain

Buste de Probus, musée du Capitole
Règne
D’abord usurpateur puis légitime
septembre 276 - octobre 282 (~6 ans)
Période Empereurs illyriens
Précédé par Florien
Usurpé par Bonosus (280281)
Saturninus (281)
Proculus (281)
Suivi de Carus
Biographie
Nom de naissance Marcus Aurelius Probus
Naissance c.
Sirmium (Pannonie)
Décès octobre 282 (50 ans)
Sirmium (Pannonie)
Empereur romain

Il est mort assassiné, mais son meurtre est à part dans la longue liste des assassinats d'empereurs romains, qui furent généralement d'ordres politiques, car il fut assassiné par un petit groupe de soldats par refus d'un simple ordre, presque banal.

Biographie

Ses origines

Probus est né à Sirmium, capitale de la Pannonie. Ses origines familiales sont incertaines (fils de tribun militaire ou d’agriculteur), mais sa carrière militaire aurait été brillante : Valérien le remarque et lui confie le commandement d’une légion. Il combat les Germains et les Sarmates, aurait mené des missions de pacification en Afrique dans la région de Carthage. Il participe aux campagnes d’Aurélien contre Zénobie.

Son accession au pouvoir

En fin 275 ou début 276, Tacite le promeut commandant de l’armée d’Orient (dux orientis), pour assurer la protection de la Syrie et de l’Égypte. À la mort de Tacite en juin 276, Probus est proclamé empereur par ses soldats. Probus invite les meurtriers de Tacite à un banquet impérial et les fait massacrer.

Florien, peut-être parent, voire frère, de Tacite, s’est aussi fait proclamer empereur. Ses soldats l’assassinent et se rallient à Probus, qui peut faire ratifier sa proclamation par le Sénat romain.

Son règne

En 276 et 277, la Gaule est ravagée en profondeur par des raids des Francs et des Alamans. L’armée de Probus intercepte ces groupes de Germains à leur retour vers le Rhin, et leur inflige de terribles défaites. L’Histoire Auguste affirme que 400 000 barbares ont été tués, 16 000 enrôlés dans l’armée romaine, et tout leur butin récupéré. Ces chiffres paraissent gonflés, mais la reconstitution des effectifs romains par des contingents barbares est une tendance qui ne fera que s’accentuer.

En 277 et 278, Probus poursuit l’intervention romaine au-delà du Rhin, et récupère le contrôle des Champs Décumates, saillant stratégique entre le Rhin et le Danube perdu en 268 sous Gallien. Ces actions et la réorganisation du limes du Rhin mettent pour un temps la Gaule à l’abri des raids germains, mais de nombreuses villes ont été victimes des raids de 276.

De 278 à 279, Probus continue ses campagnes victorieuses en Rhétie contre les Vandales et les Burgondes, en Thrace contre les bandes Sarmates. Dans le même temps ses légats ramènent l’ordre en Isaurie en réduisant un chef brigand, Lydius ou Palfurnius, et en Égypte contre les incursions des tribus nomades Blemmyes.

Enfin, cette pacification des frontières s’achève par la signature d’une trêve avec le roi de Perse Vahram II.

Antoninien à l'effigie de Probus.

Quelques tentatives d’usurpation, qui sont plutôt des révoltes locales, sont facilement matées :

Le caractère improvisé de ces tentatives témoigne à la fois d’une relative amélioration de la discipline des armées, par rapport à la période d’insurrections multiples de la décennie précédente, et aussi de l’exaspération de populations atteintes par l’insécurité et la crise économique.

Ses réformes

Probus prend des mesures d’amélioration économique, notamment en faveur de l’agriculture :

  • Il autorise la culture de la vigne et la production de vin en Gaule et en Pannonie, annulant de fait l'édit de Domitien promulgué près de deux siècles plus tôt pour interdire la plantation de nouvelles vignes[4],[5].
  • Il installe sur des terres agricoles abandonnées des petits groupes de Germains. Ces colons, désignés par divers termes (déditices, lètes, gentiles) étaient fortement imposés et mobilisables en cas de besoin. De nombreux Francs et Alamans s’implantent ainsi comme colons ou comme auxiliaires en Gaule belgique et le long du Rhin. Cette tentative échoue cependant avec les Goths qui se révoltent et pillent, d'après l'Histoire Auguste, plusieurs cités avant d'être massacrés et refoulés en dehors de l'empire.
  • Il lance des travaux d’intérêt public, de voirie, de drainage et de bonification des terres, auxquels il astreint aussi les troupes. Des papyrus découverts en Égypte témoignent que Probus oblige les propriétaires à entretenir les canaux d’irrigation, sous peine de sanctions sévères.
  • Il amnistie en grand nombre les élites et autres administrateurs qui prirent parti dans le passé pour l'un des 30 usurpateurs, et qui furent donc en sédition de l'empire Romain. Seuls ceux jugés coupables de crimes de sang ne seront pas amnistiés.

Sa fin

En 281, Probus peut enfin célébrer son triomphe à Rome et donner des jeux magnifiques : joutes de 600 gladiateurs, décors de centaines d’arbres pour des chasses avec des milliers d’animaux exotiques. Il aurait même déclaré : « Sous peu, nous n'aurons plus besoin de soldats » (« Brevi milites necessarios non habebimos ») en référence au fait que l'empire est pacifié.

En , il recevra une délégation du sénat, qui lui notifiera la pleine confiance des sénateurs et autres membres du prétoire, ce qui écartait tout danger d'un assassinat politique, pour Probus. Le même mois, Probus déclarera que la période de crise que l'empire romain subissait depuis au moins la fin de la dynastie des Sévère, en 235, était terminée. De même, Probus condamnera les massacres d' Alexandrie de 215-216 commis par Caracalla, tout en critiquant cet empereur, sans toutefois demander l'instauration d'une damnatio memoriae, car cette période était trop ancienne.

En 282, Probus confie la défense de l’Occident au préfet du prétoire Carus et se met en route vers l’Orient, pour entreprendre la conquête de l’Arménie et de la Mésopotamie contre les Perses. N'aimant pas voir ses troupes désœuvrées, il charge les soldats de travaux divers en temps de paix tels la plantation de vigne, l'assèchement des marais ou le percement de canaux, charges que les soldats trouvent déshonorantes. Autour de Sirmium, lors d’une inspection des travaux, il houspille des soldats fatigués de cette besogne et provoque une violente réaction, il parvint à se réfugier dans une tour d'assaut, mais les soldats révoltés incendient l'édifice. Probus, à moitié étouffé, presque carbonisé, se fait massacrer par les mutins. La nouvelle de sa mort est connue à Rome huit jours après son assassinat, tandis que la nouvelle se propage assez rapidement dans le reste de l'empire.

Les mutins sont rapidement arrêtés et jugés : de nombreuses condamnations à mort sont prononcées. De nombreuses peines de travaux forcés sont également prononcées (mines de Dacie). L'empire romain, reposant alors sur des bases fragiles, sortant tout juste des temps de crises des 30 tyrans, ne souhaite pas renouer avec ce passé très récent. Pour éviter d'éventuels soulèvements des armées romaines, les sanctions tombent immédiatement. C'est aussi une réponse forte, pour indiquer que Probus laisse en héritage un empire sorti de crise, aux fondations solides et bien administré.

L'assassinat choque la curie romaine, les sénateurs, et en premier lieu Carus, qui va succéder à Probus. L'assassinat n'est pas du tout politique, pour imposer un prétendant, mais est une révolte de soldats excédés par des ordres et des travaux jugés indignes et injustes. Dans un premier temps, Carus, personnage très effacé, refuse de devenir empereur. Malade, son règne sera de courte durée. Il faudra attendre 285, et l’avènement de Dioclétien pour trouver le digne successeur de Probus, ayant le charisme et l'autorité pour gouverner l'empire, ce qui démontre l'unanimité du choix de la personne de Probus. Il est avant tout considéré comme un soldat valeureux et exemplaire, avec un charisme indiscutable, et en ces temps troubles, l'heure n'est pas à organiser des complots : le règne de Probus s'annonce long et glorieux : au moins une vingtaine d'années, à l'image du règne de Trajan, mais son règne n'a duré que 6 années.

La dépouille de Probus est incinérée à Sirmium, et les cendres transférées à Rome. Là, Probus a droit à des obsèques impériales. On ignore le lieu de sa sépulture. Par la suite, l'armée romaine est placée sous des directives strictes par les empereurs suivants, Dioclétien et Constantin Ier, et les débordements sont réprimés sévèrement. Enfin, la discipline des soldats est érigée en dogme, presque comme une religion. Les travaux des soldats auprès des populations continuent, donnant une bonne image de l'armée impériale et de l'empire auprès des populations, soumises à Rome ou non : une marque de la propagande de l'empire romain sur ses peuples soumis. Le règne de Probus intervient à une époque charnière de l'empire romain, où celui-ci manque de peu d'éclater et de disparaître, avec la période des 30 tyrans. Pour Probus, le soldat n'est pas qu'un militaire, c'est un être doté de valeurs et de vertus, avant d'incarner l'ordre et le pouvoir, et défendre. Le soldat doit être un double de l'empereur et son représentant ; il doit être vu avec respect. De plus, Probus étend les actions sociales de l'armée impériale, en faisant participer l'armée romaine à des travaux utilitaires publics, et en aidant les populations, ce qui est repris dès le XVe siècle dans les empires coloniaux, et étendu à partir du XIXe siècle pour s'attacher les populations des pays conquis, et donner une bonne image des empires. Durant le règne de Probus, en plus des travaux, des soins sont apportés aux malades. Les Romains recherchent ce qui peut être emprunté de la médecine locale, respectent les chefs de tribus et les coutumes locales, et font circuler ce qui ressemble à des cahiers de doléances, afin de connaître les besoins des provinces, un concept novateur pour l'époque, plus ou moins repris par la suite, pour être ensuite rapidement oublié après le règne de Dioclétien. Pour sauvegarder un empire Romain aux abois, Probus instaure donc un dialogue constructif avec les différents peuples de l'empire, dans le respect, en passant par des valeurs sociales.

Titulatures

  • Vers 232, naît Marcus Aurelius Probus
  • Septembre 276, accède à l'Empire : Imperator Caesar Marcus Aurelius Probus Pius Felix Invictus Augustus
  • 279, reçoit les surnoms Gothicus Maximus Germanicus Maximus Persicus Maximus
  • 282, titulature à sa mort : Imperator Caesar Marcus Aurelius Probus Pius Felix Invictus Augustus Gothicus Maximus Germanicus Maximus Persicus Maximus, Pontifex Maximus, Tribuniciae Potestatis VII, Imperator I, Consul V, Pater Patriae.

Sources

Notes et références

  1. Eutrope, Abrégé de l'histoire romaine, Livre IX, 9
  2. Histoire Auguste, Le quadrige des tyrans, XIV et XV
  3. Histoire Auguste, Le quadrige des tyrans, XII et XIII
  4. Suétone indique que l'édit de Domitien ne fut pas appliqué (Vie des douze Césars, Domitien, VII). Les mesures de Probus ne furent pas forcément prises pour abolir un édit ancien pesant sur les populations locales. Cette explication fut donnée par Roger Dion en 1959 dans Histoire de la vigne et du vin en France : des origines au XIXe siècle. Depuis, des recherches archéologiques ont montré qu'en dépit de l'édit de Domitien, la culture de la vigne avait continué à s'étendre en Aquitaine, Bourgogne, Val de Loire (Jean-Pierre Brun, Fanette Laubenheimer, « Introduction » in: Gallia, tome 58, 2001, « La viticulture en Gaule », pp. 5-11, cf. p. 10).
  5. Sur les possibles motivations des mesures de Probus, voir Jean-Pierre Brun, Fanette Laubenheimer, « Conclusion », in: Gallia, Tome 58, 2001 « La viticulture en Gaule », en particulier pp. 216-217.

Bibliographie

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