Achille Liénart

Achille Liénart, né le à Lille et mort le , communément désigné sous le titre cardinal Liénart, a été évêque de Lille pendant quarante ans. Une telle longévité est assez rare dans l'histoire de l'Église. Son soutien au syndicalisme chrétien lui valut le qualificatif de cardinal rouge qui ne recouvre pas cependant la totalité de son action, qui s'étendait à tous les milieux.

Pour les articles homonymes, voir Liénart.

Achille Liénart

Le cardinal Liénart en février 1939.
Biographie
Naissance
à Lille (France)
Ordination sacerdotale
Décès
à Lille
Cardinal de l’Église catholique
Créé
cardinal
par le
pape Pie XI
Titre cardinalice Cardinal-prêtre
de S. Sisto
Évêque de l’Église catholique
Consécration épiscopale par
Mgr Charles Lecomte
Prélat de la Mission de France
Évêque de Lille
Autres fonctions
Fonction religieuse

« Miles Christi Jesu »
(en) Notice sur www.catholic-hierarchy.org

Aumônier du 201e régiment d'infanterie pendant la Grande guerre, curé de la paroisse Saint-Christophe de Tourcoing jusqu'en 1928, il devint à 44 ans le plus jeune évêque de France. Il fut créé cardinal moins de deux ans plus tard par Pie XI à un moment où celui-ci souhaitait renouveler profondément l'épiscopat français. Le cardinal Liénart accorda, dans la ligne de ce pontificat, une priorité au développement de l'Action catholique, particulièrement de l'Action catholique spécialisée, moyen privilégié de l'évangélisation dans le diocèse de Lille. Au cours de la Seconde Guerre Mondiale, Achille Liénart collabora activement avec le régime de Vichy, soutenant publiquement la politique du maréchal Pétain ainsi que l'institution du S.T.O et s'abstenant de toute condamnation des persécutions à l'encontre des juifs. Il fut l'un des plus ardents partisans du concile de Vatican II et l'un des plus importants parmi les évêques libéraux qui souhaitaient un assouplissement de la discipline, de la liturgie et de la théologie.

Biographie

Éducation et famille

Achille Gustave Louis Joseph Liénart est issu d'une famille appartenant à la moyenne bourgeoisie lilloise. Il est le deuxième d'une famille de quatre enfants : Anna, Marie-Thérèse et Maurice. Son père, Achille Philippe Hyacinthe Liénart (décédé en 1911) est négociant en toile, et sa mère, née Louise Delesalle, élève ses enfants. Il nait rue Princesse à Lille, à deux pas de la maison d'un autre illustre lillois Charles de Gaulle, né six ans plus tard[1]. Leur train de vie n'est pas important et la famille est très unie. Quand il prendra ses fonctions d'évêque en 1928, il installera sa mère dans un appartement à l'évêché jusqu'à sa mort en 1932.

En 1891, il entre au collège jésuite Saint-Joseph, situé depuis 1876 rue de Solférino à Lille, où il obtient en 1901 son baccalauréat de philosophie. Sa vocation apparaît tôt: dès sa sortie du collège, il sait qu'il sera prêtre et entre au séminaire d'Issy-les-Moulineaux, près de Paris. Il effectue son service militaire, qui durait trois ans, en octobre 1903 au 43e RI à la Citadelle de Lille.

Puis il reprend ses études ecclésiastiques au séminaire Saint-Sulpice à Paris. Comme on le destine à l'enseignement religieux supérieur, il fréquente également l'institut catholique de Paris. Ordonné prêtre le [2] il se spécialise en Écritures saintes à l'institut biblique de Rome dont, en 1909, il est parmi les premiers étudiants. Puis il enseigne au séminaire de Saint-Saulve.

Il est le grand-oncle de l'écrivain Élisabeth Bourgois.

Première Guerre mondiale

Au début du conflit, bien qu'ayant été réformé RD2 en 1907, il signe un engagement le et devient l'aumônier volontaire de l'ambulance 3 de la 51e division de réserve qui est envoyée dans les Ardennes pour soutenir les 1er et 10e corps d'armée à Dinant. Il participe, toujours avec la 51e division, à la bataille de la Meuse en et à la bataille de la Marne en .

Le , il est nommé à la division d'infanterie du 3e corps d'armée avant d'être, de 1915 à 1919, l'aumônier du 201e RI, qui est un régiment du Nord. Au front, il va au secours des blessés et des mourants. Il sera blessé deux fois : à la cuisse le [3] et à la nuque le [4], pendant la bataille de la Somme. À la fin du conflit, il est démobilisé en .

Il devient enseignant au Grand séminaire de Lille et s'intéresse de près aux questions sociales.

Évêque de Lille

En 1926, il est nommé curé doyen de l'église Saint-Christophe de Tourcoing, il étonne encore en se déplaçant à bicyclette[1], et le , il devient évêque de Lille à seulement 44 ans, plus jeune évêque de France dans un jeune diocèse créé en 1913. Il va le rester quarante ans. Sa nomination par Pie XI surprend, en raison de ses prises de position favorables aux ouvriers du textile face au patronat lillois[1].

Tout juste nommé, il se pose en médiateur lors de la grande grève d'Halluin, qui dura de à [5]. Il défend l'idée d'un syndicalisme chrétien indépendant[1]

Le cardinal Liénart, nommé en 1930, plus jeune cardinal au monde, est l'un des six cardinaux français à participer au conclave de 1939 qui élit Pie XII.

Il défend la mémoire de Roger Salengro, maire de Lille, ministre du Front Populaire, après son suicide, consécutif à une campagne de calomnie d'une violence extrême : « La politique ne justifie pas tout, la calomnie ou même la médisance sont des fautes que Dieu condamne[1]

Seconde Guerre mondiale

Le , la poche de Lille tombe : Lille est occupée. La région Nord-Pas-de-Calais est sous l'autorité de l'Ober Feld Kommandatur ou OFK 670 et de son gouverneur Felzman. Le , le cardinal Liénart obtient de Felzman des laissez-passer pour lui ainsi que pour ses collaborateurs afin de pouvoir se déplacer librement en zone « occupée » (le Nord-Pas-de-Calais faisant partie de la zone interdite) et de réorganiser le diocèse de Lille. Le , jour de la signature de la convention d'armistice franco-allemande dans la clairière de Rethondes, il est convoqué par Rüdiger, le Regierungspräsident pour le Nord-Pas-de-Calais. Le cardinal s'y présente accompagné de Mgr Lotthe. L'entretien est courtois, le but du cardinal est avant tout de « préserver les conditions pastorales sous l'occupation »[6].

À l'instar de la hiérarchie catholique, le cardinal Liénart prône le loyalisme vis-à-vis du gouvernement de Vichy.

Le cardinal était à Vichy aux côtés du maréchal Pétain, en , lors du renvoi de l'amiral Darlan par les Allemands. Il déclare dans le Journal de Roubaix daté du  : « Pétain est l'homme autour duquel tous doivent se tenir ».

[réf. nécessaire]

Le cardinal reste silencieux lors des rafles de juifs[7]. Sa position ne se nuance qu'en 1943 à propos du STO[8]. À la suite des événements de la nuit du 1er au lors du massacre d'Ascq, le cardinal Liénart écrit une lettre de protestation au général von Falkenhausen transmise par l'intermédiaire du général-lieutenant Bertram qui le convoque le soir-même à l'OFK. Les services secrets allemands, arrivés sur place l'autoriseront à célébrer, lui-même,[réf. nécessaire] les funérailles des victimes du massacre le .

Prélat de la mission de France

Après la guerre, « l'évêque rouge » puis le « cardinal rouge » défend encore l'idée des prêtres-ouvriers[1].

En 1954, le cardinal Liénart accède aux fonctions de prélat de la mission de France.

Il ajoute à son blason, qui comportait une représentation de Notre-Dame de la Treille (vénérée à Lille depuis le XIIIe siècle), le symbole du pont à trois arches de Pontigny où est situé le siège de la mission de France.

Achille Liénart, fatigué, remet deux fois sa démission. Paul VI l'accepte en 1968. Le cardinal, « un homme tranquille qui a déclenché des tempêtes », se retire à la paroisse Saint-André de Lille, où il meurt à l'âge de 89 ans, le [1].

Vatican II

Le cardinal Liénart (à droite) avec Mgr Dubois pendant le concile Vatican II

Lors de la première session de travail du IIe concile œcuménique du Vatican, le cardinal Liénart déclencha un coup de théâtre : alors que l'ordre du jour prévoyait un passage direct au vote des textes des commissions préparatoires, il prit la parole avec le cardinal Frings pour demander un débat préalable.

Le changement de procédure proposé fut immédiatement accepté par Jean XXIII. À une immense majorité, les évêques décidèrent alors par un vote de ne pas procéder ainsi que l'avaient prévu les commissions préparatoires, mais de d'abord délibérer entre eux, par groupes nationaux et régionaux, ainsi que dans des réunions plus informelles.

Armes

Blason du cardinal Liénart

Les armes du Cardinal Liénard se blasonnent comme il suit :

Écartelé: au premier d'azur à la Vierge de la Treille d'argent, au deuxième et troisième de gueules au pont d'argent à trois arches qui est de Pontigny, au quatrième d'azur au livre des Saints Évangiles d'argent chargé de l'alpha et l'oméga de sable. À la croix de sable chargée en cœur du Sacré Cœur d'or, rayonnant, blessé et enflammé de même, brochant sur les partitions. Accompagné de la devise MILES CHRISTI JESU[9].

Hommages

Décorations principales

Art

Lieux

Parcours ecclésiastique

Publications

  • A. Liénart, L'âme d'un régiment : l'Abbé Thibaut : aumônier du ler R.I., Cambrai, Oscar Masson, , 109 p. (présentation en ligne)
  • Abbé Achille Liénart (préf. Catherine Masson), Journal de guerre 1914-1918, Villeneuve-d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, (ISBN 978-2-7574-0073-9)

Notes et références

  1. Christophe Henning, «  Achille Liénart, le cardinal des ouvriers », dans Cent ans de vie dans la région, Tome 2 : 1914-1939, La Voix du Nord éditions, Hors série du 17 février 1999, p. 82-83
  2. La Voix du Nord, octobre 2009
  3. Liénart, p. 43
  4. « Le 23, nous souffrons également : le poste de secours du 5e bataillon reçoit un obus de 150 qui tue le médecin aide-major Roshem, blessant l'abbé Liénart et le médecin auxiliaire Férot, qui malgré tout restent à leur poste », Le 201e d'infanterie en campagne, Paris, (lire en ligne), p. 48 et Liénart, p. 47.
  5. Collectif, Le Nord, de la Préhistoire à nos jours, Bordessoules, (ISBN 2-903504-28-8), p. 309
  6. Catherine Masson, Le cardinal Liénart, évêque de Lille 1928-1968 (présentation en ligne)
  7. Le Cardinal Liénart Article de Catherine Masson sur le site du diocèse de Lille
  8. Collectif, Le Nord, de la Préhistoire à nos jours, Bordessoules, (ISBN 2-903504-28-8), p. 328
  9. Archives du Diocèse de Lille
  10. « Portail sud dédié à saint Eubert », sur Cathédrale de Lille

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Liens externes

  • Portail de la Seconde Guerre mondiale
  • Portail du catholicisme
  • Portail du Nord-Pas-de-Calais
  • Portail de la métropole européenne de Lille
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.