Mesure à treize temps

La mesure à treize temps est une combinaison entre plusieurs mesures binaires et ternaires[note 1]. Elle comprend donc un nombre variable de « temps forts » et de « temps faibles », en fonction de la combinaison choisie. Treize étant un nombre premier, la mesure à treize temps est considérée comme une « mesure composée asymétrique », ce qui la rend propre à l'expression de la mélodie comme de la danse.

Cette mesure, assez rare, est présente dans la musique classique et dans les musiques pop et rock, surtout dans le domaine du rock progressif.

Historique

Erik Satie

Vexations, une pièce pour piano d'Erik Satie composée en 1893, offre un des premiers exemples de mesure à treize temps. Selon John Cage, cette pièce exceptionnelle « dure vingt-quatre heures : 840 répétitions d'un morceau de 52 mesures à structure répétitive : A, A1, A, A2 ; chaque A ayant 13 temps[1] ».

Béla Bartók

Dans le domaine de la musique de chambre, un exemple de mesures à treize temps développées sur une vaste section se trouve dans le 3e mouvement, Sebes (rapide), des Contrastes de Béla Bartók (1938) pour violon, clarinette et piano, dans le trio central[2] :

Bartók - premières mesures à treize temps des Contrastes.
Bartók - passage à treize temps des Contrastes.
noicon
Joseph Szigeti (violon), Benny Goodman (clarinette)
et Béla Bartók (piano) (enr. 1940).

Pierre Citron considère « le rythme particulièrement complexe et vertigineux » de ce passage :

« La mesure est notée à
, mais il s'agit en réalité de deux rythmes bulgares superposés, l'un au piano, à
, l'autre à la clarinette puis au violon à
. Le miracle est que le résultat est parfaitement clair à l'oreille et produit l'effet saisissant d'un rubato lyrique perpétuellement bridé par une inflexible pulsation[2]. »

Caractéristiques

Notation

Dans un article consacré à la battue des mesures composées asymétriques (Rock in odd time signatures), Charles Dowd insiste sur le fait que « le résultat souhaité dans cette étude est une indépendance totale et une fluidité vis-à-vis de ces mesures, qui doivent être considérées comme une unité plutôt que comme un groupe de deux temps et de trois temps[note 2],[3] ».

Cet article propose les combinaisons suivantes :

1. Combinaisons de cinq battues simples



etc.

2. Combinaisons de six battues simples




etc.

Multiples et sous-multiples

La chanson 26 Is Dancier than 4 du groupe This Town Needs Guns est notée à
[4].

Le 2e mouvement, Nocturne, presque adagio, de la Sonate pour basson et piano, op. 71 de Charles Koechlin est noté à
, que le compositeur recommande de « rythmer à

 »
.

Une mesure notée à
est revendiquée par le groupe Tool pour leur chanson Schism[5], ce qui revient à une mesure à
.

Œuvres employant des mesures à treize temps

Musique classique

Comédie musicale

  • Skimbleshanks : The Railway Cat de Cats d'Andrew Lloyd Webber, dont l'introduction et les refrains sont notés à
    (divisés en
    ) et les couplets à
    .

Musiques pop et rock

Musique de film

Bibliographie

Ouvrages consultés

  • (fr) Pierre Citron, Bartok, Paris, Seuil, coll. « Solfèges », 1963, rééd. 1994, 222 p. (ISBN 978-2-02-018417-5 et 2-02-018417-6)
  • (fr) Anne Rey, Satie, Paris, Seuil, coll. « Solfèges », 1974, rééd. 1995, 190 p. (ISBN 978-2-02-023487-0 et 2-02-023487-4)
  • (en) Charles Dowd, A Funky Thesaurus for the Rock Drummer, New York, Alfred Music Publishing, , 48 p. (ISBN 978-1-4574-3457-0, lire en ligne)
  • (en) Edward Macan, Rocking the Classics : English Progressive Rock and the Counterculture, New York, Oxford University Press, (ISBN 978-0-19-509888-4)
  • (en) Wayne L. Perkins, Don Ellis' use of New Rhythms in his Compositions (Thèse de doctorat), vol. 1, Los Angeles, University of California,
  • (en) Tim Emmons, Odd Meter Bass : Complex Time Signatures Made Easy, New York, Alfred Music Publishing, , 88 p. (ISBN 978-0-7390-4081-2, lire en ligne)
  • Guy Sacre, La musique pour piano : dictionnaire des compositeurs et des œuvres, vol. I (A-I), Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », , 1495 p. (ISBN 978-2-221-05017-0)
  • Guy Sacre, La musique pour piano : dictionnaire des compositeurs et des œuvres, vol. II (J-Z), Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », , 2998 p. (ISBN 978-2-221-08566-0)
  • (en) Jeff Wagner, Mean Deviation : Four Decades of Progressive Heavy Metal, vol. 1, Brooklyn, Bazillion Points, , 364 p. (ISBN 978-0-9796163-3-4, lire en ligne)

Notes discographiques

  • (en + de + fr) Horst Göbel (piano) (trad. Sophie Liwszyc), « À propos des compositions pour piano de Boris Blacher », p. 13-18, Berlin, Thorofon CTH 2203, 1996.

Notes et références

Notes

  1. Pour rappel : une mesure « binaire » est basée sur une unité de durée comme la blanche (mesure notée sur 2), la noire (mesure notée sur 4) ou la croche (mesure notée sur 8), etc. avec un nombre égal à 2 ou l'un de ses multiples pour le nombre d'unités par mesure — ainsi,
    ,
    et
    ,
    et
    , etc. sont des mesures binaires.
    Une mesure « ternaire » présente un nombre égal à 3 (ou l'un de ses multiples) unités de durée par mesure — ainsi,
    ,
    et
    ,
    et
    , etc. sont des mesures ternaires.
    Une mesure « binaire » se compose d'un temps « fort » suivi d'un temps « faible », ou d'une succession régulière de temps « fort » et « faible ».
    Une mesure « ternaire » est composée d'un temps « fort » suivi de deux temps « faibles », ou d'une succession régulière de temps « fort », « faible » et « faible ».
  2. Texte original : One must strive to feel the entire measure in one rather than groupings of two's and three's.

Références

Articles connexes

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