Eau de bouleau

L’eau de bouleau se réfère au nom donné à la sève de bouleau lorsqu'elle est récoltée par entaille de l'arbre.

Extraction de sève
Extraction de sève
extracteur fabriqué et utilisé par Henry David Thoreau (Musée de Concord)
Bouteille d'eau de bouleau (russe)

On appelait autrefois le bouleau arbre de la sagesse, mais également arbre aux néphrétiques.
La sève de bouleau, lorsqu'elle est exploitée peut être classée parmi les produits forestiers autres que le bois.

Historique

La sève de bouleau est connue en Europe occidentale depuis le Moyen Âge. À cette époque, la sève de bouleau est la boisson des apothicaires utilisée en cas de calculs rénaux.

Au XIIe siècle, Sainte Hildegarde de Bingen décrit la sève de bouleau comme remède pour soulager les ulcères.

Au XIVe siècle, Conrad de Megenberg (1309-1374) décrit « l’eau de bouleau » comme ayant des propriétés médicinales sur la vessie et les reins.

En 1565, Pierandrea Mattioli (ou Matthiole), médecin et botaniste italien (1501-1577), synthétise les propriétés du bouleau, lui attribue des propriétés drainantes et le surnomme « l’arbre néphrétique ». Il explique dans son ouvrage que « Si on perce le tronc du bouleau avec une tarière, il en sort une grande quantité d'eau, laquelle a grande propriété et vertu à rompre la pierre tant aux reins qu'en la vessie, si l'on continue d'en user. Si on s'en lave la bouche, elle guérit les ulcères qui sont dedans. »

En 1800, le Baron Pierre-François Percy (1754-1825) a vanté ses mérites[1]. Le chirurgien militaire des armées de Napoléon, déclara « Les maladies de la peau, boutons, dartres, couperoses etc. lui résistent rarement. C'est un remède précieux dans les affections rhumatismales, les reliquats de goutte, les embarras de la vessie et une foule de maladies chroniques. »

Le médecin français Henri Leclerc (1870-1955) dans son ouvrage « Précis de phytothérapie. Thérapeutique par les plantes françaises » recommande les préparations à base de bouleau pour lutter contre la cellulite lorsque celle-ci est due à un excédent d’acide urique et de cholestérol.

Paul Fournier préconise des préparations en interne pour résoudre les difficultés urinaires.

Le docteur Artault de Vevey (Suisse) a attribué une action diurétique au bouleau, le préconisant pour compléter le traitement de l’azotémie (rétention de l’urée dans le sang) et de divers symptômes : maux de tête, névralgies, vertiges…

Dans l'édition du livre, paru en 1986, La phytothérapie : traitement des maladies par les plantes[2], l'aromathérapeute et Dr Jean Valnet (1920-1995) écrit : « la sève de bouleau agit sur la lithiase urinaire et les coliques néphrétiques »[réf. à confirmer].

Récolte

Il convient de distinguer la sève brute (la sève montante) et la sève élaborée. La première est absorbée au niveau des racines par les poils absorbants et les mycorhizes. Elle circule principalement dans les vaisseaux du bois. C’est cette sève qu’on cherchera à récolter pour ses bienfaits. Le mode de prélèvement ne permet de recueillir que de façon marginale la sève élaborée, qui circule quant à elle principalement dans le phloème, tissu conducteur, situé juste sous l'écorce.

La sève brute de bouleau se récolte au printemps, à la montée de sève, juste avant l’apparition des jeunes feuilles. La sève est aussi surnommée « l’eau de bouleau » car elle est incolore et fluide comme de l’eau. Elle a un goût d’eau légèrement boisée, minéralisée[3].

Il existe deux méthodes de récolte de sève de bouleau :

Récolte artisanale

Pour récolter la sève de bouleau, il faut aller en pleine forêt afin d’avoir une sève riche en propriétés minérales. La récolte se fait au moyen d’une perceuse, un tuyau en plastique alimentaire de 6 à 8 mm taillé en biseau, un récipient et une cheville en bois conique du même diamètre que le trou.

Avec une perceuse dont on aura pris soin de désinfecter le foret, on perce l’arbre de 4 à 5 cm de profondeur, d'un trou du même diamètre que le tuyau ; le côté biseauté du tuyau est inséré dans le trou ; son autre extrémité va dans le récipient ; la sève de bouleau coule dans le récipient ; après la récolte, le trou se rebouche avec une cheville en bois conique. L’écorce se refait et on peut prélever la sève l’année suivante. Cette récolte n’épuise pas l’arbre et n’est pas dangereuse pour lui.

Ce type de récolte est accessible à tous. On peut boire la sève de bouleau directement sortie du tronc de l’arbre. Elle ne se conservera pas plus de quelques jours au frais. Afin de prolonger la conservation, il est nécessaire de stabiliser la sève, en général par l’ajout d’alcool pur, de clous de girofle, ou d'extraits de bourgeons, ou en la pasteurisant (deux ans de conservation avant ouverture) ou encore en la congelant. La sève fraîche pasteurisée perdra sa vitamine C, ses enzymes et ferments dans le processus ; elle ne peut plus s'appeler "sève fraîche" quelle que soit la température de pasteurisation.

Le but est d’éviter l'oxydation et la fermentation de la sève. On reconnaît une sève de bouleau fermentée à sa couleur blanchâtre, son goût acidulé ; elle est légèrement pétillante. La sève commence à s'oxyder dès la récolte et les bactéries présentes dans l'air et le matériel de récolte s'y développent, en acidifiant son pH. Sans gravité, elle peut déranger le transit (et acidifier l’organisme[réf. nécessaire]).

Récolte finlandaise

La Finlande possède un biotope favorable à de grandes récoltes de sève de bouleau. On y trouve des forêts à perte de vue. Cela a permis de mettre en place un procédé industriel de récolte de sève de bouleau. Des tuyaux en plastique relient une forêt de bouleau à une usine d'embouteillage. Des pompes à vide aspirent la sève dans les arbres pour augmenter les rendements puis le conditionnement de la récolte se fait de façon industrielle.

En Amérique du nord

De nombreuses bétulaies permettent d'importantes récoltes : A titre d'exemple en 2006-2007, le Conseil des Montagnais du Lac-St-Jean, a décidé de soutenir la production de sève de bouleau sur 170 ha de bétulaies blanches , via une aide de 24 904 $ dont 16 116 $ en provenance du PFPN ; la récolte a démarré au printemps 2009 sur 800 tiges pour une transformation en sirop. Ce sont 64 899 $ dont 23 891 $ qui ont été investis en 2007-2008 et 2008-2009 par la FMLSJ [4].

Composition

La sève de bouleau est composée à plus de 95% d'eau. Elle est riche en sucres à des taux variables (2,5 à 4,7 g/l de glucose, 2,3 à 4,5 g/l de fructose, de faibles quantités de sucrose et galactose) et contient également des acides de fruits : acide malique (0,1 à 0,7 g/l), acide succinique (<0.1 g/l) , acide phosphorique (<0.04 g/l), acide citrique (<0.1 g/l). L’acide citrique n’est pas systématiquement détecté dans les échantillons. S'y ajoutent des polyphénols et des acides phénoliques, des protéines et des acides aminés (principalement l’isoleucine, la valine, l’asparagine et la glutamine), ainsi que des minéraux (calcium, magnésium, potassium, zinc, cuivre, manganèse, fer) et des oligo-éléments (chrome, sélénium, cobalt, or, silicium, cuivre et lithium).

Il ne faut pas confondre  :

  • le jus de bouleau (macérât aqueux des feuilles de l’arbre) ;
  • le sucre de bouleau (xylitol extrait de l’écorce du bouleau).

Utilisation

En cosmétique

La sève de bouleau est utilisée dans les cosmétiques, utilisée depuis très longtemps par les peuples nordiques, slaves et asiatiques. Les produits les plus connus sont les lotions capillaires[5].

En cuisine

La sève de bouleau n'est pas aussi riche que celle de l'érable[6], mais elle a remplacé à une époque les liqueurs spiritueuses et les vins dans de nombreux pays. Longtemps, les paysans russes l'ont utilisée sans préparation telle qu'elle coule de l'arbre.

On peut faire de l'eau de vie de bouleau en faisant bouillir 25 litres de sève de bouleau avec kg de sucre. On le laisse cuire jusqu’à ce que le mélange ait diminué d’un quart. Il faut ensuite écumer, passer et mettre en fût afin d’amorcer la fermentation avec 100 g de levure de bière ou de vin. Pendant la fermentation, on ajoute peu à peu 5 litres de vin blanc et 4 citrons coupés en tranches. Mettre en baril et attendre un mois avant de faire la mise en bouteilles. Ce vin est réputé avoir un gout agréable (à consommer avec modération)[7].

Au Canada et en Alaska, l'eau de bouleau est concentrée par évaporation afin d'éliminer l'eau et d'augmenter ainsi la concentration en glucides jusqu’à un taux minimum de 66 % afin de faire du sirop de bouleau[8]. Le sirop obtenu est utilisé de la même façon que le sirop d'érable.

En biologie

Des sèves de végétaux et notamment de bouleau et d'érable ont été utilisées comme milieu de culture de certains pathogènes (agent de la flavescence dorée) ou source alimentaire pour des élevages d'insectes suceurs de sève (cicadelles) ; c'est toujours la première sève de printemps, très riche en sucre qui est utilisée, car supposée proche en termes de composition de la sève élaborée du liber[9].

En phytothérapie

La sève de bouleau est utilisée en phytothérapie à des fins dépuratives[pas clair], amaigrissantes et reminéralisantes[pas clair][10]. Elle est également utilisée dans les cas d'hyperuricémie et d'hypercholestérolémie[11]. Cependant, ces propriétés alléguées ne reposent pas sur des preuves scientifiques suffisantes.

Dans le cadre de la phytothérapie, le docteur Jean Valnet préconise une cure à raison d’un demi-verre à un verre chaque matin à jeun pendant 21 jours[12].

L'acide bétulinique, les salycylates de méthyle, principes actifs, sont contenus dans l'écorce et non dans la sève. L'écorce de tige et les feuilles de bouleau sont inscrites sur la liste A de la pharmacopée française. En revanche, la sève de bouleau ne figure pas dans la pharmacopée française. Malgré une activité anti-inflammatoire et antipyrétique, cette dernière n’est pas significative par comparaison avec des traitements classiques.

Notes et références

  1. François Dubois, Matière médicale indigène, ou, Histoire des plantes médicinales qui croissent spontanément en France et en Belgique: ouvrage en réponse a la question, Des ressources que la flore médicale indigène présente aux médicins de campagne? auquel la Société de Médecine de Marseille a Décerné une médaille d'or, Typ. de J. Casterman, (lire en ligne)
  2. Jean Valnet, La phytothérapie : traitement des maladies par les plantes, Paris, Librairie générale française, coll. « Le Livre de poche » (no 7889), , 639 p., 17 cm (ISBN 2-253-03790-7, notice BnF no FRBNF34843301)
  3. Article dans Alternative Santé - Cure : La sève de Bouleau - no 343 avril 2007
  4. Programme forestier des Premières nations (2010). e-nouvelles (Phase I & Phase II)
  5. http://www.swissnat.com/FrontOffice/i5628/article/Minceur/Therapies-minceur/Les-incroyables-proprietes-de-la-seve-de-bouleau.htm
  6. (en) William M. Ciesla. Chapter 5 : Sap and resin - Syrups, sugar and confectionery products - Maple syrup and related products - Birch syrup and related products. Non-Wood Forest Products from Temperate Broad-Leaved Trees. Rome, 2002. FAO (ISBN 92-5-104855-X)
  7. Livre « ces plantes qui vous guérissent » édition noir et blanc
  8. (en) Alaska Birch syrupmakers association Petition to US Food and Drug Administration for establishment of Standard of Identity for birch syrup, including the Alaska Birch Syrupmakers' Association Best Practices. July 18, 2005. [PDF]
  9. Caudwell A & Kuszala C (1986) Mise au point par l'épreuve d'infectivité d'un milieu d'extraction et d'un milieu de survie, d'une méthode de purification et de conservation au froid de l'agent pathogène (MLO) de la flavescence dorée. Agronomie, 6(10), 885-892.
  10. Jean Valnet, La Phytothérapie – Se soigner par les plantes
  11. Henri Leclerc, Précis de phytothérapie. Essai de Thérapeutique par les plantes françaises.
  12. Le Docteur Jean Valnet dans son livre « La Phytothérapie – Se soigner par les plantes »

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

  • Beaud M (2010) Le Jaseur boréal Bombycilla garrulus buveur de sève au jardin botanique de Fribourg (Suisse). Nos Oiseaux, 57, 49-51.
  • Beaumont R (2010) La transformation de la sève du bouleau blanc en sirop.
  • Czurda T & Vardjan M (1969) Les gibbérellines dans la sève printanière du bouleau Betula pendula Roth.
  • Friedrich, D. Le potentiel thérapeutique du bouleau au printemps. In Forum médical (p. 14).
  • Šmid N & Vardjan M (1970) Les cytokinines dans la sève pritanière du bouleau Betula pendula Roth.
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