Steak tartare

Le steak tartare ou tartare est une recette à base de viande de bœuf ou de viande de cheval crue, généralement hachée gros, ou coupée en petits cubes au couteau (d'où l'appellation de tartare au couteau) .

Pour les articles homonymes, voir Tartare.

Steak tartare

Tartare de bœuf charolais.

Autre(s) nom(s) Tartare
Date Antiquité
Place dans le service Plat principal
Température de service Froid
Ingrédients Viande de bœuf ou viande de cheval, condiments
Mets similaires Steak, steak haché, yukhoe, carpaccio, tartare de saumon, sashimi
Accompagnement Frites, salade
Classification Viande

Le filet américain est une variante belge et du nord de la France.

Par extension, le mot « tartare » est employé pour désigner d'autres préparations crues et hachées à base de viande de veau, d'huîtres, de thon, de saumon, de courgettes[1].

Histoire

Lien entre la viande crue et les tatars

La consommation de viande hachée ou crue a été popularisée dans les régions slaves, lors de l'occupation mongole médiévale et introduite à Moscou par la Horde d'or. Les Mongols et leurs alliés turcs les Tatars avaient pour tradition de hacher finement les viandes très dures comme le cheval et le chameau, pour les rendre comestibles, puis de lier la viande avec du lait ou des œufs. Ces peuples étaient considérés comme étant de la Tartarie, et les plats de viande crue ou hachée sont devenus associés dans l'imaginaire collectif à la Tartarie.

En Europe, l’ingénieur et cartographe du XVIIe siècle Guillaume Levasseur de Beauplan, qui a longtemps servi en Pologne-Lituanie, rapporte de nombreuses observations dans un ouvrage intitulé Description de l’Ukranie[2] publié en 1651 à Rouen. Dans la recette mentionnée, attribuée aux Tatars mais observée chez les Cosaques zaporogues rencontrés sur le territoire de l'Ukraine, il s’agit de découper des morceaux de filet de cheval d’un à deux doigts d’épaisseur, puis, après les avoir abondamment salés d’un côté pour faire sortir le sang, de les placer sous la selle sur le dos de sa monture. La viande devait rester en place deux heures, puis était retirée et nettoyée de son écume sanglante sur le côté salé. Elle était ensuite retournée sur l’autre face et préparée de la même manière avant qu’elle ne soit jugée prête à être hachée, c’est-à-dire asséchée de son trop-plein de sang, au contraire de la viande simplement crue[3]. Cependant, il est possible que cette interprétation résulte d'une confusion due à l'utilisation de fines tranches de viande pour protéger les plaies de la selle de frottements supplémentaires[4].

Diffusion de la consommation de viande crue en Occident

La consommation de viande crue se diffuse à Hambourg par les navires russes qui voyagent vers ce port au XVIIe siècle et alors qu'une communauté russe habite dans cette ville, qui est une des principales villes hanséatiques. La consommation de viande crue se diffuse ensuite en Amérique via les immigrants de l'Europe du Nord[réf. nécessaire] qui étaient nombreux à partir de Hambourg[5][réf. incomplète].

À New York, destination principale des bateaux en provenance de Hambourg, des restaurants commencent à servir cette viande à la mode hambourgeoise sous le nom de Hamburg-style American fillet, voire beefsteak à la Hambourgeoise[6][réf. incomplète],[7][réf. incomplète]. À la fin du XIXe siècle, le steak hambourgeois est courant dans les menus de nombreux restaurants du port de New York et on le trouve également dans des livres de recettes[8]. La recette est alors basée sur du bœuf haché à la main, légèrement salé et souvent fumé, généralement servi cru dans un plat avec des oignons et de la chapelure[9],[10] et contient un œuf cru[11].

Origine française de l’appellation « tartare »

En France, on trouve des recettes désignées comme « tartare » avant le XIXe siècle, comme le « poulet tartare » ou les « anguilles tartare »[12], plats accompagnés d'une sauce moutardée qui prend elle aussi le nom de « sauce tartare » qui se serait transmis à l'actuelle sauce tartare.

Jules Verne, dans son roman de 1875 Michel Strogoff, adapté avec succès au théâtre en 1880, évoque une recette de koulbat décrite en ces termes par un hôtelier tatar « quelle est cette chose... koulbat ? - un pâté fait avec de la viande pilée et des œufs »[13]. Certains y voient une des origines possibles de la recette du steak tartare en France[14].

Dans la seconde partie du XIXe siècle, la consommation de viande crue augmente de même que l'hippophagie et le steak tartare serait apparu en France dans ce contexte à la fin du XIXe siècle, à base de viande de cheval avant d'être supplanté par la viande de bœuf[14]. Une recette de viande crue hachée, passée au tamis et assaisonnée de jaunes d’oeufs, de fines herbes et d’épices fines apparaît dans un ouvrage de 1910 : Zomothérapie et viandes crues du docteur O'Followell[12].

Au début du XXe siècle, l'actuel steak tartare est connu en Europe sous le nom de steak à l'américaine. On trouve une première définition du steak tartare dans le guide culinaire d'Escoffier qui définit le « steack à la tartare » comme une variante de steak à l'américaine faite sans jaune d'œuf, servi avec une sauce tartare en accompagnement. Le nom du plat, qui serait donc lié à la sauce tartare, se contracte ensuite en « steak tartare »[15],[16],[N 1]. La distinction entre le steak à l'américaine et le steak tartare finit par disparaître et c'est la désignation « tartare » qui s'impose pour la recette d'origine : l'édition de 1938 du Larousse Gastronomique décrit le steak tartare comme du bœuf haché cru servi avec un jaune d’œuf cru, sans mention de la sauce tartare.

L'appellation de steak tartare a été depuis reprise aux États-Unis.

Composition

Le plat se consomme aujourd'hui avec de la viande de bœuf hachée (rumsteck) et comprend du jaune d'œuf, de la moutarde, du ketchup, de la sauce anglaise et parfois du Viandox, du Tabasco, sel et poivre. On y ajoute en général d'autres condiments tels que câpres, cornichons, oignon, mélange d'herbes (persil, cerfeuil, estragon, ciboulette)[17].

Le steak tartare est, en général, servi avec une assiette de frites et de la salade.

Au restaurant, il peut être servi préparé ou non. Dans ce dernier cas, le jaune d’œuf est fréquemment dressé sur la portion de viande hachée.

Variantes

Le steak tartare poêlé ou « aller retour » est une variante où le steak tartare est cuit brièvement sur chaque face avant d'être servi.

De nombreuses variantes existent en restauration avec l'ajout d'ingrédients personnalisant la recette (ajout de roquefort, foie gras, porto, etc.).

Le steak tartare fait également partie de la cuisine coréenne, où il peut être servi de deux façons :

Dans la recette italienne (génoise), on y ajoute un jaune d’œuf et des câpres, des cornichons, un peu d’huile d'olive, du persil, de l'ail et des oignons.

Le kitfo est la variante éthiopienne du steak tartare. La viande est servie saisie, ou juste chauffée dans du beurre clarifié et mélangée avec un mélange d'épices nommé mitmita. Elle est ensuite servie tiède sur une crêpe a base de farine de teff nommée injera.


Filet américain

En Belgique, au Luxembourg ainsi qu'en France dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, le filet américain est la variante régionale du steak tartare, servie préparée. Le filet américain est réalisé avec un assaisonnement de mayonnaise moutardée relevée de sauce Worcestershire et de Tabasco. Il peut être agrémenté d’oignons finement hachés, de câpres, de cornichons et d'oignons au vinaigre, incorporés à la préparation ou proposés séparément.

Il est vendu en boucherie, et peut être mangé sur du pain ou avec des frites.

En restauration, on le trouve en garniture de sandwich dans les sandwicheries ou servi à l'assiette accompagné de frites et de crudités dans les restaurants, où il constitue un plat typique en Belgique et dans le nord de la France.

En Belgique, la présentation sur des tranches de pain grillé (toast), généralement accompagnées de crudités, donne au mets le nom de « cannibale ».

Origine du filet américain

Le steak à l'américaine étant le nom porté par le steak tartare au début du XXe siècle, l’appellation belge pourrait être un simple maintien du nom de ce plat, renommé « tartare » en France au cours des années 1920 ou 1930.

La recette et sa désignation sous le nom de « filet américain » sont également attribuées au chef belge Joseph Niels, qui revendique l'invention en 1926 de la recette[18].

« Le garçon préparait devant vous une mayonnaise faite avec des œufs, moutarde, sel, poivre, oignons et persil hachés, câpres, sauce anglaise, anchois, ail et souvent du citron, accompagnée de pommes frites, cresson ou cressonnette, oignons et cornichons au vinaigre, puis mélangeait la viande de bœuf hachée. C’est cette préparation d’origine française qui était couramment préparée vers les années 1920 en Belgique et qui s’appelait “steak tartare”.
Le problème était que le garçon ou le maître d’hôtel, selon son humeur, assaisonnait cette préparation fort ou pas assez.
Lorsque notre grand-père, directeur du restaurant La Royale dans la galerie Saint Hubert en 1924, a ouvert la taverne-restaurant Canterbury au 129 boulevard Emile Jacqmain à Bruxelles, il a décidé de créer une autre préparation du steak tartare qu’il a appelée “filet américain”.
Recette : viande de bœuf hachée gros 1er choix ; grosse cuisse ou tache noire (plus de goût) bien dénervée, sauce mayonnaise renforcée en piccalilli haché finement, 4 jaunes d’œufs en plus au litre de mayonnaise, sel, poivre, véritable sauce anglaise (Lea & Perrins à l’exception de toute autre marque), oignons et persil finement hachés, câpres, pas d’ail, de citron ou d’anchois, servi bien entendu avec des pommes de terre frites belges (bintje) pas trop épaisses, un peu de cresson de rivière, oignons et cornichons aigre-doux, qui ne tuent pas le goût de la viande, bien mélanger avec une fourchette en bois pour arriver à une bonne onctuosité.
Le Canterbury étant devenu une école pour beaucoup de cuisiniers belges, petit à petit la recette a été reprise en Belgique.
De plus, cette recette étant préparée en cuisine, il y a une régularité d’assaisonnement que nous n’avions pas lorsque le personnel de salle la préparait devant vous. »

 Frédéric Niels (arrière-petit-fils de Joseph Niels)

Variantes du filet américain

Le filet américain est proposé à la vente sous diverses appellations réglementées :

  • « filet américain », « steak haché préparé », « bifsteck » : il s’agit exclusivement de viande hachée crue de bœuf ou de cheval ; dans ce dernier cas, la composition de la préparation doit être clairement indiquée[19] ;
  • « préparé du chef » et « Martino » peuvent être composés de bœuf et de porc, leur assaisonnement dépendant du choix du préparateur[19].

Selon Eric Boschman et Nathalie Derny, la préparation du filet américain Martino inclut moutarde, mayonnaise, poivre de Cayenne et paprika. Dans le sandwich Martino, qui aurait été créé à Gand, il se déguste additionné de légumes au vinaigre, d’anchois, de moutarde et d’un trait de Tabasco[20].

Santé

En consommant de la viande de bœuf crue, il est possible de se retrouver parasité par le ténia du bœuf (ver solitaire).

Notes et références

Notes

  1. « dans son édition de 1921 » selon les sources citées, mais la même définition est présente dans l'édition de 1903)

Références

  1. « Recettes et bonnes adresses pour se régaler d'un tartare à Paris », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
  2. J. Techener, Description de l’Ukranie depuis les confins de la Moscovie jusqu’aux limites de la Transylvanie, page 79, 1861.
  3. Mikhaïl W. Ramseier, Cosaques, Éditions Nemo, 2009 (ISBN 978-2-940038-39-8). Description d’Ukranie, qui sont plusieurs provinces du Royaume de Pologne. Contenues depuis les confins de la Moscovie, jusques aux limites de la Transilvanie. Ensemble leurs mœurs, façons de vivre, et de faire la Guerre. Par le Sieur de Beauplan. À Rouen, chez Jacques Cailloue, 1660. Réédition aux Presses de l’Université d’Ottawa, 1990, annotée par Dennis F. Essar et Andrew B. Pernal.
  4. (en-US) Craig S. Smith, « The Raw Truth: Don't Blame the Mongols (or Their Horses) », The New York Times, (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le )
  5. Leslie Page Moch Moving Europeans : Migration in Western Europe Since 1650 (2e édition) (2003). Indiana University Press. (ISBN 978-0-253-21595-6)
  6. Charles Ranhofer (1894). The Epicurean: A Complete Treatise of Analytical & Practical Studies (1ere ed.). B00085H6PE
  7. Josh Ozersky (2008). The Hamburger: A History (Icons of America) (1ere ed.). London: Yale University Press. (ISBN 978-0-300-11758-5)
  8. Fannie Merritt Farmer (1896). Boston Cooking-School Cookbook. Gramercy (ed. 1997). (ISBN 978-0-517-18678-7)
  9. 1802, "Oxford English Dictionary
  10. Theodora Fitzgibbon (janvier 1976). The Food of the Western World: An Encyclopedia of Food from North America and Europe (1ere ed.). London: Random House Inc. (ISBN 978-0-8129-0427-7)
  11. Thomas Jefferson Murrey (1887). "Eating Before Sleeping" Cookery for Invalids (1ere ed.). New York City: White Stokes & Allen. pp. 30–33.
  12. « La petite histoire de la tartare chaude et du tartare froid », sur lacuisinedu19siecle, (consulté le )
  13. Jacques Berthomeau, « La Tartarie du steak « Quand le seigneur à envie de boire, les coupes se soulèvent de leur place sans que nul ne les touche et s’en vont devant le seigneur… » Michel Strogoff, Giovanni Drogo, Jules Verne et Dino Buzzati », sur Le blog de Jacques Berthomeau (consulté le )
  14. Emmanuel Guillemain d'Echon, « Dans les steaks de l’Asie tartare », sur Libération.fr, (consulté le )
  15. Raymond Sokolov (2004). How to Cook Revised Edition: An Easy and Imaginative Guide for the Beginner. New York, NY (USA): Harper Collins. pp. 41–42. (ISBN 978-0-06-008391-5)
  16. Albert Jack, What Caesar Did for My Salad: Not to Mention the Earl's Sandwich, Pavlova's Meringue and Other Curious Stories Behind Our Favourite Food, 2010, (ISBN 1-84614-254-7), p. 141
  17. Thibaut Danancher, Guillaume Paret, « Cuisine : le steak tartare de Jean-François Piège », sur Le Point, (consulté le )
  18. « Origine de la recette du “filet américain” inventée par Joseph Niels en 1926 », niels1926.be (consulté le 12 avril 2019).
  19. [PDF] « Lutte contre les hormones », AFSCA, Bulletin de l’Agence alimentaire fédérale, no 35, décembre 2009 (consulté le 12 avril 2019).
  20. Eric Boschman et Nathalie Derny, Le Goût des Belges, Éditions Racine, 2006, 192 p. (ISBN 978-2-87386-481-1), p. 29.

Annexes

Articles connexes

  • Alimentation et gastronomie
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.