Cratère de Vix
Le cratère de Vix est un cratère de bronze utilisé pour contenir le vin[1], découvert en 1953 dans la tombe de Vix, sépulture d'une princesse celte à Vix (Côte-d'Or), et daté d'environ 520 ans av. J.-C. Il est aujourd'hui conservé et exposé au musée du Pays châtillonnais, à Châtillon-sur-Seine.
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Découverte
La tombe de Vix fut découverte le par Maurice Moisson, agriculteur à Vix[2], mais officiellement et pour la presse de l’époque, par René Joffroy, archéologue autodidacte, président de la société archéologique locale et responsable des fouilles. Cette sépulture était située dans un champ, sous un tumulus arasé dont ne subsistaient plus que des pierres éparses qui attirèrent l'attention des archéologues ; cependant, le caveau, comblé de terre, était resté inviolé.
Une fois dégagé, dans des conditions assez difficiles, le caveau se révéla être la tombe à char d'une femme, vite surnommée la princesse de Vix (ou encore la dame de Vix[3]), qui livra un important mobilier funéraire, bijoux, céramique et vaisselle de bronze. La pièce maîtresse de cette vaisselle est un cratère à volutes en bronze d'une contenance de 1 100 litres, le plus grand que l’Antiquité nous a légué, sans doute sorti d’un atelier corinthien grec d’Italie du Sud vers [4].
Sur le sol, des pigments bleu et rouge proviennent de tentures ou de peintures décoratives. La princesse est ornée de parures à caractère local : collier de grosses perles de pierre et d’ambre, anneaux de cheville en bronze, bracelet de lignite, fibules aux cabochons de corail. Elle porte à la nuque un torque, collier celte en or fin (480 g), travail unique, d’un orfèvre initié aux techniques méditerranéennes.
Plus généralement, la tombe de Vix fait partie de l'ensemble des tombes (Ca' Morta, Hochdorf, Le Moutot, Reinheim, Kleinaspergle, Waldalgesheim…) où les motifs de décoration et objets sont liés au banquet funéraire (services à boire, vases, coupes).
Le cratère
Le cratère est un artéfact remarquable de par sa facture et ses dimensions pour un vase de l'Hallstatt. L'ensemble pèse 208,6 kg pour une hauteur de 1,64 m. Il est constitué de plusieurs pièces réalisées séparément et assemblées dont :
- La coupe, en bronze martelé. Son fond est arrondi, son diamètre maximal est de 1,27 m et sa capacité est de 1 100 litres, l'épaisseur moyenne de la paroi varie entre 1 et 1,3 mm. Sa réalisation est une prouesse technique, preuve d'une excellente maîtrise de la matière[1]. Lors de sa découverte, du fait de l'effondrement du toit du caveau, le cratère a été retrouvé écrasé, les anses se retrouvant au niveau du pied ; un travail de restauration nous permet de le retrouver dans son état originel.
- Le pied, pièce coulée d'un diamètre à la base de 74 cm et pèse 20,2 kg. Il reçoit le fond de la cuve et assure la stabilité de l'ensemble. Il est décoré de motifs classiques de végétaux stylisés.
- Les anses, fonte de bronze d'un poids de 46 kg chacune. En forme de volutes d'une hauteur de 55 cm, elles sont richement décorées de gorgones grimaçantes et tirant la langue. Ces créatures ornant diverses armes et objets conféraient à ceux-ci, selon les Grecs, des vertus apotropaïques.
- La frise des hoplites décore le tour du col qui est un cercle rapporté enserrant le haut de la cuve et supportant les anses. Huit quadriges conduits par un aurige de plus petite taille, suivant la règle d'isocéphalie nécessitée par la composition, sont suivis chacun par un hoplite à pieds en armes. Cette frise est un chef-d'œuvre du bas-relief grec.
- Le couvercle, feuille de bronze martelée de 13,8 kg, couvrait l'ouverture du cratère. Il est concave et perforé de multiples trous qui font penser qu'il servait en fait de passoire. En son centre, un ombilic relevé supporte une statuette.
- La statuette du couvercle, en bronze coulé, mesure 19 cm de haut et représente une femme, une main en avant qui tenait peut-être un objet maintenant perdu. Elle est vêtue d'un péplos, la tête recouverte d'un voile. Cette statuette de bronze, de facture manifestement locale, nous apparaît bien différente des autres éléments du vase.
Les cratères étaient, dans l'Antiquité, destinés à composer un mélange entre le vin, toujours bu dilué avec de l'eau, et agrémenté de divers aromates. La boisson y était ensuite puisée et distribuée aux convives lors de célébrations rituelles ou festives. Le cratère de Vix étonne par ses proportions et le chemin qu'il a dû parcourir pour parvenir des ateliers de la Grande Grèce[5] jusqu'à cet oppidum bourguignon. Cet extraordinaire témoignage des ateliers corinthiens fut enseveli une trentaine d'années après sa réalisation. Ce vase de grand prestige était certainement bien trop grand pour être utilisé. Ce fut très certainement un cadeau relevant de dons mutuels entre princes et puissants. Son enfouissement dans ce tumulus a dû être suivi relativement rapidement par un déclin de la principauté et des événements tragiques qui ont abouti à en perdre la mémoire, permettant ainsi sa préservation jusqu'à sa découverte en 1953. Le cratère fut restauré par Albert France-Lanord et Aimé Touvenin au laboratoire d'archéologie des métaux du musée de l'histoire du fer de Jarville, près de Nancy[6],[7].
Le cratère et la totalité des pièces retrouvées dans la sépulture de la tombe princière de Vix sont exposés au musée du Pays châtillonnais, à Châtillon-sur-Seine. Le cratère a fait l'objet d'un timbre commémoratif[8] des PTT dû à Jacques Combet et émis en 1966.
Galerie
Notes et références
- « Le cratère de Vix, chef-d'œuvre » (version du 19 avril 2013 sur l'Internet Archive), .
- « Musée du Pays châtillonnais. Cratère de Vix », sur herodote.net.
- Stéphane Verger, « Qui était la dame de Vix ? Propositions pour une interprétation historique », dans Laurent Lamoine et Mireille Cébeillac-Gervasoni (dir.), Les élites et leurs facettes. Les élites locales dans le monde hellénistique et romain, Rome/Clermont-Ferrand, École française de Rome/Presses universitaires Blaise Pascal, coll. « Collection de l'École française de Rome/Erga » (no 309/3), (ISBN 2-7283-0693-1), p. 583-625.
- Anne Bréhier, « La fabuleuse histoire du vase de Vix », La France agricole, (consulté le ).
- C. Rolley, « Le rôle de la voie rhodanienne dans les relations de la Gaule et de la Méditerranée », p. 414–415 [lire en ligne].
- « Aimé Thouvenin (1920 – 1999) », Historique du laboratoire, Laboratoire d'archéologie des métaux de Nancy.
- Félicie Fougère, « Albert France-Lanord et la restauration du vase de Vix », Le Pays lorrain, vol. 96, no 3, , p. 279–288.
- « Timbre : 1966 Cratère de Vix », sur Wiki Timbres.
Voir aussi
Références bibliographiques
- René Joffroy, La Tombe princière de Vix Côte-d'Or, Boudrot, 1961.
- René Joffroy, Le Trésor de Vix, Histoire et portée d'une grande découverte, Fayard, 1962.
- Claude Rolley (dir.), La Tombe princière de Vix, Dijon, Éditions Picard, 2003 (ISBN 2708406973).
- « Vix, le cinquantenaire d'une découverte », dans Dossiers d'Archéologie, no 284, juin 2003.
- Patrice Brun et Bruno Chaume (dir.), Vix et les éphémères principautés celtiques. Les VIe-Ve siècles avant J.-C. en Europe centre-occidentale, Actes du colloque de Châtillon-sur-Seine, Paris, Errance, 1997, 408 p.
- Joseph Vendryes, « La route de l'étain en Gaule », Comptes rendus de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, vol. 101, no 2, , p. 204–209 (DOI 10.3406/crai.1957.10754).
Articles connexes
Liens externes
- Ressource relative aux beaux-arts :
- Musée du Pays châtillonnais – site officiel.
- Site sur le trésor de Vix.
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