Syndrome des jambes sans repos

Le syndrome des jambes sans repos (SJSR) se caractérise par le besoin impérieux de bouger les membres inférieurs (ainsi que le reste du corps selon les dernières études[réf. nécessaire], le terme « maladie de Willis-Ekbom » étant alors plus approprié). Lorsqu'il est d'origine iatrogène[réf. nécessaire], ce syndrome se nomme « akathisie » voire « tasikinésie ». Dans le cas d'un syndrome de sevrage aux benzodiazépines, il prend fin au terme des symptômes de sevrage pouvant durer dix ans chez les personnes sujettes à un symptôme prolongé de sevrage aux benzodiazépines (12 % environ)[réf. nécessaire].

Syndrome des jambes
sans repos
Hypnogramme d'un sommeil normal (en bleu).
Celui d'un patient atteint du syndrome des jambes sans repos (en rouge).
Spécialité Neurologie
CISP-2 N04
CIM-10 G25.8
CIM-9 333.94
OMIM 102300 608831
DiseasesDB 29476
MedlinePlus 000807
eMedicine 1188327
eMedicine neuro/509 
MeSH D012148

Mise en garde médicale

Ce syndrome possède d'autres appellations incluant « syndrome d'impatiences des membres à l'éveil » (SIME), « impatiences », « Restless Legs Syndrome » (RLS) (en anglais) et « syndrome de Wittmaack-Ekbom ». L'association France Ekbom utilise l'appellation « maladie de Willis-Ekbom »[1].

Historique

La première description clinique du SJSR est attribuée au neurologue britannique Thomas Willis. D'abord publiée en latin en 1672, elle est éditée ensuite en anglais dans le London Practice of Physick en 1685[2]. Un traitement par opiacés est déjà préconisé. Un siècle plus tard, François Boissier de Sauvages de Lacroix, médecin français de la faculté de Médecine de Montpellier publie, à l'âge de vingt-cinq ans, une nosologie méthodique dans laquelle il classifie les maladies aux mouvements anormaux. Dans cet ouvrage, l'état des impatiences des membres inférieurs est nommé « inquiétude des pieds »[2].

Le SJSR a longtemps porté l'éponyme de syndrome d'Ekbom parce que le neurologue suédois Karl Axel Ekbom en a marqué l'histoire moderne avec ses publications de 1944 à 1966[3],[4]. Suite à la constatation selon laquelle le syndrome peut être ressenti partout dans le corps, et pas seulement dans les jambes, ce syndrome porte désormais le nom de Syndrome de Willis - Ekbom.

Épidémiologie

La prévalence est estimée entre 2 et 15 % de la population mondiale[5]. Elle est plus rare en Asie[6]. Elle touche parfois plusieurs membres d'une même famille, ce qui laisse croire qu'elle possède une composante héréditaire. Un antécédent familial est fréquemment noté[7].

Les femmes sont en moyenne deux fois plus touchées que les hommes[8]. Le syndrome débute avant l'âge de 20 ans dans près de 40 % des cas[9].

Chez la femme, le syndrome des jambes sans repos survient plus souvent durant les grossesses[10] et après la ménopause, pour une raison inconnue. On parle alors de syndrome des jambes sans repos secondaire par opposition à la forme primaire qui, elle, n'est pas due à une cause extérieure. Un premier épisode durant une grossesse augmente le risque de pérennisation du trouble et celle de récidive lors des grossesses ultérieures[11].

Causes

Les causes ne sont pas connues. Par contre, le syndrome est plus fréquent chez les sujets qui présentent une anémie ferriprive (carence en fer) où il est présent dans près d'un quart des cas[4], en cas d'insuffisance rénale, de grossesse et en cas d'antécédent chez les ascendants. Ce dysfonctionnement neurologique pourrait avoir pour origine un manque de fer retrouvé dans le cerveau[12] qui perturberait le système dopaminergique, ce dernier semblant impliqué dans la genèse du syndrome[13].

Un variant du gène BTBD9, situé sur le chromosome 6, est associé significativement avec ce syndrome[14]. D'autres gènes sont impliqués : MEIS1, MAP2K5/SKOR1 et PTPRD[10].

L'augmentation des cas durant la grossesse pourrait être due à l'influence de certaines hormones dont l'estradiol[15].

Description

Le besoin de bouger les jambes résulte de la nécessité à soulager des sensations désagréables : fourmillements, démangeaisons, picotements et courants électriques. Ces sensations, parfois violentes dans les cas extrêmes, sont déclenchées par l'immobilité que demande par exemple l'endormissement. Elles apparaissent lorsque le sujet est au repos, en position assise ou allongée, surtout le soir et la nuit, et disparaissent lors des mouvements : par exemple le fait de se lever, la marche, l'éveil. Durant le sommeil, les sensations ne sont pas perçues mais les mouvements involontaires persistent à des degrés variables. Ces mouvements peuvent aller jusqu'à des contorsions, et de fortes courbatures matinales peuvent alors se faire ressentir en plus de l'accumulation de fatigue, lorsque le syndrome est sévère. En effet, ces symptômes peuvent perturber le sommeil et dégrader la qualité de vie[16], et il n'est pas rare que les personnes qui en souffrent éprouvent également des troubles de la concentration et de la mémoire.

Les symptômes de ce syndrome sont bénins. Ils peuvent toutefois être gênants, voire handicapants dans les formes sévères. L'examen clinique est normal. L'évolution est imprévisible.

Comme son nom l'indique, le syndrome intéresse essentiellement les membres inférieurs, mais pas uniquement. De nombreux sujets se plaignent de douleurs semblables partout dans le corps. Dans près de 50 % des cas, les membres supérieurs sont également concernés[17]. Des cas touchant l'abdomen ont été rapportés[18].

À des fins d'études, des critères diagnostiques ont été élaborés, reposant essentiellement sur la description clinique[19].

Diagnostics différentiels

  • Le syndrome des mouvements périodiques des jambes
  • Les crampes, souvent nocturnes et douloureuses, définies comme étant une contraction musculaire, absente dans le syndrome
  • Les neuropathies
  • Les paresthésies dues à la compression d'un nerf
  • L'akathisie, manifestations ressemblant au syndrome, mais secondaire à un traitement neuroleptique.
  • les rythmies du sommeil
  • les myoclonies d'endormissement
  • Le syndrome des jambes douloureuses avec mouvement des orteils
  • L'insuffisance veineuse profonde
  • Survenue ou aggravation au repos : les troubles s'aggravent lorsque la personne atteinte est au repos, assise ou couchée[20],[21].

Conséquences

La principale conséquence est la mauvaise qualité du sommeil, voire l'insomnie, provoquée par un total empêchement de s'endormir du fait que les membres obligent à bouger dès que l'assoupissement se fait sentir, avec fatigue et baisse de vigilance diurnes.

  • Augmentation de la latence d'endormissement (c'est-à-dire du temps nécessaire pour s'endormir). L'endormissement n'est possible que lorsque les symptômes ne se font plus sentir. Dans des cas sévères il arrive que la personne atteinte soit dans l'impossibilité totale de s'endormir durant plusieurs jours, voire semaines, d'affilée, ce qui provoque d'autres pathologies.
  • Le stress engendré peut provoquer une forte augmentation subite de la fréquence et de la tension cardiaques[22]

Le syndrome semble corrélé avec la survenue d'une hypertension artérielle, d'un diabète, d'une obésité[23].

Chez l'enfant et l'adolescent, le syndrome des jambes sans repos, peut être responsable de déficit d'attention[24] et de déficit mnésique, ces enfants ont du mal à se concentrer, ils sont agités (agitation de lutte), ont tendance à s'endormir rapidement en métro, en voiture ou en lisant.

Traitements

La prise en charge du syndrome a fait l'objet de la publication de plusieurs recommandations par des sociétés savantes. Celles de l' European Federation of Neurological Sciences (EFNS) datent de 2006[25], du Movement Disorder Society (MDS) de 2008[26] et celle de l' European Restless Legs Syndrome Study Group (EURLSSG) de 2016[27].

Il est conseillé d'éviter l'abus d'excitants ainsi que d'avoir une hygiène de vie correcte. Une supplémentation en fer peut être justifiée en cas de carence, devant l'hypothèse causale d'un déficit. Le traitement médicamenteux ne doit être discuté que dans les formes qualifiées de répétées et gênantes, en tenant compte des effets secondaires des médicaments. Seul un cinquième des cas requièrent un traitement médicamenteux[10]. Un placebo permet d'améliorer jusqu'à 40 % des cas[28]. La gabapentine est recommandée en première intention[27]. La prégabaline pourrait également avoir un intérêt[29].

Le traitement qui avait obtenu une AMM dans cette indication en France est le ropinirole, un agoniste des récepteurs dopaminergiques, qui a une certaine efficacité dans le syndrome[30]. Il peut cependant, dans certains cas, exacerber les crises[31]. Cependant, il provoque les effets indésirables habituels des agonistes dopaminergiques : nausées, céphalées, vertiges, somnolence, hypotension orthostatique, syncopes, troubles du rythme cardiaque, troubles psychiques divers. Les effets secondaires reconnus incluent notamment l'apparition de somnolence mais aussi la possibilité d'achat compulsif, d'addiction aux jeux, de comportement marginal à l'encontre de ses inhibitions, hypersexualité, voire comportement suicidaire. Ces troubles du comportement communs aux différents médicaments anti-parkinsoniens ont été reconnus tardivement par les laboratoires[32],[33]. Devant cette situation, la Haute Autorité de santé (HAS) a estimé le qu'elle ne pouvait donner un avis favorable au maintien de ces médicaments au remboursement en France[34],[35]. Depuis 2005, il existe un médicament, le pramipexole, commercialisé en France sous le nom de Sifrol. C'est un agoniste dopaminergique utilisé comme antiparkinsonien. Il a une certaine efficacité[36] mais est aussi considéré comme ayant un rapport bénéfice/risque défavorable[37]. La rotigotine permet également d'améliorer les symptômes[38].

Ces agonistes dopaminergiques ont une efficacité modérée[39]. Il existe parfois une augmentation de la sévérité des symptômes à long terme lors de l'emploi prolongé[40], faisant que le rapport bénéfice-risque est parfois défavorable pour ce type de produit.

Dans les formes réfractaires, l'oxycodone[41] et la méthadone[42] peuvent avoir un certain succès.

Notes et références

  1. « AFR » (consulté le 3 février 2015).
  2. Krieger 2006, p. viii
  3. Krieger 2006, p. vi
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  22. Syndrome des jambes sans repos : le cœur encaisse
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Annexes

Articles connexes

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