Atlas (massif)

L'Atlas (en berbère : ⵉⴷⵔⴰⵔⵏ ⵏ ⵡⴰⵟⵍⴰⵚ[1], idraren n waṭlaṣ ; en arabe : جبال الأطلس, jibāl al-aṭlas) est un massif montagneux de l'Afrique du Nord, culminant à 4 167 mètres d'altitude au djebel Toubkal, au Maroc. Il s'étend sur trois pays : le Maroc, l'Algérie et la Tunisie.

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Atlas

Carte de localisation de l'Atlas.
Géographie
Altitude 4 167 m, Djebel Toubkal
Massif Ceinture alpine
Longueur 2 500 km
Largeur 300 km
Administration
Pays Maroc
Algérie
Tunisie
Géologie
Âge Précambrien

Toponymie

Atlas est le nom d'une divinité issue des mythologies libyque (berbère) et grecque, autrefois vénéré par les Berbères et les Grecs[2]. Selon le mythe grec, le Titan (géant) Atlas est condamné par Zeus à supporter sur ses épaules la voûte céleste : tlaô signifie en effet « porter », « supporter » en grec ancien. Les montagnes portent ainsi son nom, car c'est en ces lieux qu'il était supposé avoir réalisé son exploit, près du jardin des Hespérides, à l'extrémité occidentale du monde connu. Ce sont ces montagnes qui ont valu son nom à l'océan Atlantique[3], parce qu'il est situé au-delà de la chaîne de l'Atlas.

Il se peut aussi que ce soit une combinaison des deux mots atl et ass qui signifie « cache jour »[réf. nécessaire].

Cependant, le mot Atlas serait aussi à rapprocher du mot berbère assalas (ou aslas, du verbe selli, « porter, supporter, porter en bandoulière... ») qui signifie « poutre »[4], en particulier celle supportant la toiture. De fait, le nom Atlas est plutôt d'origine locale.

Adrar est le terme commun signifiant « montagne » en langue amazighe[5].

La symbolique de la maison kabyle[6], par exemple, assimile la poutre principale de faîte (assalas/aslas alemmas), la plus haute poutre de charpente du toit de la maison, dite aussi poutre maîtresse, à l'homme, le père de famille qui supporte le toit (qui est en quelque sorte le ciel de la maison) pour abriter le foyer. Ainsi est imagé le corps de l'homme déployant sa bure (burnous) de part et d'autre de son corps (poutre) pour couvrir la maison. L'assalas associé à un homme portant quasiment le ciel (ou le toit pour abriter les siens) est en symétrie avec la mythologie d'Atlas, ce Titan supportant le Ciel (en quelque sorte le toit du Monde). La poutre assalas repose sur le pilier central dit tagujdit assimilé à la femme, la Mère de famille, le pilier de la maison. Dans la symbolique berbère montagnarde de Kabylie, le pilier féminin est ancré dans le sol (symbolique féminine de la terre et des parties obscures de la maison, les intérieurs) sur lequel vient s'emboîter la poutre de faîte masculine pour supporter le toit (symbolique masculine du ciel, en contact avec la lumière et l'extérieur)[7].

Du temps d'Hérodote, ces montagnes, visibles de l'océan environnant, sont nommés Dyris. Ibn Khaldoun et les écrivains arabes médiévaux le nomment Deren. Ces deux termes sont à rapprocher d'un terme utilisé par les autochtones qui est adrar n'Idraren montagnes des montagnes »).

De plus, Hérodote dans son ouvrage sur les Libyens (les Berbères), L'Enquête Livre IV[8], précise que la chaîne de montagne Atlas est « si haute que la cime en demeure invisible, enveloppée de nuages en été comme en hiver. "C'est la colonne qui soutient le ciel", disent les gens du pays. La transposition antique d'une structure architectonique, que peut jouer une chaîne de montagne semblant porter le ciel, par sa hauteur et les nuages qui s'y accrochent, y voit le témoignage des Hommes anciens relatif à la peur universelle que le « ciel ne leur tombe sur la tête ». Les aléas climatiques ont poussé nombre de peuples berbères, avant de fuir les invasions, à privilégier les établissements à flancs de montagnes ou en nid d'aigle, évitant les fortes inondations en plaines en automne et à la fonte des neiges au printemps.

Hérodote démontre aussi dans son Enquête l'influence des mythologies libyennes anciennes (berbères) sur les Grecs, lorsque ceux-ci s'établirent en Cyrénaïque dès l'époque archaïque.

Géographie

Situation

L'Atlas s'étend sur 2 500 kilomètres de long selon un axe ouest-sud-ouest à est-nord-est, du Maroc à la Tunisie en passant par le Nord de l'Algérie. Il forme une barrière entre la mer Méditerranée et le Sahara.

Géomorphologie

Vue du Haut Atlas.

Le point culminant du massif est le djebel Toubkal culminant à 4 167 m d'altitude dans le Haut Atlas marocain. Le relief s'abaisse progressivement en direction de l'est.

Le Moyen Atlas est le plus septentrional des massifs atlasiques du Maroc. Il est limité au nord par le fleuve Sebou, qui le sépare du Rif, et au sud par la Moulouya et l'Oum Errabiaa. Il est constitué de reliefs généralement arrondis séparés par des plateaux fertiles.

Plus au sud, le Haut Atlas est le plus haut et le plus accidentés des massifs de l'Atlas. Il s'étend de la côte atlantique à la frontière algéro-marocaine. À son extrémité sud-ouest, il plonge de façon relativement abrupte vers la plaine côtière alors que sa bordure septentrionale descend plus doucement vers Marrakech. La vallée de l'Ourika se trouve au nord du massif. Au sud, le massif est coupé au niveau de Ouarzazate par la vallée du Drâa qui forme des bassins d'eau douce.

L'Anti-Atlas est le plus méridional des massifs atlasiques. Il s'agit d'un vieux massif érodé et désertique en bordure du Sahara. Il se prolonge à l'est jusqu'au djebel Saghro qui forme une transition avec le Haut Atlas.

En Algérie, l'Atlas est formé de deux longues chaînes montagneuses, d'ouest en est, séparées par de hauts plateaux entre 900 et 1 200 mètres d'altitude et de vastes dépressions (sebkha) généralement occupées par des lacs salés (chott).

Au nord, le long de la Méditerranée, l'Atlas tellien s'étire sur 1 500 kilomètres, de la frontière marocaine où il prolonge le Moyen Atlas à la frontière tunisienne.

Au sud, dans le prolongement du Haut Atlas, l'Atlas saharien forme un rempart à plus de 2 000 mètres d'altitude face au désert. Bien qu'arides, les montagnes sont plus fertiles que les hauts plateaux salés au nord et le Sahara au sud. Cette chaîne montagneuse est prolongée à l'est par les Aurès, qui culminent à 2 328 mètres d'altitude au djebel Chélia, puis jusqu'en Tunisie par la dorsale tunisienne.

Subdivisions

Carte de l'Atlas.

Le massif de l'Atlas est généralement divisé en trois parties :

  • l'Atlas marocain (Maroc), divisé lui-même en trois parties, du nord au sud :
  • l'Atlas saharien (Maroc, Algérie et Tunisie), dont :
  • l'Atlas tellien (Maroc, Algérie et Tunisie), comprenant d'ouest en est :
    • les Béni-Snassen qui culminent à 1 535 mètres d'altitude au Ras Foughal (Maroc),
    • les Trara qui culminent à 1 136 mètres d'altitude au djebel Fellaoucene (Algérie),
    • les monts de Tlemcen qui culminent à 1 843 mètres d'altitude au djebel Tenouchfi (Algérie),
    • les monts du Tessala qui culminent à 1 061 mètres d'altitude au djebel Tessala (Algérie),
    • les monts des Beni-Chougrane qui culminent à 932 mètres d'altitude (Algérie),
    • le Dahra qui culmine à 1 550 mètres d'altitude au mont Zaccar (Algérie),
    • l'Ouarsenis qui culmine à 1 985 mètres d'altitude au Sidi Amar (Algérie),
    • l'Atlas blidéen qui culmine à 1 629 mètres d'altitude au Koudiat Sidi Abdelkader (Algérie),
    • le Djurdjura qui culmine à 2 308 mètres d'altitude au Lalla-Khadîdja (Algérie),
    • les Bibans qui culminent à 1 845 mètres d'altitude au djebel Mansoura (Algérie),
    • les Babors qui culminent à 2 004 mètres d'altitude au mont Babor (Algérie),
    • l'Edough qui culmine à 1 008 mètres d'altitude au Bou Zizi (Algérie).

Sommets principaux

Géologie

Schéma symbolisant la frontière entre la plaque eurasiatique (au nord) et la plaque africaine (au sud) au niveau de l'Atlas.

Géologiquement, il convient de distinguer le système atlasique (Atlas au sens strict comprenant le Haut Atlas, le Moyen Atlas, l'Atlas saharien, les Aurès et l'Atlas tunisien) de l'Anti-Atlas et de l'Atlas tellien. Le système atlasique est une chaîne intra-continentale d'âge tertiaire qui est héritée d'un système de rift développé à la fin du Trias et au début du Jurassique c'est-à-dire en même temps que le rifting qui a donné naissance à l'Atlantique central d'une part et à la Téthys d'autre part. Il inclut deux domaines peu déformés (plateaux) : les mesetas marocaine et oranaise. Le système atlasique est bordé au sud par une faille majeure dite « accident sud-atlasique » ; cette structure importante, que l'on peut suivre sur plus de 2 000 km d'Agadir à Tunis, assure le chevauchement de l'Atlas sur le domaine saharien situé au sud. Cet accident est toujours actif actuellement, comme en témoigne, par exemple, le séisme d'Agadir en 1960. Vers le nord, le système atlasique est limité par le front des chaînes du Rif (Maroc) et du Tell (Algérie et Tunisie).

Des travaux récents[9] ont montré que le relief particulièrement élevé du Haut-Atlas résulterait d'un soulèvement thermique (remontée de l'asthénosphère) qui viendrait s'ajouter au soulèvement tectonique résultant du raccourcissement horizontal de la croûte terrestre. Le domaine à lithosphère amincie constituerait ainsi une bande d'orientation NE-SW, jalonnée de volcans récents, que l'on peut suivre des îles Canaries à la Méditerranée.

L'Anti-Atlas, situé au sud de l'accident sud-atlasique, appartient à la catégorie des chaînes varisques (ou hercyniennes). Il s'agit donc d'une chaîne ancienne très différente du système atlasique. Son relief actuel résulterait néanmoins essentiellement du soulèvement thermique évoqué précédemment.

L'Atlas tellien ou Tell, situé en bordure de la Méditerranée, appartient à la catégorie des chaînes alpines. Cette chaîne est issue de la fermeture de la Téthys (océan disparu).

Climat

Malgré sa latitude très méridionale, l’Atlas est sujet à un climat montagnard. Plus humide en allant vers le nord, plus sec en allant vers le sud. En hiver, la neige tombe jusqu’à 900 m, voire 750 m côté ubac dans la région de Khénifra ce qui est remarquablement bas pour la position géographique du massif, au sud de la mer Méditerranée. Sous ces altitudes, il pleut beaucoup, mais habituellement pas de neige. À l’inverse, au-dessus de 3 700 m, toutes les précipitations se font sous forme de neige.

Faune et flore

L'Atlas abrite de nombreuses espèces endémiques, souvent menacées.

Parmi les animaux figurent le Macaque berbère (Macaca sylvanus), le Léopard de Berbérie (Panthera pardus panthera), le Cerf de Barbarie (Cervus elaphus barbarus), le Mouflon à manchettes (Ammotragus lervia), la Gazelle de Cuvier (Gazella cuvieri), l'Ibis chauve (Geronticus eremita), le Cincle plongeur (Cinclus cinclus) et la Vipère naine de l'Atlas (Vipera monticola). Certaines sont totalement éteintes mais demeurent emblématiques : l'Ours de l'Atlas (Ursus arctos crowtheri), seule espèce africaine d'ours disparue à la fin du XXe siècle, le Lion de l'Atlas (Panthera leo leo) disparu à l'état sauvage en 1943[réf. nécessaire] et l'Auroch d'Afrique du Nord (Bos primigenius africanus), disparu depuis l'Antiquité.

Les espèces d'arbres caractéristiques sont le Cèdre de l'Atlas (Cedrus atlantica), le Pin noir de l'Atlas (Pinus nigra subsp. salzmannii var. mauretanica) ou encore le Chêne zéen (Quercus canariensis).

Population

L'Atlas est peuplé essentiellement par des Berbères.

Histoire

Massif de l'Atlas en 1930. Photographie de Walter Mittelholzer, ETH-Bibliothek.

Antiquité

Les poètes et historiens antiques grecs Homère et Hérodote voient en l'Atlas la frontière occidentale du monde connu.

Au cours de l'expansion de l'islam, les géographes arabes considèrent l'extrémité nord-ouest de l'Atlas comme une île coincée entre la mer Méditerranée au nord et le désert aride au sud. Une fois leurs idées suffisamment ancrées, cette île se soulève contre le pays montagneux d'Andalousie. Cette partie du monde constitue alors pour eux leurs limites extérieures. D'autre part, ces géographes arabes ont étendu le concept d'Atlas plus à l'est, au-delà de ses limites naturelles.

Activités

Protection environnementale

Au Maroc :

Algérie :

Tunisie :

Randonnée

Le djebel Toubkal attire de plus en plus de randonneurs occidentaux.

Sports d'hiver

Deux stations de sports d'hiver sont présentes au Maroc. L'Oukaïmeden se trouve dans le Haut Atlas, au nord du djebel Toubkal, à seulement 75 kilomètres de Marrakech. Son domaine s'étend sur 300 hectares jusqu'à 3 200 mètres d'altitude, ce qui en fait le plus haut d'Afrique. L'enneigement le rend skiable de mi-décembre à fin mars. Le Moyen Atlas abrite la station de sports d'hiver de Michlifen, gérée par la ville d'Ifrane, surnommée la « Suisse marocaine ». La station occupe un ancien cratère volcanique, entre 1 800 et 2 000 mètres d'altitude ; elle offre cinq pistes[10].

Des stations de sports d'hiver sont également présentes en Algérie. Celle de Tikjda se trouve sur le versant sud du massif de Djurdjura de l'Atlas tellien, dans la wilaya de Bouira à 120 km d’Alger, sur un site culminant à 1 475 mètres d'altitude[11]. La station de Tala Guilef se situe sur le versant nord à 1 500 mètres d'altitude dans la wilaya de Tizi-Ouzou. Toutes deux sont situées dans le parc national du Djurdjura. La station de ski de Chréa se trouve à 50 km de la ville d’Alger, dans l'Atlas blidéen, au cœur du parc national de Chréa ; son domaine est densément boisé de cèdres de l'Atlas[11]. Une nouvelle station est en projet au mont de Megress, dans la wilaya de Sétif[12]. Toutefois, la pratique du ski alpin a fortement reculé en Algérie en raison des événements des années 1990. La station de Tikjda est née dans les années 1920 (le refuge et le pavillon des Cèdres ouverts en 1927)[13], ce qui fait d'elle, avec Chréa, l'une des plus anciennes stations de montagne françaises nées ex-nihilo avant l'indépendance de l'Algérie.

Notes et références

  1. Asinag N° 14, Institut royal de la culture amazighe
  2. M.-J. Ramin, Atlas et l'Atlas (lire en ligne)
  3. « ATLANTIQUE : Définition de ATLANTIQUE », sur www.cnrtl.fr (consulté le )
  4. Basagana Ramon et Sayad Ali, Habitat traditionnel et structures familiales en Kabylie, Alger, SNED, , 157 p., p. 25
  5. Reclus O.,, L’Algérie, (Alger-Constantine-Oran), collection « Sites et monuments , à la France », Touring Club de France, , 207 p., p20 de la préface
  6. Pierre Bourdieu, Esquisse d’une théorie de la pratique : précédé de Trois études d’ethnologie kabyle, Paris, Libraire Droz, , 272 p. (ISBN 978-2-600-04155-3)
  7. « La Maison traditionnelle de Kabylie », (consulté le )
  8. Hérodote, traduction d'Andrée Barguet, L'enquête. Livres I à IV, Paris, Folio Classique, , 608 p. (ISBN 978-2-07-037651-3, notice BnF no FRBNF34977678), p. 442
  9. André Michard, Continental Evolution : The Geology of Morocco, Springer, (lire en ligne)
  10. Toma, Yann, Oxford University Press, coll. « Benezit Dictionary of Artists », (lire en ligne)
  11. « Magie de la nature à l'ombre des cèdres séculaires », sur Djazairess (consulté le )
  12. Ski alpin : Une première à Megress, Le Soir d'Algérie, 9 mars 2011.
  13. Gouvernement général de l'Algérie, Le livre d'or du centenainre de l'Algérie française, Alger-Nice, Éditions d'Alger, Jacques Gandini, alger 1930, réimp. 2003 jacques gandini, nice, 2003, p. 531

Voir aussi

Articles connexes

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