Article 18 de la Constitution de la Cinquième République française
L’article 18 de la Constitution de la Ve République est un article de la Constitution française du 4 octobre 1958 qui précise les modalités de message du président de la République aux deux assemblées du Parlement.
Texte
« Le Président de la République communique avec les deux Assemblées du Parlement par des messages qu'il fait lire et qui ne donnent lieu à aucun débat.
Hors session, le Parlement est réuni spécialement à cet effet. »
— Article 18 de la Constitution du 4 octobre 1958 en vigueur du 5 octobre 1958 au 25 juillet 2008[1]
« Le Président de la République communique avec les deux assemblées du Parlement par des messages qu'il fait lire et qui ne donnent lieu à aucun débat.
Il peut prendre la parole devant le Parlement réuni à cet effet en Congrès. Sa déclaration peut donner lieu, hors sa présence, à un débat qui ne fait l'objet d'aucun vote.
Hors session, les assemblées parlementaires sont réunies spécialement à cet effet. »
— Article 18 de la Constitution du 4 octobre 1958 en vigueur depuis le 25 juillet 2008[2]
Origines
IIe République : discours annuel
Dans la Constitution de 1848 (régissant la Deuxième République), l'article 52 dispose que le président doit prononcer annuellement un discours devant l’Assemblée nationale législative, qui était l’unique assemblée parlementaire, pour « l’exposé de l’état général des affaires de la République ». Louis-Napoléon Bonaparte a ainsi prononcé trois discours, en 1849, 1850 et 1851 avant l’instauration du Second Empire[3].
IIIe et IVe République : lecture d'un message
Au début de la Troisième République, la loi de Broglie, votée le interdit la présence du président de la République devant le Parlement, et réduit son intervention à la possibilité de faire lire des messages par le président d’une assemblée. Cette contrainte, appelée « cérémonial chinois » visait à sanctionner le tournant politique de Thiers, élu par la majorité monarchiste au Parlement mais qui s'était tourné vers le républicanisme[4].
Ces dispositions ont été reprises par la loi constitutionnelle du 16 juillet 1875 sur les rapports des pouvoirs publics (article 6), puis sous la Quatrième République par la Constitution du 27 octobre 1946 (article 37)[5].
La pratique
À l'origine : Lecture d'un message uniquement
Les dispositions de la Troisième et de la Quatrième République ont été reprises sous la Cinquième République par l'article 18 de la Constitution du 4 octobre 1958.
Sous la Cinquième République, la lecture d'un message du président s'est produite à 18 reprises[6] :
- Charles de Gaulle : 15 janvier 1959, 25 avril 1961, 20 mars 1962, 2 octobre 1962, 11 décembre 1962 ;
- Georges Pompidou : 25 juin 1969, 5 avril 1972, 3 avril 1973 ;
- Valéry Giscard d'Estaing : 30 mai 1974 ;
- François Mitterrand : 8 juillet 1981, 8 avril 1986, 25 juin 1986, 26 octobre 1988, 27 août 1990, 16 janvier 1991 ;
- Jacques Chirac : 19 mai 1995, 2 mars 1999, 2 juillet 2002.
Depuis 2008 : Possibilité de discours devant le Congrès
La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a modifié l'article 18 pour donner au président la possibilité de venir s'exprimer de vive voix devant le Parlement réuni en congrès. Cette modification avait été suggérée dès 1963 par le général de Gaulle[7].
Le discours du président ne remplace pas la déclaration de politique générale, où le Premier ministre peut engager sa responsabilité devant l’Assemblée nationale.
Pour l'occasion, les deux chambres du Parlement se réunissent au château de Versailles, dans la salle du Congrès. La déclaration du président ne peut toutefois faire l'objet d'un vote et les parlementaires ne peuvent lui répondre en sa présence.
En juillet 2018, cette nouvelle disposition a été utilisée à quatre reprises[8] :
- Nicolas Sarkozy : le ;
- François Hollande : le ;
- Emmanuel Macron : le et le .
Débats sur l'interprétation de l'article
Le président Nicolas Sarkozy ayant envoyé le 26 juillet 2011 un courrier à chaque parlementaire français, cette initiative a été jugée contraire à la Constitution par le député Henri Emmanuelli, au motif que l'article 18 définirait de manière limitative les procédures par lesquelles le président peut s'adresser aux parlementaires. La position des constitutionnalistes varie sur cette question : Guy Carcassonne estime que ce courrier n'est pas conforme à la Constitution, tandis que Didier Maus « ne voi[t] pas ce qui lui interdit formellement d'écrire aux parlementaires »[9]. Le président de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer, a quant à lui considéré que rien n'interdisait au président de s'adresser, comme il l'entend, à chacun des parlementaires[10].
Notes et références
- Article 18 de la Constitution du 4 octobre 1958 en vigueur du 5 octobre 1958 au 25 juillet 2008, sur Légifrance
- Article 18 de la Constitution du 4 octobre 1958 en vigueur depuis le 25 juillet 2008, sur Légifrance
- Jean-Marie Pottier, « Sarkozy succède à Louis-Napoléon Bonaparte », sur challenges.fr, .
- Patrick Roger, « Adophe Thiers et le “cérémonial chinois” », Le Monde, (lire en ligne).
- Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions, « Les discours du Président de la République devant le Parlement » (sur Internet Archive).
- « Les messages au Parlement du président de la République », Dossiers d'histoire, sur senat.fr.
- Mustapha Afroukh, « La portée du nouveau droit de message à la lumière de la déclaration du Président de la République au Congrès du 22 juin 2009 », Revue française de droit constitutionnel, no 87, , p. 1-23 (DOI 10.3917/rfdc.087.0001).
- « Déclaration du président de la République », sur assemblee-nationale.fr (consulté le )
- Thomas Wieder, « Nicolas Sarkozy a-t-il pris ses aises avec la Constitution ? », Le Monde, (lire en ligne).
- Jean-Baptiste Garat, « La lettre de Sarkozy conforme à la Constitution pour Accoyer », Le Figaro, (lire en ligne).
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