Fontaines Montefiore
Les fontaines Montefiore sont des fontaines-abreuvoirs publiques d'eau potable parsemant la ville de Liège, en Belgique.
À l'origine au nombre de vingt et conçues autant pour les habitants que les animaux, elles sont offertes à la ville en 1888 et 1891 par la philanthrope Hortense Montefiore-Bischoffsheim, épouse de Georges Montefiore-Levi, industriel et homme politique liégeois. Endommagées et supprimées au fil des décennies, elles sont aujourd'hui au nombre de cinq, à de nouveaux emplacements.
Histoire
XIXe siècle
À la fin du XIXe siècle, à peine la moitié des maisons de Liège dispose de l'eau courante et en a besoin pour ses tâches quotidiennes et abreuver les animaux de traits (les chevaux et les chiens) encore fort utilisés à l'époque. Dans les années 1880, la Société royale protectrice des animaux, qui fête son 25e anniversaire en 1888, projette d'offrir à la ville des fontaines-abreuvoirs d'eau potable destiné aux habitants et aux animaux pour marquer l'occasion[1],[2].
Pour cet évènement, deux offres sont alors faites à la ville : celle de Hortense Montefiore, une offre pour dix fontaines acceptée lors du conseil communal du , et celle de la SRPA, une offre pour une unique fontaine acceptée lors du conseil communal du [3],[2].
Le premier lot de dix fontaines, fabriqué par la fonderie liégeoise Requilé et fils, est installé à travers la ville durant les mois d'avril et mai 1889. Ces fontaines, placées où la circulation est la plus active (souvent au carrefour de plusieurs voies), sont coiffées de la statuette d'une botteresse au repos due au sculpteur hollandais Henri Beckers. Les journalistes de La Meuse, dans leur édition du , la décrivent comme « bien campée, le poing sur la hanche ». Ces statuettes sont coulées à la fonderie des bronzes phosphoreux d’Anderlecht, dont Georges Montefiore-Levi est propriétaire. L'alliage de bronzes phosphoreux est d'ailleurs mis au point par lui-même en 1869. Malgré le succès initial des fontaines cependant, des vandales renversent déjà celle située Quai Sur-Meuse dès la nuit du 30 novembre 1889, ce qui sera le premier épisode de nombreux dégâts fait aux fontaines durant leur existence[4],[5],[6],[7].
Les fontaines Montefiore, en fonte, sont un modèle produit en série basé sur un dessin de l'architecte liégeois Joseph Lousberg[réf. nécessaire], proposé par exemple au catalogue de la Compagnie générale des conduites d'eau, située à l'époque quai des Vennes[8]. Elles ont toutes une structure identique (deux vasques surmontées d'une colonne coiffée d'un chapiteau corinthien sur lequel se tient la statuette d'un métier féminin lié au patrimoine liégeois), et sont conçues autant pour désaltérer les passants que les animaux, soulignant les intentions de la SRPA. À la colonne est attaché un gobelet de fer blanc par une chaînette pour les passants, qui est régulièrement volé. La base de la colonne est décorée de plusieurs frises ouvragées, ainsi que des coquilles Saint-Jacques. Au pied de la colonne se trouvent quatre dauphins crachant des jets d'eau dans la grande vasque supérieure destinée aux chevaux et séparés par des figures de roseaux et de roses, et la vasque inférieure, au niveau du sol, destinée aux chiens de charrettes et aux oiseaux, est alimentée par quatre têtes de lion alternées par les initiales de la donatrice sur la frise intermédiaire du fut inférieur, dont la frise supérieure est arborée de quatre anneaux pour y attacher les cordes ou laisses des animaux. La margelle de la vasque supérieure porte en double l'inscription « Fontaine-abreuvoir Montefiore-Bischoffshein 1888 », ainsi que d'autres coquilles Saint-Jacques reliées par des guirlandes[3],[9].
- Statuette de la porteuse d'eau sur chapiteau corinthien (Quai Sur-Meuse, 1892).
- Statuette de la porteuse d'eau sur chapiteau contemporain (Roture, 2021).
- Attache de le chaînette du gobelet (Péralta, 2021).
- Les coquilles Saint-Jacques et, dessous, les dauphins cracheurs séparés par des roseaux et des roses (Péralta, 2021).
- Nom de la donatrice sur la margelle de la grande vasque (Péralta, 2021).
- Date qu'on trouve sur les modèles de 1888 sur la margelle de la grande vasque (Péralta, 2021).
- L'une des coquilles Saint-Jacques reliées par des guirlandes sous la grande vasque (Péralta, 2021).
- Lions cracheurs et initiales de la donatrice au-dessus de la petite vasque (Sur-les-Foulons, 2021).
Le no 2153 du magazine français Le Monde Illustré, daté du 2 juillet 1898 et proposant une illustration à forte licence artistique de la fontaine des Guillemins par Paul Adolphe Kauffmann, décrit les fontaines Montefiore comme suit :
« Coins de Belgique : La fontaine de la place de la gare de Guillemin [sic] à Liège. — Un cheval, un chien, un homme s'abreuvent à la même fontaine — la fontaine égalitaire. Il y a une sorte de leçon dans cette pittoresque scène de mœurs ; encore bien qu'il soit permis de se demander si vraiment on boit tant d'eau que cela en Belgique : passe pour le cheval et le chien, mais l'homme ? Dans cet heureux pays où le faro coule à plein fleuve, où le rez-de-chaussée de chaque maison est occupé par un estaminet, jamais désempli, la chose paraît quelque peu invraisemblable. Mais elle fournit le motif d'une jolie scène bien vue et bien rendue, et il suffit d'avoir traversé Liège pour reconnaître la vérité du joli coin que nous montre Kauffmann. »[10]
En 1889, la fontaine offerte par la SRPA, du même modèle que la Montefiore, est installée devant le chauffoir public place Saint-Séverin[9],[11].
Face au succès remporté par ses dix fontaines auprès des habitants comme utilité et lieu de rencontre, et contribuant à l’embellissement de la ville, Hortense Montefiore offre le 22 janvier 1891 un second lot de dix, cette fois coiffées de la statuette d'une porteuse d'eau tenant un seau et une cruche reliés à un joug par des chaînettes, œuvre du sculpteur liégeois Léopold Harzé. L'offre est acceptée lors du conseil communal du [2],[5],[12].
L'annonce de l'installation de ce nouveau lot dans le journal La Meuse le 22 avril 1891 émeut un lecteur qui s'étonne qu'un quartier relativement plat comme Outremeuse, et déjà bien fourni en points d'eau, se retrouve doté de trois fontaines Montefiore, tandis qu'aucune n'est prévue pour le quartier Saint-Laurent où ont été supprimées deux fontaines (devant le couvent Sainte-Agathe et Mont-Saint-Martin), et où il n'en reste plus qu'une seule adossée à la caserne de l'abbaye Saint-Laurent. Le lecteur suggère qu'une fontaine soit installée contre le mur du Trihay près de l'église Saint-Martin pour les chevaux ayant grimpé jusqu'à cet endroit, car l'eau fait très souvent défaut dans le quartier[12].
À l'aube du XXe siècle en 1898, Liège compte, en plus des fontaines Montefiore, sept fontaines monumentales, douze fontaines diverses, soixante pompes raccordées aux conduites d'eau, et cent-six bornes-fontaines, compensant grandement le manque d'accès à l'eau courante des maisons de la ville. En 1911, le nombre de bornes-fontaines se trouve réduit à une vingtaine, et moins d'une dizaine en 1954[1],[9].
Hortense Montefiore, résidant au château du Rond-Chêne à Esneux de 1882 à sa mort en 1901, fait aussi don à la commune de deux petites fontaines de pierre en 1889 et 1895[13],[14].
Le , les époux Montefiore fêtent leurs noces d'argent au château du Rond-Chêne. À cette occasion leur est offerte une copie réduite de la fontaine offerte à Liège, coiffée de la porteuse d'eau, sous la forme d'un surtout de table en argent massif financé par souscription, coulé et ciselé par Jacques Petermann de la Fonderie Nationale des Bronzes[15].
Les fontaines offertes par Montefiore étant un modèle standard, à cette époque d'autres villes en sont dotées, avec les colonnes coiffées par des éléments différents : le premier bâtiment de la gare de Visé disposait d'une fontaine coiffée d'un réverbère, la gare de Spa disposait d'une fontaine coiffée d'une vasque, Namur comptait plusieurs fontaines avec les colonnes coiffées de la même vasque que celle de la gare de Spa[16], et Maastricht dispose encore d'un exemplaire de 1906 dans la Boschstraat, à l'origine coiffée de la statue d'un chasseur avec des lièvres et des lapins, remplacée par une simple vasque, elle-même remplacée par la statuette de trois chevaux dans les années 1950[17].
Emplacements de 1888
Ce qui suit sont les emplacements originaux du premier lot de dix fontaines, coiffées de la statuette de la botteresse et installées à travers la ville durant les mois d'avril et mai 1889. Ces emplacements sont donnés dans un article de La Meuse du 18 janvier 1889[4],[5].
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Citée en 1889 comme étant située quai de l'Abattoir et citée en 1954 comme étant située rue de l'Abattoir, ce qui la place au carrefour de la rue et du quai. Ne subsistait que la grande vasque à cette époque. Un déplacement sur la place du Congrès voisine est considéré avant cette date[4],[9]. | ||||||
Installée au carrefour des rues Saint-Gilles et Sur-la-Fontaine au bord de l'extrémité nord du boulevard d'Avroy. Démontée provisoirement en 1902 à la suite du doublement des voies du tram, mais jamais replacée[1]. | ||||||
Située face à la fontaine de la Vierge de Jean Del Cour Vinâve d'Île. Botteresse remplacée par la porteuse d'eau. | ||||||
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Située dans la partie sud-est de la place, à l'opposé de l'emplacement original de la fontaine de la place de la Cathédrale, c'est un premier exemple de fontaine Montefiore restaurée. Elle est installée en 1949 à l'occasion de manifestations organisées en mémoire du sculpteur Léopold Harzé, auteur de la porteuse d'eau. Elle était la seule en 1954 à être complète parmi les douze fontaines encore en situation à cette époque. En 1963, c'était toujours le cas jusqu'à ce qu'une nuit la statuette et un des quatre dauphins cracheurs d'eau soient volés[9],[1]. | |||||
Située en fait au carrefour du quai Sur-Meuse, la place Cockerill et la rue la Régence, devant les maisons démolies pour édifier la Grand Poste en 1896, puis à droite de la tour de la Grand Poste après sa construction, mais sans changer de place. Comme vu sur le cliché des enfants à la fontaine du quai pris en 1892 avant la construction de la poste, la botteresse avait déjà été remplacée par la porteuse d'eau, mais, d'après le cliché des femmes à la fontaine du quai, elle était de retour après la construction de la poste. | ||||||
Située à gauche de la tour de la Grand Poste, sur le tronçon de la rue de Régence qui sépare la place Cockerill du quai Sur-Meuse, à quelques mètres de l'emplacement initial de la fontaine de la place Cockerill. Sa statuette était manquante à dater de 1954[9]. | ||||||
Située au carrefour de la rue et du quai de la Goffe. Botteresse remplacée par la porteuse d'eau. À dater de 1954, elle avait été déplacée de quelques mètres vers la rue de la Cité et remplacée par celle de la place de la Vieille Montagne après avoir été détruite par un camion[19],[9],[20]. | ||||||
Située devant l'actuel no 9 et peu après le no 11, à quelques mètres de l'emplacement de la fontaine du quai de la Goffe, après sa destruction par un camion et son remplacement par la fontaine provenant de la place de la Vieille Montagne. À dater de 1954, il ne subsistait que la grande vasque[9],[23]. | ||||||
Située sur le côté gauche de la place de la gare de Liège-Longdoz donnant sur la rue Grétry, et nommée aujourd'hui place Henriette Brenu devant la Médiacité. La botteresse a vite été remplacée par la porteuse d'eau, et il ne subsistait que la grande vasque à dater de 1954[21],[22],[9],[24]. À l'époque du Centre Longdoz ayant remplacé la gare, il est prévu, en 1995, de rénover la place, appelée à l'époque « place du Longdoz », et ses abords. Dans le cadre de ces réaménagements, il est prévu de réinstaller une fontaine au même endroit[5], projet qui restera sans suite. | ||||||
Située contre le pavillon gauche de la gare de Liège-Guillemins, côté rue Varin. Supprimée en 1931[9]. | ||||||
Située au sud-est de la prison Saint-Léonard, à l'angle des rues Mathieu Laensbergh et Saint-Léonard. Remplacée en 1935 par un abreuvoir de pierre[9]. | ||||||
Située dans la zone faisant face à La Violette. Ne subsistait que la grande vasque à dater de 1954[9]. Botteresse remplacée par la porteuse d'eau. | ||||||
Ne subsistait que la grande vasque à dater de 1954[9]. À cet endroit commence aujourd'hui la rue de la Populaire, située dans l'Îlot Saint-Michel. | ||||||
Emplacements de 1891
Ce qui suit sont les emplacements originaux du second lot de dix fontaines, coiffées de la statuette de la porteuse d'eau. Ces emplacements sont donnés dans un article de La Meuse du 22 avril 1891, avec plus de précision que dans l'article de 1889[12],[5].
Illustration | Localisation | Commentaire | ||||
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La SRPA en fait don à la ville en 1889 et elle est installée en 1890. Pas une fontaine Montefiore proprement dite, elle y est cependant associée de par le contexte de son installation. Utilisant un autre modèle de fontaine et n'étant pas coiffée d'une statuette, elle était située devant le chauffoir public place Saint-Séverin, place qui constitue l'angle des rues Hocheporte et Saint-Séverin. Brisée durant la Seconde Guerre mondiale, elle a depuis été remplacée par une fontaine en pierre bleue toujours présente[25],[9],[1]. | ||||||
Décrite dans La Meuse comme étant située « rue Dehin, à l'angle de la rue Joseph Demoulin, près la gare aux marchandises du Haut-Pré [sic] ». Sa statuette était manquante à dater de 1954[9]. Elle a disparu durant les années 1970 lors de la création de l'avenue de Fontainebleau dans le cadre des travaux de l'A602 et sa liaison à la place Saint-Lambert. | ||||||
Décrite dans La Meuse comme étant située au « carrefour des rues Hemricourt, du Plan-Incliné et Édouard Wacken ». Ne subsistait que la grande vasque à dater de 1954[9]. | ||||||
Située le long de la Maison Magnery, anciennement « Auberge du soleil » ou « Au bon logis », comme indiqué sur son enseigne de pierre replacée au no 11 de la rue Mère-Dieu. Décrite dans La Meuse comme étant située au « carrefour des rues de l'Académie, Hocheporte, Mississipi et Montagne Sainte-Walburge », endroit qui sera baptisé « Place Hocheporte » en 1910. Elle est remplacée en 1935 par un abreuvoir de pierre. La Maison Magnery est détruite durant la Seconde Guerre mondiale[26],[9]. | ||||||
Décrite dans La Meuse comme étant située « avenue d'Avroy, en face de la rue de Fragnée », qui est au carrefour actuel entre l'avenue Blonden et la rue de Fragnée. Le journaliste utilise cependant l'ancien nom car ce tronçon de l'avenue d'Avroy avait été renommé « boulevard Blonden » en 1882[27],[28]. Sera déplacée de quelques mètres vers la rue Paradis dans les années 1930. | ||||||
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Située au carrefour de l'avenue Blonden et la rue Paradis, déplacée à quelques mètres de l'emplacement original de la fontaine du Petit Paradis durant les travaux de comblement du chenal de Commerce dans les années 1930. Ne subsistait que la grande vasque à dater de 1954[9]. | |||||
Décrite dans La Meuse comme étant située à l'« angle des boulevards d'Avroy et Piercot, près la statue de Charlemagne [sic]». Elle est située sur la gauche du boulevard. | ||||||
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Située sur la droite du boulevard, à quelques mètres de l'emplacement original de la fontaine du boulevard Piercot. Ne subsistait que la grande vasque à dater de 1954[9]. | |||||
Décrite dans La Meuse comme étant située « rue Saint-Léonard, à l'angle de la rue rue Sainte-Foi, près de l'église [Sainte-Foy] ». Elle est détruite par un camion en 1939[9]. Un bac de pierre et une pompe se trouvent à sa place. | ||||||
Décrite dans La Meuse comme étant située « place Saint-Pholien, à l'angle de la rue des Écoliers », elle est située au centre de la place, à côté d'une pylône. Ne subsistait que la grande vasque à dater de 1954[9],[29]. | ||||||
Décrite dans La Meuse comme étant située a l'« angle des rues d'Amercœur et Saint-Remacle, près de l'église [Saint-Remacle] ». À dater de 1954, elle avait été transférée dans le quartier proche de Cornillon[9]. | ||||||
Décrite dans La Meuse comme étant située à l'« angle des rues Grétry et Méan, près du pont de Longdoz », endroit qui sera baptisé « place Sylvain Dupuis » après 1931 (la date de décès de Sylvain Dupuis). La suppression de la fontaine a lieu en 1930[9]. | ||||||
Décrite dans La Meuse comme étant située « place de la Vieille-Montagne, à l'angle de la rue de Moresnet ». À dater de 1954, elle avait été enlevée pour remplacer celle du quai de la Goffe détruite par un camion[9]. La place dispose toujours d'une source d'eau potable sous la forme d'une borne à boire avec bouton pressoir[30]. | ||||||
XXe siècle
Durant leur existence, presque toutes les fontaines sont endommagées ou détruites par accident ou vandalisme, et les statuettes sont presque toutes volées[5],[1]. De nouvelles statuettes de la porteuse d'eau du second lot de fontaines doivent assez vite remplacer la botteresse du premier lot, comme pour celles de la place Cockerill, place de la Cathédrale, ou rue Grétry. L'année 1930 amorce la disparition graduelle puis totale des emplacements d'origine au cours du XXe siècle, mais aussi la création de nouveaux, en bonne partie encore présents au XXIe siècle.
L’augmentation du trafic ferroviaire et automobile (remplaçant les animaux) demande en effet le déplacement des fontaines vers des emplacements à l'abri du trafic pour laisser la place au développement de la ville, et ce en déplaçant une fontaine de quelques mètres, la déménageant dans un tout autre quartier, ou en la supprimant purement et simplement. À cette époque les fontaines détruites sont rarement remplacées car la fonderie les ayant fabriquées ayant cessé son activité et les moules originaux étant perdus sont un frein à leur remplacement. Les progrès en termes d'accès à l'eau courante dans les foyers précipite aussi l'obsolescence des fontaines publiques comme objet utilitaire[5],[9].
Malgré les services qu'elles rendent aux Liégeois, les fontaines peuvent aussi être vecteurs de maladies contagieuses. Durant l'été 1905, plusieurs cas de morve, maladie équine transmissible à l’homme, sont signalés à Liège. Malgré les demandes à la population de la police, relayées par le journal La Meuse, de ne plus faire boire les chevaux dans les fontaines Montefiore, certains habitants continuent de les laisser y boire, et continuent d'y boire eux-mêmes. Comme des cas de morve ont fini par se déclarer dans une commune voisine, la ville décide de fermer temporairement les bouches des fontaines pour permettre le placement de robinets destinés au remplissage des seaux pour pouvoir abreuver les animaux sans utiliser les vasques, et ainsi limiter la propagation de la maladie[31].
En 1949, à l'occasion de manifestations organisées en mémoire du sculpteur Léopold Harzé, auteur de la porteuse d'eau, la fontaine de la place de la Cathédrale est restaurée, dans un premier exemple du genre, et réinstallée à l'opposé de son emplacement, plus près de la cathédrale[9],[1].
En 1954 subsistent encore douze fontaines en situation, mais seule celle reconstituée place de la Cathédrale en 1949 est complète, les autres étant privées de leur statuette ou de leur colonne. Ces dernières incluent les emplacements de la place Cockerill, rue Joseph Demoulin, place Saint-Pholien, place du Marché, place de la République française, rue Grétry, boulevard Piercot, avenue Blonden, rue Hemricourt, quai de la Goffe et quai de l'Abattoir. Dans le bulletin 106 du Vieux-Liège, le chroniqueur Charles Bury déplore la disparition progressive des fontaines qu'il considère comme faisant partie du paysage liégeois et souligne le cachet qu'elles apportaient à la ville en tant qu'élément marquant du folklore liégeois de 1900[9].
En 1963, il n'en reste plus que quatre en situation. Sur la place du Marché, de la République française et le quai Sur-Meuse, incomplètes et dans un mauvais état général, ainsi qu'une cinquième reposant au dépôt du service des plantations de la ville. La quatrième en situation est celle de la place Cathédrale, toujours la seule à être complète depuis sa restauration en 1949, jusqu'à ce que sa statuette de porteuse d'eau et un des quatre dauphins cracheurs soient volés une nuit de la fin du mois de mars 1963. Cet exemplaire de la porteuse d'eau étant à l'époque une reproduction unique de la statuette de Harzé dont l'original est perdu, sa disparition suscite un certain émoi. Après une enquête, il est découvert qu'il s'agit d'une blague d'étudiant, et la statue (mais pas le dauphin) est finalement restituée[1],[32],[33].
En 1972, les fontaines toujours en situation sont les mêmes qu'en 1963, et le service des plantations de la ville possède à nouveau la statuette originale de la porteuse d'eau. À cette époque, Mr. Nelissen, le directeur du service, caresse le projet de restaurer plusieurs fontaines et de les placer à des endroits où elles seraient mieux à l'abri des dégradations, comme par exemple au centre de parterres de fleurs[33], projet qui va déboucher sur la création des emplacements actuels durant les années 1970.[réf. nécessaire]
En 1995, les nombre de fontaines en situation est remonté à huit, et tous les emplacements originaux ont disparu. Ces tout nouveaux emplacements, à l'écart du trafic, sont établis dans les quartiers du Centre et d'Outremeuse, dans un diamètre de moins d'un kilomètre autour du pont des Arches : rue Moray, En Neuvice et rue Sur-les-Foulons pour le Centre, et quai de Gaulle, rue Porte-Grumsel et rue Roture pour Outremeuse, ainsi qu'un emplacement à l'écart du centre, au parc de Péralta à Angleur. Toutes les fontaines de cette époque arborent la porteuses d'eau[5], qui sont des copies pleines réalisées par les ateliers Lhoest à Herstal, les statuettes originales étant creuses[réf. nécessaire], et certaines bénéficient d'une nouvelle colonne aux décorations légèrement différentes (sur la forme uniquement, pas le fond) réalisées par fonderie Mecanofonte, à Sauheid, qui a apposé son nom entre deux frises. Deux fontaines sont en cours de restauration, dont une censée rejoindre la place du Longdoz, ce qui restera sans suite. Un exemplaire avec colonne d'origine, mais coiffé d'une pomme de pin, se trouve aussi au parc de Sept Heures à Spa depuis au moins 1991[34].
Emplacements passés
Ce qui suit sont les emplacements créés au XXe siècle mais ayant été supprimés depuis.
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À dater de 1954, ce sous-quartier d'Amercoeur avait accueilli la fontaine de la rue Saint-Remacle. Elle avait ensuite été supprimée lors de la construction du viaduc de la ligne ferrioviaire 40[9]. | ||||||
Située devant le musée de la vie wallonne. Était encore présente en 1995[5]. | ||||||
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Située devant le bâtiment des nos 7 et 9, le long du bâtiment de la piscine d'Outremeuse, et arborant la porteuse d'eau. Était encore présente en 1995[5]. | |||||
Emplacements présents
Ce qui suit sont les emplacements créés au XXe siècle subsistant au XXIe siècle. Ces fontaines sont coiffées de la porteuse d'eau et fournissent de l'eau potable, à l'exception de celle de Spa. Les coordonnées des fontaines de Liège sont les coordonnées officielles. Ces modèles ont perdu leur chapiteau corinthien qui a été remplacé par un modèle plus simple que l'on trouvait aussi sur les fontaines du même type à Namur.
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Située devant le no 12, à mi-chemin entre la passerelle Saucy et le pont des Arches. Lions cracheurs incomplets à dater de 2021. | ||||||
Située au coin sud-est de la place Gabriel située au milieu de la rue. Lions cracheurs incomplets à dater de 2021. | ||||||
Située à l’extrémité sud-est de la rue. L'emplacement contemporain le plus connu, elle apparaît dans le film franco-belge Jeux d’enfants, sorti en 2003. En 2015, elle est renversée par une camionnette et cassée en trois morceaux, puis remplacée par un autre exemplaire provenant du stock des anciennes fontaines des ateliers du service des plantations de la ville[3],[38]. Lions cracheurs incomplets à dater de 2021. | ||||||
Située dans la partie est du parc. La porteuse d'eau dont elle était coiffée a été brièvement manquante jusqu'à son remplacement à la fin des années 2010. Lions cracheurs cependant incomplets à dater de 2021. | ||||||
Située à l’extrémité sud-est de la rue. | ||||||
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Située à l'extrémité sud-est du parc, au pied du funiculaire, elle est d'abord peinte en vert et surmontée d'une pomme de pin, disparue et remplacée ensuite par une simple boule, disparue à son tour. Présente depuis au moins 1991[34],[41]. | |||||
XXIe siècle
Dans les années 2010, les ateliers du service des plantations de la ville possèdent toujours dans leurs stocks des anciens exemplaires des fontaines supprimées[3]. Durant cette décennie la peinture des fontaines en situation est restaurée et elles reçoivent une couche de peinture marron, avec certaines éléments rehaussés par de la peinture dorée, notamment les inscriptions de la grande vasque, les dauphins ou les coquilles Saint-Jacques.
Dans les années 2020 subsistent cinq fontaines en situation à Liège, ainsi qu'une toujours à Spa. Elles se trouvent toujours aux emplacements créés durant la seconde partie du XXe siècle, à l'exception des rues Moray et Porte-Grumsel ayant été supprimés depuis.
Les fontaines de Liège ont cependant été renouées à leurs origines, car de juin à octobre, elles fournissent toutes de l'eau potable, parmi les autres points d'eau potable publics de la ville[42]. Début 2020 cependant, la pandémie de Covid-19 contraint la ville à désactiver tous ses points d'eau potable. Presque tous les points, sauf les Montefiore, sont réactivés en été de la même année[43].
Notes et références
- « Titre inconnu », La Meuse, .
- « Liège - fontaine Montefiore », sur Musée de l'eau et de la fontaine (consulté le ).
- « Liège, en Neuvice : la fontaine Montefiore restaurée », sur RTC-Télé Liège, (consulté le ).
- Jean Catin, « Liège en 1889 : Fontaines-abreuvoirs, La Meuse, 18 janvier 1889 », sur Ma nouvelle vie à Lîdge, (consulté le ).
- Ricardo Gutierrez, « Fontaines-abreuvoirs : l’héritage des Montefiore, le long parcours du cadeau de Mme Hortense Bischoffheim », sur Le Soir, (consulté le ).
- Paul Delforge, « Georges Montefiore-Levi », sur Connaître la Wallonie, (consulté le ).
- Guy Vanden Bemden, « Requilé », sur BE-monumen, (consulté le ).
- Compagnie générale des conduites d'eau : Série A, Liège, , Catalogue commercial (lire en ligne), Planche 128.
- Charles Bury, « Fontaines-abreuvoirs liégeoises », Bulletin du Vieux-Liège ASBL, no 106, , p. 388-389.
- « Coins de Belgique : La fontaine de la place de la gare de Guillemin à Liège. », Le Monde Illustré, no 2153, , p. 8 et 13 (lire en ligne).
- Théodore Gobert, « Les Eaux à Liège - Les fontaines publiques », sur Chokier (consulté le ).
- Jean Catin, « Liège en 1891 : Fontaines-abreuvoirs, La Meuse, 22 avril 1891 », sur Ma nouvelle vie à Lîdge, (consulté le ).
- « Fontaine Montefiore de 1889 sise rue du Monument 4, 4130 Esneux », sur Inventaire du patrimoine immobilier culturel, (consulté le ).
- « Fontaine Montefiore de 1895 sise rue de Poulseur 81, 4130 Esneux », sur Inventaire du patrimoine immobilier culturel, (consulté le ).
- Au Rond-Chêne : 28 juin 1891, Liège, Auguste Bénard, .
- Jean-Philippe Moutschen, « Photos des fontaines namuroises provenant de Buch (archives photographiques de Namur) et Closson », sur Facebook, (consulté le ).
- « Drinkwaterfontein », sur Maastricht Digitaal Centrum (consulté le ).
- Estelle Florani, « Liège en Cartes Postales - Les fontaines Montefiore », sur Chokier (consulté le ).
- « Les areines ou araines liégeoises », sur Province de Liège (consulté le ).
- Chien et cheval à la fontaine Montefiore du quai de la Goffe coiffée d'une porteuse d'eau.
- Jean-Philippe Moutschen, « Photos des fontaines liégeoises provenant des archives du Musée de la Vie wallonne », sur Facebook, (consulté le ).
- « Les archives du Musée de la Vie wallonne », sur Province de Liège (consulté le ).
- La quai de la Goffe et sa fontaine privée de sa colonne dans les années 50.
- La gare de Liège-Longdoz dans les années 50.
- Jean Catin, « Les fontaines en activité dans le quartier », sur Quartier Sainte-Marguerite à Liège, (consulté le ).
- Claude Warzée, « Hocheporte », sur Histoires de Liège, (consulté le ).
- Claude Warzée, « Les origines de l’avenue Rogier », sur Histoires de Liège (consulté le ).
- Claude Warzée, « Le lieu-dit Paradis (ou Petit Paradis) et l’ancien chenal de Commerce », sur Histoires de Liège (consulté le ).
- La place Saint-Pholien dans les années 50.
- « Borne à boire - Vieille montagne », sur Liège.be (consulté le ).
- Jean Catin, « Liège puzelé, chapitre quinze : La Meuse, 7 septembre 1905 », sur Ma nouvelle vie à Lîdge, (consulté le ).
- Jean Catin, « La Wallonie liégeoise en 1963 : La Wallonie, 25 mai 1963 : Les Liégeois : « Où est la Porteuse d'eau de Harzé ? » », sur Ma nouvelle vie à Lîdge, (consulté le ).
- Jean Catin, « Liège en 1972 : L'Avenir du Luxembourg, 20 décembre 1972 : La dernière porteuse d’eau des fontaines Montefiore, par Lily Portugaels », sur Ma nouvelle vie à Lîdge, (consulté le ).
- « Spa - fontaine Montefiore », sur Musée de l'eau et de la fontaine (consulté le ).
- « Fontaine Montefiore - de Gaulle », sur Liège.be (consulté le ).
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Voir aussi
Articles connexes
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