Société d'agriculture et de commerce de Caen

La Société d’agriculture et de commerce de Caen est une société savante fondée au XVIIIe siècle dans le but de diffuser l’innovation technique pendant la première industrialisation.

Histoire

XVIIIe siècle

La première société de ce type, la Society for improvement of husbandry, a été fondée à Dublin en 1731. En France, c'est en 1757, à Rennes, qu’a été constituée la première société d’agriculture, la Société d'agriculture, de commerce et des arts de Bretagne. Devant le succès de cette dernière, Henri Léonard Jean Baptiste Bertin, contrôleur général des finances de Louis XV, publie une circulaire le pour enjoindre aux intendants de créer des sociétés sur le même modèle dans leur généralité ; une vingtaine sont créées entre 1762 et 1765[1]. La Société d’agriculture et de commerce de Caen a, quant à elle, été instituée par un arrêt du Conseil d’État du  ; les premiers membres de la société, au nombre de 27, ont été directement désignés par Louis XV[2]. La première réunion a lieu le [3].

Les membres de ce type de société, composée de membres associés et de correspondants, se cooptent au sein des grands propriétaires fonciers; les simples cultivateurs y sont rares. On y débat de questions diverses ayant trait aux maladies du bétail ou des végétaux, à l'utilisation de cendre comme engrais ou à la liberté de commerce du grain. On y écrit et lit des correspondances et on publie des mémoires. En lien avec l'académie d'équitation de Caen, la société mène également des travaux sur l'amélioration des races de chevaux normands[4]. Mais ces débats restent théoriques et laissent peu de place à l'action pratique[1]. Du fait de son manque d'activité et de son inefficacité à donner une impulsion nouvelle à l'exploitation des sols de la généralité de Caen, son intendant, François-Jean Orceau de Fontette se désintéresse de l'institution[3]. Ainsi en 1775, Charles-Nicolas Desmoueux écrit-il au nouvel intendant Charles d'Esmangart : « Il faudrait réveiller tout à fait cette société qui s'est adonnée à un sommeil trop long, l'aiguillonner fortement et renouer avec tous ses membres une correspondance trop longtemps et mal à propos interrompue »[3]. Comme les autres sociétés savantes de la ville, elle cesse ses activités pendant la Révolution française.

XIXe siècle

Le , le préfet du Calvados, Charles Dugua, installe à nouveau la société ; Antoine-François Fourcroy prononce un discours à l'occasion de son inauguration[5]. Le , un décret a reconnu cette institution comme étant d’intérêt public[6].

Voilà comment est présentée l'institution lors d'un congrès scientifique en 1842[7] :

« La Société d'agriculture et de commerce de Caen s'occupe, comme son titre le fait connaître, de tout ce qui peut contribuer au développement et à l'amélioration de ces deux branches importantes de l'économie sociale. Culture des terres, éducation des bestiaux, extension du commerce, tels sont les points capitaux autour desquels elle développe toute l'activité et tout le zèle dont elle est capable ».

Dans la lignée du mouvement physiocrate, la société d'agriculture, qui réunit dans le Pavillon des sociétés savantes (ancien bureau de la police de la foire)[2], vise à diffuser les découvertes agronomiques permettant d'améliorer la productivité dans les riches contrées agricoles de Normandie. Pour cela, la société publie des périodiques (bulletins et mémoires), organise des concours agricoles et prodigue un enseignement agricole. En , s'appuyant sur l'exposition des produits de l'industrie française qui se tient à Paris, la Société en organise une propre au Calvados[8]. Les 26 et , la Société a également organisé les premières courses de chevaux sur la Prairie, qui a par la suite été aménagée en hippodrome[9].

En ce qui concerne le commerce, la société savante a œuvré pour améliorer l'accès à la ville de Caen et notamment celle de son port. Elle a ainsi contribué à l'aménagement des docks[7] sur l'Orne et sur l'Odon, transformé en bassin Saint-Pierre. Elle a également appuyé le projet d'aménagement de l'Orne visant à rendre navigable le fleuve de son embouchure jusqu’à Argentan et à creuser un canal pour le relier au bassin de la Loire[10]. Ce projet a échoué, mais la Société a néanmoins encouragé la réalisation du canal de Caen à la mer[7], finalement inauguré en 1857. La société a également proposé en 1855 un projet de tracé pour le chemin de fer de Granville à Paris en passant par Caen[11].

Membres

Ont été membres ou associés de la société d'agriculture et de commerce de Caen (ordre chronologique de naissance) :

Présidents
IdentitéPériodeDurée
DébutFin
Paul de Longuemare (d)
( - )
Louis Doynel de Saint-Quentin
( - )
Georges de Mathan
( - )
20 ans
Gabriel Hébert (d)
( - )
David Beaujour (d)[16]
( - )
46 ans
Jules Morière
( - )
4 ans

Notes et références

  1. René Pillorget, Suzanne Pillorget, France baroque, France classique, Paris, Éditions Robert Laffont, 1995, tome 2, p. 1169
  2. Guillaume-Stanislas Trébutien, Caen : précis de son histoire, ses monuments, son commerce et ses environs, A. Hardel, Caen, 1879.
  3. Robert Patry, Une ville de province : Caen pendant la Révolution de 1789, Condé-sur-Noireau, Éditions Charles Corlet, 1983, p. 67.
  4. A.-J. Bourde, « L'agriculture à l'anglaise en Normandie au XVIIIe siècle », Annales de Normandie, 1958, Volume 8, no 8-2, p. 227
  5. Grégoire-Jacques Lange, Éphémérides normandes, Caen, Imprimerie de Bonneserre, 1833, t. 1, p. 299–300.
  6. Collection complète des lois, décrets, ordonnances, règlements et avis du Conseil d'État, 1854, p. 640, [lire en ligne].
  7. Contribution de M. Le Cerf, délégué de la société d'agriculture et de commerce de Caen, au dixième congrès scientifique de France, tenu à Strasbourg en septembre et octobre 1842.
  8. Catalogue des produits des arts du Département du Calvados.
  9. François Robinard, Caen avant 1940 : rétrospective de la vie caennaise de 1835 à 1940, Éditions du Lys, Caen, 1993 [(fr) lire en ligne (page consultée le 20 juin 2008)].
  10. Grégoire-Jacques Lange, Mémoire sur le port de Caen : sur l'avantage qu'il y aurait à rendre l'Orne navigable depuis cette ville jusqu'à Argentan, et sur la possibilité de la faire communiquer avec la Loire par la Mayenne ou la Sarthe, sans aucune dépense pour l'État, F. Poisson, Caen, 1818.
  11. Tableau analytique des délibérations du conseil général du Calvados d'après l'annuaire du département (Sessions de 1833 à 1863), Caen, Pagny, 1864, p. 46.
  12. Nouvelle biographie générale depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, Firmin-Didot [(fr) lire en ligne (page consultée le 16 novembre 2008)]
  13. Le Nobiliaire universel ou recueil général des généalogies historiques et véridiques des maisons nobles de l'Europe, Tome 4 [(fr) lire en ligne (page consultée le 16 novembre 2008)]
  14. Claude Quétel, « Un Caennais, ministre de Charles X », Annales de Normandie, 1981, Volume 31, no 31-2, p. 197
  15. Notice BnF.
  16. « https://www.persee.fr/doc/annor_0003-4134_1999_num_49_3_1216 »

Bibliographie

  • André Rostand, Bulletin de la société des antiquaires de Normandie, t. 37, pp. 293–342
  • Pierre-Aimé Lair, Rapport général sur les travaux de la Société d’agriculture et de commerce de Caen, F. Poisson, Caen, 1805
  • Pierre-Aimé Lair, Fête décennale de la Société d’agriculture et de commerce de Caen : célébrée , Société d’agriculture et de commerce de Caen, F. Poisson, Caen, 1811
  • Étienne Vivier, « La société d’agriculture et de commerce de Caen entre 1801 et 1851 » dans les Annales de Normandie (ISSN 0003-4134), Laboratoire d’ethnographie régionale, Caen, 1999, vol. 49, no 3, pp. 251-271 [lire en ligne]

Liens externes

  • Portail de l’agriculture et l’agronomie
  • Portail de la production industrielle
  • Portail de Caen
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.