Le Testament d'Orphée
Le Testament d’Orphée ou ne me demandez pas pourquoi est un film français réalisé par Jean Cocteau en 1959 et sorti en 1960.
Titre original | Le Testament d'Orphée ou ne me demandez pas pourquoi ! |
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Réalisation | Jean Cocteau |
Scénario | Jean Cocteau |
Acteurs principaux | |
Sociétés de production | Les Éditions Cinégraphiques |
Pays d’origine | France |
Genre |
Film biographique Manifeste poétique |
Durée | 81 minutes |
Sortie | 1960 |
Série
Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution
Synopsis
Mort et résurrection du poète. Frappé par une balle, le poète Jean Cocteau rebondit dans un autre temps. Vie et mort, présent et futur, monstres et imagination, angoisses et fantasmes, c'est le testament du poète cinéaste, sa biographie sans aucun souci de chronologie. Jean Cocteau y tient le rôle principal.
Résumé
Préambule : Pendant qu’une craie magique dessine sur un tableau noir le visage du poète Orphée, on entend la voix caractéristique de Jean Cocteau nous dire : « Le privilège du cinématographe, c'est qu'il permet à un grand nombre de personnes de rêver ensemble le même rêve et de montrer en outre, avec la rigueur du réalisme, les fantasmes de l'irréalité, bref c'est un admirable véhicule de poésie. Mon film n'est pas autre-chose qu'une séance de strip-tease consistant à ôter peu à peu mon corps et à montrer mon âme toute nue. Car il existe un considérable public de l'ombre, affamé de ce plus vrai que le vrai qui sera un jour le signe de notre époque. Voici le lègue d'un poète aux jeunesses successives qui l'ont toujours soutenu ».
Venu de l’autre temps et en habit du XVIIIe siècle, le poète apparaît à un écolier, âgé de 13 ans, assis studieux derrière son pupitre, apeuré par cette vision étonnante puis, plus tard, c’est au tour d’une femme épouvantée de laisser tomber le bébé qu'elle tenait dans ses bras. « Ce fut ma deuxième rencontre avec un personnage dont je venais d'embrouiller l'existence contre toute logique » nous dit le poète qui, à la troisième rencontre, croise une infirmière poussant le fauteuil roulant d’un vieux professeur infirme, rendu sourd par une chute dans sa petite enfance. Le vieillard meurt et laisse tomber une boite dont s'empare le poète, heureux de la tenir enfin car elle va lui être d’un grand service.
Le poète se présente une quatrième fois au même professeur mais cette fois âgé d'une cinquantaine d'années qui, le voyant devant lui, se souvint d’avoir été effrayé, à treize ans, par son apparition inattendue dont il aimerait comprendre à présent cette bizarrerie ; alors le poète lui dit : « Professeur, vous êtes sans doute la seule personne au monde capable à ne pas chercher à comprendre et capable aussi de comprendre l'incompréhensible ». Il est une sorte de voyageur dans l’intemporel, perdu dans l'espace-temps, alors qu'il vient de l’an 1770. Le poète remet au professeur la boite de son invention future : elle contient des balles de révolver capables d’anéantir le temps.
Frappé par une balle, tirée à sa demande par le professeur, le poète tombe puis rebondit dans un autre temps que le sien, en 1959 et en habit moderne, tentant désespérément de regagner son époque. Sur sa route, il croise un homme à tête de cheval qui le conduit dans une "Zone Intermédiaire". intemporelle parmi une troupe de gitans. Le poète ne s’y attarde pas et part retrouver ses propres créations : en premier, il rencontre le jeune poète Cégeste, revenu à la vie qui lui remet une fleur immortelle d’hibiscus et l’oblige à le suivre pour comparaître devant un tribunal composé de la belle et inaccessible Princesse et de son fidèle Heurtebise qui s'érigent en juges face à leur créateur. Accusé pour crimes d'innocence et se défendant de son mieux, le poète est condamné à la peine de vie.
Accompagné de Cégeste, le poète reprend la route, à la recherche de la déesse grecque de la Sagesse, Pallas Athéna (Minerve pour les romains). En chemin, il croise une dame qui s’est trompée d’époque, lisant un livre qui ne paraîtra que dans 70 ans puis Iseut cherchant à rejoindre Tristan et même son propre double qui va d’où il vient et vice versa. Puis Gégeste disparaît laissant seul le poète explorer la "Zone Intermédiaire" où vivent les symboles et les divinités diverses qui hantent son esprit, loin de toute réalité.
Enfin, le poète arrive au palais de Pallas Athéna dans un univers en ruines. Un moment arrêté par l'huissier en habit qui garde le passage, il a accès auprès de la déesse à laquelle il désire lui offrir son hibiscus. Elle le transperce de sa lance et le fait déposer par deux hommes à tête de cheval dans un tombeau, entouré des chants et des pleurs de la bande de gitans : « Faite semblant de pleurer mes amis puisque les poètes font semblants d’être mort ». Il se relève avec les yeux de l'initié. Dédaignant la tentation du Sphinx ailé aux seins nus, insensible également à la rencontre d'Œdipe aveuglé, s’appuyant sur sa fille Antigone, il continue de cheminer dans la campagne où des motards de la police l’arrêtent pour vérifier son identité. C'est alors que Cégeste réapparait pour le faire disparaître en lui disant que « La terre n’est pas votre patrie ». De retour, le policier constate sa disparition tandis que les papiers d'identité se transforment en fleurs d'hibiscus.
Fiche technique
- Titre original : Le Testament d'Orphée
- Titre original complet : Le Testament d'Orphée ou Ne me demandez pas pourquoi !
- Réalisation : Jean Cocteau
- Assistants : Francis Caillaud et Jean-Pierre Bastid (non crédité)
- Conseillers techniques : Claude Pinoteau, Étienne Périer
- Scénario : Jean Cocteau
- Dialogues : Jean Cocteau
- Décors : Pierre Guffroy
- Costumes et sculptures : Janine Janet
- Photographie : Roland Pontoizeau
- Son : Pierre Bertrand, René Sarazin
- Structure sonores : J. Lasry et F.B. Baschet
- Cameraman : Henri Raichi
- Maquilleur : Alexandre Marcus
- Montage : Marie-Josèphe Yoyotte assistée de Raymonde Guyot
- Effets spéciaux : Pierre Durin
- Masques de Bebko
- Assistante montage : Geneviève Lallement Bastid (non créditée)
- Musique enregistrée sous la direction de Jacques Météhen
- Indicatif musical et trompettes : Georges Auric
- Piano-jazz : Martial Solal
- Script-girl : Lucile Costa
- Photographies en marge du film de Lucien Clergue
- Photographe de plateau : Yves Mirkine
- Producteur : Jean Thuillier
- Producteur associé : Yul Brynner
- Assistant de production : François Truffaut
- Régisseur général : Michel Mombailly
- Société de production : Les Éditions Cinégraphiques (France)
- Sociétés de distribution : Cinédis (France), UGC (France), Connaissance du Cinéma (France), Tamasa Distribution (France), Les Acacias (France), Robur (France), Ciné Classic (France)
- Studios : La Victorine à Nice et Franstudio à Paris
- Pays d'origine : France
- Langue : français
- Format : 35 mm — noir et blanc — 1.37:1 — son monophonique
- Genre : film biographique, manifeste poétique
- Durée : 81 minutes
- Date de sortie : France
- (fr) Classifications CNC : tous publics, Art et Essai (visa d'exploitation no 22579 délivré le )
Distribution
- Jean Cocteau : le poète Jean Cocteau/Orphée
- Jean Marais : Œdipe
- Maria Casarès : la princesse
- François Périer : Heurtebise
- Édouard Dermit : Cégeste
- Et par ordre alphabétique :
- Claudine Auger : Minerve
- Charles Aznavour : le curieux
- Lucia Bosè : une amie d’Orphée
- Yul Brynner : l’huissier des enfers
- Françoise Christophe : l’infirmière
- Gérard Chatelain : l'amoureux
- Michèle Comte : la petite fille
- Nicole Courcel : la mère maladroite
- Henri Crémieux : le professeur
- Luis Miguel Dominguín : un ami d'Orphée
- Guy Dute ; un homme-chien
- Daniel Gélin : l’interne
- Philippe Juzau : un homme-cheval
- Jean-Pierre Léaud : Dargelos, l'écolier
- Michèle Lemoigne : l'amoureuse
- Serge Lifar : un ami d'Orphée
- Daniel Moosmann : un homme-cheval
- Brigitte Morisan : Antigone
- Pablo Picasso : un ami d'Orphée
- Jacqueline Roque : une amie d'Orphée
- Françoise Sagan : une amie d'Orphée
- Alice Sapritch : la reine des gitanes
- Henri Torrès : le speaker
- Annette Vadim/Roger Vadim[1] : des amis d’Orphée
- Francine Weisweiller : la dame qui s'est trompée d'époque
- Marie-Josèphe Yoyotte : une gitane
Production
Tournage
- Période prises de vue : du 7 septembre à novembre 1959.
- Intérieurs : studios de la Victorine (Nice), studios Francoeur (Paris).
- Extérieurs :
- Alpes-Maritimes : Saint-Jean-Cap-Ferrat (certaines scènes ont pour décor la villa Santo Sospir[2] dont les murs sont peints de fresques par Jean Cocteau), Villefranche-sur-Mer (on aperçoit dans une scène la façade de la chapelle Saint-Pierre décorée par Cocteau et une autre scène a été tournée sous les voutes de la rue Obscure où l'on voit Cocteau s'appuyant sur un angle de mur).
- Bouches-du-Rhône : Les Baux-de-Provence (tournage facilité grâce à François Truffaut, notamment pour les scènes dans les sites du Val d’Enfer et des Carrières de Lumières).
- Jean Cocteau accepta qu’une équipe radiophonique, conduite par Roger Pillaudin, suive le tournage du film.
Musique
Musiques additionnelles : Christoph Willibald Gluck, Georg Friedrich Haendel, Johann Sebastian Bach (BWV 1067, Menuet et Badinerie), Richard Wagner.
Accueil et commentaires
- « Ce film est beau parce que c'est le film d'un homme qui sait qu'il va mourir et qui ne parvient pas, quelque désir qu'il en ait, à prendre la mort au sérieux. » (Cahiers du cinéma).
- C'est en premier lieu le testament de Cocteau puisque, jouant lui-même son propre rôle, le poète se promène dans le film et à travers le temps où il retrouve ses propres créations dont les personnages de son film Orphée (1950) : le jeune poète Cégeste (Édouard Dermit), la Princesse (Maria Casarès), le fidèle Heurtebise (François Périer).
- Dans sa biographie sur l’acteur Marais, Carole Weisweiller (fille de Francine Weisweiller) raconte que Cocteau avait demandé à Jean Marais de jouer Œdipe. Celui-ci, vêtu de sa toge blanche tachée de sang, le visage douloureux avec des yeux crevés peints sur des paupières, remuant doucement les lèvres comme le lui avait demandé Cocteau, avançant lentement sur un chemin de pierres, un lourd bâton à la main en guise de canne et s’appuyant sur sa fille Antigone, croisait le poète qui s’éloignait sans le voir. « Ce qu’on a tant voulu voir, quand cela arrive enfin, on ne le voit plus », expliquait Cocteau à des journalistes venus l’interroger sur la signification de cette scène.
- Christian Soleil, dans sa biographie sur Marais, révèle qu’à sa sortie à Paris en février 1960, Le Testament d’Orphée reçut de la presse critique des louanges, encensements, admirations, le plaçant d’emblée au Panthéon du cinéma français. Mais le public ne fut guère au rendez-vous, sans doute à cause du caractère très étrange du film, de sa construction décousue mais en réalité cousue comme un rêve, que les spectateurs ordinaires pouvaient considérer comme l’hermétisme de l’univers de Cocteau. « Ils ont en fait du mal à admettre qu’il ne faut pas chercher un sens derrière chaque signe, trouver une symbolique derrière chaque objet et chaque geste, mais simplement admettre les choses comme elles sont, à la manière des enfants dont Cocteau veut nous faire retrouver l’âme. »
- Tourné en noir et blanc, le film montre, au moment où le poète est transpercé par la lance de la déesse, la fleur d’hibiscus et la tache de sang de couleur rouge, signifiant l’immortalité du poète.
Sources :
- Jean Marais, le bien-aimé de Carole Weisweiller et Patrick Renaudot – Edition de La Maule – 2013 – (ISBN 978-2-87623-317-1)
- Jean Marais La voix brisée de Christian Soleil – éd. Arts graphiques – 2000 – (ISBN 2-910868-42-7)
Audiovisuel
Audiogramme
1998 : Jean Cocteau : Journal sonore du Testament d'Orphée par Roger Pillaudin (2 CD ina/Radio France/Harmonia Mundi[3]) Interview de Jean Cocteau par Roger Pillaudin, et interventions de plusieurs acteurs du film, notamment de Maria Casarès, Daniel Gélin, Jean Marais, Pablo Picasso. Durée 2 h 30. Livret illustré inclus |
DVD
Le Testament d'Orphée de Jean Cocteau, Studiocanal, 2010, 1 DVD zone 2, noir et blanc, 96 min, bonus inclus (EAN 5050582572971).
Bibliographie
Roger Pillaudin (ill. 23 dessins originaux de Jean Cocteau), Jean Cocteau tourne son dernier film : Journal du Testament d'Orphée, Paris, Éditions de la Table ronde, coll. « L'Ordre du jour », , 176 p., broché, 14 x 20 cm, couverture illustrée (notice BnF no FRBNF33136653).
Notes et références
- Mariés à l'époque du tournage, l'une ou l'autre sont crédités par différentes bases de données cinématographiques : Annette Vadim par l'IMDb, Roger Vadim par la BiFi, et tous les deux par The TCM Movie Database États-Unis (TCM mentionne Roger Vadim et « Annette Strøyberg »). Comme l'indique Jean Cocteau dans l'épilogue du film, chaque spectateur aura pu reconnaître plusieurs célébrités parmi les apparitions des « amis d'Orphée ».
- Propriété de Francine Weisweiller.
- Catalogue général de la BnF
Liens externes
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