Cérumen
Le cérumen, communément connu comme cire de l'oreille, est une substance jaunâtre, cireuse, sécrétée dans le conduit auditif externe des humains et autres mammifères[1]. Il joue un rôle qui s'est relativisé dans le temps, aidant à son nettoyage et sa lubrification, et fournissant aussi une protection contre les bactéries, champignons et les insectes. L'excès de cérumen dans les oreilles peut conduire à une perte auditive.
Production
Le cérumen est produit dans le tiers externe de la portion cartilagineuse du conduit auditif externe. C'est un mélange de sécrétions visqueuses des glandes sébacées et d'autres moins visqueuses des glandes de transpiration apocrine modifiée. Le cérumen est déterminé génétiquement — Asiatiques et Amérindiens ayant le plus souvent un type de cérumen sec (gris et floconneux), alors que les Européens et les Africains ont celui du type humide (teinte variant de brun miel à brun foncé). Le type de cérumen est d'ailleurs utilisé par les anthropologues pour suivre les tendances migratoires humaines, comme celles des Inuits.
La différence du type de cérumen chez l'Homme varie d'une seule paire de nucléotides dans le gène appelé C11 du transporteur atp-binding-cassette. En plus de l'affectation du type de cérumen, cette mutation réduirait aussi la transpiration. Les chercheurs imaginent que la réduction de transpiration serait due aux ancêtres des populations est-asiatiques et des Amérindiens qui auraient vécu à des époques plus froides[2].
Fonctions
Nettoyage
Le nettoyage du canal de l'oreille intervient comme résultat d'une « courroie de transport », le procédé de migration épithéliale, aidé par le mouvement de la mâchoire. Les cellules formées dans le centre de la membrane du tympan migrent vers l'extérieur, d'abord lentement (à une allure équivalente à celle de la pousse d'un ongle) depuis l'ombilic du tympan jusqu'aux parois du canal de l'oreille, puis plus rapidement jusqu'à l'entrée du canal. Le cérumen du canal est poussé vers l'extérieur, emmenant avec lui toute la poussière, saletés et particules de matières qui pourraient s'accumuler dans le canal. Les mouvements de la mâchoire aident en augmentant la probabilité d'extrusion.
Lubrification
La lubrification empêche l'assèchement et la démangeaison de la peau à l'intérieur du canal (connu comme « astéatose »). Les propriétés lubrifiantes proviennent du haut taux de lipides du sébum produit par les glandes sébacées. Dans le cérumen de type humide au moins, ces lipides incluent du cholestérol, du squalène et de nombreux acides et alcools gras à longue chaîne.
Rôle antibactérien et antifongique
Alors que le rôle antibactérien et antifongique du cérumen était méconnu jusque dans les années 1960, des études récentes[réf. nécessaire] ont mis en évidence son rôle de protection contre certaines sortes de bactéries notamment Haemophilus influenzae, Staphylococcus aureus, et de nombreuses variantes d'Escherichia coli. La croissance de deux champignons habituellement présents dans les cas d'otomycose est aussi nettement réduite. Ces propriétés antibactériennes sont dues principalement à la présence d'acides gras saturés, de lysozyme et en particulier au pH relativement bas qui fait du cérumen un milieu acide.
Élimination
Du cérumen en excès peut gêner le passage des sons dans le canal auditif, causant une diminution de l'acuité auditive. Il est estimé être la cause de 60 à 80 % des pannes des prothèses auditives, les plus touchées étant les aides intra-auriculaires. La méthode la plus utilisée pour retirer le cérumen par des médecins est la seringue. Les méthodes de la curette et de la pince contre-coudée sont plus fréquentes par les otologistes et ORL quand le canal auditif est partiellement bouché et le bouchon n'adhère pas à la peau du canal. Il est habituellement nécessaire de l'assouplir (céruménolyse)[3].
Utilisation du coton tige
Le coton tige a été conçu et mis sur le marché pour le nettoyage des oreilles, mais les oto-rhino-laryngologistes et dermatologues recommandent de ne pas l'utiliser pour nettoyer le conduit interne de l'oreille, tout particulièrement chez les bébés ou jeunes enfants[4] et chez les personnes âgées[5]. Le cérumen protège l'oreille des intrusions de bactéries et de microchampignons (responsables d'otomycoses causées par des Aspergillus dans 80 à 90 % des cas, et par des Candida dans 10 % à 20 % des cas et plus rarement par d'autres espèces telles que Phycomycetes, Rhizopus et Actinomyces). Le cérumen a des vertus antibiotiques et il collecte les particules (dont les cellules mortes des tympans et de la muqueuse) qui pourraient encombrer le conduit auditif pour peu à peu et naturellement les évacuer vers l'extérieur, grâce aux mouvements de mâchoire mastication, phonation, baillements... (l'intérieur du conduit auditif est auto-nettoyant, seule l'entrée du conduit doit être nettoyée).
Le coton-tige est paradoxalement devenu « la cause la plus fréquente d'un bouchon de cérumen » dans le conduit auditif[6] (74,2 % de 65 patients consultant pour un bouchon de cérumen uni ou bilatéral, dont 18 étaient des enfants de moins de 10 ans) selon Desaulty et ses collègues[7]), ce qui peut avoir des conséquences néfastes, l'absence de cérumen favorisant notamment les inflammations de la muqueuse de l'oreille avec généralement un prurit auriculaire, de l'eczéma des otalgies, otorrhées voire une hypoacousie ou des surinfections[8],[9] Le coton-tige tend plutôt à augmenter la production de cérumen et il contribue à le compacter dans l'oreille. Il ne devrait être utilisé que pour nettoyer les creux du pavillon et à la rigueur la périphérie de l'entrée du conduit auditif. En cas de nécessité, le conduit interne peut être nettoyé par un bain d'eau salée stérile (il a été montré in vitro que l'eau de mer dissout le cérumen[7], ce qui peut expliquer le fait que des activités aquatiques lors desquelles la tête est immergée prédisposent à des infections de l'oreille[10]. Il est recommandé aux nageurs et plongeurs de bien sécher leur conduit auditif, mais sans y plonger aucun objet dur et en respectant le cérumen.
Notes et références
- (en) Chai TJ, Chai TC. « Bactericidal activity of cerumen » Antimicrob Agents Chemother. 1980;18(4):638–641. .
- (en) Yoshiura K, Kinoshita A, Ishida T, Ninokata A, Niikawa N. et al., « A SNP in the ABCC11 gene is the determinant of human earwax type », Nat Genet, vol. 38, no 3, , p. 324-30. (PMID 1644273, résumé)
- (en) Wilson PL, Roeser RJ. « Cerumen management: professional issues and techniques » J Am Acad Audiol. 1997; 8(6):421–430.
- Rivereau C (2012). L'oreille, la gorge, le cou. Trames, 135-143.
- Trottier D (2017). Conseils pour les aînés. La santé, une priorité !, 4.
- Lawson S.A., Flatin M, Kpemissi E & Yheouessi V.B (2016). Plaidoyer pour les oreilles. Journal de la Recherche Scientifique de l'Universite de Lome, 18(1), 157-162 | résumé
- Dessaulty A, Gilain L, Joubert C, Manach Y, Peynegre R, Schuck S & Strunski V (2001). Intérêt de l'eau de mer désodée stérile (Audiclean®) dans le lavage du conduit auditif externe. Journal français d'oto-rhino-laryngologie, 50(2), 106-109.
- Dubreuil, C. (2005) Les otites externes de l’été Acute otitis externa in summer ; La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale | no 298 | Mai-juin 2005
- Clere, N. (2014). Les pathologies auriculaires, bénignes mais fréquentes. Actualités Pharmaceutiques, 53(539), 42-45.
- Ditisheim A, Chuard C & Erard V (2011). Infections liées aux activités aquatiques. Revue Medicale Suisse, (312), 1976.
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