Expulsion des Jésuites

L'expulsion des Jésuites est un ensemble de décisions prises par les gouvernements de différents pays au XVIIIe siècle pour interdire les activités de la Compagnie de Jésus, dissoudre ses institutions, confisquer ses biens et obliger les Jésuites à s'exiler dans un pays étranger s'ils voulaient conserver leur état religieux. L'aboutissement en fut la suppression de l'ordre par le pape Clément XIV en 1773.

Universellement rétablie en 1814 par un autre pape, Pie VII, la Compagnie de Jésus subit de nouvelles mesures d’expulsion ou bannissement aux XIXe et XXe siècles, selon les pays, touchant l'ensemble des congrégations religieuses ou plus particulièrement la Compagnie elle-même.

La première Compagnie de Jésus (1540 à 1773)

Le Marquis de Pombal : L'Expulsion des Jésuites, tableau de 1766.

Interdiction de 1594 à 1603

Les collèges Jésuites ont un grand succès malgré la situation précaire des Jésuites dans une France à ce moment largement gallicane. Leur allégeance au pape les rend toujours un peu suspects.

En décembre 1594 les Jésuites sont expulsés de France accusés de complicité dans l’attentat manqué contre le roi Henri IV. À partir de 1603, les Jésuites sont de retour sur le territoire français.

Bannissement de 1763

C'est au XVIIIe siècle, c'est-à-dire en 1763, que les Jésuites sont expulsés de France. Ce renvoi part de l'une importante faillite financière du R. P. Antoine Lavalette à la Martinique. Ayant été assigné par ses créanciers, les Jésuites refusent d'éponger ses dettes. Le responsable des missions jésuites fait appel au Parlement de Paris. Les magistrats jansénistes du parlement profitent de l’occasion pour réclamer un examen des statuts de l’ordre en 1761. Ils sont condamnés par le Parlement de Paris où une alliance gallicane-janséniste saisit cette occasion de régler leur compte aux Jésuites en dépit du soutien de Louis XV. Le Parlement déclare finalement que leur ordre « nuit à l’ordre civil, viole la loi naturelle, détruit la religion et la moralité, corrompt la jeunesse » et la Compagnie de Jésus est bannie de France. Ses collèges sont fermés les uns après les autres. Cependant les Jésuites peuvent résider en France comme ‘fidèles sujets du Roi’ et exercer leur ministère sous l’autorité des évêques locaux.

Expulsion des colonies portugaises du Brésil (1640)

Les traficants portugais d'esclaves amérindiens se heurtent cependant en 1640 à la proclamation de l’encyclique du pape Urbain VIII contre l’esclavage des Amérindiens[1], et ses déclinaisons locales, qui entraînent des ordres royaux les obligeant à rendre les biens et les villages indiens[1]. Mais il y désobéissent immédiatement. Peu après, ils ont même expulsé les jésuites de Sao Paulo[1],[2].

Expulsion de Naples, Sicile et Parme (1767)

Les souverains de ces États étant directement liés aux Bourbons de la maison royale d’Espagne, ils emboitent le pas et suivent l’exemple de l’Espagne.

Suppression universelle de l’Ordre religieux (1773)

En 1773, le pape Clément XIV, par le bref Dominus ac Redemptor supprime l’ordre religieux, estimant cette décision nécessaire pour une paix « véritable et permanente » dans l’Église. Cette décision s'appliqua dans tous les pays catholiques. En Russie (orthodoxe) la tsarine Catherine II interdit la promulgation du bref apostolique et il en fut de même en Prusse où régnait le roi protestant Frédéric II.

Après la restauration de la Compagnie de Jésus (1814)

Expulsion de Russie (1820)

Les Jésuites sont d’abord bannis de Saint-Pétersbourg puis expulsés de Russie, par Alexandre Ier, en 1820.

Expulsions de France (1828, 1880, 1901)

Victimes des luttes de pouvoir et querelles incessantes entre les partis de tendance républicaine et ceux qui prônaient la ‘restauration’ les Jésuites sont expulsés de France en 1828, 1880 et 1901.

Interdiction de 1880

Le 29 mars 1880, deux décrets sont signés par Charles de Freycinet, président du Conseil, et Jules Ferry, ministre de l’Instruction publique, pour d'une part expulser de France les jésuites et d'autre part imposer aux autres congrégations religieuses de demander une 'autorisation d'enseignement' dans un délai de trois mois, sous peine de dissolution et de dispersion.

Au total, 5.643 Jésuites auraient été expulsés[3].

Interdiction de 1901

Lorsqu’ils furent bannis en 1901 les Jésuites dirigeaient en France 24 collèges, de nombreuses églises et autres institutions. Ils cherchèrent refuge dans les pays limitrophes et eurent ainsi collèges et scolasticats à Jersey, en Belgique (Enghien et Florennes), en Espagne, etc.

Expulsion de Suisse (1848)

Elle est une des conséquences de la guerre du Sonderbund qui vit la défaite des cantons catholiques, et de la création de l’État fédéral suisse. Avec le Kulturkampf pour toile de fond, le bannissement des Jésuites avait été confirmé par les articles d'exception lors de la révision constitutionnelle de 1874. L'interdiction constitutionnelle a été levée en 1973.

Expulsion du Mexique

Entre 1821 et 1914 les Jésuites durent quitter cinq fois le Mexique…

Expulsions des pays d’’Amérique latine

Victimes de changements politiques les Jésuites furent expulsés de Colombie (1850), Guatemala (1871), Nicaragua (1881) et Brésil (1889), chaque fois pour y revenir quelques années plus tard.

Notes et références

  1. "Le versant brésilien de l'Atlantique-Sud : 1550-1850" par Luiz Felipe de Alencastro, dans la revue Annales en 2006
  2. "Autour de 1640 : politiques et économies atlantiques" par H. Chaunu et P. Chaunu, dans la revue des Annales en 1954
  3. Libre pensée 44, Au temps de l’expulsion des congrégations: Nantes, le 14 juin 1903.
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