Ü-Tsang
L’Ü-Tsang (tibétain : དབུསགཙང་, Wylie : Dbus-gtsang, chinois : 衛藏 ; pinyin : ) ou bar ütsang rushyi (tibétain : བར་དབུས་གཙང་རུ་བཞི, Wylie : bar dbus gtsang ru bzhi, THL : bar ütsang ru shyi), est l'union des deux provinces du Tibet que sont l'Ü et le Tsang.
Dans la culture géographique traditionnelle tibétaine, le Tibet est divisé en trois régions, le Tibet occidental ou Tibet septentrional appelé Ngari Korsum (tibétain : མངའ་རི་སྐོར་གསུམ, Wylie : mnga' ri skor gsum, THL : ngari korsum), l'aire central du Tibet-Tsang Ü-Tsang (tibétain : བར་དབུས་གཙང་རུ་བཞི, Wylie : bar dbus gtsang ru bzhi, THL : bar ütsang ru shyi), incluant les vallées et citées de Lhasa, Yarlng, Shigatse et Gyantse, et enfin le Tibet oriental et méridional, le Dokham (tibétain : སྨད་མདོ་ཁམས་སྒང་དྲུག, Wylie : smad mdo kham sgang drug, THL : mé dokham gang druk), composé de l'Amdo et du Kham)[1].
La conception plus récente (postérieure au XVIIe siècle)[2] qui domine de nos jours chez les Tibétains en exil rattache le Ngari Korsum à l'Ü-Tsang et divise le Dokham : de ce point de vue, le Tibet se divise entre Ü-Tsang, Amdo et Kham.
Histoire
À la fin de l'Empire du Tibet (629 – 877), après l'assassinat du dernier empereur, Langdarma par un moine bouddhiste en 841 ou 842, ses deux fils, Yumtän et Ösung se sont disputé la succession Commence ensuite l'Ère de la fragmentation du Tibet (IXe siècle — XIIe siècle) où les successeurs d'Ösung contrôle ensuite le Ngari, tandis que ceux de Yumtän contrôle l'Ü[3].
Le Ngari, est le siège du Royaume de Gugé (Xe siècle – milieu XVIIe siècle) du début de l'ère de la fragmentation à la conquête par le Khanat qoshot, sous l'impulsion de Güshi Khan.
Au XIIIe siècle l'Empire mongol commencé par Gengis Khan et étendu par ses descendant conquièrent l'ensemble du Tibet. Kubilai Khan, qui installe sa capitale à Pékin et y fonde la dynastie Yuan en 1270, y choisi l'école Sakya du bouddhisme tibétain comme représentants religieux. La dynastie Yuan est défaite par la dynastie Ming un siècle plus tard.
Altan Khan, maître de la Mongolie choisit les gelugpa pour école bouddhiste. En 1578, il donne le titre de dalaï-lama à Sonam Gyatso. Ce titre est alors donné à titre posthume aux deux prédécesseurs de la lignée, et sera conservé par la suite.
La dynastie Rinpungpa contrôle une grande partie de l'Ü-Tsang, entre 1435 et 1565.
L'Ü-Tsang s'est constitué par l'union d'une part du Tsang (gTsang), fief des Karmapa, gouverné par la dynastie des Tsangpa et s'étendant du centre (Gyantsé - Rgyang-rtse) vers l'ouest jusqu'au Ngari, et de l’Ü (dbus) d'autre part, fief des gelugpa soutenu par les Mongols qoshots gouverné par Güshi Khan, situé dans le centre autour de Lhassa.
En 1620 Karma Tenkyong Wangpo devient régent du Tsang[4],[5] en succédant à son père, Karma Phuntsok Namgyal[6]. Il s'empare de Lhassa, capitale de l'Ü, entre 1630 et 1636[7].
En 1642 Güshi khan défait Karma Tenkyong Wangpo au fort de Shimbatsé (centre urbain de l'actuelle Ville-préfecture de Shigatsé). Güshi khan déclare alors Lobsang Gyatso souverain du Tibet central (Dbus et Tsang). Ce dernier se fait construire sur à Lhassa, sur l'emplacement de l'ancien palais des rois du Tibet le Potala (entre 1643 et 1645). En retour, Güshi Khan, déjà maître du Koukonor, du Tsaïdam et du Tibet septentrional, est reconnu par le pontife, à Lhassa même, protecteur et vicair temporel de l’Église Jaune? Jusqu’à sa mort en 1656. Il fût vraiment, comme l'appelait la cour de Pékin, « Le Khan des Tibétains »[8].
A partir de 1720, profitant des guerres qui opposent les Mongols dzoungars et Qoshots au Tibet, et de l'invasion de la Mongolie extérieure par les Dzoungars, la dynastie Qing, alliée aux Mongols khalkhas prend le contrôle sur le Tibet central et y intronise définitivement le dalaï-lama, tout en y gardant le contrôle via des ambans.
En 1912, le Tibet libéré de la présence militaire chinoise et gouverné par le dalaï-lama correspond aux régions de l'Ü-Tsang et du Ngari. L'ensemble du Kham étant alors inclus dans le District spécial de Chuanbian, puis la province du Xikang. Les zones de mixité comportant des cultures Tibetaines étant divisé au sein des provinces frontalières ; Gansu (comportant également entre autres Hui et Yugur), Qinghai (Mongols, Yugurs, Monguors (ou Tu) et Huis), Sichuan (Yi, Qiangs), Yunnan (Bai, Naxi, Mosuo, etc.). Ces régions, hors de l'Ü-Tsang comportaient généralement des Tusi (cheftaines tribales locales), créés à partir de la dynastie Yuan, à l'image du royaume de Dergé de culture tibétaine, au Kham oriental.
La Région autonome du Tibet correspond aujourd'hui à peu de chose près à l'ensemble formé par l'Ü, le Tsang, le Ngari et le Kham occidental, proche de son état sous la dynastie Qing, avant l'établissement de la voie du Bian occidental.
Annexes
Notes et références
- (Gelek 2003) « In traditional Tibetan cultural geography, Tibet is divided into three regions: West Tibet or Upper Tibet, called To Ngari Korsum in Tibetan; the middle area of Tibet-Tsang (Bur Dbus Gtsang Ru-zhi) including the central Tibet cities and valleys of Lhasa, Yarlung, Shigatse, and Gyantse; and East Tibet or Lower Tibet-Dokham (Amdo and Kham, Smad Mdo Kham Sgang Drug). Eastern Tibet is traditionally divided into the regions of Kham and Amdo, and these are now are incorporated into parts of Qinghai, Sichuan, Gansu, and Yunnan provinces. »
- (Yeh 2003, p. 508) « While the division of Tibetan cultural geography into the three ‘provinces’ of U-Tsang, Kham and Amdo now dominates exile discourse, this is a relatively new representation. An earlier scheme, in use in the mid-seventeenth century, conceived of the three regions as being Ngari Korsum, U-Tsang, and mDo-Kham (including both Kham and Amdo) »
- (Shakabpa 2010, p. 177)
- (Shakabpa 2010, p. 99-102)
- (Shakabpa 2010, p. 284)
- (Kapstein 2009, p. 144)
- (Grousset 1965, p. 645) « Or, à ce moment, l’Église jaune était menacée d’un grave danger. Un prince tibétain, le de-srid de gTsang, protecteur de l’ancien clergé rouge, s’empara de Lhassa (entre 1630 et 1636) ».
- Grousset 1965, p. 646,646.
Bibliographie
- (en) Lobsang Gelek, « The Washul Sethar », Chinese Sociology and Anthropology, vol. 35, no 1, , p. 3-20 (ISSN 0009-4625, DOI 10.2753/csa0009-462535013)
- (en) W.D. Shakabpa, One Hundred Thousand Moons: An Advanced Political History of Tibet, vol. 1, Brill Publishers, (ISBN 9789004177888, lire en ligne)
- (en) Emily T. Yeh, « Tibetan Range Wars: Spatial Politics and Authority on the Grasslands of Amdo », Development and Change, vol. 34, no 3, , p. 499–523 (DOI 10.1111/1467-7660.00316)
- (en) Matthew Kapstein, Buddhism Between Tibet and China : studies in Indian and Tibetan Buddhism, Somerville, Mass., Wisdom ; Enfield, , 453 p. (ISBN 978-0-86171-581-7, OCLC 263295746, lire en ligne), p. 144
- René Grousset, L’Empire des steppes : Attila, Gengis-khan, Tamerlan, Paris ; Chicoutimi, Editions Payot ; Classiques de l'Université du Québec, (lire en ligne) (1re édition : 1938)
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