Ministère des Territoires occupés de l'Est
Le ministère des Territoires occupés de l'Est (Reichsministerium für die besetzten Ostgebiete) est un ministère du Troisième Reich créé par un décret de Hitler du et confié à Alfred Rosenberg.
Ministère des Territoires occupés de l'Est Reichsministerium für die besetzten Ostgebiete | |
Unter den Linden, 62 : cette adresse de Berlin, qui devint celle de l'ambassade d'Union soviétique en RDA après-guerre, hébergea à compter de le siège de « l’Ostministerium ». En , le bâtiment principal subit un bombardement stratégique allié. | |
Situation | |
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Création | 1941 |
Dissolution | 1945 |
Type | Gouvernement du Reich |
Siège | Berlin |
Langue | Allemand |
Dirigeant | Alfred Rosenberg (1941-1944) |
Mise en place
Une fois l'l'Union soviétique envahie, l'objectif de ce nouveau ministère est d'organiser la colonisation germanique à l'Est, et de « mettre en coupe réglée » les nouvelles ressources économiques obtenues à la suite des conquêtes militaires et de réorganiser l'occupation spatiale de l'Est européen.
La réunion du
Le 16 juillet 1941, dans une atmosphère de victoire, se tient à Rastenburg une réunion à laquelle sont présents Hitler, Bormann, Göring, Lammers, Keitel et Rosenberg, afin de définir les modalités du partage des responsabilités dans les territoires nouvellement conquis sur l'Union Soviétique[1].
Constitution du ministère
Rapidement constitué à partir du décret du , qui vise à confier le plus rapidement possible la gestion des territoires à une administration civile[2], ce ministère voit son action contrecarrée par l'enchevêtrement des compétences dans les territoires conquis : Göring est compétent pour l'exploitation économique des territoires, Himmler pour le maintien de l'ordre et la politique raciale, tandis que, par la suite, d'autres administrations du Troisième Reich exercent elles aussi des fonctions sur les territoires nominalement confiés à Rosenberg[2].
Nomination
Alfred Rosenberg prend en charge un ministère nouvellement créé, mal organisé et en restructuration permanente ; dans ce ministère s'affairent, sans aucun esprit de corps, des fonctionnaires issus de différents horizons, des SS, présents en nombre à partir de la nomination de Gottlob Berger, haut responsable SS, à la direction de l'État-major politique du ministère en [3].
Un acteur supplémentaire
Au sein de la polycratie du Troisième Reich, l'Ostministerium constitue un acteur supplémentaire dans les territoires occupés.
Rosenberg et les fonctionnaires placés sous sa responsabilité doivent partager le contrôle des territoires placés sous sa responsabilité avec la SS, chargé de la sécurité, et de ce fait de la politique raciale[4], avec les services de Göring, compétents en matière économiques et avec les services de Sauckel, compétents pour la main d’œuvre.
Si les attributions du ministère sont diminuées par le partage des responsabilités, Rosenberg évince cependant le ministère des Affaires étrangères, Ribbentrop ne pouvant envoyer qu'un agent de liaison auprès des services de l'Ostministerium[4].
Fonctionnement du ministère
Un ministère spécifique
La spécificité de ce ministère, à vocation territoriale, le fait entrer rapidement en concurrence avec l'ensemble des autres ministères du Reich[3]. Ainsi, les attributions de ce ministère sont dès le départ limitées par les compétences économiques attribuées à Göring, ainsi que définies par un décret du , sur les territoires qu'il devra administrer et par l'autorité de la SS, compétente en matière de police et de maintien de l'ordre sur les territoires de l'Est[5].
Recrutement des fonctionnaires
Dans le cadre de la constitution des équipes chargées de régir ce ministère, Rosenberg appelle auprès de lui ses proches, anciens combattants du NSDAP[N 1], des membres de l'Amt Rosenberg, auxquels se joignent quelques fonctionnaires de carrière[6].
Aux échelons inférieurs, les équipes sont constituées de fonctionnaires de carrière et de membres du NSDAP, peu préparés à la spécificité de l'administration civile d'un territoire conquis[6].
Politique menée
Souhaitant reprendre la politique de dislocation de la Russie en s'appuyant sur les éléments non russes, Rosenberg appelle de ses vœux la mise en place d'une politique de distinction de traitement entre les peuples des territoires conquis sur l'Union soviétique ; il tente ainsi de mener une politique de rapprochement avec les Ukrainiens, mais, il se heurte rapidement à Himmler et au commissaire Erich Koch, son subordonné à Rovno[1].
Rapidement les fonctionnaires de l'Ostministerium souhaitent voir la mise en place d'une politique devant aboutir à une alliance avec les Slaves de l'Union Soviétique, à l'image de ce que souhaite Rosenberg dans sa politique ukrainienne[7].
L'Ostministerium sur le terrain
Depuis Berlin, Rosenberg et ses équipes tentent de piloter la politique menée dans les commissariats par les commissaires, Lohse dans l'Ostland, Koch en Ukraine et Kube en Ruthénie Blanche; mais ce pilotage est rendu hasardeux par les directives contradictoires émanant des autres acteurs de la politique nazie à l'Est, en dépit du souhait de Hitler, formulé à l'issue de la réunion du , de voir les différends aplanis dans la pratique[7].
Ainsi, le décret du , créant et organisant le ministère permet aux représentants de Himmler sur place de donner des ordres à l'autorité civile[7].
Recherche d'alliés locaux
Ainsi, en , un conseiller ministériel propose un changement de politique, proposant des mesures de nature à créer une alliance entre les Allemands et les Slaves, comme la création d'États autonomes sous contrôle économique et politique du Reich, reprenant ainsi la politique menée par le Reich après la paix de Brest-Litovsk[8].
Des divergences
Dès la constitution du ministère, des différences de conceptions opposent différents groupes de pression au sein même du ministère. Deux groupes se constituent au sein même de l'administration centrale du ministère, structurés autour de la place à accorder respectivement à l'idéologie et au pragmatisme dans la politique à mener dans les commissariats[9].
Le premier de ces groupes, constitué autour de Erhard Wetzel, se montre partisan de vastes transferts de population vers la Sibérie, afin de permettre l'installation de colons allemands, souhaitant la réalisation rapide d'un vaste programme colonial[9] ; le second de ces groupes, structuré autour d'Otto Bräutigam, souhaite la mise en place d'une politique plus pragmatique[9].
L'évolution de la situation, dont les fonctionnaires du ministère sont informés par les rapports venant des responsables dans les commissariats, oblige à une recomposition des rapports de force entre ces deux groupes, basée sur l'analyse des comptes rendus de la situation sur place[9].
Disparition
Le 31 octobre 1944, le ministère des Territoires occupés tente encore de créer une « communauté de travail pour l’exploration de la menace bolchevique » afin de combattre les « Juifs » au niveau international. Cette réunion à Prague du 31 octobre au 2 avril est sa dernière intervention[10].
Notes et références
Notes
- Les anciens combattants du NSDAP désignent les adhérents du parti depuis les années 1920.
Références
- Breitman 2005, p. 222.
- Mineau 2007, p. 101.
- Baechler 2012, p. 313.
- Breitman 2005, p. 223.
- Baechler 2012, p. 282.
- Mineau 2007, p. 102.
- Breitman 2005, p. 224.
- Mineau 2007, p. 105.
- Mineau 2007, p. 106.
- Kurt Pätzold/Manfred Weißbecker (Hrsg.): Stufen zum Galgen. Lebenswege vor den Nürnberger Urteilen, Leipzig 1999, S. 182 (Quelle: BAK, NS 30/29 und NS 8/132, Bl. 54 ff.).
Bibliographie
- Chistian Baechler, Guerre et extermination à l'Est : Hitler et la conquête de l'espace vital. 1933-1945, Paris, Tallandier, , 524 p. (ISBN 978-2-84734-906-1).
- Richard Breitman (trad. de l'anglais), Himmler et la solution finale : L'architecte du génocide, Paris, Calmann-Lévy, , 410 p. (ISBN 978-2-7021-4020-8).
- André Mineau, « L’idéologie des fonctionnaires du Troisième Reich dans les territoires occupés de l’Est », Vingtième Siècle, vol. 1, no 93, , p. 101-113 (DOI 10.3917/ving.093.0101).
- Adam Tooze (trad. de l'anglais), Le salaire de la destruction : Formation et ruine de l'économie nazie, Paris, Les Belles Lettres, , 806 p. (ISBN 978-2-251-38116-9).
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
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