Jan Mabuse

Peintre, dessinateur, graveur, Jean Gossart, ou Jan Gossaert, dit Mabuse, né à Maubeuge vers 1478 et mort à Anvers le , est un artiste romaniste de style maniériste de l'École d'Anvers. Il est un précurseur de ce « style italianisant d'Anvers », qui relie la tradition flamande du XVe siècle, attentive à la recherche minutieuse du monde réel, à la « manière moderne » italienne dans le rendu de la perspective et la relation entre personnages et environnement[1].

« Mabuse » redirige ici. Pour les autres significations, voir Mabuse (homonymie).

Biographie

On ne sait rien du début de sa vie si ce n'est qu'il est né à Maubeuge d'où son surnom. Il apprend probablement son art à Bruges, mais on ne sait pas où il a fait son apprentissage. Il exerce ensuite à Anvers où sa première trace date de 1503[2]. Il y est reçu cette année-là, franc-maître à la guilde de Saint-Luc, sous le nom de « Jennyn Van Henegouve »[3]. Il semble y acquérir un certain succès.

Les œuvres de sa première période montrent une influence d'artistes familiers avec les modèles plastiques, ce qui incite à penser qu'il vécut près de la frontière avec la France.

Il travaille pour Philippe de Bourgogne, futur évêque d'Utrecht et l'accompagne en Italie, lors de sa mission, qui avait pour objectif de rencontrer le pape à Rome (1508-1509). Après plusieurs étapes à Trente, Vérone, Mantoue et Florence[3], il se trouve à Rome au moment où Michel-Ange et Raphaël travaillent au Vatican, et au milieu de la ferveur suscitée par de sensationnelles découvertes archéologiques[1]. Il y fait divers croquis sur des antiques. A son retour d'Italie, il est un des premiers à oser dessiner des nus mythologiques[4], sans doute à l'instigation du duc de Bourgogne[5].

Il retourne en Flandres avec son mécène vers le début des années 1510 et y est accaparé par des commandes de compositions religieuses, dans lesquelles il allie l'héritage technique des primitifs flamands aux nouveautés de la Renaissance italienne[3]. Il peint plusieurs tableaux à l'église Sint-Adriaansabdij à Grammont, ainsi que le triptyque de Malvagna vers 1513-1515 (palais Abatellis à Palerme).

Au château de Suiburg, appartenant à son mécène, il peut exploiter pleinement ses acquis italiens. Fin 1515, il décore ce palais avec un certain nombre de nus profanes, grandeur nature[3], comportant une dimension érotique[6]. L'année suivante, sur les indications de Philippe de Bourgogne, il décorera le char funèbre de Ferdinand le Catholique, de personnages nus et de trophées guerriers à l'antique[3]. Il travaille également pour Charles Quint, Marguerite d'Autriche ainsi que d'autres commanditaires.

Il est actif à Middelbourg, Utrecht, Bruxelles et Anvers.

Sans avoir la subtilité ou la puissance de Van der Weyden, il a notamment en commun avec ce maître de Tournai et Bruxelles, de nombreuses compositions sur un fond architectural. Cette caractéristique est probablement importée d'Italie. Danaé, sa dernière œuvre mythologique, datée de 1527 en témoigne.

On retrouve son effigie dans Les Effigies des peintres célèbres des Pays-Bas de Dominique Lampson.

Œuvres

Nombre de ses œuvres ont probablement disparu, mais on peut citer les suivantes :

Les thèmes sont religieux, avec une touche maniériste (Triptyque Malvagna), mais également érotiques (Neptune et Amphitrite). Il reste l'un des plus importants portraitistes de son temps[12].

Postérité

Son art, profondément novateur exerça peu d'influence sur les peintres de son époque. Il marqua plutôt ceux de la génération suivante. Après sa mort en 1532, sa renommée gagne l'Italie, puis tout au long du XVIIe et du XVIIIe siècle, elle fut grande dans les Pays-Bas du Sud[3].

Les enfants du roi Christian II de Danemark (Christine, Jean et Dorothée), 1526.

Son œuvre a fait l'objet de deux grandes expositions : en 1965 à Bruges et Rotterdam et en 2011 au Metropolitan Museum of Art de New York et au National Gallery de Londres[13].

Notes et références

  1. Stefano Zuffi (trad. de l'italien), Le Portrait, Paris, Gallimard, , 304 p. (ISBN 2-07-011700-6), p. 99.
  2. A. Galansino, E. Bensard, « Un jeune peintre flamand ébloui par l'Italie », Dossier de l'art, no 184, avril 2011, p. 34-39.
  3. Jean-Claude Frère, Les Primitifs flamands, Paris, Editions Pierre Terrail, , 206 p. (ISBN 2-87939-115-6), p. 203-205
  4. Françoise Monnin, « Charles Quint, Ma Collection pour un cheval », Muséart, no 96, , p. 42.
  5. Sabine van Sprang, Musée d’Art Ancien : Œuvres choisies, Bruxelles, Musées royaux des beaux arts de Belgique, Bruxelles, , 238 p. (ISBN 90-77013-04-0), p. 60.
  6. A. Galansino, E. Bensard, « Un jeune peintre flamand ébloui par l'Italie », Dossier de l'art, no 184, avril 2011, p. 53-56.
  7. Erika Langmuir, National Gallery : Le Guide, Flammarion, , 335 p. (ISBN 2-08-012451-X), p. 116-119
  8. Vincent Pomarède, 1001 peintures au Louvre : De l’Antiquité au XIXe siècle, Paris/Milan, Musée du Louvre Editions, , 308 p. (ISBN 2-35031-032-9), p. 407.
  9. Wolfgang Prohaska, Le Kunsthistorisches Museum de Vienne : Peinture, C.H. Beck/Scala Books, , 128 p. (ISBN 3-406-47459-4, lire en ligne), p. 63.
  10. Françoise Pitt-Rivers, Balzac et l’art, Paris, Sté Nelle des Editions du Chêne, , 159 p. (ISBN 2-85108-799-1), p. 86
  11. Sabine van Sprang, Musée d’Art Ancien : Œuvres choisies, Bruxelles, Musées royaux des beaux arts de Belgique, Bruxelles, , 238 p. (ISBN 90-77013-04-0), p.62
  12. A. Galansino, E. Bensard, « Un jeune peintre flamand ébloui par l'Italie », Dossier de l'art, no 184, avril 2011, p. 58-65.
  13. (en) L'exposition Gossaert à la National Gallery de Londres.

Annexes

Bibliographie

  • Luce Stiers, Et laisse-moi l'ivresse, Paris, L'Harmattan, , 182 p. (ISBN 978-2-7475-9184-3, lire en ligne)
  • Maryan W. Ainsworth (dir.), La Renaissance de Jan Gossart : L'homme, le mythe et la sensualité - L'œuvre complet, Bruxelles / New York, Fonds Mercator / Actes sud / The Metropolitan Museum of Art, , 512 p. (ISBN 978-90-6153-964-3)
  • Jan Gossaert et le maniérisme flamand, Dossier de l'Art, no 184,

Articles connexes

Liens externes

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