Limes

Le limes (prononcé [li.mɛs]) est le nom donné par les historiens modernes aux systèmes de fortifications établis au long de certaines des frontières de l'Empire romain. Le terme limes peut comporter deux significations :

  1. Le mot peut être considéré comme frontière ou limite, avec comme équivalent la Grande Muraille de Chine ou plus tard la ligne Maginot. Pour les Romains, ce terme signifie qu'il s'agit d'une barrière pour défendre l'intérieur de l'Empire romain (sens utilisé pour la première fois par Frontin[1] et Tacite[2] au Ier siècle).
  2. Le terme peut signifier chemin ou route, c'est-à-dire la voie qui mène vers des territoires nouvellement conquis (ou à conquérir), comme le limes germanique sous Auguste, qui longe la rivière Lippe. Cette frontière était gardée par plusieurs places d'auxiliaires ou de légionnaires.

Pour les articles homonymes, voir Limes (homonymie).

Pour un article plus général, voir Système défensif de l'Empire romain.

Le limes germanique et de Rhétie a été inclus en 2008 dans la liste des sites du patrimoine mondial de l'UNESCO, sous l'appellation "Frontières de l'Empire romain", tout comme le mur d'Hadrien en 1987 et le mur d'Antonin en 2005 au Royaume-Uni.

Le limes comme barrière

Ce système désigne toutes les frontières de l'Empire romain, lesquelles sont classées en fonction de leur mode de barrière : naturelle ou artificielle.

Barrières naturelles

Les barrières naturelles qui séparaient le monde romain des Barbares ou des autres royaumes pouvaient être :

Barrières artificielles

Les barrières peuvent aussi être artificielles, comme une palissade ou un mur de pierre, parfois précédés d'un fossé. C'est le cas pour le mur d'Hadrien, le mur d'Antonin, le Limes Porolissensis (en) (en Dacie) ou le limes de Germanie. Chaque frontière était également suivie en parallèle sur toute sa longueur par une route avec un intervalle régulier des forteresses de légionnaires (castra), des forts (castella), des forts auxiliaires, ainsi que des tours (turris) et des zones d'observation (stationes).

Les représentations du limes romain peuvent être vues sur la frise de la colonne de Trajan ou sur celle d'Antonin, où les scènes d'ouvertures se situent sur la rive droite du Rhin, avec la représentation d'une série de postes de garde, de forts, de forteresses, avec également une protection de palissade.

Zones Intérieures

Le troisième cas est très particulier, il s'agit des préfectures (comme la préfecture des Alpes à l'époque des guerres marcomanes). Ce territoire est confié à un commandant militaire spécial (dans l'exemple précédent, il s'agit de Quintus Antistius Adventus (en), dont le rôle a été de prévenir et bloquer les invasions barbares[3].

Principaux domaines stratégiques / territoire du limes romain

Il y avait deux positions stratégiques clés pour protéger l'Empire romain :

  1. la première et la plus importante position stratégique est le front nord, qui se compose de :
  2. la deuxième position stratégique est la frontière orientale de l'Empire romain, qui est organisé en quatre secteurs

En Occident: la frontière septentrionale

En Bretagne : le front du Nord

Là où le bois manquait déjà à la suite des défrichements entamés dès le Néolithique, des murs de pierre étaient élevés, qui bloquaient efficacement les cavaliers (Mur d'Hadrien)

Fonctions

Le limes matérialise physiquement la frontière entre l'empire romain et le monde barbare, tel qu'il était entendu par les Romains, à savoir les peuples ne parlant ni grec, ni latin.

Le limes consiste en routes de rocade le long de la frontière, desservant des postes de surveillance plus ou moins importants, et reliées aux villes de garnison. Localement, le limes peut être renforcé par des ouvrages tels que mur et/ou fossé. Il a un but défensif, mais aussi douanier et politique car il s'agit d'une fortification discontinue plus symbolique qu'efficace[4].

Des limes plus ou moins élaborés ont ainsi été établis sur la plupart des frontières de l'Empire. Les plus célèbres sont ceux construits dans le nord de la province de Bretagne (actuelle île de Grande-Bretagne) : les murs d'Hadrien, d'Antonin. Le plus grand était établi le long du Rhin et du Danube, par une succession de tours de guet, de castella (fortins), de places fortes reliées par un réseau très dense de voies romaines. Un limes de ce type, mais moins profond et moins dense, était construit en Afrique du Nord.

Le limes romain figure sur le Canon historique des Pays-Bas, liste officielle de 50 thèmes, initiative du gouvernement néerlandais, dont la première version date de 2006 et dont la deuxième version est officiellement acceptée le .

Limes de Germanie

Le limes de Germanie : reconstitution dans les monts du Taunus.

En latin, limes signifie simplement chemin de patrouille à la frontière. Pour permettre une vue dégagée sur l'ennemi, les Romains avaient déboisé de grands pans de forêt. Nombre de ces sentiers existent encore aujourd'hui en Allemagne.

Le limes rhénan couvrait la province de Germanie inférieure.

Le limes de Germanie supérieure protégeait les provinces de Germanie supérieure et de Rhétie, en avant des Champs Décumates.

  • Il était constitué de plus de soixante places fortifiées espacées d'une dizaine de kilomètres. Elles défendaient la frontière de l'Empire. On peut citer celle de Saalburg près de Bad Homburg, qui est la seule à avoir été reconstruite, ou le camp romain d'Obernburg, aujourd'hui largement documenté.
  • Des cohortes de 500 légionnaires et cavaliers y étaient stationnées pour empêcher les pillages des Germains dans la zone contrôlée par les Romains. Des voies romaines y conduisaient à partir de l'Italie ou de la Gaule.
  • Plus de neuf cents tours de guet se dressaient le long du limes rhénan, espacées les unes des autres de façon à pouvoir communiquer entre elles par signaux visuels ou sonores selon les conditions de visibilité, et ainsi avertir au plus vite la prochaine place fortifiée de tout mouvement germain.

La tour de guet no 1 se trouve à Rheinbrohl en Rhénanie-Palatinat (caput limitis).

Cologne, Strasbourg et Vienne étaient des forts chargés de protéger le limes.

Le limes germanique fut détruit par les attaques des Alamans en 258, qui occupèrent l'espace compris entre le Rhin et le Danube. Une nouvelle ligne de défense fut organisée par Aurélien (270-275) le long du Rhin et de l’Iller, affluent du Danube, avec Brigantium (Brégence) comme camp militaire.

Au IVe siècle, ce limes était défendu par des Lètes francs et des fédérés Saxons à Mayence, Alamans sur le Rhin supérieur (fondation dudit royaume alaman).

Limes danubien

Le limes danubien s'articulait sur une série de places fortes reliées par une route de rocade suivant le cours du Danube. Une flotte fluviale complétait le dispositif de surveillance.

Limes d'Afrique du Nord

Les limes d'Afrique romaine désignent la série d'aménagements défensifs réalisés par les Romains en Afrique du Nord.

Les Romains organisent leur système de défense au fur et à mesure de leur progression dans le contrôle des territoires annexés en Afrique et en Maurétanie. À chaque avancée, un nouveau limes enveloppe des territoires et des populations réputés pacifiés et susceptibles d’accepter la civilisation à la romaine, et les distinguent des zones extérieures où la Pax Romana n’est pas encore établie. Par sauts successifs, ce limes finit par atteindre et parfois pénétrer les confins arides du domaine saharien depuis l’océan Atlantique jusqu’aux déserts de la Grande Syrte.

Ces systèmes diffèrent des limes européens appuyés sur des fleuves : le relief montagneux et étiré d'est en ouest impose de construire des routes de rocade qui permettent la circulation des troupes et aussi celles des commerçants, des points fortifiés qui les jalonnent et exceptionnellement des ouvrages défensifs tels que murs ou fossés. Des voies transversales unissent ce limes aux principales cités, et à la zone côtière[5].

Murs sur l'île de Bretagne

Ils contiennent les Pictes et les Scots.

Dans le même ordre d'idées, se construit la digue d'Offa dans l'Essex, longtemps après le départ des Romains, qui sépare Saxons et Gallois.

Notes et références

  1. Frontin, Les Stratagèmes, paragraphe 1, 3-10.
  2. Tacite, Annales : livre I, paragraphe 11.
  3. Yann Le Bohec, L'esercito romano da Augusto alla fine del III secolo, Roma 1992, VII ristampa 2008, p. 206.
  4. Lucien Sigayret, Rome et les Barbares, Ellipses, , p. 9
  5. Louis Harmand, L’Occident romain, Gaule, Espagne, Bretagne, Afrique du Nord, Payot, Paris, 1960, réédité 1970, p. 262-289

Annexes

Galerie d'illustrations

Bibliographie

 : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

Littérature antique

  • Frontin (trad. du latin), Les Stratagèmes, Paris, Institut de stratégie comparée : Economica, coll. « Bibliothèque stratégique », , 283 p. (ISBN 2-7178-3886-4). 
  • Tacite (trad. du latin), Annales : livres I-III, Paris, Les Belles Lettres, coll. « Collection des universités de France », , 201 p. (ISBN 2-251-01264-8). 

Études modernes

  • Edward Luttwak, La Grande Stratégie de l'Empire romain, Paris, Économica, coll. « Bibliothèque stratégique », , 260 p. (ISBN 2-7178-1269-5). 
  • (en) Maureen Carroll-Spillecke, Romans, Celts & Germans : the German Provinces of Rome, Stroud, Gloucestershire : Tempus, , 160 p. (ISBN 0-7524-1912-9). 
  • (it) John Wacher, Il Mondo di Roma imperiale. Tome 1 : La Formazione, Bari, Laterza, coll. « Storia e societa », , 386 p. (ISBN 88-420-3418-5). 

Congrès

  • 1st International Congress of Roman Frontier Studies, édité par E. Birley, Durham 1952;
  • 2nd International Congress of Roman Frontier Studies, édité par E. Swoboda, Graz-Cologne, 1956;
  • 3rd International Congress of Roman Frontier Studies, édité par R. Laur-Belart, Bâle, 1959;

Articles connexes

Liens Externes


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