Léon Schwartzenberg

Le professeur Léon Schwartzenberg, né le à Paris dans le 4e arrondissement[1] et mort le à Villejuif, est un cancérologue français. Il fut brièvement ministre délégué, chargé de la Santé en 1988. Il s'est aussi signalé par son engagement en faveur des sans-abri et des « sans-papiers ». Il est le père du journaliste Emmanuel Schwartzenberg.

Pour les articles homonymes, voir Schwartzenberg.

Léon Schwartzenberg
Fonctions
Ministre délégué à la Santé

(9 jours)
Président François Mitterrand
Gouvernement Rocard II
Prédécesseur Claude Évin
Successeur Bruno Durieux
Député européen

(4 ans, 11 mois et 23 jours)
Élection 18 juin 1989
Circonscription France
Législature 3e
Groupe politique S&D
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Paris 4e, (France)
Date de décès
Lieu de décès Villejuif (France)
Nationalité Française
Profession Cancérologue

Biographie

Famille et occupation nazie

Ses parents sont des juifs roumains. Son père Simon Schwartzenberg est né en 1895 en Roumanie et est connu pour ses peintures[2]. Après la Seconde Guerre mondiale, il exerce la profession de grossiste en bonneterie avec son frère André Schwartzenberg, père de Roger-Gérard Schwartzenberg, comme partenaire. Sa mère est Germaine Kissler.

Durant l'Occupation, Léon se réfugie avec sa famille à Toulouse où il commence des études de médecine. Il est très rapidement interdit de faculté de médecine en raison des lois raciales de Vichy. « Le conseil de l'Ordre des médecins de l'époque restait muet » rappelait-il. Il s'engage alors, à l'âge de 20 ans, dans la Résistance (il est membre du Corps Franc Pommiès[3] et du réseau franco-britannique d'évasion des aviateurs alliés) avec ses deux frères cadets Raymond (dit Serge, né le à Paris) et Jacques (né le à Paris). Dénoncés, ces derniers sont arrêtés à Pau le et déportés à Mauthausen. Il dira plus tard « J'ai vécu mes vingt ans comme un mélange de cauchemars et de moments agréables[4]. » Il n'apprit l'exécution de ses frères qu'à la Libération.

En 1953, il épouse Nora Coste (1927-2015) et ils ont deux enfants : Emmanuel et Berthe. Il a un troisième enfant avec Maître Colette Auger, Mathieu[réf. nécessaire].

De 1980 à 2003, il a pour compagne la comédienne Marina Vlady.

Cancérologie

Après la guerre, il finit ses études de médecine et devient médecin hématologue, puis cancérologue. Il travaille en 1958 avec le professeur Georges Mathé et traite des scientifiques yougoslaves irradiés grâce aux premières greffes de moelle osseuse, avec la participation du clinicien et hématologue bosniaque de Sarajevo Hekalo Irvin, un traitement révolutionnaire pour l'époque. Puis, il devient assistant d'hématologie à l'Institut Gustave-Roussy de Villejuif en 1963. Il développe les transfusions de globules blancs utilisées dans le traitement de certains cancers jusqu'à la fin des années 1970. Il devient agrégé des hôpitaux en 1971 à l'Institut de cancérologie et d'immunogénétique de Villejuif.

À la question « Serait-il devenu médecin et cancérologue s'il n'avait pas été interdit d'études médicales ? » il a répondu avec ironie « Peut-être pas, je n'en sais rien […] Le vieux maréchal (Pétain) a fait beaucoup pour forger le moral de la jeunesse de France en ce temps-là. » [réf. nécessaire] En 1977, alors que le cancer n'était évoqué que comme « une longue et douloureuse maladie », il publie Changer la mort, en collaboration avec le journaliste Pierre Viansson-Ponté (1920-1979), où il plaide en faveur de la vérité au malade, en toutes circonstances. « La vérité doit toujours être dite, elle est toujours positive ». Cohérent et entier, il annonce le diagnostic de sa maladie à Pierre Viansson-Ponté qui refuse de l'entendre; les deux hommes se brouillent alors[5].

Politique et débats autour de l'éthique médicale et scientifique

Adepte du « parler vrai » et homme qui savait séduire pour mieux convaincre, il n'hésite pas à relever les contradictions de la société[non neutre] : « Mentir aux cancéreux par compassion et dire la vérité à ceux qui ont le sida par peur de la contagion, cela procède d'une égale saloperie », disait-il à l'apparition de cette maladie en France, alors dénuée des puissantes trithérapies actuelles.

La même année, il prend la défense du droit de mourir dignement et lance le débat sur l'euthanasie. Il dira au cours de l'émission Apostrophes sur Antenne 2 : « Je suis simplement contre le maintien à tout prix d’une vie qui n’est plus une existence. »

En 1985, il signe avec Hervé Bazin, Albert Jacquard et Suzanne Prou un article affirmant que « l'arme nucléaire est une arme de suicide autant qu'une arme de menace[6]. »

Il publie Requiem pour la vie en 1985, un ouvrage cherchant à rompre le tabou de l'euthanasie. En 1991, l'Ordre des médecins le suspend d'exercice pour un an pour avoir révélé dans la presse, en 1987, l'euthanasie qu'il avait apportée à un malade incurable. En 1993, le Conseil d'État annule cette décision.

Nommé le ministre délégué à la Santé dans le premier gouvernement de Michel Rocard, il doit démissionner le 7 juillet pour avoir proposé publiquement un dépistage systématique du sida chez les femmes enceintes et avoir pris position en faveur de la légalisation, de la mise en vente libre du cannabis, sous le contrôle de l'État, afin de barrer la route aux trafiquants. Ses neuf jours de présence au gouvernement représentent un record de brièveté pour un ministre de la Ve république[7], égalé en 2014 par Thomas Thévenoud[8].

Léon Schwartzenberg revient en politique. Il est candidat aux élections européennes de 1989. Faisant partie des 22 élus sur la liste Majorité de progrès pour l'Europe conduite par Laurent Fabius, il est député européen de 1989 à 1994.

En 1992, il se présente aux élections régionales en Provence-Alpes-Côte d'Azur où il est tête de la liste Énergie Sud de Bernard Tapie dans le Var. Il renoncera à son poste de conseiller régional à la suite de l'affaire Testut.

Il figure aux élections européennes de 1994 parmi les initiateurs de la liste L'Europe commence à Sarajevo. Sa liste obtient 1,57 % des suffrages exprimés et n'obtient aucun siège au Parlement européen.

En 1994, il est l'un des fondateurs de l'association Droits Devant !![9].

Plaque de rue Léon-Schwartzenberg, 10e arrondissement de Paris.

Il publie en 1994, le livre Face à la détresse[10].

Vers la fin de sa vie, il s'engage auprès des étrangers en situation irrégulière et des mal-logés et contre les organismes génétiquement modifiés (OGM). Jusqu'en 2001, tant que sa santé le lui permet, il défile régulièrement avec l'association Droit au logement, dont il est alors président d'honneur. En 2002, il apporte son soutien à Régina Louf au cours de cette affaire judiciaire belge[11], préfaçant l'édition française de son livre[12].

Il meurt le à 79 ans à l'hôpital Paul-Brousse[5] de Villejuif d'un cancer, évolution d'une hépatite C contractée selon ses proches en se blessant lors de transfusions effectuées à ses patients, hépatite qui avait évolué en une cirrhose puis en cancer du foie[5]. Il est enterré à Paris, au cimetière du Montparnasse.

Hommages

Une rue de Paris dans le 10e arrondissement porte son nom.

Le centre hospitalier intercommunal Eure-Seine d'Évreux est situé rue Léon-Schwartzenberg.

Œuvres

  • Changer la mort, Albin Michel, 1977 (ISBN 2226005277)
  • Requiem pour la vie, Pré aux clercs, 1985 (ISBN 2714417779)
  • La Société humaine, P. Belfond, 1988 (ISBN 2714422640)
  • Face à la détresse, Fayard, 1994 (ISBN 2213593418)
  • Doubles Vies, Stock, 1997 (ISBN 2234048605)
  • C'est quoi le sida?, Albin Michel, 1999 (ISBN 2226109269)

Notes et références

  1. Institut national de la statistique et des études économiques, « Fichier des décès - années 2000 à 2009 » [zip], sur www.insee.fr
  2. Voir, Simon Schwartzenberg. Espace Tajan, vendredi 1er juillet 2005, nos 10 et 11.
  3. Dominique Lormier, Le livre d'or de la Résistance dans le Sud-Ouest, Éditions Sud-Ouest, 18 janvier 2011.
  4. Dans une émission de Christine Ockrent en 1990 intitulée Qu'avez-vous fait de vos vingt ans ?
  5. Eric Favereau et Dominique Simonnot, « Léon Schwartzenberg, l'engagé volontaire » Libération, 15 octobre 2003
  6. Hervé Bazin, Albert Jacquard, Suzanne Prou et Léon Schwartzenberg, « Vers le suicide collectif ? », Le Monde,
  7. « Démission express: Léon Schwartzenberg garde le record » Libération, 26 août 1995
  8. « Thomas Thévenoud, ministre le plus éphémère de la Ve République », sur L'Obs (consulté le )
  9. « «Droits devant» a du monde derrière », sur Libération.fr (consulté le )
  10. « Léon Schwartzenberg, briseur de tabous et médecin engagé », sur ladepeche.fr (consulté le )
  11. Léon Schwartzenberg sur l'affaire Regina Louf : "Les pédophiles sont l'avarie du développement humain".
  12. Régina Louf, Silence, on tue des enfants ! Voyage jusqu'au bout du réseau, éditeur Factuel, 2002, (ISBN 978-2940313136), préface de Léon Schwartzenberg

Voir aussi

Liens externes

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