Georges Thill

Georges Thill est un ténor français, né le à Paris et mort le à Draguignan dans le Var[1].

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Biographie

Fils d'un éditeur parisien, Georges Thill nait à Paris[2] le . Tout jeune, il se plait à chanter et le fait volontiers sur demande, même devant ses collègues de la Bourse des valeurs, où il travaille dès 1915 ; mais il est loin de penser à faire carrière dans le chant, quoiqu'il est déjà doté d'une voix puissante. Thill raconte plus tard avoir appris par cœur, aux écouteurs d'un juke-box de l'époque, deux airs italiens chantés par Caruso, tirés des opéras Tosca et Paillasse. Ces enregistrements, reproduits à la mauvaise vitesse, l'habituent à placer sa voix trop haut. Il avait, comme il le dit lui-même, « le chant véritablement dans la peau » et devait résumer ses toutes premières leçons à ces deux extraits.

Thill, appartenant à cette génération de conscrits de la Grande Guerre, est appelé au front en 1916. Il y a l'occasion de chanter devant ses compagnons d'armes. À la fin des combats, un oncle le pousse à passer une audition au Conservatoire de Paris, où il est admis en . Ses deux premières années de formation (1919-20) avec la basse André Gresse comme professeur de chant sont pourtant difficiles et frustrantes pour le futur grand ténor, qui ne trouve toujours pas comment placer une voix déjà trop courte. Il obtient seulement en fin de cycle un 2e accessit de déclamation lyrique.

En , il décide, sur les conseils d'un ami, le ténor Mario Podesta, qui a fait des progrès fulgurants, de se rendre auprès du célèbre ténor Fernando De Lucia, spécialiste du répertoire du bel canto, qui enseigne à Naples. Ce chanteur renommé s'aperçoit rapidement de la qualité des aigus de son nouvel élève et de la faiblesse et de l'instabilité de ses registres médium et grave. Thill gagne par l'enseignement de De Lucia le renforcement de son bas registre, le contrôle du souffle, un legato exemplaire et une diction étonnante de clarté. Les leçons de ce professeur restent présentes à son esprit tout au long de sa carrière et vont lui servir à aborder plus tard des rôles dramatiques plus lourds. Il reste deux ans auprès de De Lucia, avant que ce dernier ne tombe gravement malade et ne meure.

Thill décide, au début de 1924, d'entrer à l'Opéra de Paris (alors dirigé par Jacques Rouché) plutôt qu'à La Scala de Milan ; ce qui aurait été la suite logique de ses études du chant italien et conforme aux vœux de son maître. Cette décision marque la singularité de sa carrière, car il devient, par la suite, le spécialiste incontesté de l'opéra français (qui touche alors à la fin de son âge d'or) et, à travers le monde entier, l'un de ses interprètes emblématiques. Il parvient par ses qualités uniques à s'imposer peu à peu dans ce temple lyrique où règne pourtant le grand ténor parisien Paul Franz, qui ne devait quitter l'établissement qu'en 1938.

Principaux jalons de sa carrière

Cette liste s'appuie sur la chronologie exhaustive établie par André Segond (cf. Bibliographie).

Type de voix

La voix de Thill est celle d’un ténor demi-caractère (ou lyrique) au timbre clair et à l’aigu facile et large, mais au médium et bas-médium suffisamment affermis (chez De Lucia) pour tenir couramment les rôles dramatiques d’un « lirico-spinto », tels ceux de Lohengrin et de Radamès (Aida); voire de se frotter, sans toutefois en abuser, à ceux de Tannhäuser, Parsifal, Don Carlo, Samson et autres plutôt dévolus aux forts-ténors. Voix virile, souple et élégante, miraculeusement homogène sur deux octaves, qui porte sans forcer, sans la nasalisation typique du chant français classique. On a pu lui reprocher un peu d’accent pointu parisien qui lui revenait parfois. On disait que la voix de Caruso était de cuivre et que celle de Thill était d’argent.

Art du chanteur

Que Thill ait pu tenir pendant presque 30 ans, dont une quinzaine en plein apogée, avec un répertoire aussi diversifié (en français surtout, mais aussi en italien, en espagnol et en allemand) en dit long sur la technique acquise et le travail incessant pour maintenir un mécanisme vocal aussi performant. Son assimilation du style du bel canto qu’il adapta à la déclamation et à la prosodie françaises, la netteté de l’élocution, la maîtrise du passage des registres, la coloration raffinée et l’aisance de l’articulation sont étonnantes. Son chant, « voix de violoncelle », semblait lui sortir naturellement du gosier. Bien sûr, le tissu vocal s'use et ne se régénère pas et, à partir des années 1940, si sa technique était toujours présente, il n’eut plus la même splendeur.

Popularité

Il demeure un rare artiste français qui eut sans interruption une gloire aussi éclatante. Tous ses faits et gestes étaient repris en écho dans toutes les presses régionales. Son succès ne se démentit jamais. Les critiques étaient invariablement dithyrambiques et ne se désolaient que de quelques soirées d’empêchement. Toujours pris par le plaisir de chanter et de faire plaisir au public, il ne dédaignait pas les airs d’opérette et les chansons. Cette popularité entretenue par ses enregistrements continua même pendant sa retraite. Cela l’étonnait et le touchait. Homme affable, élégant, d’un physique séduisant et d’une belle prestance, il fut adulé des femmes qui l’assiégeaient et dont il fut sans cesse entouré. Ceux qui avaient connu son époque se souvenaient de la croix tressée avec leurs cheveux offerte par des jeunes filles d’une institution religieuse tombées en adoration. Aujourd’hui, ses admirateurs sont plus silencieux mais toujours aussi passionnés.

Enregistrements

Thill enregistra plus de 200 faces électriques en 78 tours (et 4 seulement en acoustique). Aujourd’hui, les enregistrements les plus importants ont été repiqués sur disques-compacts. Malibran-Musique vient de commencer une intégrale Georges Thill.

Parmi les plus intéressants et surtout les plus couramment disponibles figurent :

  • NAXOS : l'opéra Louise, de Charpentier (1 CD) 8.110225
    • N. Vallin, G. Thill, A. Pernet, A. Lecouveur
  • Austro Mechana Historic Recordings 89168 (Lebendige Vergangenheit)
  • Louise de Charpentier (DVD, de Bel Canto Society, BCS D0670) film d’Abel Gance (1938).
    • Avec G. Moore, G. Thill, A. Pernet.
  • Enfin une curiosité : un reportage des actualités de l’époque filmé dans le salon du domicile du chanteur à Saint-Germain-en-Laye et le montrant répétant un passage de Vercingétorix, opéra de Joseph Canteloube (qui se mettra lui-même au piano) créé en . Thill y chante un passage sans plus d’efforts apparents que s’il le sifflait. Ce clip est actuellement disponible à partir d’un site de vidéos.

Sources

  • Avant-scène : Georges Thill et l'opéra, hors-série,
  • André Segond : Album Georges Thill, Edisud, 1984
  • Alain Pâris : Dictionnaire des interprètes, Laffont, 1995

Notes

  1. Inhumé à Saint-Mandé ; cimetière nord.
  2. 10, rue Simon Le-Franc dans le IVearrondissement.
  3. A. Segond indique le 16 octobre à Lorgues. En réalité, selon l'acte de décès, le chanteur est mort à Draguignan, boulevard de la Commanderie (probablement dans la clinique où il avait été transporté) le 15 octobre, et c'est seulement la déclaration du décès qui fut faite le lendemain.

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