Opération Force alliée

L'opération Force alliée[1],[2] (en anglais Operation Allied Force) est l'opération militaire de bombardement par l'OTAN de cibles serbes durant la guerre du Kosovo, du au , à la suite du massacre de Račak.

Pour les articles homonymes, voir Bombardement de Belgrade.

Pont autoroutier détruit lors de l'opération.

La campagne aérienne a duré 78 jours, du au , alors que le plan américain avait prévu de bombarder la Serbie de nuits avec des pauses en journée[3]. Le nombre de sorties aériennes nécessaires pour faire plier la République fédérale de Yougoslavie fut de 37 465, soit 480 par jour en moyenne[4].

Échec des négociations

L'opération de frappes aériennes a été décidée le , après l'échec de la conférence de Rambouillet (-)[5].

Des rumeurs concernant un plan d'épuration ethnique à grande échelle mené au Kosovo par la Serbie circulèrent dans les médias occidentaux. Ces rumeurs avaient en réalité été fabriqué à partir d’éléments compilés par les services secrets de la Bulgarie qui fait alors du zèle pour rentrer dans l’OTAN, puis transmis aux Allemands. L'argument du dit "massacre de Račak" décide l'OTAN a lancer une campagne aérienne[6].

Objectifs

Quartiers-généraux de l'Armée yougoslave endommagés durant les bombardements de l'OTAN.

La cible proclamée de ces raids était le complexe militaro-industriel serbe et les centres du pouvoir de Slobodan Milošević. Cependant, de nombreux bâtiments non militaires (notamment des usines chimiques, ce qui provoqua de graves problèmes écologiques et sanitaires) ainsi que des civils furent bombardés.

Le , en début de matinée, les avions de l’OTAN bombardent les quartiers généraux et les studios de la Radio-Télévision de l’État serbe (Radio Televizija Srbije, RTS), en plein centre de Belgrade, tuant au moins seize civils et en blessant grièvement seize autres[7].

Dans la nuit du 7 au , des bombardiers furtifs B-2, arrivés tout droit des États-Unis, larguent trois bombes auto-guidées sur le bâtiment neuf abritant la mission diplomatique chinoise[8].

Bilan militaire

Les pertes humaines non civiles du côté yougoslave seraient, selon les déclarations du gouvernement Miloševic en , de 462 soldats tués et 199 blessés, ainsi que de 114 policiers tués[9],[10].

L'OTAN annonça un bilan matériel de 20 chars, 220 transports et 450 pièces d’artillerie de l'Armée populaire yougoslave détruits. Cependant, une enquête du magazine Newsweek publiée le , s’appuyant sur un rapport de l’Armée de l’air américaine, révéla que seuls 14 chars, 18 transports de troupes et 20 pièces d’artillerie yougoslaves avaient été détruits et que le reste du bilan était constitué par les leurres utilisé par les forces yougoslaves. Cinq avions de combat MiG-29 et un J-22 Orao furent détruits en vol, plusieurs autres au sol. Les casernes, bases aériennes, et dépôts logistiques furent sérieusement endommagés ainsi que l'industrie pétrochimique et les réseaux de transport.

Le , un F-117A fut abattu par un missile anti-aérien S-125 au-dessus de la Serbie. Le pilote s'éjecta et fut récupéré sain et sauf[11]. L'opérateur de la batterie de missiles serbe avait modifié et amélioré les caractéristiques de celle-ci et disposait d'un radar plus puissant que celui d'origine qui aurait réussi à détecter l'avion furtif  qui volait dans de mauvaises conditions météorologiques augmentant sa signature  à 25 km[12]. L'OTAN a soupçonné les Forces armées serbes d'utiliser un radar passif, appareil peu coûteux qui utilise la réflexion des ondes radio et télé ambiantes, pour guider leurs missiles[13]. Les Serbes ont donné une aile à la Russie, tandis que la campagne serbe était parcourue par des agents chinois qui rachetaient aux paysans des débris de l'appareil, ce qui aurait aidé à la conception du Chengdu J-20, une allégation démentie par les autorités chinoises[14].

Impact sur les populations et violation présumée du droit international par l'OTAN

Une enquête de l'organisation non gouvernementale Human Rights Watch a recensé 90 incidents lors des bombardements, entraînant la mort de 489 à 528 civils. Environ deux tiers d'entre eux (303 à 352) étaient des réfugiés albanais du kosovo[15],[16]. Si l'OTAN se défendit en invoquant le concept de dommage collatéral, elle n'en fut pas moins vivement critiquée, l'enquête précédente, par exemple, concluant à une violation du droit international humanitaire.

Détails techniques de l'opération

  • Ce sont 37 465 missions aériennes sur ses 78 jours d’opération, qui ont été effectuées par un total de 786 aéronefs de l'OTAN[1] pendant lesquelles deux appareils américains furent perdus au combat (un F-117 Nighthawk et un F-16 Fighting Falcon) ; plus de 800 missiles sol-air ont été tirés par la DCA de l'Armée populaire yougoslave. On compte 8 676 missions offensives qui ont conduit au largage d'environ 23 000 munitions, 5 551 missions de défense aérienne et 4 397 missions SEAD anti-radar, le reste étant du soutien.
  • Douze F-16 de la Composante air de l'armée belge présents à la base aérienne d'Amendola (en) ont effectué 679 sorties de combat et ont largué 279 bombes et missiles[17].
  • Les forces aériennes françaises ont effectué environ 2 000 sorties durant ce conflit ; 420 missions ont permis le tir effectif de 988 bombes et missiles dont 49 furent largués au-dessus de la mer Adriatique par des Super-Étendard[18]. Les stocks de munitions air-sol de l'armée de l'air et de l'aéronautique navale françaises ont rapidement été insuffisants, notamment les bombes guidées par laser (BGL), ce qui a conduit à utiliser des bombes Paveway américaines en complément. Lorsque la configuration des cibles s'y prêtait (large surface à traiter, pas de risques collatéraux…), des bombes « lisses » non guidées de fabrication française ont été utilisées, l'insuffisance des stocks ayant, ici également, rendu nécessaire, en cours de campagne, l'acquisition de bombes américaines Mk82 de 250 kg. Au total 398 bombes lisses furent utilisées sur un total de 988 bombes et missiles largués[19].

Légalité de l'intervention

D'après Jean-Christophe Buisson, rédacteur en chef au Figaro Magazine et essayiste, cette opération humanitaro-militaire violait plusieurs lois et conventions internationales  par exemple, l'article 2, alinéa 4 de la Charte des Nations unies qui prévoit que les membres doivent s'abstenir « dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de la force, soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies[20] »[21].

Selon la Radio-télévision de Serbie, le , une équipe « spéciale » composée de médecins et d'avocats (serbes et étrangers) annonce son intention de porter plainte devant les tribunaux de chacun des 19 pays membres de l'OTAN qu'elle accuse d'avoir bombardé, en 1999, « principalement au Kosovo, mais aussi quatre endroits dans le Sud de la Serbie » sans autorisation légale et en violation des articles 5 et 6 des statuts de l'OTAN qui stipulent que l'OTAN n'est pas une structure offensive, mais défensive. L'équipe compte réunir les preuves démontrant que l'utilisation de bombes à sous-munitions et le bombardement des usines chimiques ou pétrochimiques a eu  sur le long terme  des conséquences sanitaires[22],[23],[24].

Excuses

Le 18 mai 2021, le président de la Tchéquie, Miloš Zeman, sans pour autant révoquer la reconnaissance du Kosovo par la République tchèque, est le premier dirigeant à présenter des excuses aux peuples Serbes pour les bombardements de 1999[25],[26],[27],[28].

Notes et références

  1. « Les premiers enseignements de l'opération « force alliée » en Yougoslavie : quels enjeux diplomatiques et militaires ? », « Rapport d'information no 464 (1998-1999) de M. Xavier de Villepin, fait au nom de la commission des affaires étrangères du Sénat français, déposé le 30 juin 1999 ».
  2. http://pantheon.hrw.org/legacy/french/docs/2000/02/07/serbia7342.htm
  3. « SERBIE. Le bombardement de l'ambassade de Chine était-il délibéré ? », Courrier international, (lire en ligne, consulté le )
  4. « 4 scénarios pour l'avenir de la Libye : « Kadhafi ne quittera la Libye que les pieds devant » », Le Post (consulté le ).
  5. Site de l'OTAN
  6. Serge Halimi et Pierre Rimbert, « Le plus gros bobard de la fin du XXe siècle », sur Le Monde diplomatique,
  7. Le Monde diplomatique, L’attaque contre les studios de la télévision serbe
  8. Les Echos, Le bombardement de l'ambassade de Chine à Belgrade complique le jeu diplomatique
  9. (en) « Milosevic proclaims victory with end to Kosovo conflict », CNN, 10 juin 1999.
  10. Heike Krieger, The Kosovo conflict and international law, Cambridge University Press, 2001 (ISBN 0521800714).
  11. (en) Vega 31: The loss of F-117A #82-806.
  12. (ro) « Doborarea invizibilului F117 : strategie stralucita,un P18 inovator sau pur noroc ? », sur Suntem Romania, (consulté le ).
  13. Serge Courrier, « Radars invisibles contre objets furtifs », 01.net, (consulté le ).
  14. Arnaud de La Grange, « L'avion furtif chinois serait inspiré du F-117 américain », sur Le Figaro, (consulté le ).
  15. (en) Rapport de HRW sur les bombardements de 1999.
  16. « Human Rights Watch Publie le Bilan des Victimes Civiles Dans la Guerre du Kosovo », Human Rights Watch (consulté le ).
  17. « Les F-16 belges au Kosovo : une facture de 474 millions », Le Soir, (consulté le ).
  18. Jean-Michel Boucheron, « Rapport d’information n° 1775 déposé par la commission des finances, de l’économie générale et du plan sur le coût de la participation de la France aux opérations menées en vue du règlement de la crise au Kosovo », Assemblée nationale (consulté le ).
  19. RAIDS (hors-série no 33), les ailes françaises au combat, 1994-2009.
  20. « Charte des Nations unies : Chapitre I : buts et principes », sur un.org (consulté le ).
  21. Jean-Christophe Buisson, « Belgrade : 15 ans après le bombardement, les Serbes n'oublient pas », Le Figaro (consulté le ).
  22. (sr) « Tužba protiv NATO za bombardovanje », sur danas.rs, .
  23. « BOMBARDOVANJE SRBIJE Nakon 18 godina priprema se tužba protiv 19 članica NATO-a », sur blic.rs, (consulté le ).
  24. (sr) « RTS: Lekari i advokati spremaju tužbu za NATO bombardovanje », sur n1info.com (consulté le ).
  25. RTS, Radio televizija Srbije, Radio Television of Serbia, « Земан: Извињавам се за бомбардовање СРЈ и молим српски народ да нам опрости », sur www.rts.rs (consulté le )
  26. (sr) « Zeman objasnio: Zašto se izvinio srpskom narodu? », sur B92.net (consulté le )
  27. (en) « "Let me say first: I apologize for the bombing"; "Nobody said that, thank you" VIDEO », sur B92.net (consulté le )
  28. « La République-Tchèque s'excuse pour les frappes de l'Otan en 1999 contre la Yougoslavie », sur SudOuest.fr (consulté le )

Liens externes

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