Mutilation génitale

Une mutilation génitale est une modification permanente et importante des organes génitaux humains. Le terme de mutilation sexuelle est aujourd'hui adopté de préférence à celui de mutilation génitale tant par les organismes internationaux que par l'Académie nationale de médecine[1].

Mutilations génitales féminines

Article détaillé : Mutilations génitales féminines.

Ces mutilations sont classées en quatre catégories[2] :

  • excision dite « sunna » : ablation ou incision du capuchon du clitoris ;
  • excision ou clitoridectomie : ablation du clitoris et, souvent, des petites lèvres. Cette opération, la plus fréquente, est pratiquée dans plus de 25 pays d'Afrique noire, ainsi que, dans une moindre mesure, en Asie (notamment en Indonésie et en Malaisie), au Moyen-Orient (notamment en Égypte et au Soudan et dans la Péninsule arabique, notamment au Yémen). Son équivalent chez l'homme serait l'ablation du gland du pénis ;
  • infibulation ou circoncision pharaonique : excision doublée de l'ablation des grandes lèvres, suivie de la suture bord à bord des deux moignons. Ne subsiste qu'une petite ouverture permettant le passage des urines et du flux menstruel. Cette opération est pratiquée à Djibouti, en Égypte, dans certaines régions d’Éthiopie, au Mali, en Somalie et dans le nord du Soudan ;
  • autres types de mutilations sexuelles féminines : perforation, perçage ou incision du clitoris et/ou des lèvres ; nymphotomie ou ablation des petites lèvres; cautérisation par brûlure du clitoris et des tissus qui l'entourent ; curetage de l'orifice vaginal ; scarification du vagin ; introduction de substances corrosives dans le vagin pour provoquer des saignements ou introduction d'herbes, toujours dans le vagin, dans le but de le resserrer ou de le rétrécir.

Mutilations génitales masculines

Les mutilations sexuelles masculines peuvent être divisées en deux catégories :

  • celles qui empêchent à l'homme d'éjaculer, le rendant le cas échéant stérile, soit :
    • la castration qui consiste en ablation des testicules (voir l'article eunuque),
    • l'émasculation, ou pénectomie en terme médical, c'est-à-dire l'ablation du pénis,
  • et les autres modifications invasives des organes sexuels masculins telle que la subincision qui ne compromettent pas la fonction reproductrice.

Le débat autour de la circoncision

Lorsqu'elle intervient sur des enfants sans motif thérapeutique, la circoncision (qui consiste en l'ablation du prépuce du pénis) a été qualifiée de « mutilation sexuelle » par des intellectuels comme Jean-Pierre Rosenczveig[3], Michel Onfray[4], Christopher Hitchens[5] ou Abdelwahab Bouhdiba[6] et des organisations médicales telle que la Swedish Paediatric Society[7], ceux-ci admettant cependant que la circoncision reste moins « mutilante » que l'excision.
Cette qualification de « mutilation » a été examinée au sein d'organisations internationales comme l'ONU[8],[9], son antenne médicale, l'OMS[10] et Amnesty International[11], qui ne l'ont pas reconnue comme telle. L'ONUSIDA indique d'ailleurs « en quoi la circoncision masculine est différente de la mutilation génitale féminine », en précisant que « si la circoncision masculine et la mutilation génitale sont toutes deux ancrées dans la culture et la tradition, les conséquences sanitaires de chacune sont drastiquement différentes »[12].

Contactée par le journal Le Temps, l'Unicef déclare que « la circoncision masculine est en général moins invasive que l’excision, et que ses conséquences sont, la plupart du temps, moins graves. Néanmoins, il s’agit aussi en principe d’une violation du droit de l’enfant à son intégrité physique. Nous conseillons aux parents qui sont appelés à prendre une décision pour ou contre la circoncision de leur fils de mettre en balance avec le plus grand soin les différents aspects, qu’il s’agisse des droits de l’enfant ou d’autres considérations[13]. »
En mai 2012, le tribunal de grande instance de Cologne juge que la circoncision est contraire à l'intérêt de l'enfant et que « le corps d'un enfant était modifié durablement et de manière irréparable par la circoncision », ce qui constitue « une blessure corporelle passible d'une condamnation[14]. » Ce jugement a provoqué un vaste débat en Europe, et s'est inscrit dans la polémique qui sévit aux États-Unis à propos de la circoncision (qu'elle soit religieuse, culturelle ou “hygiénique”), voir par exemple, le “room for debate” du New York Times consacré à la circoncision[15].

Historique des mutilations génitales

En Rome antique, les adorateurs de la déesse phrygienne Cybèle se castraient. Le fils de la déesse, Attis, s'était castré puis ressuscité[16].

Les eunuques sont des hommes émasculés et dont le rôle était la garde des harems et épouses impériales en Orient (cité interdite). Les eunuques existent depuis le IXe siècle av. J.-C. et se perpétuent de nos jours en Inde, où on compte un million de Hijras, un groupe hétérogène composés d'eunuques et de transgenres[17]. Ils y ont un statut de troisième sexe.

Cette pratique orientale serait à l'origine des castrats en Occident. Au XVIIe siècle, les castrats étaient de jeunes garçons castrés avant la puberté pour prévenir la mue de leur voix et lui conserver son timbre aigu.

Au XIXe siècle, des mutilations génitales étaient pratiquées par la secte d'origine russe des Skoptzy.

La Commission pour l’Abolition des Mutilations Sexuelles (CAMS) a été fondée en 1982 par Awa Thiam, universitaire sénégalaise célèbre pour avoir publié en 1978 un livre intitulé "La parole aux Négresses" dénonçant cette forme gravissime de violence faite en particulier aux fillettes africaines.

Motifs contemporains

Certaines mutilations sexuelles relèvent de coutumes et parfois de rites d'initiation ou plus simplement d'intégration sociale. Elles concernent principalement le sujet jeune.

Il existe aussi des cas d'automutilation sexuelle, ou de mutilation voulue par le sujet mutilé, rencontrée chez certains hommes. La secte chrétienne russe Skoptzy en fournit un exemple. D'autres cas peuvent relever de la psychiatrie, comme celui de Bernd Jürgen Brandes qui a demandé à Armin Meiwes de lui couper le pénis pour le manger.

Un cas très courant et problématique, est celui des opérations de réassignation du genre dont sont l'objet les personnes intersexes.

Restauration et réversibilité

Il existe une technique de chirurgie réparatrice et reconstructive des mutilations génitales féminines permettant de reconstituer le clitoris et de réorganiser anatomiquement la vulve sans pour le moment pouvoir rendre aux zones érogènes détruites leur sensibilité. Cette technique mise au point par l'urologue Pierre Foldès[18] est inscrite à la nomenclature des actes médicaux remboursés de la Sécurité sociale française.

Les techniques de restauration du prépuce après une circoncision sont essentiellement non-chirurgicales, par traction de la peau restante.

La vasectomie est théoriquement réversible par vasovasostomie.

Notes et références

  1. colloque du 10 juin 2004
  2. Éliminer les mutilations sexuelles féminines Déclaration commune 2008 HCDH, OMS, ONUSIDA, PNUD, UNCEA, UNESCO, UNFPA, UNHCR, UNICEF, UNIFEM
  3. « Derrière les mutilations sexuelles sur l’enfant, les rapports du laïc et du religieux (478) », sur le blog de Jean-Pierre Rosenczveig hébergé par "Le Monde"
  4. Michel Onfray, Traité d'athéologie, Livre de Poche, (ISBN 2-253-11557-6), p. 149« Étrange comme l'excision - la circoncision féminine, plusieurs langues utilisent le même mot pour les deux mutilations - des petites filles révulse l'Occident, mais ne génère aucune condamnation quand elle est pratiquée sur les petits garçons. Le consensus semble absolu, jusqu'à ce qu'on invite son interlocuteur à réfléchir sur le bien-fondé de cette opération chirurgicale qui consiste à retrancher une partie saine du corps d'un enfant non consentant sans raison médicale - la définition juridique de ...la mutilation. »
  5. Christopher Hitchens, Dieu n'est pas grand : Comment la religion empoisonne tout, Belfond, , p. 246« La circoncision complète, originellement exigée par dieu comme prix du sang pour le futur massacre des habitants de Canaan, apparaît aujourd'hui clairement pour ce qu'elle est : la mutilation d'un bébé innocent dans le but de détruire sa vie sexuelle future. Le lien entre la barbarie religieuse et la répression sexuelle ne saurait être plus évident que lorsqu'il est « marqué dans la chair ». Qui pourra compter le nombre de vies ainsi rendues misérables, surtout depuis que des médecins chrétiens se sont mis à adopter l'antique folklore juif dans leurs hôpitaux ? Et qui peut supporter de lire les manuels et les histoires de la médecine qui recensent froidement le nombre de petits garçons morts d'une infection après leur huitième jour, ou qui ont subi des dysfonctionnements et déformations intolérables ? [...] S'il ne s'agissait pas de religion et de son arrogance, aucune société saine d'esprit ne tolérerait cette amputation primitive, ni n'autoriserait une opération chirurgicale sur les parties génitales sans le consentement total et informé de la personne concernée. »
  6. Abdelwahab Bouhdiba, La Sexualité en islam, PUF, , p. 217-218« Quant à l'enfant mutilé il n'avait que la ressource de crier ses souffrances et de pleurer le choc ressenti devant cette violence castratrice faite à son corps. Cette meurtrissure dans sa chaire, ces hommes et ces femmes qui le torturent. ce rasoir qui brille, les youyous stridents de vieilles curieuses et fort peu discrètes. Les gargoulettes qui volent en éclats, le coq qui crie, se débat et perd son sang, le tintamarre et enfin cette ronde de bonshommes et de bonnes femmes qui viennent féliciter le patient de "son heureuse accession à l'islam"  : voilà à quoi se réduit pour l'enfant une circoncision. [...] Et la douloureuse blessure trop souvent tarde à se cicatriser; parfois de longues et pénibles semaines étaient nécessaires; parfois aussi des accidents entrainaient des complications plus graves : infections, hémorragies, sectionnement de la verge, artère su pénis tranchée, partie du gland coupé...[...] Les dangers énormes sur le plan physiologique et psychique sont sérieux. Ce n'est pas sans raison que certains parlent de procédés barbares et traumatisants. »
  7. Swedish docs in circumcision protest
  8. (en) The implementation of the human rights of women. Traditional practices affecting the health of women and children, 25 juin 1997
  9. The implementation of the human rights of women. Traditional practices affecting the health of women and the girl child., 27 juin 2000
  10. (en) [PDF]« New Data on Mal Circumcision and HIV Prevention : Policy and Programm Implications », conclusions et recommandations de l'OMS.
  11. (en) « Amnesty International and Genital Mutilation : A Brief History », sur le site mgmbill.org
  12. (en) [PDF] « La circoncision masculine sécurisée, volontaire et informée dans le cadre d’un programme complet de prévention du VIH », rapport de l'ONUSIDA p. 85
  13. « Sexe, religion et hygiène: la justice ouvre le débat de la circoncision », sur du journal suisse Le Temps
  14. « Allemagne : la circoncision religieuse interdite ? », sur TF1 News,
  15. room for debate” du New York Times consacré à la circoncision
  16. Cybèle
  17. Eunuchs -- India's Third Gender
  18. Le clitoris retrouvé interview du Dr Foldès dans Afrik.com

Voir aussi


  • Portail de la médecine
This article is issued from Wikipedia. The text is licensed under Creative Commons - Attribution - Sharealike. Additional terms may apply for the media files.