Fondation Maeght

La Fondation Marguerite et Aimé Maeght dite « Fondation Maeght » (prononcé [mɑɡ][1]) est la première fondation privée dédiée à l’art en France. C’est une fondation d’art moderne et d'art contemporain, elle est située à proximité du village de Saint-Paul-de-Vence, à 25 km de Nice.

La Fondation d’Aimé Maeght et de son épouse Marguerite, principaux éditeurs et marchands d’art de l’Europe d’après guerre, est née de l’amitié qu’ils entretenaient avec les artistes les plus importants du XXe siècle : Joan Mirò, Alexander Calder, Fernand Leger, Georges Braque, Alberto Giacometti, Marc Chagall et bien d’autres. Tous contribuèrent à sa création et c’est l’architecte catalan Josep Lluis Sert qui réalisa le bâtiment.

Ouverte toute l'année, sept jours sur sept, la Fondation Maeght accueille chaque année plus de 200 000 visiteurs[2] et possède une des plus importantes collections en Europe de peintures, sculptures, œuvres graphiques du XXe siècle[3]. La fondation organise de grandes expositions thématiques et des rétrospectives qui s'étendent à la littérature sur l'art.

Histoire

La Galerie Maeght

En décembre 1945, Aimé et Marguerite Maeght inaugurent à Paris la Galerie Maeght, lieu de rendez-vous des artistes, des poètes et des écrivains. Parmi eux, les peintres Matisse, Bonnard, et Braque qui apportent leur soutien aux projets d’Aimé Maeght. Le groupe s’agrandit avec l’arrivée des artistes comme Fernand Leger, Joan Miró, Bram et Geer Van Velde. Puis à nouveau, entre 1946 et 1951, avec Marc ChagallAlexander Calder, Raoul Ubac, Alberto Giacometti et Vassily Kandinsky qui exposent pour la première fois à la Galerie Maeght. Ce couple visionnaire organise en 1947 la première exposition surréaliste autour d’André Breton et de Marcel Duchamp.

La création de la fondation Maeght

La mort en 1953 de leur fils Bernard, atteint d’une leucémie, est une véritable épreuve qu’ils traversent avec le soutien des artistes. Georges Braque, épaulé par André Malraux, alors ministre d'État chargé des Affaires culturelles, suggère à Marguerite et Aimé Maeght de se lancer dans un grand projet : la création ex nihilo d’un lieu d’un nouveau genre dans le sud de la France, à Saint-Paul-de-Vence où les Maeght possèdent déjà une maison. Aimé Maeght a expliqué ainsi, après la mort de son fils, l’origine de ce projet :

« Quand Braque est venu me rejoindre à Saint-Paul, un mois après la mort de mon petit garçon, j'étais au fond du désespoir. Il m'a dit : « Puisque vous avez tant envie de faire quelque chose qui dépasse le commerce des arts que vous avez l'air de mépriser, comme je vous comprends, faites quelque chose ici, quelque chose qui n'aurait pas de but spéculatif, qui nous permettrait à nous les artistes d'exposer de la sculpture et de la peinture dans les meilleures conditions possibles de lumière et d'espace. Faites-le, je vous aiderai. » [...] Ce sont encore les peintres qui m'ont suggéré la voie à suivre. Georges Braque m'a incité à entreprendre quelque chose qui dépasse ma peine : un lieu d'art moderne parmi le thym et le romarin. Et Fernand Léger m'a dit : « Si tu fais ça, je t'apporte ma barbouille. Je peindrai même les rochers. »

Sur les conseils de Braque, le couple Maeght entreprend alors un voyage aux États-Unis en 1955, afin de visiter les fondations américaines telles que la fondation Barnes, la collection Phillips ou le musée Guggenheim.

C’est à partir de ces modèles que la Fondation Maeght ouvrira ses portes le 28 juillet 1964 à Saint-Paul-de-Vence. Elle sera inaugurée par André Malraux qui déclarera : « Ici est tenté quelque chose qui n’a jamais été tenté : créer l’univers dans lequel l’art moderne pourrait trouver à la fois sa place et cet arrière-monde qui s’est appelé autrefois le surnaturel. »

La fondation a été entièrement financée par Aimé et Marguerite Maeght. Elle ne dépend pas de l’administration des Musées Nationaux et ne bénéficie d’aucune subvention de l’État, du département ou de la commune de Saint-Paul. Cette autonomie financière lui permet d’être entièrement indépendante et libre du choix de son programme et de ses expositions.

Le conseil d’administration est composé de 11 membres où figurent 3 représentants des ministères de tutelle. Le directeur est chargé de l’administration, de la conservation des œuvres et des expositions.

Elle est reconnue d’utilité publique et peut recevoir des dons, legs et mécénats qui lui permettent ainsi de conserver et d’enrichir sa collection, de préserver son patrimoine architectural et de développer des activités culturelles. La création de la Société des Amis et la contribution des donateurs sont fondamentaux au développement et au rayonnement de la Fondation.

Collections

La Fondation Maeght possède une des plus importantes collections de peintures, de sculptures, de dessins et d’oeuvres graphiques d’artistes modernes et d’artistes contemporains en Europe avec plus de 13 000 références.

La collection de la Fondation regroupe plus de 1000 peintures et sculptures, 600 dessins, 6000 gravures et plus de 30 000 livres. Elle est composée des œuvres de la collection personnelle de Aimé et Marguerite Maeght mais aussi des commandes et des achats faits aux artistes. La collection a pour but d’être variée, et de confronter différentes générations d’artistes.

Alberto Giacometti est un des artistes les plus visibles à la Fondation. L’ensemble d’oeuvres de l’artiste est un des deux plus importants au monde: 35 sculptures, 25 dessins, 60 gravures et lithographies, dont les rares bronzes des années 1930 comme Le Cube, l’Objet invisible ou la Fontaine. La Fondation Maeght possède notamment les deux versions de L’homme qui marche.

La collection comporte aussi une grande partie de l’œuvre de Joan Mirò avec 8 peintures, 140 sculptures, 75 dessins, une centaine de collages et maquettes et plus d’un millier de lithographies et de gravures.

Expositions

Depuis son ouverture en 1964, la Fondation Maeght a organisé plus de 140 expositions thématiques, monographiques ou des expositions d’artistes contemporains.

On peut citer comme exemple :

  • Expositions thématiques : l’Art vivant aux États-Unis, L’art en mouvement, le Nu au XXe siècle, La Russie et les Avant-Gardes, Les Aventures de la vérité
  • Expositions monographiques : Kandinsky, Chagall, Calder, Matisse, de Staël, Bonnard, Giacometti, Miró, Braque, Dubuffet
  • Expositions d’artistes contemporains : Yan Pei-Ming, Pier Paolo Calzolari, Takis, Jacques  Monory, Gérard Garouste, Christo et Jeanne-Claude, Eduardo Arroyo, Lee Bae

La Fondation a aussi organisé des expositions consacrées à des écrivains, à leur rôle dans le domaine de l’art, et aux peintres qu’ils ont défendus. Ce fut le cas pour Pierre Reverdy en 1970, pour René Char en 1971 et en 1973 pour André Malraux.

La Fondation organise également des expositions qui sont présentées à l’étranger dans des musées ou dans des fondations privées comme à Teheran, à Grenade, à Bruxelles, à Madrid, ou a Stockholm.

Expositions temporaires

L'architecture

Organisation du bâtiment

Le bâtiment qui abrite les collections de la Fondation a été réalisé par l’architecte catalan Josep Lluis Sert, recommandé par Joan Miró.

Ce bâtiment novateur a marqué l’architecture du XXe siècle. Le projet initial était de créer un village d’artiste et non un musée.

Josep Lluis Sert calque son plan sur celui d’un village méditerranéen, où l’ensemble se développe autour d’un point central : la chapelle. Chaque bâtiment a sa fonction : la bibliothèque, le café, la librairie, le bureau, les salles d’expositions, les ateliers de gravure et de céramique, comme dans un village.

Le bâtiment s’intègre parfaitement dans le paysage. Le rythme est donné par les claustras blancs et les baies vitrées qui invitent le spectateur à observer les bois, la mer, le patio ou encore le bassin décoré par Braque.

L’architecte a conservé les déclivités du sol. Ainsi les salles d’expositions, patios et jardins sont agencés sur différents niveaux de terrasses, et donne au bâtiment toute son originalité.

La chapelle dédiée à Saint-Bernard est érigée sur des vestiges anciens. Cet édifice religieux est consacré. Le Christ au-dessus de l’autel, offert par le couturier Balenciaga à Marguerite Maeght est un Christ espagnol datant du XIIe siècle.

Une grande exposition sur l’architecte Joseph Lluis Sert a été organisée en 2014 pour les 50 ans de la Fondation. Olivier Kaeppelin, directeur de la fondation Maeght, commente cette architecture :

« Ma conviction, partagée avec Adrien Maeght qui a vécu son édification, est que l’architecture de Sert y est pour beaucoup : lumineuse, ouverte, intemporelle, elle est un havre de paix et de vie pour les artistes et leurs œuvres. Les amateurs d’art y trouvent, entre ciel et nature, quelque chose d’unique. De cette alchimie si singulière, tant architecturale qu’artistique, qui fait depuis 50 ans le succès de la Fondation Maeght, nous chercherons dans cette exposition à révéler les secrets. »

Un bâtiment HQE

La Fondation Maeght est le premier bâtiment à porter le titre HQE « Haute qualité environnementale ». Son architecte conçoit un lieu où lumière, ventilation naturelle, circulation d’air, présence d’eau et ombrage végétal sont les maitres mots. Ce bâtiment est un précurseur de l’architecture durable.

Le problème de l’éclairage des salles d’expositions a été résolu grâce aux demi-voutes qui coiffent les toits, véritables « pièges de lumière » qui captent et diffusent la lumière solaire à travers une paroi vitrée.

Josep Lluis Sert a voulu une lumière naturelle qui ne soit jamais directe pour préserver les œuvres. Cette lumière naturelle pénètre dans les bâtiments, et crée ainsi le lien entre l’extérieur et l’intérieur.

Au grand regret des défenseurs de ce projet architectural, de nombreuses ouvertures imaginées par Josep Lluis Sert, notamment les lanterneaux installés sur les toits, ont dû être occultées pour protéger les œuvres à l’intérieur.

Les deux grands impluviums blancs sont l’emblème de la Fondation et assurent deux fonctions : recueillir les eaux de pluie pour alimenter les bassins, et apporter de la fraicheur dans les salles d’exposition grâce à l’ombre qu’ils procurent.

En 2008, l’architecte italien Silvio d’Ascia dirige les travaux de réhabilitation et d’extension.

La contribution des artistes

Des peintres et des sculpteurs ont collaboré à l'architecture avec Josep Lluis Sert en créant des œuvres intégrées au bâtiment et à la nature : la cour Giacometti, le Labyrinthe Miró peuplé de sculptures et de céramiques, les mosaïques murales de Marc Chagall et de Pierre Tal Coat, le bassin et la mosaïque de Braque, le vitrail de la chapelle qui reprend le thème exact des Oiseaux que Georges Braque a créé pour le plafond du musée du Louvre[5], la fontaine animée de Pol Bury[6].

L'édifice a été labellisé « Patrimoine du XXe siècle » par le ministère de la Culture[7].

Joan Miró

Chaque année Joan Miró séjourne plusieurs mois à Saint Paul chez les Maeght, où il travaille dans les ateliers de gravure et de céramique. Pour témoigner de sa reconnaissance, il fera le don de plusieurs centaines d’œuvres à la fondation. En 1979, la Fondation célèbre les 85 ans de l’artiste et dévoile le vitrail monumental que Miró a conçu pour la Fondation.

Le Labyrinthe de Miro :

Aimé Maeght propose à Joan Miró d’investir les jardins de la Fondation. Accompagné de Josep Llorens Artigas, son ami de jeunesse à Barcelone, Miró réinvente la sculpture monumentale, qu’il associe à la nature et à l’architecture. Pour le Labyrinthe, il va créer un monde onirique peuplé d’animaux fantastiques.

L’artiste catalan explore plusieurs matériaux. Il utilise principalement la céramique : le Lézard  grimpe sur le mur du patio, le Mur qu’il réalise compte 468 plaques de céramique, la sculpture intitulée le Cadran solaire, ainsi que son œuvre la plus importante  : La déesse de la Fécondité. Le mur de brique du bâtiment principal de la Fondation est le support du Personnage, visage de céramique brune juché sur une haute tige de fer.

La Tour est dominée par un oiseau en fer forgé, L’ Oiseau Solaire et L’Oiseau Lunaire sont en marbre de Carrare, la Fourche est en fer et en bronze. Celle-ci reprend le symbole du poing levé du paysan en révolte lors de la guerre d’Espagne. La Grande Arche est réalisée en béton, où Miró a gravé ses signes récurrents au marteau-piqueur.

Au centre d’un bassin se dresse La femme à la chevelure défaite en marbre blanc, et un second bassin accueille trois gargouilles de l’artiste.

On peut aussi voir Le fil d’Ariane, ligne blanche peinte par Miró sur les murets, qui guide le visiteur dans sa promenade.

Alberto et Diego Giacometti

La Cour Giacometti se trouve en bas du bâtiment principal et ses toits en pagode. Cette cour accueillait les Nuits de la Fondation ainsi que des concerts et des grandes soirées.

Tous les éléments de décoration de la fondation comme les bancs, les portes, les lampes, les lampadaires, ont été conçus par Alberto Giacometti et Diego Giacometti. L’ensemble du mobilier de la cafétéria, appelée Café Diego, est une création spéciale de Diego pour la Fondation. Il réalise les étagères, les comptoirs, les lampes, les chaises ainsi que les tables en bronze et en fer forgé.

Georges Braque

Georges Braque a réalisé le vitrail sud de la chapelle saint Bernard en 1962, où son oiseau blanc incarne le sacré. Il dessine aussi un bassin en mosaïque représentant des poissons.

Raoul Ubac

Raoul Ubac a réalisé le vitrail nord de la chapelle saint Bernard ainsi que les quatorze stations du Chemin de Croix en ardoise sculptée en 1961. On trouve aussi, sur l’un des murs extérieurs de la fondation, la plus grande sculpture murale de l’artiste.

Marc Chagall

Marc Chagall réalise spécifiquement pour la Fondation, une mosaïque murale intitulée « Les Amoureux » ou « Bienvenue ». Elle représente le couple Maeght accueillant les visiteurs.

Une structure multiculturelle

Les Nuits de la Fondation

La Fondation Maeght ne se présente pas comme un musée mais comme un grand atelier, permettant la rencontre de tous les arts.

Les Nuits de la Fondation Maeght ont eu lieu tous les étés de 1965 à 1970. Le public pouvait ainsi découvrir au sein même de la Fondation des artistes pionniers de la musique expérimentale comme Terry Riley, Pierre Boulez ou encore Cecil Taylor. La Fondation accueillait ainsi la musique contemporaine mais aussi la danse et le théâtre d’avant-garde.

La Bibliothèque

La Fondation Maeght comporte une bibliothèque publique ouverte depuis 1972. Elle comprend environ 10 000 volumes sur l’art, les collections complètes des principales revues d’art ainsi que les catalogues des principaux musées du monde.

Le Cinéma

La Fondation comportait un cinéma d’art et d’essai qui fonctionnait tous les jours en été et trois jours par semaine pendant le reste de l’année. Une cinquantaine de films sur les artistes, la plupart produits par Maeght, y étaient projetés en alternance.

Voir aussi

Notes et références

  1. D'origine flamande, le nom Maeght est prononcé en France approximativement comme « mâg » ou « maag » (à la différence du Maeght néerlandais, qui se prononce lui comme « makt »).
  2. Informations du site officiel de la fondation
  3. Liste du site des Amis du musée.
  4. Page du site des Amis du musée.
  5. Les Oiseaux du Louvre en vitrail
  6. (en) « Stones for the Spirit », Time magazine, .
  7. Liste d'édifices du XXe siècle de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, sur patrimoine-xx.culture.gouv.fr. Consulté le 2 mai 2012.

Liens externes

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