Pierre Charron

Pierre Charron (1541 à Paris - à Paris) est un théologien, un philosophe, un orateur et un moraliste du XVIe siècle.

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Ne pas confondre avec l'homme politique Pierre Charon et la rue Pierre-Charron.


Vie

Il était fils d'un libraire qui eut 25 enfants[1]. Il suivit des études de philosophie et de droit. Il exerça d'abord la profession d'avocat, puis reçut les ordres, et se fit bientôt un nom par ses prédications. Marguerite de France en fit son prédicateur. Plusieurs évêques l'attirèrent auprès d'eux, et il séjourna comme théologal à Bazas, Lectoure, Agen, Cahors, et à Condom, où il acheta une maison et y fit graver sur un linteau : « Je ne sais ». Il rencontra Montaigne à Bordeaux, avec qui il se lia d'une grande amitié et qui eut une grande influence sur son œuvre. Il adopta bientôt sa philosophie. Montaigne le désigna comme héritier du blason de sa maison. Charron reconnut plus tard ce témoignage d'affection et d'estime en instituant le beau-frère de Montaigne son légataire universel. En 1595, il fut envoyé à Paris comme député à l'assemblée du clergé et devint secrétaire de cette assemblée. Il est mort d'apoplexie à Paris en 1603.

Pensée

De la sagesse : trois livres / par Pierre Charron. – 3e éd. rev. et augm.– Paris : David Deuceur Libraire Iuré, 1607.

Charron composa un Traité de la Sagesse qu'il a publié en 1601 à Bordeaux, après d'autres ouvrages concernant la religion, et qui présentait un catholicisme orthodoxe, répondait aux attaques dont il était l'objet et provoqua un scandale : il y défendait la tolérance religieuse, ce qui le fit accuser d'athéisme. « Nous sommes circoncis, baptisés, juifs, mahométans, chrestiens avant que nous sachions que nous sommes hommes. » Il séparait ainsi la religion de la morale (morale appuyée sur la nature), ouvrant l'espace d'une pensée laïque. C'est encore un des meilleurs traités de morale connu au XIXe siècle ; mais on y trouve quelques propositions hasardées qui en firent longtemps défendre l'impression et le firent mettre à l'Index librorum prohibitorum à Rome.

Des pamphlétaires, jésuites en particulier et en premier lieu le père Garasse[2], l'attaquèrent vigoureusement et les critiques continuèrent bien après sa mort, l'accusant de plagiat à l'égard de Montaigne et des auteurs de l'Antiquité. Il imita également le style de Montaigne, mais il avait moins de grâce et de naïveté. Charron a aussi laissé un Traité des Trois Vérités (existence de Dieu, vérité du Christianisme, vérité du Catholicisme), 1594, fort estimé, et un Abrégé du Traité de la Sagesse. La meilleure édition de la Sagesse est celle qu'a donnée Amaury Duval, 1820, 3 v. in-8.

Emmanuel Faye estime que, pour fonder une philosophie morale autonome et directement enracinée en l’homme, Pierre Charron a cru devoir écarter entièrement la métaphysique, jugée par lui toute spéculative. Charron pense donc que la philosophie morale suffit pour penser ce qu’il nomme l’« excellence et perfection de l’homme »[3]. Avant Spinoza et son Éthique, l'idée « Dieu c'est-à-dire la nature » est exprimée par Pierre Charron, ce qu'a relevé Michel Onfray[4]. Ce thème est déjà présent dans la philosophie juive[5], elle-même marquée par la pensée de Moïse Maïmonide[6],[7].

Descartes s'inspirera de sa méthode du doute pour la rédaction du Discours de la méthode.

Œuvres

  • Les Trois Veritez contre les Athées, idolatres, Iuifs, Mahumetans, hérétiques, & schismatiques, etc. : livre trois, Bordeaux, Simon Millanges, , 552 p. (lire en ligne sur Gallica).
  • Les trois veritez : livre trois, Bordeaux, Simon Millanges, (lire en ligne).
  • L'octave, contenant huict discours du S. sacrement ; avec un autre discours de la communion des saincts. par M. Pierre Charron, parisien, Bordeaux, Simon Millanges, , 204 p. (lire en ligne).
  • De la Sagesse : livre trois, Bordeaux, Simon Millanges, , 804 p. (lire en ligne).
  • Discours chrestiens de M. Pierre Charron, parisien, chantre et chanoine théologal de l'église cathédrale de Condom. Seconde partie, Bordeaux, Simon Millanges, (lire en ligne).
  • Œuvres complètes, Paris, 1635 avec une vie de l'auteur, par Michel de La Rochemaillet (reprises à Genève, 1970).

Notes et rétérences

  1. Joseph Fr. Michaud, Louis Gabriel Michaud, Biographie universelle, ancienne et moderne, ou Histoire, par ordre alphabétique, de la vie publique et privée de tous les hommes qui se sont fait remarquer par leurs écrits, leurs actions, leurs talents, leurs vertus ou leurs crimes, 1813, [lire en ligne].
  2. Jean-Louis Dumas, Histoire de la Pensée - T.2 Renaissance et Siècles des Lumières Tallandier 1990 p. 67
  3. Emmanuel Faye, Descartes et les philosophes français de la Renaissance, Conférence et débat organisés en Sorbonne le 5 décembre 1998 autour du livre Philosophie et perfection de l’homme. De la Renaissance à Descartes (Vrin, 1998).
  4. Michel Onfray, Contre-Histoire de la philosophie, tome 3 : Les Libertins baroques, pages 39 à 72, éditions Grasset.
  5. Moshé Idel, Maïmonide et la mystique juive, Le Cerf, 1991.
  6. Moshé Idel, L’Expérience mystique d’Abraham Aboulafia, Le Cerf, 1989.
  7. Charles Mopsik, Chemins de le Cabale, L’Éclat, 2004.

Annexes

Bibliographie

  • Jean-Pierre Luchet, Analyse raisonnée de la Sagesse de Charron, (1789) [microform]. (C. Lacour, 1997).
  • Michel Adam, Etudes sur Pierre Charron, Talence, Presses universitaires de Bordeaux, 1991.
  • Christian Belin, L'Œuvre de Pierre Charron, 1541-1603. Littérature et théologie de Montaigne à Port-Royal, Paris, Honoré Champion, 1995.
  • Michel Onfray : Cours radiodiffusés sur Pierre Charron (dont le 26/07/2005 Restaurer Pierre Charron et le 27/07/2005 Inventer une sagesse laïque), ainsi que : Les libertins baroques, Contre-histoire de la philosophie, t.3, Grasset (2008), ch.I, Charron et la « volupté prudente ».
  • Claudiu Gaiu, La prudence de l’homme d’esprit. L’éthique de Pierre Charron. Préface de Denis Kambouchner, Zeta Books, Bucharest, 2010.


Articles connexes

Liens externes

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