Alnus glutinosa

Aulne glutineux, aulne noir, aulne poisseux, vergne ou verne

Alnus glutinosa
Aulne glutineux (Alnus glutinosa)
Classification APG III (2009)
Règne Plantae
Clade Angiospermes
Clade Dicotylédones vraies
Clade Noyau des Dicotylédones vraies
Clade Rosidées
Clade Fabidées
Ordre Fagales
Famille Betulaceae
Genre Alnus

Espèce

Alnus glutinosa
(L.) Gaertn. (1790)

Synonymes

  • Alnus alnus Britton
  • Alnus vulgaris Hill
  • Betula alnus variety glutinosa Gaertn
  • Betula glutinosa Lam

Statut de conservation UICN


LC  : Préoccupation mineure

Répartition géographique

Un aulne noir en été à Marbourg.
Un aulne noir en hiver en Styrie.

L’aulne glutineux, l’aulne noir, l’aulne poisseux (Alnus glutinosa), est un arbre feuillu de la famille des bétulacées, très présent dans la flore indigène de l'Europe (Scandinavie comprise). Il est parfois appelé vergne ou verne.

Description

L'aulne glutineux possède un port conique et son écorce est d'un brun noir et crevassée.

Ses feuilles sont ovales et tronquées au sommet (comme découpées d'un coup de ciseau). La face supérieure est vert foncé, luisante et gluante, tandis que la face intérieure est mate avec des touffes de poils à l'angle des nervures.

Les rameaux sont fins, souples, puis, en vieillissant, se couvrent de lenticelles. Les bourgeons sont violets, gluants et retirés du rameau.

L'espèce produit des chatons mâles et femelles. Les chatons mâles sont d'une longueur oscillant de 6 à 10 cm et les chatons femelles sont petits et globuleux. Les fruits (strobiles) sont en forme de cône vert devenant brun et ils sont globuleux d'un centimètre de diamètre .

Exigences écologiques

Inflorescence, appelée strobile.
inflorescence mâle.

Tempérament héliophile.

Exigences hydriques : humide à très humide.

Exigences trophiques : sol moyennement acide à neutre malgré une préférence pour les sols acides.

On trouve cette espèce à l'étage collinéen jusqu'à l'étage montagnard (1 200 mètres). C'est l'espèce d'aulne qui supporte le mieux l'eau stagnante et les sols lourds. L'aulne glutineux souffre très vite de la sécheresse contrairement à son voisin, l'aulne vert plus tolérant aux sols secs généralement, cet arbre se trouve sur les ripisylves car il apprécie les sols constamment humides. Cette particularité de pouvoir pousser les racines totalement immergées amène cet arbre à devoir développer une technique différente pour capter l'azote nécessaire à sa croissance. Habituellement prélevé par les racines dans la terre l'azote est, chez l'aulne glutineux, absorbé avec l'aide d'une bactérie présente sur ses racines appelée Frankia[1].

C'est une espèce à tendance pionnière qui supporte mal la concurrence et à tendance à disparaître lorsque d'autres essences s'installent.

État des populations, pressions réponses

L'aulne glutineux n'est pas considéré comme menacé, mais les aulnaies qui avaient notamment été conservées pour la production d'un charbon de bois apprécié pour les poudreries ont fortement régressé, au profit de la culture de peupliers (populiculture) ou du drainage des zones humides pour leur mise en culture, en pâture ou pour leur urbanisation.

La diversité génétique des populations d'aulnes glutineux a probablement souffert de l'artificialisation et du déboisement des berges et ripisylves des cours d'eau.

Dépérissement des aulnes glutineux

Jeune tronc malade du Phytophtora alni.
Comme toutes les espèces rivulaires ayant coévolué avec le castor, l'aulne glutineux se régénère très facilement par recépage, pratique dont il ne faut pas abuser pour limiter les risques d'infections bactériennes et fongiques et si l'on veut qu'il entretienne une large diversité génétique.
Aspect du tronc.

Cette maladie, qui n'a été signalée qu'en Europe, semble due à Phytophthora alni et peut-être à d'autres cofacteurs[2].

Elle progresse en Europe depuis les années 1980 (mortalité importante à partir des années 1980)[3]. Les dépérissements ponctuels d'aulnes signalés depuis le début des années 1900 sporadiquement en Europe semblaient pouvoir tous être expliqués par des problèmes stationnels (aulnes plantés ou ayant poussé dans un milieu ne leur convenant pas : trop sec, trop acide...).

Mais une maladie émergente semble prendre de l'ampleur depuis les années 1990, due à une espèce antérieurement inconnue de champignon du genre Phytophthora (micro-organisme filamenteux, oomycète proche des champignons, issu de l’hybridation de deux espèces de Phytophthora présentes dans les mêmes milieux[3])
Les symptômes en sont des feuilles anormalement nombreuses, trop petites et jaunissantes, un houppier clairsemé (mais homogène), des taches rouille à noirâtres à la base du tronc, marquant des zones de nécroses sous l'écorce et évoquant un chancre, souvent accompagnées de coulures goudronneuses (exsudats).

  • En Bavière, des mortalités ont touché environ 1/3 des parcelles forestières prospectées et plus de 50 % des berges étudiées.
  • En Région wallonne (Belgique), 28 % des aulnes dépérissaient sur les berges[3]
  • En Angleterre, plus de 15 % des aulnes des ripisylves inspectées dans le sud du pays ont été infectés ou tués de 1994 à 2006[3].
  • En France, environ 20 % des aulnes du bassin Rhin-Meuse étaient malades, avec 71 % des rivières touchées (en 2004 dans ce bassin, 16 % de 1204 aulnes étudiés étaient touchés. 78 % des 58 tronçons de rivières inspectés présentaient au moins un arbre dépérissant et 71 % de 35 cours d’eau inspectés étaient touchés). Au début des années 2000, des mortalités touchant annuellement environ 5 % des aulnes ont été signalées dans certains secteurs de la Sarre et en Charente[3].
  • En Allemagne, Phytophthora alni a été identifié dans 90 % des lieux infectés[3].

Ceci fait de l'aulne, avec l'orme, l’espèce d'arbre la plus menacée dans les écosystèmes naturels européens[3]. La température de l'eau et la faiblesse du courant favorisent le dépôt d'inoculum au pied des arbres, et un contexte argilo-limoneux (généralement agricole) favorise de manière générale les espèces de Phytophthora[3].

La qualité de l'eau ne semble pas en cause, mais le type de sol et la présence d'ouvrages artificiels (barrages, ponts semblent  selon l'agence de l'eau  pouvoir accroître le risque d'infection en aggravant la fréquence des crues et la stagnation de l’eau[3]. La mort des aulnes contribue à diminuer l'ombrage des rivières et donc leur réchauffement, ce qui  dans une perspective de réchauffement climatique  pourrait encore favoriser la production de zoospores. Il est recommandé de brûler la base des troncs contaminés, d'éloigner le bois contaminé du bord de l'eau, de désinfecter les outils d'entretien de berge, de ne pas introduire de Phytophthora alni dans les sites indemnes (ce qui peut se faire via des plants ou le transports de terre ou bois contaminé), ou via le réempoissonnement[3] ou l'apport d'écrevisses, plantes, etc. venant de zones touchées.

Le recépage permet  dans les zones touchées  de produire des brins sains (le microbe ne semble pas passer facilement de la souche au rejet[3] dont le système immunitaire est peut-être dopé par le recépage. Conserver des ripisylves à haute biodiversité, c'est-à-dire non équiennes, constituées d'espèces autochtones, adaptées au milieu et génétiquement diversifiées est peut-être le meilleur moyen de contrôler et limiter cette maladie[3].

Galles et parasitisme des feuilles

La feuille de l'Aulne glutineux abrite fréquemment neuf galles différentes, dans les genres Eriophyes et Aceria dont :

Ses racines sont le refuge d’une importante faune aquatique lorsqu'il pousse au bord d'un cours d'eau.

L'aulne semble, comme toutes les espèces d'arbres, sensible à un excès d'ozone troposphérique (nécrose des feuilles), fréquent lors des canicules, sous le vent des grandes agglomérations et des axes de circulation.

Systématique

L'espèce Alnus glutinosa a été décrite initialement par le naturaliste suédois Carl von Linné, et reclassée par le botaniste allemand Joseph Gärtner en 1790[4].

Noms vernaculaires

  • aulne glutineux,
  • aulne noir,
  • aulne poisseux,
  • verne ou vergne.

Dans le massif des Albères en Roussillon ainsi qu'en Catalogne, il était surnommé arbre nègre (arbre noir), à la fois du fait de son écorce foncée mais aussi à cause de la croyance selon laquelle les sorcières utilisaient son charbon pour tracer des cercles magiques[5].

Taxinomie

Selon Catalogue of Life (8 juin 2014)[6] et World Checklist of Selected Plant Families (WCSP) (8 juin 2014)[7], il existe quatre sous-espèces :

  • Alnus glutinosa subsp. glutinosa. Europe.
  • Alnus glutinosa subsp. barbata, Nord de l'Anatolie (Rize, Trabzon, Artvin)
  • Alnus glutinosa subsp. antitaurica. Sud de l'Anatolie, rare.
  • Alnus glutinosa subsp. betuloides. Est de l'Anatolie.

et des variétés à usage décoratif :

  • Alnus glutinosa var. laciniata (aux feuilles petites et profondément dentées).
  • Alnus glutinosa var. incisa (Willd.) Regel (aux feuilles très petites et lobées)

L'aulne glutineux et l'humain

L'aulne permet de consolider les rives des cours d'eau grâce à son important système racinaire.

On l'utilise en foresterie pour préparer les sols qu'il assainit et enrichit avant la plantation de peupliers. Il est considéré comme l'engrais vert des forestiers.[réf. souhaitée]

Au Japon, un type d'aulne serait utilisé pour préparer de futures terres agricoles[réf. nécessaire].

Il était utilisé au Moyen Âge par les chapeliers pour teindre les feutres en noir.

Il était autrefois le combustible préféré des boulangers et des verriers car il brûle rapidement en dégageant une vive chaleur et peu de fumée.

Le bois d'Aulne pourrit dans l'air humide ; en revanche, il est réputé imputrescible dans l'eau : on l'utilisait pour faire des conduites d'eau souterraines et des rigoles. Il peut être utilisé en drainage : des fagots d'aulne bien serrés au fond de tranchées assurent longtemps l'écoulement de l'eau et l'aération des sols.

La moitié de Venise serait bâtie sur des pilotis en Aulne[8].

Il peut être utilisé comme pare-feu productif autour de stations enrésinées.

Les racines et les feuilles d'aulne servent souvent de refuge à la faune environnante (y compris les insectes et des arachnides tels que les tiques). Lorsqu'on retourne les feuilles d'un aulne, on y trouve souvent de la vermine (terme qui aurait la même étymologie que « verne »). Autrefois, lorsqu'on voulait se débarrasser de la vermine dans une maison, un poulailler ou une écurie, on épandait sur le sol des feuilles de verne encore bien humides de rosée le matin et toute la vermine venait s'y mettre. Ensuite on jetait les feuilles au feu et le lieu était vidé de ces parasites.

Cultivars

  • Imperialis : peu volumineux, houppe conique, feuillage vert tendre, feuilles très découpées (même plus que la variété 'Laciniata'), branche grèle, hauteur m. Croissance lente[9].
  • Laciniata : comme le type avec des feuilles, houppe conique, port érigé, pousse plus vite que la variété 'imperialis'[9] ;
  • Pyramidalis : port étroit[9] ;
  • Incisa : arbre très lent à pousser, 12 m, petites feuilles qui font penser à l'aubépine[9] ;
  • Aurea : il a une écorce orangée et des feuilles dorées surtout au débourrement[9].

Croyances

En Roussillon, les sorcières étaient réputées utiliser son bois pour la fabrication de leurs baguettes magiques. Le proverbe foc de vern, foc d'infern (feu d'aulne, feu d'enfer) fait référence à la fois à la hauteur des flammes lorsqu'il brûle et aux feux de l'enfer. Dans le massif des Albères, toujours en Roussillon, il était accusé de deixar morir el seu pare de fred (ce qui signifie en catalan : laisser mourir son père de froid), en raison de sa piètre qualité comme bois de chauffage[5].

Notes et références

  1. Francis Hallé, Les arbres amoureux ou comment se reproduire sans bouger, Paris, Salamandre, , 143 p. (ISBN 9782940584307), pages 24-25
  2. Dans le cas du chancre du marronnier, d'abord attribué à un Phytophtora presque toujours trouvé dans le bois dépérissant, le facteur initial était une bactérie (Pseudomonas syringae), et le Phytophtora n'était qu'opportuniste.
  3. Dépérissement des aulnes glutineux dû à Phytophthora alni ; Revue bibliographique. Synthèse des travaux réalisés entre 1999 et 2006 dans le bassin Rhin-Meuse et conseils de gestion Document d'information et conseil publié par l'Agence de l'eau Rhin-Meuse (8 pages, PDF).
  4. Gaertner, J. (1788-1791) De Fructibus et Seminibus Plantarum, 2 vols. Stuttgart, Tübingen.
  5. Joan Tocabens, Herbes magiques et petites formules : Sorcellerie en Roussillon et autres Pays Catalans, Perpignan, Ultima Necat, , 141 p. (ISBN 978-2-36771-002-0).
  6. Roskov Y., Ower G., Orrell T., Nicolson D., Bailly N., Kirk P.M., Bourgoin T., DeWalt R.E., Decock W., van Nieukerken E.J., Penev L. (eds.) (2020). Species 2000 & ITIS Catalogue of Life, 2020-12-01. Digital resource at www.catalogueoflife.org. Species 2000: Naturalis, Leiden, the Netherlands. ISSN 2405-8858, consulté le 8 juin 2014
  7. WCSP. World Checklist of Selected Plant Families. Facilitated by the Royal Botanic Gardens, Kew. Published on the Internet ; http://wcsp.science.kew.org/, consulté le 8 juin 2014
  8. op. cit.Lieutaghi.
  9. Charlotte Testu, Arbres feuillus de nos jardins, Paris, La Maison Rustique, 1976 (ISBN 2-7066-0026-8).

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes

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