Épistémologie

L'épistémologie (du grec ancien ἐπιστήμη / epistémê « connaissance vraie, science » et λόγος / lógos « discours ») est un domaine de la philosophie qui peut désigner deux champs d'étude :

  • l'étude critique des sciences[1] et de la connaissance scientifique (ou de l’œuvre scientifique[2]) ;
  • l'étude de la connaissance en général[3].

Cet article s'intéresse principalement à l'épistémologie en tant qu'étude des sciences et des activités scientifiques.

Parmi tous les thèmes sur lesquels cette discipline s'est penchée, celui de l'unité de la science est essentiel. Il s'articule autour de trois piliers :

De façon plus précise, l'épistémologie cherche à répondre à des questions telles que[4] :

  • Quels sont les objectifs de la science en général ou de telle science en particulier ?
  • Par qui, par quelles organisations et par quelles méthodes ces objectifs sont-ils poursuivis et tenus ?
  • Quels principes fondamentaux sont à l’œuvre ?
  • Quels sont les rapports internes entre les sciences ?
  • Par qui et par quelles méthodes sont enseignées les sciences ?
  • Quelles sont les interrelations entre les théories des différentes sciences ?

Définition

Le terme « épistémologie » a un sens qui peut beaucoup varier d'une tradition philosophique à l'autre. Même au sein d'une même tradition, la distinction entre les différentes acceptions et le rapport de l'épistémologie à la philosophie des sciences ne sont pas toujours clairement définis[5].

Dans la tradition philosophique francophone

L'épistémologie, « bien qu'elle en soit l'introduction et l'auxiliaire indispensable », se distingue de la gnoséologie « en ce qu'elle étudie la connaissance dans le détail et a posteriori, dans la diversité des sciences et des objets plutôt que dans l'unité de l'esprit »[6],[7].

Pour la plupart des auteurs, l'épistémologie est l'étude critique des sciences[1] et de la connaissance scientifique. C'est une branche de la philosophie des sciences qui « étudie de manière critique la méthode scientifique, les formes logiques et modes d'inférence utilisés en science, de même que les principes, concepts fondamentaux, théories et résultats des diverses sciences, afin de déterminer leur origine logique, leur valeur et leur portée objective »[8].

Pour d'autres auteurs, l'épistémologie traite de la connaissance en général[3] et peut donc se pencher sur des objets non scientifiques[note 1]. Le mot est également employé parfois pour désigner telle ou telle théorie de la connaissance censée porter sur la connaissance en général. Beaucoup plus rarement, le terme « épistémologie » est utilisé comme synonyme de « philosophie des sciences »[9]. Hervé Barreau considère que l'épistémologie est l'étude des sciences et que ce terme récent (début du XXe siècle) vient « remplacer l'expression antérieure de philosophie des sciences qu'avaient employée Auguste Comte et Augustin Cournot […] ». Il ajoute plus loin : « L'épistémologie se distingue surtout de la théorie de la connaissance, telle qu'elle était entendue par les philosophes des XVIIe et XVIIIe siècles, qui s'étaient préoccupés déjà d'élargir, au contact de la science moderne, les anciennes doctrines sur la connaissance humaine »[10].

Jean Piaget[11] proposait de définir l’épistémologie « en première approximation comme l’étude de la constitution des connaissances valables », dénomination qui, selon Jean-Louis Le Moigne, permet de poser les trois grandes questions[12] :

L'enquête épistémologique peut ainsi porter sur plusieurs aspects : les modes de production de la connaissance, les fondements de cette connaissance, la dynamique de cette production. Plusieurs questions en découlent : qu'est ce qu'une connaissance ? Comment est-elle produite ? Comment est-elle validée ? Sur quoi se fonde-t-elle ? Comment les connaissances sont-elles organisées ? Comment progressent-elles ?

À cela s'ajoute parfois une dimension normative de l'analyse. Il ne s'agit plus seulement de décrire la connaissance, mais de définir ce qui constitue une connaissance valide.

On distingue parfois l'épistémologie générale des épistémologies particulières, propres à chaque science. On parle alors d'épistémologie de la physique, de la biologie, des sciences humaines…

Dans la tradition philosophique anglo-saxonne

L'épistémologie se confond avec l'étude de la connaissance en général, et ne porte donc pas spécifiquement sur la connaissance scientifique. Pour certains auteurs, elle est même synonyme de « théorie de la connaissance ».

Champ d'application de l'épistémologie

Longtemps, l'épistémologie a porté exclusivement sur le contenu de la science, l'histoire de ce contenu, et la généalogie des avancées de ce contenu. La science en tant qu'institution humaine était laissée à d'autres disciplines, notamment à la sociologie. La question de la nature de la science se confondait alors avec celle de la nature de la connaissance scientifique. Mais Hervé Barreau signale que ce contenu de science ne se souciait pas de la différence entre connaissance commune et connaissance scientifique[13]. Il a fallu attendre le XVIIIe siècle pour que la philosophie et l'épistémologie « manifestent la faiblesse des opinions et des croyances communes »[13] afin que l'épistémologie se centre véritablement sur la connaissance scientifique.

D'autre part, les premières épistémologies ne posaient pas la question des capacités de la sensibilité et de l'entendement de l'être humain permettant la connaissance, pas plus que de l'origine de ces dites capacités. Hervé Barreau estime que c'est Kant qui est à l'origine de cette question ; « [Kant montre] que la connaissance scientifique était seulement possible à partir des formes a priori de la sensibilité et de l'entendement »[14].

Ensuite, est venue la question du passage de la connaissance commune, plus ou moins empirique, à la connaissance scientifique. Hervé Barreau évoque David Hume, mais retient surtout la psychologie du XIXe siècle comme seule capable d'expliquer ce passage avec « des résultats acceptables ». « Husserl qui est le fondateur du mouvement phénoménologique [...] a dénoncé [le fondement idéaliste] de la connaissance scientifique par la psychologie [c'est-à-dire par la subjectivité de l'apprenant] »[15]. Ce sont les sciences cognitives qui sont actuellement en pointe dans ces explications.

L'épistémologie a ensuite épousé un courant « historique » avec l’avènement de la méthode historico-critique comme méthode directrice. « Les scientifiques commencent à produire des travaux en histoire [des sciences] et en philosophie des sciences [= l'épistémologie] »[16]. C'est cette méthode historico-critique susceptible d'être perpétuellement révisée et perfectionnée qui a été utilisée par Bachelard et Canguilhem[17].

Ces dernières décennies, certains courants de la sociologie (science studies notamment) ont réclamé un « droit de regard » sur ce contenu en analysant le contexte de production de science par la communauté scientifique, d'autre part certains épistémologues jugent nécessaire de porter attention aux dimensions concrètes de l'activité scientifique pour mieux comprendre l'avancement de la connaissance scientifique.

Le progrès des connaissances aidant, le nombre des sciences étudiées et le volume des réponses spécifiques rattachées à certaines sciences n'ont cessé d'augmenter. Une classification s'est mise en place autour d'une discipline « phare » dénommée la science spéciale qui porte les problématiques spécifiques par rapport à la science en général.

Acteurs épistémologues

Au XXIe siècle, un double mouvement se dessine[18] :

  • les philosophes (ontologues, épistémologues) [des sciences] se doivent de connaître les sciences sur lesquelles et à partir desquelles ils s'expriment,
  • les « scientifiques qui ne mettent pas à jour leur philosophie [et l'histoire de leur discipline] contaminent leur science avec des philosophies moribondes ».

Guillaume Lecointre juge aujourd'hui nécessaire de rappeler aux chercheurs les termes du contrat tacite qui conditionne la possibilité de reproductibilité des expériences scientifiques[19] :

  1. scepticisme initial sur les faits ;
  2. réalisme de principe ;
  3. matérialisme méthodologique ;
  4. rationalité [et logique].

Décomposition épistémologique de la science : les sciences spéciales

En fonction de l'époque historique, la science est décomposée en différentes disciplines et les auteurs les regroupent alors :

  • en 2 parties : sciences et sciences humaines,
  • en 3 parties : sciences physiques, sciences du vivant et sciences humaines,
  • en 4 parties : sciences formelles, sciences physico-chimiques, sciences du vivant et sciences humaines.

Ces piliers épistémologiques sont représentés par une ou plusieurs « sciences spéciales ».

Dans les précis d'épistémologie récents, on trouve souvent deux sections : l'une est relative à l'épistémologie de la Science en général (les problématiques récurrentes et transverses) et l'autre porte sur les épistémologies « régionales » convoquant en particulier au minimum une discipline spécifique porteuse des problématiques régionales. Les sciences spéciales les plus citées sont les suivantes :

Chaque science spéciale fait l'objet d'une épistémologie particulière. Cette dernière a apporté à l'épistémologie de la Science en général de nouveaux questionnements avec plus ou moins de bonheur.

Thèmes de l'épistémologie de la science

Les quatre thèmes classiques sont[4] :

  1. l'explication ;
  2. la confirmation ;
  3. la causalité ;
  4. le réalisme scientifique et l'ontologie des objets de la science, donc débarrassée de toute métaphysique.

On trouve ensuite d'autres thèmes : le changement dans la science (nommée la « paradigmatologie » par Edgar Morin), l'impact du concept de l'émergence sur la notion de réduction en science, les approches syntaxiques et sémantiques dans l'analyse des théories scientifiques.

Thèmes des épistémologies des sciences spéciales

L'épistémologie régionale de la science (cas de la biologie par exemple) a conduit à la déclinaison en épistémologies des sciences spéciales. Il peut s'agir[4] :

  • d'un thème général qui a été particularisé par la science spéciale ;
  • de l'émergence sur le devant de la scène d'un nouveau thème lié spécifiquement à la science spéciale et qui ne se généralise pas aux autres disciplines.

Par exemple, le thème de l'éthique qui est posée à l'économie dont on ne peut accepter que la science qui la prend pour objet ne s'inquiète pas du sort de populations fragiles (page 109)[13].

Certains auteurs ont voulu « imposer » à l'épistémologie des processus d'une science spéciale : par exemple l'épistémologie évolutionniste « calque » sur l'épistémologie la théorie évolutionniste des espèces décrite dans la biologie.

Étymologie

Le mot « épistémologie » remplace celui de philosophie des sciences au début du XXe siècle[20]. Il s'agit d'un emprunt au néologisme epistemology construit en 1856 par le fichtéen James Frederick Ferrier, dans son ouvrage Institutes of metaphysics (1854). Le mot est un dérivé du nom grec ἐπιστήμη / épistémê signifiant « science au sens de savoir et de connaissance », le suffixe λόγος signifiant « discours ». Ferrier l'oppose au concept antagoniste de l'« agnoiology », ou théorie de l'ignorance. Le mot forgé par James Frederick Ferrier[21] avait pour but de traduire l'allemand Wissenschaftslehre[22].

On a considéré à l'époque — peut-être à tort — que la problématique de Fichte était éloignée de la problématique kantienne et l'on a attribué le concept d'épistémologie à Eduard Zeller, lequel utilise le mot allemand Erkenntnistheorie théorie de la connaissance ») dans un sens kantien[23].

Le philosophe analytique Bertrand Russell l'emploie ensuite, dans son Essai sur les fondements de la géométrie en 1901, sous la définition d'analyse rigoureuse des discours scientifiques, pour examiner les modes de raisonnement qu'ils mettent en œuvre et décrire la structure formelle de leurs théories[24]. C'est dans cette acception que le mot épistémologie apparaît pour la première fois en France en 1901[25], dans la traduction de l'introduction de l’Essai sur les fondements de la géométrie de Bertrand Russell, notamment de ce passage :

« Ce fut seulement de Kant, le créateur de l'Épistémologie, que le problème géométrique reçut sa forme actuelle[26]. »

À la traduction de l'œuvre de Russell est annexé un Lexique philosophique rédigé par Louis Couturat, qui à l'entrée Épistémologie donne la définition d'une « théorie de la connaissance appuyée sur l'étude critique des Sciences, ou d'un mot, la Critique telle que Kant l'a définie et fondée »[27]. Couturat introduit ainsi une première confusion entre théorie de la connaissance et philosophie des sciences[28]. Cette évolution n'est pas sans conséquence[29].

En d'autres termes, les « épistémologues » se concentrent sur la démarche de la connaissance, sur les modèles et les théories scientifiques, qu'ils présentent comme autonomes par rapport à la philosophie[note 2].

Histoire de l'épistémologie

Selon Hervé Barreau, l'épistémologie moderne tire son origine du criticisme de Kant au XVIIIe siècle et du positivisme de Comte aux XIXe et XXe siècles[13]. Mais elle puise également à des traditions plus anciennes, dont les traditions antique et cartésienne. C'est au début du XXe siècle que l'épistémologie se constitue en champ disciplinaire autonome.

Grands modèles épistémologiques

L'histoire des sciences et de la philosophie a produit de nombreuses théories quant à la nature et à la portée du phénomène scientifique. Il existe ainsi un ensemble de grands modèles épistémologiques qui prétendent expliquer la spécificité de la science. Le XXe siècle a marqué un tournant radical. Très schématiquement, aux premières réflexions purement philosophiques et souvent normatives sont venus s’ajouter des réflexions plus sociologiques et psychologiques, puis des approches sociologiques et anthropologiques dans les années 1980, puis enfin des approches fondamentalement hétérogènes à partir des années 1990 avec les Science studies. Le discours sera également interrogé par la psychologie avec le courant du constructivisme. Enfin, l'épistémologie s'intéresse à la « science en action » (expression de Bruno Latour), c'est-à-dire à sa mise en œuvre au quotidien et plus seulement à la nature des questions théoriques qu'elle produit.

Antiquité

Selon Hervé Barreau, « la substitution de l'épistémologie à la théorie classique de la connaissance […] a eu au moins le mérite de manifester clairement la différence entre la connaissance commune et la connaissance scientifique »[30]. D'après Maurice Sachot, Parménide serait le fondateur de l'épistémologie, en exposant dans la première partie du Poème les règles épistémiques auxquelles toute connaissance du réel doit se soumettre pour prétendre à quelque vérité. Et en présentant dans la seconde partie sa propre conception du monde (sa doxa), proposant un modèle théorique d’interprétation, qu’il nomme diakosmos, « transmonde », et dont la métaphore clé est la reproduction sexuée, il peut aussi être considéré comme le père de la science au sens moderne du mot[31].

Épistémologie cartésienne

Dans le Discours de la méthode, Descartes :

  • ouvre la 1re partie sur les attendus utiles « pour bien conduire sa raison et chercher la vérité dans les sciences »,
  • pose quatre règles qu'il doit appliquer afin de mener sa réflexion :
Principe Règles explicites
Evidence Ne recevoir aucune chose pour vraie tant que son esprit ne l'aura pas clairement et distinctement assimilée au préalable.
Réductionnisme Diviser chacune des difficultés afin de mieux les examiner et les résoudre.
Causalisme Établir un ordre de pensées, en commençant par les objets les plus simples jusqu'aux plus complexes et divers, et ainsi de les retenir toutes et en ordre.
Exhaustivité Passer toutes les choses en revue afin de ne rien omettre.

La troisième de ces règles affirme que la simplicité a une valeur épistémologique :

« Conduire par ordre mes pensées, en commençant par les objets les plus simples et les plus aisés à connaître pour monter peu à peu, comme par degrés, jusques à la connaissance des plus composés ».

Cartésianisme et rationalisme

Le rationalisme est un courant épistémologique, né au XVIIe siècle, et pour lequel « toute connaissance valide provient soit exclusivement, soit essentiellement de l'usage de la raison »[32]. Des auteurs comme René Descartes (on parle alors du cartésianisme), ou Leibniz fondent les bases conceptuelles de ce mouvement, qui met en avant le raisonnement en général, et plus particulièrement le raisonnement déductif, dit aussi analytique. Il s'agit donc d'une théorie de la connaissance qui postule le primat de l'intellect. L'expérimentation y a un statut particulier : elle ne sert qu'à valider ou réfuter les hypothèses. En d'autres mots, la raison seule suffit pour départager le vrai du faux dans le raisonnement rationaliste. Les rationalistes prennent ainsi comme exemple le célèbre passage du dialogue de Platon, dans le Ménon, où Socrate prouve qu'un jeune esclave illettré, étape par étape et sans son aide, peut refaire et redémontrer le théorème de Pythagore.

Le rationalisme, surtout moderne, prône le primat des mathématiques sur les autres sciences. Les mathématiques représentent, en effet, le moyen intellectuel démontrant que l'intellect et la raison peuvent parfois se passer de l'observation et de l'expérience. Déjà Galilée, en 1623, suivant la conception cosmologique proposée par Platon dans le Timée, expliquait dans son ouvrage L'essayeur — qui est également une démonstration de logique — :

« Le grand livre de l'Univers est écrit dans le langage des mathématiques. On ne peut comprendre ce livre que si on en apprend tout d'abord le langage, et l'alphabet dans lequel il est rédigé. Les caractères en sont les triangles et les cercles, ainsi que les autres figures géométriques sans lesquelles il est humainement impossible d'en déchiffrer le moindre mot. »

Empirisme

L'empirisme postule que toute connaissance provient essentiellement de l'expérience. Représenté par les philosophes anglais Francis Bacon, John Locke et George Berkeley, ce courant postule que la connaissance se fonde sur l'accumulation d'observations et de faits mesurables, dont on peut extraire des lois par un raisonnement inductif (dit aussi synthétique), allant par conséquent du concret à l'abstrait. L'induction consiste, selon Hume en la généralisation de données de l'expérience pure[33], appelée « empirie » (ensemble des données de l'expérience), qui est ainsi l'objet sur lequel porte la méthode. Néanmoins, Bertrand Russell mentionne dans son ouvrage Science et Religion ce qu’il nomme le « scandale de l’induction » : cette méthode de raisonnement n'a rien d'universel, en effet, et selon lui les lois admises comme générales par l'induction n'ont été cependant vérifiées que pour un certain nombre de cas expérimentaux. Dans l'empirisme, le raisonnement est secondaire alors que l'observation est première[note 3]. Les travaux d'Isaac Newton témoignent d'une méthode empirique dans la formalisation de la loi gravitationnelle.

L'empirisme se décompose lui-même en sous-courants[34] : le matérialisme qui explique que seule l'expérience sensible existe ; le sensualisme qui considère que les connaissances proviennent des sensations (c'est la position de Condillac par exemple) ; l'instrumentalisme, qui voit dans la théorie un outil abstrait ne reflétant pas la réalité.

Enfin, l'empirisme aurait percé dans le champ scientifique, selon Robert King Merton (dans Éléments de théorie et de méthode sociologique, 1965) grâce à ses liens étroits avec l'éthique protestante et puritaine. Le développement de la Royal Society de Londres, fondée en 1660 par des protestants, en est ainsi l'expression aboutie : « la combinaison de la rationalité et de l'empirisme, si évidente dans l'éthique puritaine, forme l'essence de la science moderne », explique Merton.

Par delà l'empirisme et le rationalisme

Avec l'ambition de refonder la science, et plus encore de réaffirmer l'esprit scientifique, dans un contexte historique dominé par les doctrines et les théories, Francis Bacon, se proposa de dépasser les écueils de l'empirisme et du rationalisme : « Les sciences ont été traitées, ou par les empiristes, ou par les dogmatiques. Les empiriques, semblables aux fourmis, ne savent qu'amasser et user ; les rationalistes, semblables aux araignées font des toiles qu'ils tirent d'eux-mêmes ; le procédé de l'abeille tient le milieu entre ces deux : elle recueille ses matériaux sur les fleurs des jardins et des champs, mais elle les transforme et les distille par une vertu qui lui est propre : c'est l'image du véritable travail de la philosophie, qui ne se fie pas aux seules forces de l'esprit humain et n'y prend même pas son principal appui, qui ne se contente pas non plus de déposer dans la mémoire, sans y rien changer, des matériaux recueillis dans l'histoire naturelle et les arts mécaniques, mais les porte jusque dans l'esprit, modifiés et transformés. C'est pourquoi il y a tout à espérer d'une alliance intime et sacrée de ces deux facilités expérimentale et rationnelle ; alliance qui ne s'est pas encore rencontrée » (Novum organum).

Théorie analytique de la connaissance scientifique

La théorie analytique de la connaissance scientifique est une discipline philosophique qui s'est pour l'essentiel développée dans le monde anglophone[note 4].

Le monde germanique, de par l'apport anglo-saxon, a repris les résultats analytiques pour les réunir dans une théorie globalisante. Le passage est très distinct de Locke, Berkeley, Hume à Kant pour l'analytique. Fichte opère le renversement avec sa « Doctrine de la science » imposant ainsi le départ d'une conception qui ne se veut pas seulement analytique mais unifiante. Ceci sera beaucoup développé par Schelling et Hegel.

Épistémologie kantienne : le criticisme

Pour Roger Verneaux, qui a étudié la pensée de Kant, l'épistémologie est, au suprême degré, et avant tout, « la critique de la connaissance ». C'est la plus noble des entreprises humaines en tant que préalable à toute entreprise scientifique[35].

Kant offre un changement de perspective radical vis-à-vis de l'empirisme : c'est une véritable révolution épistémologique, qu'il qualifie lui-même par l'expression célèbre de « révolution copernicienne ». Hume avait déjà placé le sujet au centre de la connaissance. Kant, lui, va jusqu'à affirmer que la véritable origine de la connaissance est dans le sujet et non dans une réalité vis à vis de laquelle nous serions passifs[réf. nécessaire].

Il reprend certains principes des empiristes : « Ainsi, dans le temps, aucune connaissance ne précède l'expérience, et toutes commencent avec elle », explique-t-il dans Critique de la raison pure.

Ainsi pour Kant, note Claude Mouchot[36], « l'objet en soi, le noumène, est et restera inconnu » et « nous ne connaitrons jamais que les phénomènes », et en cela Kant reste très actuel. Selon les termes de Kant (Critique de la raison pure) « il n’y a que les objets des sens qui puissent nous être donnés […] ils ne peuvent l’être que dans le contexte d’une expérience possible ».

Actuel, Kant le reste également par sa « reconnaissance de l'existence de cadres (spatio-temporels), au travers desquels le réel se présente à nous » écrit encore Claude Mouchot [36]. Toutefois, le caractère a priori de ces cadres de la mécanique classique (seule existante au temps de Kant) ne peut plus être accepté aujourd'hui, à la suite notamment de la remise en cause de la notion d'espace-temps par la mécanique relativiste[réf. nécessaire]. Tout au moins pouvons-nous considérer ces cadres comme étant construits par le sujet, ce qui est le point de vue du constructivisme.

Le tournant positiviste et le positivisme logique

Auguste Comte distingue trois états historiques :

  1. dans l'état théologique, l'esprit de l'homme cherche à expliquer les phénomènes naturels par des agents surnaturels.
  2. dans l'état métaphysique, l'explication se fonde sur des forces naturelles mais encore personnifiées (la théorie de l'éther par exemple).
  3. avec l'état positif, l'esprit ne cherche plus à expliquer les phénomènes par leurs causes, mais il s'édifie sur des faits constatables et mesurables.

Le personnage de Newton est, pour Comte, révélateur de cette « marche progressive de l'esprit humain »[37].

La science doit ainsi mettre en œuvre des hypothèses, permettant de se passer de l'expérience, et aboutissant à la formation de lois non contradictoires. Comte cite ainsi, comme exemple, la théorie de la chaleur de Joseph Fourier, qu'il a bâtie sans avoir à observer la nature du phénomène. Le positivisme met en avant la qualité prédictive de la science, qui permet de « voir pour prévoir » selon les mots de Comte, dans ses Discours sur l'ensemble du positivisme (1843). Néanmoins, pour lui, la méthode scientifique culmine dans la mise en pratique, dans l'action : ce que le discours moderne appellera l'application scientifique. L'ingénierie est ainsi la main de la science, caractérisée par le savoir-faire. La science est avec Comte indissociable de l'action :

« Science, d'où prévoyance ; prévoyance d'où action »

Dans la philosophie de Comte, l'esprit se limite au « comment », et renonce à la recherche du « pourquoi ultime » des choses.

Le Cercle de Vienne

Le tournant positiviste logique est marqué par la rupture épistémique liée au « cercle de Vienne ».

Épistémologie contemporaine

Un exemple d'épistémologie contemporaine : la chaire d'épistémologie comparative du Collège de France (1987-1990).
Quine et l'« épistémologie naturalisée »

Avec l'article Deux Dogmes de l'empirisme, Willard Van Orman Quine critique deux aspects centraux du positivisme logique. Le premier est la distinction entre vérités analytiques et vérités synthétiques : il y aurait des propositions vraies indépendamment des faits, qui seraient vraies en vertu de leur seule signification. Le second dogme, le réductionnisme, est la théorie selon laquelle les énoncés doués de sens peuvent être reformulés en énoncés portant sur des données de l'expérience immédiate (dans ce cas un énoncé analytique serait un énoncé confirmé par l'expérience dans tous les cas).

Ce texte constitue une attaque en règle contre l'héritage théorique du positivisme logique. Comme le précise Quine lui-même, « Another effect is a shift toward pragmatism » : « Les deux dogmes de l'empirisme » marque le grand retour du pragmatisme dans la philosophie américaine, au sein même du mouvement intellectuel qui l'avait évincé de la scène intellectuelle : la philosophie analytique (sous sa forme empiriste).

Avec l'« épistémologie naturalisée », Quine, dans un point de vue naturaliste, affirme que la philosophie de la connaissance et des sciences constitue elle-même une activité scientifique, corrigée par les autres sciences, et non pas une « philosophie première » fondée sur une métaphysique.

Critique de l'induction de Mach

Inventeur de la mesure de la vitesse de propagation du son, Ernst Mach développa une pensée épistémologique qui influença notamment Albert Einstein. Dans La Mécanique, exposé historique et critique de son développement[38], Mach dévoile la conception mythologique qui sous-tend les représentations mécanistes de son époque et qui aboutissent au conflit des spiritualistes et des matérialistes. Mais la critique de Mach porte surtout sur la méthode de l'induction, pendant de la déduction. Dans La Connaissance et l'erreur (1905), Mach explique que le travail du savant porte avant tout sur les relations des objets étudiés entre eux, et non sur leur classement. La démarche de recherche est avant tout mentale conclut Mach : « Avant de comprendre la nature, il faut l'appréhender dans l'imagination, pour donner aux concepts un contenu intuitif vivant »[39]. Par ailleurs, Mach défend l'idée que la science est symbolique, thèse qu'il reprend chez Karl Pearson dans La Grammaire de la science (1892)[40] et qui explique que la science est « une sténographie conceptuelle ». Mach annonce que seule la méthode empirique est scientifique :

« Nous devons limiter notre science physique à l'expression des faits observables, sans construire d'hypothèses derrière ces faits, où plus rien n'existe qui puisse être conçu ou prouvé[41] »

Bertrand Russell

Bertrand Russell introduit la notion de knowledge by acquaintance (connaissance directe) et knowledge by description (connaissance par description) en philosophie pour désigner deux types fondamentaux de connaissance.

Réfutabilité de Karl Popper

Le philosophe autrichien Karl Popper (1902-1994) bouleverse l'épistémologie classique en proposant une nouvelle théorie de la connaissance, dès 1934 avec la Logique de la découverte scientifique. Il donne à l'épistémologie de nouveaux concepts et outils d'examen, comme la réfutabilité (capacité d'une théorie scientifique de se soumettre à une méthode critique sévère) ou l'infaillibilité (qui définit a contrario les théories métaphysiques, psychanalytiques, marxistes, astrologiques). Il propose ainsi de voir dans la réfutabilité le critère permettant de distinguer la science de la non-science. Un énoncé est ainsi « empiriquement informatif, si et seulement s'il est testable ou réfutable, c'est-à-dire s'il est possible, au moins en principe, que certains faits puissent le contredire »[42]. Néanmoins, Popper admet que les énoncés non réfutables peuvent être heuristiques et avoir un sens (c'est le cas des sciences humaines).

Popper émet par ailleurs une critique de la thèse de l'unicité de la science, notamment dans son ouvrage La Logique de la découverte scientifique. L'idée d'un système de connaissance est futile selon lui : « nous ne savons pas, nous ne faisons que conjecturer. » L’idéal d’une connaissance absolument certaine et démontrable s’est révélé être une idole. Selon lui, enfin, l'induction n'a aucune valeur scientifique :

« Il n'y a pas d'induction parce que les théories universelles ne sont pas déductibles d'énoncés singuliers[43]. »

Les « programmes de recherche scientifique » de Imre Lakatos

La pensée d'Imre Lakatos (1922-1974) est en droite file de celle de Popper. Il est le créateur de la notion de « programmes de recherche scientifique » (P.R.S) qui est un corpus d'hypothèses théoriques lié à un plan de recherche au sein d'un domaine particulier (un « paradigme ») comme la métaphysique cartésienne par exemple. Lakatos, bien qu'étant l'élève de Karl Popper, s'oppose à lui sur le point de la réfutabilité. Un programme de recherche est selon lui caractérisé à la fois par une heuristique positive (qui définit ce qu'il faut chercher et quelle méthode utiliser) et une heuristique négative (les hypothèses sont inviolables).

La « Science normale » de Thomas Kuhn

Les travaux de Thomas Samuel Kuhn vont marquer une rupture fondamentale en philosophie, en histoire et en sociologie des sciences[note 5]. Il va historiciser la science et rejeter une conception fixiste de la science. Son ouvrage principal en la matière, La Structure des révolutions scientifiques (1962) pose qu'« il est ainsi difficile de considérer le développement scientifique comme un processus d’accumulation, car il est difficile d’isoler les découvertes et les inventions individuelles ». « Lorsque les scientifiques ne peuvent plus ignorer plus longtemps des anomalies qui renversent la situation établie dans la pratique scientifique, alors commencent les investigations extraordinaires qui les conduisent finalement à un nouvel ensemble de convictions, sur une nouvelle base pour la pratique de la science » ajoute-t-il, qualifiant ces bases pratiques de paradigmes scientifiques (comme la lumière considérée comme un corpuscule, puis comme une onde, puis enfin comme une particule). Ces « épisodes extraordinaires » sont comme des « révolutions scientifiques » (ainsi celles apportées par Isaac Newton, Nicolas Copernic, Lavoisier, ou encore Einstein) : toutes viennent renverser un paradigme dominant. L'état d'une science, des connaissances et du paradigme, à une période donnée, constitue la « science normale » qui est selon Kuhn « une recherche fermement accréditée par une ou plusieurs découvertes scientifiques passées, découvertes que tel ou tel groupe scientifique [a considérées] comme suffisantes pour devenir le point de départ d’autres travaux. »

Holisme épistémologique

Opposé à toute interprétation matérialiste et réaliste de la chimie et de la physique, Pierre Duhem proposa une conception qu'on qualifiera ensuite d'« instrumentaliste » de la science dans La Théorie physique. Son objet et sa structure (1906). Selon l'instrumentalisme, la science ne décrit pas la réalité au-delà des phénomènes mais n'est qu'un instrument le plus commode de prédiction.

Le holisme épistémologique de Quine ne se limite pas à la physique comme celui de Duhem, ni même aux sciences expérimentales comme celui de Carnap mais s'étend à toute la science, logique et mathématique comprise.

La phénoménologie de Husserl

Pour Edmund Husserl, la phénoménologie prend pour point de départ l'expérience en tant qu'intuition sensible des phénomènes afin d'essayer d'en extraire les dispositions essentielles des expériences ainsi que l'essence de ce dont on fait l'expérience.

Systémique et constructivisme épistémologique

Le terme constructivisme est né au début du XXe siècle avec le mathématicien hollandais Brouwer qui l'utilisa pour caractériser sa position sur la question des fondements en mathématiques comme discipline maîtresse. Mais c'est surtout Jean Piaget qui a su apporter au constructivisme ses lettres de noblesse : avec la publication en 1967 de l'encyclopédie de la Pléiade et notamment de l’article Logique et connaissance scientifique, il opère selon Jean-Louis Le Moigne une « renaissance du constructivisme épistémologique, notamment à partir des travaux de Bachelard »[44]. Toutefois, selon Ian Hacking, c'est Kant qui fut le « grand pionnier de la construction »[45].

L'école constructiviste n'accepte comme vrai que ce que le scientifique peut construire, à partir d'idées et d'hypothèses que l'intuition (comme fondement des mathématiques) accepte comme vraies, et qui sont représentables. Le psychologue et épistémologue Jean Piaget expliquera ainsi que le « fait est (…) toujours le produit de la composition, entre une part fournie par les objets, et une autre construite par le sujet »[46]. L'expérimentation ne sert alors qu'à vérifier la cohérence interne de la construction (c'est la notion de modèle épistémologique). Piaget étendra cependant le cadre constructiviste à ce qu'il nomme l'« épistémologie génétique » qui étudie les conditions de la connaissance et les lois de son accroissement, en lien avec le développement neurologique de l'intelligence. Pour lui, l'épistémologie englobe la théorie de la connaissance et la philosophie des sciences (ce qu'il nomme le « cercle des sciences » : chaque science renforce l'édifice des autres sciences). Autrement dit, « la succession des sciences dans l'histoire obéit à la même logique que l'ontogenèse des connaissances »[47]. Sans parler de ressemblance totale, les mécanismes, de l'individu au groupe de chercheurs et donc, aux disciplines scientifiques, sont communs (Piaget cite ainsi l'« abstraction réfléchissante »).

Refusant l'empirisme, l'épistémologie constructiviste pose que la connaissance se fait au moyen d'une dialectique, du sujet à l'objet et de l'objet au sujet, par un aller et retour expérimental.

Jean Piaget[48] proposait de définir l’épistémologie « en première approximation comme l’étude de la constitution des connaissances valables », dénomination qui, selon Jean-Louis Le Moigne, permet de poser les trois grandes questions de la discipline :

  1. Qu’est ce que la connaissance et quel est son mode d'investigation (c'est la question « gnoséologique ») ?
  2. Comment la connaissance est-elle constituée ou engendrée (c'est la question méthodologique) ?
  3. Comment apprécier sa valeur ou sa validité (question de sa scientificité) ?

Ces travaux vont inspirer plusieurs auteurs. Certains, liés à la systémique, sont publiés par Paul Watzlawick en 1980 dans l’ouvrage L’invention de la réalité – Contributions au constructivisme[49]. Edgar Morin offre au constructivisme son « discours de la méthode » avec La Méthode[44]. Herbert Simon renouvelle la classification des sciences avec Les sciences de l’artificiel[50].

Structuralisme

Le structuralisme est un ensemble de courants holistes en épistémologie apparus principalement en sciences humaines et sociales au milieu du XXe siècle, ayant en commun l'utilisation du terme de structure entendue comme modèle théorique (inconscient, ou non empiriquement perceptible) organisant la forme de l'objet étudié pris comme un système, l'accent étant mis moins sur les unités élémentaires de ce système que sur les relations qui les unissent. La référence explicite au terme structure, dont la définition n'est pas unifiée entre les différents courants de pensée concernés, se systématise progressivement avec la construction institutionnelle des sciences humaines et sociales à partir de la seconde moitié du XIXe siècle dans la filiation positiviste ; cependant certains auteurs font remonter bien antérieurement (jusqu'à Aristote) la généalogie du structuralisme.

La définition du structuralisme et de ses frontières disciplinaires est devenue un champ de recherche à part entière, complexe et en évolution rapide. Actuellement, le terme en français tend à désigner deux types de phénomènes :

  • dans le sens le plus connu (structuralisme généralisé)[51], une période particulière de l'histoire des idées scientifiques, un phénomène transitoire de mode intellectuelle à caractère contestataire ayant eu cours entre la fin des années 1950 et le début des années 1970, essentiellement en France, débordant largement les frontières universitaires pour envahir le champ littéraire, médiatique et politique ; ce « moment structuraliste », inspiré essentiellement de la linguistique saussurienne et très marqué par son formalisme, s'est organisé autour d'un petit nombre de personnalités-phares : Roland Barthes en littérature, Jacques Lacan en psychanalyse, Michel Foucault et Louis Althusser en philosophie ;
  • dans son acception épistémologique plus spécialisée[52],[53], un paradigme scientifique proche de la systémique où la notion de structure est centrée sur la genèse dynamique des systèmes de l'esprit et du sens, entendus au sens de la philosophie de la forme, avec une généalogie remontant jusqu'à Aristote ; c'est dans cette lignée naturaliste du structuralisme que s'est situé l'ethnologue Claude Lévi-Strauss, en développant à partir des années 1950 l'anthropologie structurale en rupture avec les courants de l'anthropologie anglo-saxonne de l'époque (évolutionnisme, diffusionnisme, culturalisme, fonctionnalisme).

Michel Foucault

Pour Hervé Barreau[15], « on a désigné [dans le passé] en France par épistémologie l'étude de l’épistémè, c'est-à-dire de ce que Michel Foucault considérait comme un corps de principes, analogues aux “paradigmes” de T. S. Kuhn, qui sont à l’œuvre simultanément dans plusieurs disciplines, et qui varient dans le temps de façon discontinue ». [...] C'est pourquoi la conception foucaldienne de l'épistémologie, que son auteur avait bornée du reste aux sciences de la vie et aux sciences de l'homme, ne peut prétendre occuper le terrain de ce qu'on entendait jadis par la philosophie des sciences.

Cette épistémologie foucaldienne est incluse dans l'épistémologie actuelle.

L'épistémologie comparative de Gilles Gaston Granger

Introduite par Gilles Gaston Granger, l'Épistémologie comparative a pour objet la comparaison de théories ou de systèmes scientifiques en vue de dégager « l'homologie formelle du fonctionnement de différents concepts dans ces structures »[54].

Une chaire d'Épistémologie comparative a été créée au Collège de France en 1987.

Épistémologie complexe

Dans ce courant de pensée, l'objet à étudier est considéré comme un système complexe, c'est-à-dire qu'il est fonction d'une multitude de paramètres et inclut des inerties, des non-linéarités, des rétroactions, des récursivités, des seuils, des jeux de fonctionnement, des influences mutuelles de variables, des effets retard, des hystérésis, des émergences, de l'auto-organisation, etc. Il est en relation avec son milieu, qui l'alimente en entrées (par ex. énergie et commandes) et à qui il donne des sorties (par ex. production et déchets).

En France, Henri Poincaré est un précurseur de cette approche[55]. Edgar Morin et Jean-Louis Le Moigne l'ont développé par leurs travaux, écrits et conférences.

Exemples

  • système d'information d'entreprise ;
  • système de prise de décision ;
  • système industriel opérant.

Approche par la complexité

Approche complexe[56] :

Principe ancien

(cartésien)

Nouveau principe

(complexe)

Observations
Évidence Pertinence Utilité : permet la subjectivité, ce qui est important pour les fins poursuivies
Réductionnisme Globalisme Partie d'un tout plus grand, ne pas découper ou disjoindre car il y a perte d'informations
Causalisme Téléologie Comprendre le comportement de l'objet face aux fins données au système par le modélisateur
Exhaustivité Agrégativité Regroupement à l'aide de « recettes éprouvées » qui simplifie et garde les aspects pertinents

Les méthodes de modélisation analytique doivent s'adapter pour atteindre les méthodes de modélisation systémique en utilisant un vocabulaire, des concepts, des outils et des processus de pensée différents[56] :

Ancien « outil »

(cartésien)

Nouvel « outil »

(complexe)

Objet Projet ou processus
Élément Unité active
Ensemble Système
Analyse Conception
Disjonction Conjonction
Structure Organisation
Optimisation Adéquation
Contrôle Intelligence
Efficacité Effectivité
Application Projection
Évidence Pertinence
Explication causale Compréhension téléologique
Plan, programme Stratégie avec points de contrôle et de réorientation éventuelle

Questions épistémologiques

Jean Ladrière donne une définition de la rationalité scientifique : « Une démarche rationnelle, dans l'ordre cognitif comme dans l'ordre de l'action, est une démarche qui s'accompagne de la monstration de sa validité ou de sa légitimité, conformément à des critères qui peuvent eux-mêmes être reconnus comme acceptables au regard d'une critique éventuelle »[57]. L'exigence fondatrice de la rationalité c'est la nécessité de justifier le pourquoi de ses jugements.

« La recherche de rationalité est une démarche atemporelle, mais les formes de la raison sont […] historiques et donc contingentes », nous dit Michel Morange[58].

On retrouve dans ces différentes questions des aspects descriptifs et normatifs.

Contexte de découverte et contexte de justification : pendant longtemps, la question de la découverte ne relève pas de l'épistémologie, mais au mieux de la psychologie (recherche des intentions, des pré-pensés... du chercheur).

Les choses ont changé progressivement : l'épistémologie moderne ré-interroge les corpus de connaissances scientifiques acquises et questionne les contextes de découverte, de validation, de communication et d'enseignement de la Science et de la recherche en train de se faire[59].

Production des connaissances scientifiques

Les questions épistémologiques portent par exemple sur :

  • Quelle place accorder à l'intuition, à la créativité, à l'imagination, à l'analogie entre disciplines, à la sérendipité ?
  • Quelles méthodes ? La question de la déduction, de l'induction...
  • Quelles formes de validations ?... On trouve ici la question de l'explication, de la validation...
  • Il y a aussi la question de l'unité de la science ou de production de science dans un contexte pluridisciplinaire/interdisciplinaire [60].

Un exemple volontiers cité[61] est l'étonnement des mathématiciens grecs devant le fait que la diagonale du carré ne puisse correspondre à aucune fraction irréductible p/q, à une époque où on n'imaginait de nombres que rationnels (l'irrationalité de pi était encore inconnue). En effet, on aurait eu alors (p/q)² = 2, soit p² = 2 q². Cela aurait impliqué que p² soit pair, soit p = 2k ; mais en ce cas p² aurait valu 4k² et la fraction p/q n'aurait pas été irréductible, ce qui était contraire à l'hypothèse.

Déduction

La méthode hypothético-déductive est régulièrement considérée comme la production scientifique par excellence, surtout depuis que la science s'inscrit dans le paradigme de la recherche appliquée, qui consiste à travailler à résoudre des problèmes identifiés d'avance, selon la méthode du problem-solving. Cependant, la démarche mise en œuvre par les découvreurs échappe régulièrement à cette approche, très rationaliste.

Induction

L'induction consiste à se fonder sur l'observation de cas singuliers pour justifier une théorie générale ; c'est l'opération qui consiste à passer du particulier au général. Le problème est de savoir s'il peut être épistémologiquement valide de croire que les théories universelles sont justifiées voire vérifiées par la seule prise en compte d'un grand nombre d'observations singulières passées. Par exemple, nous avons observé que le soleil, jusqu'ici, se lève le matin. Mais rien ne semble justifier notre croyance au fait qu'il se lèvera encore demain. Ce problème avait été jugé insoluble par Hume, pour lequel notre croyance relevait de l'habitude consistant à voir telle cause susciter tel effet, ce qui ne présume pas que ce soit le cas dans la réalité. Cette position non réaliste fut critiquée par Emmanuel Kant, Karl Popper et Ernest Mach bien que le concept d'induction, tout comme celui de réfutation, regroupent aujourd'hui une variété de théories allant des plus naïves aux plus sophistiquées.

Vérification

C'est le problème des fondements de la connaissance scientifique :

  • la nature de la connaissance : connaissance scientifique ou générale, exclusion de la métaphysique de la Science... C'est notamment la question de la démarcation,
  • la validation de la connaissance, de la question du réalisme/antiréalisme, et bien sûr la question du rapport au vrai.

Ce qui mène également à la question du relativisme.

Nature des connaissances

Historiquement, cette question épistémologique concerne plus directement la question de savoir comment identifier ou démarquer les théories scientifiques des théories métaphysiques. Au XXIe siècle, il y a aussi le tri entre la connaissance en général et la connaissance véritablement scientifique.

Les philosophes positivistes fondateurs du Cercle de Vienne, pensaient que le seul critère de démarcation qui puisse être valide, (afin d'éliminer la métaphysique), était la vérifiabilité des énoncés singuliers, seules données des sens capables de permettre la vérification des théories générales de la science, à la condition qu'elles soient suffisamment nombreuses et bien observées.

Pour Karl Popper, philosophe des sciences du XXe siècle et adversaire des thèses et du projet du Cercle de Vienne, aucune théorie scientifique générale n'a jamais pu être établie par une quelconque forme d'induction, donc être vérifiée. Il critique le raisonnement par induction : ce dernier a pour lui une valeur psychologique mais pas une valeur logique. De nombreuses observations cohérentes ne suffisent pas à prouver que la théorie qu'on cherche à démontrer soit vraie. A contrario, une seule observation inattendue suffit à réfuter une théorie. Ainsi, mille cygnes blancs ne suffisent pas à prouver que tous les cygnes sont blancs ; mais un seul cygne noir suffit à prouver que tous les cygnes ne sont pas blancs. Voir Paradoxe de Hempel.

Karl Popper pense que les théories scientifiques ne peuvent pas être justifiées, même sur la base d'un très grand nombre d'observations empiriques, elles peuvent seulement être évaluées à partir de tests dont la logique consiste à tenter de mettre à l'épreuve les connaissances scientifiques (la réfutation). Il en résulte qu'une théorie ne peut être « prouvée » mais seulement considérée comme non invalidée jusqu'à preuve du contraire. Partant de là, on peut distinguer :

  • les théories impossibles à réfuter (par l'observation ou l'expérience)
  • les théories qui peuvent être invalidées.

D'autre part il pense qu'aucune théorie scientifique n'est logiquement ou même empiriquement vérifiable si l'on admet sous ce terme la notion de certitude ou de vérification avec certitude. Karl Popper soutient même qu'une théorie ne peut être scientifique que si elle est potentiellement fausse (réfutable), et même fausse en comparaison de la vérité certaine à laquelle elle prétendrait se rapprocher. Seules les théories potentiellement réfutables (celles associables à des expériences dont l'échec prouverait l'erreur de la théorie) font partie du domaine scientifique; c'est le « critère de démarcation des sciences ».

Le problème de la démarcation (identifié comme étant le problème de Kant par Karl Popper[62]) s'articule à celui de la justification des théories :

  • soit selon une méthode inductive,
  • soit par une méthode hypothético-déductive.

Dans le domaine de la science empirique, la vérification devrait plutôt être assimilable à la corroboration (Karl Popper), c'est-à-dire à une forme relative et non absolue de vérité, toujours dépendante des tests scientifiques qui ont pu être réalisés par une communauté de chercheurs. Ainsi, en science, la vérification des théories seraient donc toujours relative à des tests eux-mêmes relatifs à d'autres tests précédents et toujours améliorables, et jamais absolus.

Réfutation

Rendu célèbre par l'œuvre de Karl Popper, ce terme implique la possibilité d'évaluer empiriquement les énoncés généraux de la science par l'intermédiaire de tests. Seules les théories formulées de manière à pouvoir permettre la déduction logique d'un énoncé particulier capable potentiellement de les réfuter, peuvent, pour Karl Popper, être considérées comme scientifiques et non métaphysiques.

Mais Popper propose qu'il existe deux niveaux de réfutabilité. La réfutabilité « logique » et la réfutabilité « empirique » ; sachant qu'un énoncé réfutable d'un point de vue logique ne l'est peut-être pas d'un point de vue empirique. Par exemple, l'énoncé « tous les hommes sont mortels » est logiquement réfutable, mais empiriquement irréfutable puisque aucun être humain ne pourrait vivre assez vieux pour vérifier qu'un homme est immortel.

Karl Popper a toujours soutenu qu'aucune réfutation empirique ne pouvait être certaine, car il est toujours possible de sauver une théorie d'une réfutation par l'adoption de stratagèmes ad hoc. En conséquence, pour Popper, le critère de démarcation reposant sur la réfutation, doit avant tout être un critère méthodologique puisque tout reposerait, en dernier ressort, sur les décisions de la communauté scientifique, pour accepter ou rejeter la valeur d'un test, d'une réfutation ou d'une corroboration[63].

Relativisme

Paul Feyerabend observait à l'exemple de la naissance de la mécanique quantique que souvent l'avancement scientifique ne suit pas de règles strictes. Ainsi, selon lui, le seul principe qui n'empêche pas l'avancement de la science est « a priori tout peut être bon » (ce qui définit l'anarchisme épistémologique - à distinguer de « tout est bon » (anything goes), que Feyerabend lui-même récusait). Il critique donc l'aspect réducteur de la théorie de la réfutabilité et défend le pluralisme méthodologique. Il existe selon lui une très grande variété de méthodes différentes adaptées à des contextes scientifiques et sociaux toujours différents.

De plus, il remet en question la place que la théorie de la réfutabilité accorde à la science, en en faisant l'unique source de savoir légitime, et le fondement d'une connaissance universelle qui dépasse les clivages culturels et communautaires. Enfin, Feyerabend critique le manque de pertinence pour décrire correctement la réalité du monde scientifique et des évolutions des discours et pratiques scientifiques.

Son œuvre principale, Contre la méthode. Esquisse d'une théorie anarchiste de la connaissance, fut reçue très négativement par la communauté scientifique, car elle accusait la méthode scientifique d'être un dogme et soulevait la question de savoir si la communauté doit être aussi critique par rapport à la méthode scientifique que par rapport aux théories qui en résultent.

Organisation des connaissances

La question épistémologique concerne :

  • l'organisation de la connaissance en différents corpus, en différentes disciplines...
  • les liens interdisciplinaires, transdisciplinaires...
  • Les principes choisis à tous les niveaux organisationnels

Théories, modèles...

Hypothèses, exercices de pensée...

Théorèmes, lois, principes…

Évolution et dynamique des connaissances

La question épistémologique concerne la nature du processus dynamique du changement scientifique :

  • La science avance-t-elle par sauts ? Continuisme et discontinuisme,
  • La science progresse-t-elle que de l'intérieur ? ou bien est-ce que les non scientifiques font progresser la Science ? internaliste et externalisme.
  • Ce qui renvoie à nouveau au problème du relativisme.

Continuisme et discontinuisme

Bachelard et l'« obstacle épistémologique » : Gaston Bachelard définit ce dernier , en 1934, dans un article intitulé La formation de l'esprit scientifique, comme étant « la rectification du savoir, l'élargissement des cadres de la connaissance ». Pour lui, le scientifique doit se dépouiller de tout ce qui constitue les « obstacles épistémologiques internes », en se soumettant à une préparation intérieure afin que sa recherche progresse vers la vérité. La notion d’« obstacle épistémologique » est ce qui permet de poser le problème de la connaissance scientifique : c'est à partir du moment où celui-ci est surmonté, donnant lieu à une « rupture épistémologique », que l'on atteint le but recherché. Les obstacles sont, pour Bachelard, non seulement inévitables, mais aussi indispensables pour connaître la vérité. Celle-ci en effet n'apparaît jamais par une illumination subite, mais au contraire, après de longs tâtonnements, « une longue histoire d'erreurs et d'errances surmontées ».

Bachelard dénonce l'opinion que laisse l'expérience empirique et son influence sur la connaissance scientifique : « le réel n'est jamais ce que l'on pourrait croire, il est toujours ce qu'on aurait dû penser », dit-il. « La science s'oppose formellement à l'opinion : l'opinion ne pense pas, elle traduit des besoins en connaissances ». La connaissance scientifique consistera à revenir sans arrêt sur le déjà découvert.

Mettant l'accent sur la discontinuité dans le processus de la construction scientifique, Thomas Samuel Kuhn discerne des périodes relativement longues pendant lesquelles la recherche est qualifiée de « normale », c'est-à-dire qu'elle s'inscrit dans la lignée des paradigmes théoriques dominants, périodes pendant lesquelles de brefs et inexplicables changements constituent une véritable « révolution scientifique ». Le choix entre les paradigmes n'est pas fondé rationnellement. Cette posture implique que chaque paradigme permet de résoudre certains problèmes et, de là, les paradigmes seraient incommensurables.

Internalisme et externalisme

La vision internaliste ne prend en compte que l’histoire des idées scientifiques, de découverte en découverte, indépendamment de tout contexte : les savants sont un monde à part, qui progresse indépendamment du reste. La science se nourrit d’elle-même. Il est ainsi possible de comprendre l’histoire des sciences sans se référer au contexte historique, social, culturel. Dans cette vision l’important, ce sont les étapes de progression de l’histoire scientifique.

La vision externaliste rend au contraire la science dépendante de l’économie, de la psychologie, etc. Cela amène à des conséquences différentes suivant le contexte[note 6].

Institutions

En France

En France, l'épistémologie a le statut institutionnel d'une discipline à part, distincte de la philosophie et de l'histoire : elle constitue ainsi la section 72 du CNU. Elle y occupe plusieurs dizaines de laboratoires, dont notamment l'IHPST, le Centre de recherche en épistémologie appliquée, REHSEIS, le Centre François Viete, les Archives Henri Poincaré, le Centre Georges Canguilhem, l'Institut Jean Nicod, l'IRIST, l'unité Savoirs et Textes, ou le GRS (Groupe de recherche sur les savoirs), qui regroupent des centaines de chercheurs. Elle intéresse plus d'une vingtaine d'écoles doctorales et des sociétés savantes comme la Société de philosophie des sciences (dépendant de l'ENS Ulm) ou la SFHST ou des listes de diffusion comme Theuth. En 1987, une chaire d'Épistémologie comparative est créée au Collège de France pour Gilles Gaston Granger.

Auteurs de référence

Auteurs anciens

Aristote (Antiquité)
Platon (Antiquité)
Guillaume d'Ockham (XIIIe siècle)
René Descartes (XVIIe siècle)
Emmanuel Kant (XVIIIe siècle)
Pierre-Simon Laplace (XIXe siècle)

XXe siècle

Notes

  1. On peut ainsi signaler l'existence d'une « épistémologie des affects » développée par Pascal Nouvel.
  2. Pour une définition de l'épistémologie, ainsi que les questions clés qui y sont liées, voir : L'épistémologie, par Jean-Claude Simard, du Cégep de Rimouski.
  3. Y compris en mathématique, où l'on parle de quasi-empirisme : Philosophie et mathématiques : sur le quasi-empirisme de Patrick Peccatte.
  4. Cela entraîne quelques problèmes quand on passe au français ; dans les cas litigieux, l'expression anglaise correspondante sera mentionnée entre parenthèses.
  5. Pour une analyse de la théorie épistémologique de Thomas S. Kuhn, voir la fiche de lecture de "La structure des révolutions scientifiques" par Delphine Montazeaud, sur le site du Conservatoire National des Arts et Métiers.
  6. Voir ou revoir la série télévisuelle de Jacob Bronowski L’évolution de l’homme (The Ascent of Man) de la BBC qui l’a rendu célèbre auprès du grand public cultivé, disponible aussi en francophonie.

Références

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  27. Reproduit in Wagner 2002, p. 40.
  28. Wagner 2002, p. 39.
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  48. Cité dans Le Moigne 1995, p. 3. Piaget utilise cette expression dans l'introduction de Logique et connaissance scientifique, 1967.
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Bibliographie

 : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

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