La Sirène du Mississipi (film)

La Sirène du Mississipi est un film français de François Truffaut, sorti en 1969.

La Sirène du Mississipi
Réalisation François Truffaut
Scénario François Truffaut
Acteurs principaux
Sociétés de production Les Films du Carrosse
Pays d’origine France
Italie
Genre Drame
Durée 123 minutes
Sortie 1969


Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution

Pour les articles homonymes, voir La Sirène du Mississippi.

Synopsis

Louis Mahé, un riche industriel de La Réunion entre, à la suite d'une petite annonce, en contact épistolaire avec une certaine Julie Roussel vivant en Nouvelle-Calédonie ; après échange de lettres, ils conviennent de se marier et elle doit se rendre à la Réunion à bord du Mississipi, un navire des messageries maritimes. Mais à l'arrivée, Louis ne reconnaît pas celle dont il a la photo (elle est, en fait, beaucoup plus jolie). La jeune femme lui avoue en avoir envoyé une fausse. Louis se formalise d'autant moins du mensonge qu'il est tombé quasiment instantanément sous le charme de celle qui prétend être Julie. Il l'épouse comme prévu.

N'ayant plus aucune nouvelle de Julie depuis des semaines, sa sœur Berthe écrit son inquiétude à Louis, lequel demande alors instamment à Julie de rassurer sa sœur. Mais Julie disparaît alors en vidant les deux comptes de celui qui l'a épousée (son compte personnel et celui de son entreprise, dont il n'est d'ailleurs propriétaire que pour moitié).

Berthe, venue en toute hâte de Nouvelle-Calédonie à la Réunion, découvre que Louis n'a pas épousé sa sœur mais une aventurière qui s'est fait passer pour elle. Louis et Berthe engagent alors un détective privé, Comolli, pour retrouver l'usurpatrice et découvrir ce qu'il est advenu de la vraie Julie Roussel.

Parti se reposer en France de sa désillusion, Louis Mahé est pris de faiblesse dans l'avion et se retrouve en cure de sommeil dans une clinique niçoise. Il s'y rétablit progressivement, mais découvre, regardant la télévision, que la jeune femme qu'il a épousée et qui l'a délesté de tout son argent, travaille en ce moment dans une boîte de nuit d'Antibes. Il achète une arme, remonte jusqu'à l'hôtel de la "sirène" et la menace de mort. Mais il réalise qu'il est incapable de la tuer. Elle lui avoue la supercherie et dit s'appeller Marion Vergano. C'est son amant Richard qui aurait tué Julie et l'aurait forcée à prendre sa place. Louis retombe amoureux de Marion et tous deux décident de reprendre leur vie commune.

Pendant ce temps, Comolli, le détective privé que Louis et la sœur de Julie avaient engagé et payé chacun pour moitié, retrouve à son tour la trace de Marion. Pour protéger celle dont il est maintenant passionnément épris, Louis est amené à tuer Comolli qui l'a suivi jusqu'à son domicile. Aidé de Marion, il enterre le corps dans la cave de la villa qu'ils avaient louée autour d'Aix-en-Provence.

Le couple s'enfuit alors pour Lyon et vit simplement dans un petit appartement. Mais Louis n'arrive plus à assurer le train de vie de Marion qui réclame toujours plus. Il décide de retourner à la Réunion et de vendre en urgence ses parts de la société à son associé, à moitié prix. Il rentre ainsi à Lyon avec une grosse somme d'argent liquide. Mais ils apprennent par la presse que le cadavre de Comolli est découvert à la suite d'inondations de sous-sols. La police est déjà chez eux et ils partent alors en catastrophe, abandonnant dans leur appartement la sacoche qui contient presque tout leur argent. Ils se réfugient dans un chalet de montagne abandonné, à proximité de la frontière suisse. Ils sont désormais quasiment sans le sou et Marion, n'acceptant pas la perspective d'une vie de couple fauché, décide in petto d'abandonner Louis. Comme il l'en empêche, elle tente de l'empoisonner (avec de la mort-aux-rats). Louis s'en aperçoit et lui avoue qu'il l'aime tellement qu'il est prêt à mourir si ça peut, elle, l'arranger. Touchée par cet aveu, Marion est saisie de honte et retombe dans ses bras. Réconciliés, les deux amants (officiellement mari et femme) partent ensemble à travers un paysage de neige, probablement en direction de la Suisse.

Fiche technique

Distribution

Analyse

L'église de Sainte-Anne dans laquelle fut tournée la scène du mariage.

Ce film, dont l'action se déroule en partie à La Réunion, est la deuxième adaptation par Truffaut d'un roman noir de William Irish après La mariée était en noir. Jean-Paul Belmondo surprend dans un rôle plutôt inhabituel de victime devenant consentante et presque complice de sa propre fin. Les frontières sont floues entre escroquerie et amour, douleur et plaisir, tu et vous, distance et intimité.

Parmi les lieux de tournage : le vieil AntibesBelmondo escalade un immeuble de trois étages, en un long plan-séquence de trois minutes. La fin du film a été tournée dans le massif de la Chartreuse, au Sappey-en-Chartreuse, dans un chalet où fut tourné quelques années auparavant Tirez sur le pianiste, avec Charles Aznavour, et des années après Buffet froid, avec Gérard Depardieu et Bernard Blier[réf. nécessaire].

La pousse-au-crime et l'homme plein de principes

Dans le rôle de la femme pernicieuse et prompte à tuer, Catherine Deneuve livre une grande interprétation, n'éprouvant que peu de scrupules face au cadavre de Comolli. Comment la percevoir ? Est-elle une pousse-au-crime ? Une véritable meurtrière ? Se joue-t-elle de son mari quitte à l'empoisonner sans manifester la moindre émotion ? Le film ne nous livre que peu d'indices mais l'absence filmée du premier meurtre peut pousser les spectateurs les plus méfiants à opter pour le second choix.

Belmondo, quant à lui, livre une composition loin de ses rôles lisses de héros qu'il jouera plus tard dans sa carrière. Son personnage est celui d'un empoté, prisonnier de ses principes et de son envie — ou son besoin — d'être amoureux. Tous les détails que l'acteur exécute montrent un anti-héros, conscient de sa valeur – au début du film, il est un industriel très riche – et qui vacille péniblement si ses habitudes sont modifiées. Finalement, on découvre un personnage conformiste, convaincu par des niaiseries – sa tirade sur « les femmes dans les aéroports » en est une manifestation –, prêt à tuer au nom de ses principes. Beaucoup de passages sont révélateurs de sa façon de penser : lorsque sa femme est à ses côtés dans la rue, il faut qu'elle lui donne le bras ; quand il va vendre ses parts à son associé, il commente son malheur en lui déclarant : « Vous n'êtes pas de cette race », comme s'il croyait appartenir à une élite, alors qu'il n'a plus rien.[Interprétation personnelle ?]

L'implication des actes

L'interaction des actes des deux personnages fera toute la romance du film et ses rebondissements. Tout porte à croire que l'enchaînement des événements se calque sur le déroulement d'une tragédie grecque comme si « ce qui devait arriver arrive ». Finalement, c'est la question principale de savoir si Marion Vergano est une meurtrière ou une pousse-au-crime qui ressurgit, avec le passage central du seul meurtre filmé. Michel Bouquet, lui aussi d'une régularité parfaite dans son interprétation, met la pression sur un Belmondo acculé, muré dans son silence et ses principes néfastes.

Toute la cruauté du film tient dans cette exposition de deux personnages qui, livrés à eux-mêmes, font ce qu'ils peuvent malgré leur amour, ou en fonction de leur amour. C'est un enchaînement d'actions qui, en fonction de leur caractère, va donner son épaisseur à l'histoire. Pour finir bien plus mal qu'elle n'a commencé

Tournage

Le tournage s'est déroulé du au à La Réunion, Nice[1], Aix-en-Provence, Grenoble, Lyon, Antibes et Paris.

Citation

Les derniers mots que prononce Jean-Paul Belmondo à Catherine Deneuve - « C'est une joie et une souffrance » - seront repris dans Le Dernier Métro, lorsque les personnages de Gérard Depardieu et Catherine Deneuve récitent les répliques de la pièce représentée dans l'histoire du film. De même pour l'expression « L'amour fait mal ».

En hommage à Truffaut, François Ozon fait dire cette phrase à Catherine Deneuve dans le film Huit femmes (2002).

Truffaut fait également référence à plusieurs films de Jean Renoir. Le film s'ouvre sur un extrait de la Marseillaise (1938), le moment où la Garde suisse du Palais des Tuileries hésite à fraterniser avec la garde nationale. Le Crime de monsieur Lange (1936) est évoqué lorsque le personnage de Jean-Paul Belmondo indique à celui de Catherine Deneuve qu'il va voir Arizona Jim au cinéma, personnage créé par Amédée Lange (qu'interprète René Lefèvre) et figure principale du nouveau magazine développé par la coopérative d'employés des éditions Batala. Enfin, le plan final du film est une référence directe à celui de La Grande Illusion daté de 1937.

Ce film de Truffaut est d'ailleurs dédié à Jean Renoir.

Orthographe du titre

Dans le titre du film[2], « Mississipi » est écrit avec un seul « p »  car il est fait référence au nom du navire des Messageries maritimes[3],[4] d'où débarque Marion Vergano et qui s'écrit ainsi (ancienne orthographe française du fleuve américain). Dans le titre français du roman de William Irish, qui se déroule à la Nouvelle Orléans[5], « Mississippi » s'écrit avec deux « p » et fait référence au fleuve Mississippi.

Autour du film

En 1964, soit 5 ans plus tôt, Jean-Paul Belmondo jouait dans L'Homme de Rio de Philippe de Broca, aux côtés de Françoise Dorléac, la sœur aînée de Catherine Deneuve, qui tenait le rôle de la fiancée de Belmondo.

En 2015, Jean-Paul Belmondo confie avoir tourné un bout d'essai avec Brigitte Bardot dans le rôle de Marion Vergano, finalement remplacée car indisponible[6]. Un motif en contradiction avec ce que Bardot a elle-même, par ailleurs, déclaré[7].

Notes et références

  1. L'entrée de la clinique où est conduit en ambulance Louis Mahé (Belmondo) est l'entrée (côté jardin) du musée Masséna, situé promenade des Anglais.
  2. Copie d'écran du générique du film
  3. Le Journal de la marine marchande, Volume 57, page 2852, 1975
  4. "La Transat se construit à Marseille et Port-de-Bouc Les Chantiers et Ateliers de Provence (1899-1966)"
  5. Philippe Durant, Belmondo, Robert Laffont (lire en ligne).
  6. Belmondo sur Bardot
  7. Cf l'article Wikipedia sur Brigitte Bardot, chapitre "Sex-symbol des années 1960", paragraphe "De Serge Gainsbourg à Shalako (1968-1969)", dernier alinéa, à savoir : "Entre-temps, François Truffaut prépare le tournage de La Sirène du Mississipi, dont elle (Bardot) aimerait avoir le rôle féminin, mais le cinéaste lui préfère Catherine Deneuve. Le film n'est pas un succès et à sa sortie, Bardot déclare : Je suis ravie que ce soit un tel bide, parce que c'est bien fait. On me l'a piqué d'une manière tellement ignoble. J'étais folle de rage."

Voir aussi

Bibliographie

  • Gilbert Salachas, « la sirène du mississipi », Téléciné no 154, Paris, Fédération des Loisirs et Culture Cinématographique (FLECC), , p. 31, (ISSN 0049-3287).

Articles connexes

Liens externes

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